Sainte-Lucie

Sainte-Lucie

(Saint Lucia)

Capitale: Castries
Population: 172 800 (2008)
Langue officielle:  anglais (de facto)
Groupe majoritaire: créole à base lexicale française (75 %)
Groupes minoritaires: anglais et langues immigrantes (25 %)
Système politique: monarchie constitutionnelle (Elizabeth II), membre du Commonwealth 
Articles constitutionnels (langue): art. 25 et 31 de la Constitution du 22 février 1979
Lois linguistiques: Loi sur l'éducation (1999) ; Loi sur les indications géographiques (2000); Loi sur les brevets (2001); Loi électorale (2001).

1  Situation géographique

Sainte-Lucie (en anglais: Saint Lucia) est un petit État insulaire de 616 km² situé dans les Petites Antilles, dans la partie sud-est de la mer des Caraïbes, entre la Martinique au nord et Saint-Vincent-et-les-Grenadines au sud (voir la carte régionale). 

Castries est la capitale, la plus grande ville et le principal port de Sainte-Lucie; le nom de Castries vient du maréchal de Castries, ministre de la Marine de Louis XVI, qui avait insisté, à la signature du traité de Versailles en 1783, pour que la Grande Bretagne restitue l'île à la France. L'organisation administrative de l'île est héritée de la colonisation française avec une division en 11 paroisses (ou «parishes»): du nord au sud, Gros-Islet, Dauphin, Castries, Anse-la-Raye, Dennery, Soufrière, Praslin, Micoud, Choiseul, Laborie et Vieux-Fort. 

Sainte-Lucie fait partie des Îles-du-Vent avec, du nord au sud, Porto Rico, les îles Vierges, Saint-Martin, Saint-Barthélemy, Saint-Christophe-et-Niévès, Antigua-et-Barbuda, la Guadeloupe, la Dominique, la Martinique, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, la Barbade et la Grenade.

2 Données démolinguistiques

En 2008, la population de Sainte-Lucie était estimée à 172 800 habitants. Elle comprenait 90 % de Noirs, 6 % de Métis et 0,8 % de Blancs. Du point de vue linguistique, on estime que 75 % des Saint-Luciens parlent le créole comme langue maternelle. Appelé kweyol (créole) ou patwa (patois), il est à base lexicale française et se rapproche beaucoup du créole martiniquais; la syntaxe emprunte aux langues d'Afrique de l'Ouest, tandis que la majorité des termes sont issus du français. Les autres communautés linguistiques parlent l'anglais ou l'une ou l'autre des langues immigrantes. L'île compterait quelque 2500 francophones réels.

Sur le plan géolinguistique, Sainte-Lucie fait partie d'un ensemble de quatre îles — Sainte-Lucie, Martinique, Dominique et Guadeloupe — représentant un bassin de population de plus d'un million d'habitants créolophones (à base lexicale française).

De façon générale, les locuteurs du créole sont en majorité des habitants des villages. Depuis les années cinquante, les parents dans les centres urbains, soucieux de voir leurs enfants s'exprimer en anglais, la langue officielle qui est perçue comme un moyen de mobilité sociale, ont découragé l'utilisation du créole. De plus en plus de Saint-Luciens ont l'anglais comme langue maternelle. De plus, l'influence de l'anglais est plus marquée aujourd'hui dans le vocabulaire technique et les expressions de la vie quotidienne; les divergences se renforcent progressivement entre le créole de Sainte-Lucie et celui de la Martinique lui même très marqué par le français moderne. Voici quelques exemples de créole saint-lucien:

Créole saint-lucien  Français
1. mwen ka alé lékol 
2. mwen ni la fyév 
3. anou maché an vil
4. mwen gwo mem kò papa mwen
5. nou pa janmen wé sa 
6. la pa ni personn 
7. mwen kay bat 
1. Je vais à l'école.
2. J'ai la fièvre.
3. Allons marcher en ville. 
4. Je suis gros comme mon papa.
5. Nous n'avons jamais vu cela.
6. Il n'y a personne.
7. Je vais te battre.

