United Kingdom

Bermudes

Territoire britannique d'outre-mer

 

Capitale:  Hamilton
Population:  82 500 (2004)
Langue officielle: anglais (de facto)
Groupe majoritaire:  anglais bermudien (60 %)
Groupes minoritaires: anglais (36 %), portugais (3,6 %)
Système politique:  territoire britannique d'outre-mer
Articles constitutionnels (langue):  art. 5 et 6 de la Constitution
de 1968 (modifiée en 1989 et 2001)
Lois linguistiques locales:  aucune

1   Situation géographique

Les Bermudes (en anglais: Bermuda) constituent un archipel de 53,3 km², situé dans l'océan Atlantique, à 1437 km à l'est de Charleston en Caroline du Sud et à 1500 km au nord des Bahamas. C'est un caillou perdu au milieu de l'Atlantique Nord (voir la carte). L'archipel se compose de quelque 360 îles (et îlots), dont une vingtaine seulement sont habités. Les sept îles principales, appelées «Grande Terre», sont Ireland Island North, Ireland Island South, Boaz Island, Somerset Island, Main Island ou Bermuda Island (ou Great Bermuda ou en français «Grandes Bermudes»), St. David's Island et St. George's Island; toutes ces îles sont reliées entre elles par des ponts, ce qui leur donne la forme d'un hameçon (voir la carte ci-dessous au no 2). La Grande Bermude a une longueur de 34 km et sa largeur ne dépasse pas trois kilomètres. L'archipel compte également neuf paroisses («parishes») et deux municipalités*; Devonshire, Hamilton, Hamilton*, Paget, Pembroke, Saint George*, Saint George's, Sandys, Smith's, Southampton et Warwick. Au point de vue de leur statut, les Bermudes forment un territoire britannique du Royaume-Uni. La capitale est Hamilton.

Les Bermudes sont parfois appelés «la Petite Suisse de l'Atlantique» en raison du grand nombre de banques et d'institutions financières, et du niveau de la vie des habitants comptant parmi les plus élevés au monde. Les Bermudes sont devenues célèbres en raison de la légende dite du «Triangle des Bermudes». Selon cette croyance, des centaines de navires et d'avions, sinon des milliers, auraient disparu dans une région de l'Atlantique circonscrite entre les Bermudes, Porto Rico et la côte de Floride, formant ainsi une sorte de triangle. La paternité de cette légende reviendrait à Vincent Gaddis dans un article de la revue Argosy paru en 1964, et intitulé «The Deadly Bermuda Triangle», inspiré par de nombreux articles antérieurs publiés par divers magazines au cours des années cinquante. De nombreuses personnes croient que des forces mystérieuses sont à l'origine de ces disparitions. 

2   Données démolinguistiques

La population des Bermudes était estimée en 2004 à quelque 82 500 habitants. On compte 58 % de Noirs, 36 % de Blancs et 6 % d'autres races (Mulâtres, Asiatiques, etc.). Quelque 73 % de la population est d'origine bermudienne, les autres étant principalement des Britanniques, des Américains, des Canadiens, des Australiens, des Néo-Zélandais, des Indo-Pakistanais et des Brésiliens. Une bonne partie de la population blanche est issue des premiers colons d'origine britannique, écossaise, galloise et irlandaise; la population noire provient de la traite des esclaves. La population est répartie d'une manière relativement égale entre les neuf paroisses des Bermudes, c'est-à-dire entre 4000 et 8000 personnes.

Plus de 60 % de la population parle l'anglais bermudien comme langue maternelle, notamment les Noirs et les Mulâtres. Cet anglais bermudien, qui n'est pas un créole, est assez proche de l'anglais standard, sauf qu'il se caractérise par des archaïsmes phonétiques et lexicaux, ainsi que par des emprunts particuliers aux langues africaines. Les Blancs anglo-saxons (36 %) et les Indo-Pakistanais s'expriment en anglais standard, les Portugais (3,6 %) en portugais Il faut ajouter des résidants temporaires asiatiques travaillant dans les hôtels et la restauration, ainsi que des travailleurs philippins dans les secteurs du service domestique et de la santé.