Il existe beaucoup de ressemblances entre le créole saint-lucien et le créole martiniquais, en raison de l'immigration martiniquaise, en particulier entre 1763 et 1769.  Lorsqu'un Saint-Lucien et un Martiniquais (un "French") se rencontrent, ils se parlent dans leur créole respectif et se comprennent.

3 Données historiques

Entre 800 et 1000, les tribus caraïbes ont progressivement conquis les îles de l’arc antillais, dont Sainte-Lucie qu'ils avaient nommée Iguanaronia (de ioüana-lao qui signifierait «iguane-dessus», «où il y a des iguanes», «là où on trouve l’iguane», comme à Saint-Barthélemy). Les Arawaks s'y établirent également.

Puis Sainte-Lucie fut découverte par les Espagnols au cours de leurs premiers voyages exploratoires, entre 1492 ou 1502, sans qu'ils s'y établirent. La légende laisse croire que Christophe Colomb l'aurait découverte le 13 décembre 1492, et c'est pourquoi cette date est commémorée à Sainte-Lucie comme une fête nationale. La découverte de l'île est plutôt attribuée à un compagnon de Colomb, Juan de la Cosa, qui y aurait mouillé durant ses expéditions en 1499 ou en 1504. Bien que ses livres de bord ne mentionnent pas l'île, une carte dressée par Cosa en 1504 porte l'indication d'une île du nom de El Falcon attribuable à l'actuelle Sainte-Lucie. 

Les premiers colons européens venus s'établir à Sainte-Lucie furent des Hollandais et des Anglais, mais ils résistèrent mal aux attaques des Caraïbes et abandonnèrent l'île. En 1639, une nouvelle tentative d'implantation britannique menée par sir Thomas Warner échoua encore devant la résistance des autochtones. Ensuite, pendant les deux siècles qui suivirent la découverte de l'île, son histoire fut le reflet des longues luttes que se livrèrent pour sa possession la France et l'Angleterre. En effet, du XVIe au XVIIIe siècle, l'île changea 14 fois de mains.  Le nom d'Hélène des Antilles (Helen of the West Indies) donné à Sainte-Lucie est inspirée par cette rivalité qui, à 14 reprises, conduisit l'île à un changement d'allégeance. On sait que, dans la mythologie grecque, Hélène (fille de Zeus et de Léda) était réputée (comme Sainte-Lucie aux Antilles) pour être la plus belle femme de Grèce; sa beauté fatale fut la cause directe de la guerre de Troie. Est-ce pour cette raison que Français et Britanniques se disputèrent autant Sainte-Lucie?

3.1    La colonie française

Le ministre de Louis XIII, Richelieu, soucieux de suivre l'exemple des Hollandais aux Antilles, désigna en 1635 Pierre Belain d'Esnambuc comme gouverneur général de la Compagnie des îles de l'Amérique, après son implantation réussie à Saint-Christophe (aujourd'hui Saint-Christophe-et-Niévès); puis Philippe de Lonvilliers (chevalier de Poincy) lui succéda. En 1639, Jacques Dyel du Parquet, gouverneur de la Martinique, acquit l'île de Sainte-Lucie. En 1648, du Parquet envoya des colons à la Grenade et à Sainte-Lucie.  En 1651, la Compagnie des Petites Antilles acheta l'île aux autochtones, marquant ainsi presque 140 années de colonisation française. Entre 1650 et 1795, les Français occupèrent Sainte-Lucie pendant 137 ans; les Anglais, une quinzaine d'années. Comme dans le reste des Antilles, les colons français qui s'établissaient à Sainte-Lucie étaient généralement pauvres et y résidaient en vertu d'un contrat variant de cinq à dix ans. La survie de la colonie restait donc précaire, car elle devait compter sur des résidants temporaires intéressés à la culture du maïs, du plantain ou de la pomme de terre. Quant aux autochtones, ils furent rapidement décimés par les maladies virales importées par les Français; ou bien ils se laissèrent mourir ou commirent des suicides plutôt qu'être réduits en esclavage.

Devant l'évidence des profits que la France pouvait tirer de la culture de la canne à sucre, le ministre Colbert décida en 1674 de faire passer directement sous le contrôle de la couronne de France les possessions de la Compagnie des îles des Antilles. Mais les plantations de canne à sucre exigeaient une main-d'œuvre abondante, d'où la nécessité de recourir aux esclaves d'Afrique. Ce ne fut qu'au XVIIIe siècle que débuta la colonisation européenne massive et durable à Sainte-Lucie grâce à l'essor de l’industrie sucrière à La Martinique. L'implantation de l'industrie sucrière à Sainte-Lucie aurait débuté en 1765 avec les sieurs Lavacher et Le Blond dans la plaine de Vieux-Fort au sud de l'île. La toponymie saint-lucienne conserve la mémoire de ses planteurs ou grands administrateurs français du XVIIIe siècle: de Castries, Micoud d'Argout, D'Ennery, Choiseul, Praslin, Laborie, etc. De 1793 jusqu' à la chute de Napoléon en 1815, l'île de Sainte-Lucie fut prise alternativement sept fois par les Français et les Britanniques. Toutefois, l'influence de la langue française fut durable chez les esclaves et descendants d'esclaves, puisque le vocabulaire créole est resté d'origine française.

3.2    La colonie britannique

En 1814, le traité de Paris accorda la colonie de Sainte-Lucie aux Britanniques. Pour l’Angleterre, Sainte-Lucie était une cible stratégique pour assurer la protection de la Barbade, plutôt qu’un besoin économique. Les terres de l'Église catholique furent confisquées, mais les planteurs français purent conserver leurs terres pourvu qu'ils résident au moins six mois par année dans l'île et qu'ils possèdent moins de 500 acres de terres. Le créole continuait d'être pratiqué dans la vie quotidienne des esclaves noirs, mais l'anglais remplaça le français dans l'Administration. 

Sainte-Lucie fut incorporée dans l’Administration anglaise des «Windward Islands» (les «Îles-du-Vent») dont le quartier général fut situé à La Barbade, puis à La Grenade en 1885. Des régiments coloniaux anglais furent affectés à Sainte-Lucie. Avec la fin des guerres en Europe, l'Empire britannique renforça sa révolution industrielle, dans une situation de primauté industrielle et maritime sur le monde. Ce fut la doctrine du libéralisme économique qui s'installa progressivement. Sur le marché britannique, la production de Sainte-Lucie s'ajouta à celle de La Barbade et de la Jamaïque, et entraîna une chute des prix, rendant difficile l'équilibre financier des plantations.

En 1838, l’esclavage fut aboli dans toutes les possessions anglaises, dont Sainte-Lucie. Pour assurer le maintien de l’industrie sucrière dans la deuxième moitié du XIXe siècle, le remplacement des esclaves d’origine africaine suscita l'importation d'une immigration indienne provenant de l’Est de l’Inde et du Sri Lanka. 

Au XXe siècle, l'île de Sainte-Lucie fut marquée par la participation à l'effort de guerre et au blocus de la Martinique fidèle à Vichy pendant la Seconde Guerre mondiale. Une base aéro-navale américaine fut alors aménagée à Vieux-Fort, Gros-Islet et Pigeon-Point. En 1924, une nouvelle constitution donna à l’île sa première forme de gouvernement représentatif, en intégrant une minorité de membres élus au sein du Conseil législatif dont les membres étaient antérieurement tous nommés par Londres; le suffrage universel fut introduit en 1951 et un gouvernement ministériel fut introduit en 1956. Sainte-Lucie participa en 1958 à la création d’une «Fédération semi-autonome des îles antillaises» sous contrôle britannique, jusqu’à sa dissolution en 1962 provoquée par la défection de la Jamaïque. Une nouveau statut d’«État associé» au Royaume-Uni apparut alors pour les six Îles-du-Vent («Windward Islands») et les Îles-sous-le Vent («Leeward Islands»: au nord du Venezuela). 