On trouve aux Bermudes un éventail de religions chrétiennes: 28 % d'anglicans, 15 % de catholiques, 12 % de méthodistes africains, 6 % d'adventistes du Septième Jour et 5 % de méthodistes américains.

3  Données historiques

C'est un marin espagnol du nom de Juan de Bermúdez qui a découvert en 1503 l'archipel des Bermudes, à l'époque où celui-ci était encore inhabité. Bien que Bermúdez ait donné son nom à l'archipel, il ne revendiqua pas les îles pour l'Espagne, mais par la suite les Bermudes devinrent un point de repère important pour les navires qui naviguaient sur l'Atlantique, entre l'Espagne et le Nouveau Monde. Étant donné que les Bermudes étaient entourés de récifs dangereux, beaucoup d'Espagnols perdirent la vie en tentant d'aborder l'une ou l'autre des îles de l'archipel. L'explorateur français Samuel de Champlain, fondateur de Québec (en 1604), aborda les côtes des Bermudes en 1600; il inscrivit l'archipel sur une carte, mais ne revendiqua pas l'archipel pour la France.

3.1 La colonisation anglaise

La colonisation anglaise aurait commencé en 1609 à la suite du naufrage du Sea Venture qui faisait voile vers la Virginie. C'était le navire de l'amiral George Somers qui s'était échoué aux Bermudes. Il fit construire des bateaux de remplacement avec du cèdre et reprit la mer en laissant des hommes dans l'archipel, ce qui permettait de revendiquer les îles au nom de l'Angleterre. Les premiers véritables colons permanents arrivèrent en 1612. L'un d'eux, Richard Moore, devint le premier gouverneur de l'archipel. La ville de Saint-Georges fut fondée la même année. La Chambre d'Assemblée des Bermudes qui, à l'exception de la Chambre des communes de la Grande-Bretagne, reste le plus ancien corps législatif du Commonwealth britannique; elle fut fondée en 1620. Évidemment, les Bermudes constituent le plus ancien et l'un des plus petits, quoique des plus peuplés, territoires britanniques d'outre-mer et le membre le plus ancien du Commonwealth britannique.

À cette époque, l'archipel appartenait par une charte royale à la Bermuda Company, qui avait divisé le territoire en neuf tribus (appelées aujourd'hui «paroisses»), auxquelles elle avait donné le nom de ses principaux actionnaires (Devonshire, Hamilton, Paget, Pembroke, Sandys, Smith's, Southampton, Warwick). L'archipel des Bermudes avait été rebaptisée du nom de Somers Islands en l'honneur de l'amiral qui avait échoué dans l'archipel, mais la nouvelle dénomination n'est pas restée, les habitants continuant d'utiliser le terme Bermuda (nom de la compagnie qui possédait l'archipel). Le commerce du tabac, du cèdre et du sel, ainsi que la pêche à la baleine constituaient les piliers de l'économie des Bermudes. Pour combler la main-d'œuvre, la compagnie fit venir des esclaves dès 1616, en plus des colons de la Grande-Bretagne; on importa aussi des Amérindiens des colonies de la Nouvelle-Angleterre. Le gouvernement britannique racheta la colonie de la Bermuda Company en 1684.

3.2 Les États-Unis et la France

La situation stratégique de l'archipel favorisa le développement économique lors de la guerre d'Indépendance américaine grâce à la construction de places fortes et de ports militaires. Pendant la Révolution américaine, le marquis de Lafayette avait proposé au général George Washington de se saisir des Bermudes. L'article 5 du traité de 1778 entre les États-Unis et la France accordait le droit aux États-Unis de récupérer le Canada (autrefois sous domination française) et les Bermudes. L'article 6 du traité énonçait que la France s'engageait à renoncer à toutes revendication sur l'un ou l'autre de ces territoires. Mais Washington déclina l'offre parce qu'il avait d'autres priorités. Des troupes américaines ont tenté de prendre les Bermudes en 1777, mais elles furent repoussées. Pendant la guerre de 1812 entre la Grande-Bretagne et les États-Unis, la France tenta encore d'intervenir pour que les Américains se saisissent des Bermudes, mais la tentative échoua encore une fois. Au cours de la guerre, les Britanniques se servirent des Bermudes pour garder en captivité des prisonniers français et américains. En 1838, un groupe de huit Canadiens français (des «patriotes)», qui s'étaient révoltés contre le régime britannique, furent expulsés aux Bermudes en tant que «prisonniers politiques».

3.3 L'abolition de l'esclavage

La Grande-Bretagne abolit l'esclavage en 1834. Les gouvernement local recensa alors 5000 Noirs et autres «gens de couleur» (55 %) parmi les 9000 personnes résidant dans les Bermudes. On fit alors appel à des travailleurs portugais en provenance de l'île de Madère, puis des Açores. Par la suite, ces Portugais conservèrent leur langue, que leurs descendants parlent encore aujourd'hui. Au cours de la décennie de 1880, le gouvernement fit venir un millier d'Indo-Pakistanais qui s'installèrent dans l'archipel. Progressivement, ils s'intégrèrent et perdirent leur langue.

Les Bermudes développèrent le secteur des exportations agricoles. Étant donné que les États-Unis avaient fixé des droits de douane élevés en 1930 à l'encontre de leurs partenaires commerciaux, les exportations agricoles, surtout les légumes frais, chutèrent considérablement, ce qui eut pour effet de réduire considérablement les exportations agricoles des Bermudes. Cette situation incita ce territoire britannique d'outre-mer à développer l'industrie touristique. Dès lors, les Bermudes devinrent une destination à la mode pour les riches touristes britanniques, américains et canadiens.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, les Bermudes devinrent une importante base militaire en raison de leur situation stratégique dans l'océan Atlantique. En 1941, les États-Unis conclurent un accord avec le Royaume-Uni. En échange de la cession de destroyers américains, les Britanniques concédaient aux Américains, pour une durée de 99 ans, un terrain dans le but d'y établir des bases militaires aériennes et navales.

3.4 L'autonomie

En 1963, le Progressive Labour Party (Parti progressiste-travailliste) se présenta comme le représentant des intérêts des Bermudiens non blancs face à un gouvernement presque totalement composé de propriétaires terriens blancs. Les parlementaires se sont unis pour former l'United Bermuda Party (Parti des Bermudes unies). C'est ainsi qu'est issue la Constitution de 1968 qui prévoyait un gouvernement local responsable des affaires internes en laissant la sécurité, la défense et des affaires diplomatiques à la Couronne britannique. En 1995, les deux bases américaines cessèrent de fonctionner, de même que les bases britannique et canadienne; leur évacuation a libéré un dixième de la superficie totale du territoire.

La même année, un référendum sur l'indépendance échoua, les habitants préférant, dans une proportion de 75 %, demeurer une colonie britannique. Le gouvernement local décida de modifier l'industrie du «paradis fiscal» afin de réduire les cas de fraude; n'oublions pas que plus de 13 000 sociétés, surtout des entreprises américaines, canadiennes et britanniques, sont enregistrées au Bermudes.  La législation bermudienne interdit l'affichage de mauvais goût, les enseignes au néon et tout panneau-réclame, ainsi que les chaînes de restauration rapide; aucun fast food n'est toléré dans l'archipel. Le tourisme a toujours une grande importance pour l'économie de l'île, bien que le commerce international ait dépassé les avantages financiers du tourisme.

4 La politique linguistique

Le gouvernement local des Bermudes n'a pas de politique linguistique. La non-intervention a pour effet de perpétuer les usages linguistiques en cours depuis le début de la colonisation. En tant que colonie britannique, les Bermudes ont toujours eu l'anglais comme langue officielle, sans qu'il n'ait été nécessaire de le proclamer ou le reconnaître dans quelque texte que ce soit.