De 1967 à 1979, Sainte-Lucie jouit d’une autonomie complète pour ses affaires intérieures, mais remettait sa défense et la responsabilité de ses relations extérieures au gouvernement britannique.

3.3    L'indépendance

L’indépendance politique de Sainte-Lucie fut accordée le 22 février 1979. Cependant, le souverain britannique demeure le chef de l'État. Sur proposition du premier ministre de Sainte-Lucie, le souverain nomme son représentant, le gouverneur général.

Membre actif du Commonwealth, l’île collabore avec différentes organisations, dont le Commonwealth britannique, le Caribbean Community and Common Market (CARICOM: Communauté et Marché commun des Caraïbes), le East Caribbean Common Market (ECCM: Marché commun de la Caraïbe de l'Est), et enfin l'Organization of Eastern Caribbean States (OECS: l'Organisation des États de la Caraïbe de l'Est). En tant qu'État soumis à la sphère d’influence nord-américaine, Sainte-Lucie bénéficie de programmes de coopération civil et militaire avec les USA. Mais Sainte-Lucie participe également, en raison de son passé francophone et sa créolophonie d'origine française, aux travaux de l’Agence de la Francophonie (en tant qu'«État associé» depuis décembre 1981) et aux Sommets francophones (depuis 1986). 

4 La politique linguistique

Sainte-Lucie doit composer avec trois langues sur son territoire: le créole, la langue de la majorité des Saint-Luciens, l'anglais, la langue officielle léguées par les derniers colonisateurs, puis le français, la langue ayant servi de base lexicale au créole saint-lucien et celle des îles voisines que sont la Guadeloupe, la Dominique et la Martinique.  

4.1  Les règles constitutionnelles

La Constitution de 1979, au lendemain de l'indépendance, ne traite que de l'anglais, et ce, de façon très ponctuelle. En effet, l'article 25 suppose que, pour être nommée sénateur une personne doit notamment pouvoir «lire l'anglais avec une compétence suffisante pour prendre une part active aux travaux du Sénat»:

Article 25

Subject to the provisions of section 26 of this Constitution, as person shall be qualified to be appointed as a Senator if, and shall not be so qualified unless, he-

a) is a Commonwealth citizen who has attained the age of thirty years;
b) has been ordinarily resident in Saint Lucia for a period of five years immediately before the date of his appointment; and
c) is able to speak and, unless incapacitated by blindness or other physical cause, to read the English language with sufficient proficiency to enable him to take an active part in the proceedings of the Senate.

Article 25

Sous réserve des dispositions de l'article 26 de la présente Constitution, quiconque pourra se qualifier pour être nommé sénateur si et seulement si:

a) il est un citoyen du Commonwealth âgé de trente ans;

b) a résidé habituellement à Sainte-Lucie pendant au moins cinq ans immédiatement avant la date de sa nomination; et

c) est capable de parler et, à moins d'être aveugle ou handicapé physiquement, de lire l'anglais avec une compétence suffisante pour prendre une part active aux travaux du Sénat.

L'article 31 de la Constitution est de la même eau, mais il porte sur l'élection comme membre de la Chambre d'assemblée:
 

Article 31

Subject to the provisions of section 32 of this Constitution, a person shall be qualified to be elected as a member of the House if, and shall not be so qualified unless, he-

a) is a citizen of the age of twenty-one years or upwards,
b) was born in Saint Lucia and is domiciled and resident there at the date of his nomination or, having been born elsewhere, has resided there for a period of twelve months immediately before that date; and
c) is able to speak and, unless incapacitated by blindness or other physical cause, to read the English language with a degree of proficiency sufficient to enable him to take an active part in the proceedings of the House.