4.1 L'anglais, langue de l'État et de l'Administration territoriale

Le gouvernement local perpétue les pratique en vigueur depuis le début de la colonie. L'anglais est la seule langue admise à l'Assemblée, dans l'Administration, les tribunaux et l'éducation. En réalité, même si la colonie est régie par les lois anglaises, les habitants continuent de parler leur anglais local, que ce soit dans les tribunaux ou l'Administration, qui s'accommodent de la langue parlée par les insulaires. Dans les tribunaux ou procédures judiciaires, les articles 5 et 6 de la Constitution de 1968 (modifiée en 1989 et en 2001) prévoient des dispositions particulières pour les Bermudiens et non-Bermudiens, qui ne connaîtraient pas la langue du tribunal:

Article 5

1) No person shall be deprived of his personal liberty save as may be authorised by law in any of the following cases:

2) Any person who is arrested or detained shall be informed as soon as is reasonably practicable, in a language that he understands, of the reasons for his arrest or detention.

Article 6

2) Every person who is charged with a criminal offence—

(a) shall be presumed to be innocent until he is proved or has pleaded guilty;

(b) shall be informed as soon as reasonably practicable, in a language that he understands and in detail, of the na­ture of the offence charged;

(f) shall be permitted to have without payment the assis­tance of an interpreter if he cannot understand the lan­guage used at the trial of the charge;

Article 5

1) Nul ne sera privé de sa liberté personnelle, sauf s'il en est autorisé conformément à la loi dans chacun des cas suivants.

2) Quiconque est arrêté ou détenu sera informé, aussitôt qu'il est raisonnable de le faire, dans une langue qu'il comprend, des motifs de son arrestation ou de sa détention.

Article 6

2) Quiconque est accusé d'un délit :

(a) sera présumé innocent avant qu'il ne soit prouvé le contraire ou ait plaidé coupable;

(b) sera informé, aussitôt qu'il es raisonnable de le faire, dans une langue qu'il comprend et en détail de la nature de l'accusation en cours;

(f) pourra gratuitement recevoir l'aide d'un interprète s'il ne peut comprendre la langue employée dans le procès pour lequel il est accusé;

Quant aux écoles, c'est l'anglais qui sert d'unique langue d'enseignement. D'ailleurs, le système est calqué sur le système britannique, y compris les manuels. Les langues secondes apprises sont généralement le portugais, l'espagnol ou le  français.

4.2 Les médias 

Les médias écrits bermudiens sont tous en langue anglaise: Bermuda Sun, The Royal Gazette, Mid Ocean News et Bermudian. Les médias électroniques ont également recours à l'anglais, que ce soit à la radio (Bermuda Harbour Radio) ou à la télévision (National Television Networks et CATV). ll ne pourrait difficilement en être autrement puisque l'archipel est très isolé du continent et que, de toute façon, les stations ne pourraient provenir que des États-Unis ou du Canada.

L'unilinguisme anglais standard est omniprésent dans le fonctionnement de l’État et de l'Administration territoriale, notamment dans la langue écrite. Un certain pragmatisme est toléré dans les communications orales avec l'anglais bermudien, que ce soit dans l’Administration locale ou les tribunaux, ainsi qu'à la radio. Comme les Bermudes font partie intégrante du Royaume-Uni, on ne voit pas comment il pourrait en être autrement. Les Bermudes, la plus ancienne colonie britannique, se présente comme une terre britannique dans un îlot perdu dans l'Atlantique-Nord.

Dernière mise à jour: 06 déc. 2015

 

Bibliographie 

ENCYCLOPÉDIE MICROSOFT ENCARTA, 2004, art. «Bermudes», pour la partie historique.

MANNING, Patrick. Bermuda Politics in Transition, Hamilton, Island Press, 1978, 231 p.

PORY, John. A Lost Description of Plymouth Colony, Boston-New York, Houghton Mifflin Limited, 1918. 

RAINE, David F. Sir George Somers: A Man and his Times, Hamilton, Pompano Publications, 1986, 189 p.

STRUDWICK, Marin Rogers. The Bermuda Indenture, Novel, Court Street Press Montgomery & Alabama and The Bermudian Publishing Co. Ltd., 2001.

TUCKER, Terry. The Islands of Bermuda, Hamilton, Island Press, 1970. 138 p.

 

Les territoires britanniques d'outre-mer

 

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