Article 31

Sous réserve des dispositions de l'article 32 de la présente Constitution, quiconque pourra se qualifier pour être élu membre de la Chambre si, et seulement si:

a) il est un citoyen âgé de vingt et un ans ou plus;

b) il est né à Sainte-Lucie, y a son domicile et sa résidence à la date de sa nomination ou, étant né ailleurs, a résidé à Sainte-Lucie pendant 12 mois immédiatement avant la date de sa nomination;

c) il est capable de parler et, à moins d'être aveugle ou handicapé physiquement, de lire l'anglais avec une compétence suffisante pour prendre une part active aux travaux de la Chambre.

En somme, l'anglais n'est pas proclamé la langue officielle de jure, c'est la pratique (de facto) et l'histoire qui en a décidé ainsi. Aucun article de la Constitution ne proclame une langue officielle, ni d'ailleurs aucune loi. Cependant, quelques rarissimes lois mentionnent occasionnellement l'emploi de l'anglais.

4.2  L'anglais, la langue de l'État

À l'île de Sainte-Lucie, l'anglais demeure la langue officielle de l'État. C'est la langue des activités parlementaires, de la rédaction et de la promulgation des lois, des cours de justice et des services gouvernementaux. Cependant, étant donné que la majorité des Saint-Luciens parlent le créole comme langue maternelle, des facilités sont accordées aux citoyens en créole dans les tribunaux; l'usage de cette langue est tolérée, mais les documents écrits et la sentence doivent être en anglais. Quant aux débats parlementaires, le gouvernement pense à permettre bientôt l'usage du créole, mais pour le moment seul l'anglais est autorisé. En dépit des déclarations d'intention en faveur de la promotion du créole (une quinzaine d'années), on ne constate pas encore de signes très nets de progrès en cette matière. Il existe même un "Komité Kréyol" et un "Folk Research Centre" pour promouvoir l'usage du créole. Mentionnons également le festival connu sous le nom de "Jounen kweyol» ("Creole Day"), un événement célébré chaque année à Sainte-Lucie au cours du mois d'octobre dans différentes localités de l'île.

Les services gouvernementaux sont tous offerts en anglais, mais le créole est largement utilisé dans les communications orales, tant par les fonctionnaires que par les citoyens, notamment dans les zones rurales. La Loi électorale (2001) reste l'une des très rares lois à aborder la question linguistique. L'article 42 prévoit la présence d'un interprète lorsqu'un recenseur, un agent d'inscription ou un responsable préposé à l'inscription dans l'exercice de ses fonctions ne comprend pas la langue parlée par un individu. L'article 61 autorise le président du scrutin à recourir à un interprète s'il ne comprend pas la langue parlée par un électeur:

Section 61.

Correction of Discrepancies

4)
Whenever the presiding officer does not understand the language spoken by an elector, he or she shall appoint and swear an interpreter who shall be the means of communication between him or her and the elector with reference to all matters required to enable such elector to vote and in case no interpreter is found, such elector shall not be allowed to vote.
Article 61

Correction des problèmes

4) Chaque fois que le président du scrutin ne comprend pas la langue parlée par un électeur, il doit nommer et assermenter un interprète pour servir de moyen de communication entre lui et l'électeur en relation avec toutes les questions nécessaire pour permettre à cet électeur de voter et, au cas où aucun interprète n'est trouvé, cet électeur ne doit pas être autorisé à voter.


De plus, la loi contient un certain nombre de formulaires. Dans le Formulaire no 8, «Déclaration solennelle d'une personne désignée comme candidat pour l'élection comme membre de la Chambre d'assemblée», il est précisé que le candidat doit être capable de parler et de lire l'anglais avec un degré de compétence suffisant pour lui permettre de prendre une part active aux débats de la Chambre d'assemblée:
 
(d) I am able to speak and read the English language with a degree of proficiency sufficient to enable me to take an active part in the proceedings of the House of Assembly; (d) Je suis capable de parler et de lire l'anglais avec un degré de compétence suffisant pour me permettre de prendre une part active aux débats de la Chambre d'assemblée;

La  Loi sur les brevets (2001) exige que les documents présentés le soient en anglais ou traduits dans cette langue:

Section 25

Search and examination and corresponding international applications

4)
Where the applicant has furnished the prescribed details under subsection (1) (c), he or she shall, subject to subsection (5), within the prescribed period, file the prescribed information in or translated into the English Language relating to any one of the corresponding international applications or other corresponding applications referred to in subsection (1) (c).
Article 25

Recherche et examen, et applications internationales correspondantes

4)
Lorsque le requérant a fourni les indications prescrites en vertu du paragraphe 1-c, il doit, sous réserve du paragraphe 5, dans le délai prescrit, déposer les renseignements demandé
s en anglais ou traduits dans cette langue concernant à l'une des applications internationales correspondantes ou d'autres applications correspondantes visées au paragraphe 1-c.

Il reste encore la Loi sur les indications géographiques (2000), qui ne mentionne aucune langue en particulier. Elle ne fait qu'autoriser l'emploi d'une indication géographique sur les produits et services des vins et spiritueux.

L'affichage public est uniquement en anglais, mais un mouvement s'est formé afin que le gouvernement de Sainte-Lucie accepte d'écrire les panneaux de signalisation routière «en kweyol». En règle nénérale, les avis du gouvernement sont accompagnés de la phrase suivante: "All information should be submitted in the English language." («Toute information doit être présentée en anglais»).

4.3 L'éducation

Le système d'éducation est régi par la Loi sur l'éducation (1999), mais cette loi ne traite pas de la langue d'enseignement. La seule fois où une langue est mentionnée a trait à l'obtention de bourses d'études: il faut avoir réussi un examen d'aptitude en anglais.

Section 151

Qualifications for scholarship.

1)
A student shall be eligible to compete for a scholarship if the student —

(b) has passed the Caribbean Examination Council proficiency examination or any other equivalent examination as may be prescribed by the Cabinet in five or more subjects including English Language;

Article 151

Qualifications pour une bourse d'études

1)
Tout étudiant est admissible à concourir pour une bourse d'études s'il:

(b) a réussi l'examen d'aptitude du Conseil des examens de Caraïbes ou tout examen équivalent qui peut être prescrit par le Ministère dans cinq matières ou plus, y compris celui en anglais;

À Sainte-Lucie, il existe des écoles maternelles («pre-schools education»), généralement privées. Toutes les écoles doivent exiger des frais aux élèves afin de couvrir le salaires des enseignants. Dans de nombreux cas, les familles sont incapables de payer ces frais et leurs enfants n'ont pas accès à l'éducation préscolaire. On compte des régions plus pauvres où il n'existe aucune école. La langue d'enseignement est l'anglais.

Les écoles primaires sont gratuites, universelles et obligatoires. La seule langue d'enseignement est l'anglais. Plus de 98 % des enfants fréquentent l'école primaire à Sainte-Lucie, mais les faits démontrent que la qualité de l'enseignement peut varier beaucoup d'une école à l'autre; il reste encore 20 % d'adultes analphabètes dans l'île.  Le ministère de l'Éducation soutient des projets visant à alphabétiser des fonctionnaires de l'État en créole. Plus de 50 % des élèves accèdent au secondaire où l'on enseigne les langues étrangères. Des expériences sont tentées actuellement pour que le créole (kweyol) soit enseigné dans les établissements secondaires. Sainte-Lucie bénéficie de projets régionaux de la part du gouvernement français afin de favoriser l'enseignement du français au secondaire; on compterais actuellement 4000 élèves apprenant le français (langue seconde). L'île compte aussi deux écoles secondaires privées.

Les programmes sont décidés par le ministère de l'Éducation de Sainte-Lucie, mais les conseils scolaires gèrent les écoles et les programmes. En principe, tous essaient de se rapprocher des exigences du Caribbean Examinations Council (auquel participent les gouvernement des Anguilla, Antigua et Barbuda, Barbade, Belize, les îles Vierges britanniques, les îles Cayman, la Dominique, la Grenade, Guyana, la Jamaïque, Montserrat, Saint-Christophe-et-Niévès, Sainte-Lucie, Saint-Vincent et les Grenadines, Trinidad et Tobago, les îles Turks et Caicos).

Enfin, les études universitaires se font exclusivement en anglais. Les cours se donnent essentiellement par la University of the West Indies (l'Université des Antilles) fondée en 1948. Il s'agit d'un établissement autonome régional soutenu par 15 pays: outre Sainte-Lucie, Anguilla, Antigua et Barbuda, le Bahamas, la Barbade, le Belize, des îles Vierges britanniques, les îles Caïman, la Dominique, la Grenade, la Jamaïque, Montserrat, Saint-Christophe-et-Niévès, Saint-Vincent et les Grenadines, la république du Trinidad et Tobago. L'Université compte trois campus principaux: à Mona en Jamaïque, Cave Hill à la Barbade et St. Augustine à Trinidad. On comprendra que, dans ces conditions, règne l'unilinguisme anglais dans les établissements universitaires.

4.4 Les médias

Tous les médias écrits (Midweek Star, One Caribbean, St. Lucia Mirror, Weekend Star, etc.) paraissent en anglais à Sainte-Lucie. La radio et la télévision d'État (Radio St. Lucia) diffusent en anglais, mais également en créole et en français. La plupart des stations privées (Radio 100 Helen FM et Radio Caribbean International) diffusent dans ces trois langues, sauf la station The Wave (uniquement en anglais). Les émissions de télévision (Helen Television System et Daher Broadcasting Service) sont massivement en anglais, parfois en créole. Le gouvernement semble avoir franchi une étape significative au sein de son service d’information en lançant la chaîne nationale de télévision NTN (National Television Network) dont la programmation est presque entièrement en créole. La proximité des DOM français (à 40 km de la Martinique) favorise la réception de la télévision hertzienne, principalement RFO émettant en français.

La politique linguistique de Sainte-Lucie est très simple. C'est une politique de non-intervention qui consiste à perpétuer les pratiques en vigueur lors du colonialisme britannique. Les affaires publiques se déroulent en anglais, mais le peuple continue de parler son créole d'origine française. Diverses tentatives sont actuellement en cours afin de promouvoir l'usage du créole au Parlement, dans l'enseignement et dans les médias. Pour le moment, les réalisations tardent encore, mais les locuteurs du créole saint-lucien constituent la majorité linguistique dans le pays. S'il y tiennent vraiment, ils peuvent faire ce qu'ils veulent à la condition de bousculer les forces de l'inertie favorables à l'anglais. À court terme, on ne voit pas comment Sainte-Lucie pourrait changer de politique, laquelle joue sur un certain bilinguisme anglo-créole.  

Dernière révision en date du 03 janv. 2024

Bibliographie

CHAUDENSON, Robert. Les créoles français, Paris Éditions Fernand Nathan, 1979, 173 p.

COMISIÓN INTERAMERICANA DE DERECHOS HUMANOS. La Situación de los Derechos Humanos de los Indígenas en las Américas, Organización de los Estados Americanos, Washington, 1997,
[http://www.cidh.oas.org/Default.htm].

GAUTHIER, François, Jacques LECLERC et Jacques MAURAIS. Langues et constitutions, Montréal/Paris, Office de la langue française / Conseil international de la langue française, 1993, 131 p.

MUÑIZ-ARGÜELLES, Luis. «Les politiques linguistiques des pays latino-américains», Colloque international La diversité culturelle et les politiques linguistiques dans le monde, Québec, Commission des états généraux sur la situation et l’avenir de la langue française au Québec, 24 et 25 mars 2001

ORGANIZACIÓN DE LOS ESTADOS AMERICANOS. La situación de les Derechos Indígenas en las Américas, Georgetown, 2000.

YACOUB, Joseph. «Les minorités en Amérique latine et aux Caraïbes» dans Les minorités dans le monde, Paris, Desclée de Brouwer, 1998, p. 781-805. 

 
 
 
 

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