Sint Maarten / Saint-Martin

Données historiques

Saint-Martin/Sint Maarten est une île (l'une des îles Sous-le-Vent) des Petites Antilles entre les îles Anguilla et Saint-Barthélemy. La partie nord, appelée Saint-Martin, est dépendante de la Guadeloupe, département français d'outre-mer; la partie sud, appelée Sint Maarten, possède un gouvernement autonome et faisait partie, jusqu'au 10 octobre 2010, des Antilles néerlandaises, maintenant abolies. La région des possessions françaises a une superficie de 52 km²; celle de la zone néerlandaise est de 34 km². La principale ville française, Marigot, et la principale ville néerlandaise, Philipsburg, sont toutes les deux des ports francs.

1 La colonisation espagnole

L’île de Saint-Martin (ou Sint Maarten en néerlandais) fut découverte par Christophe Colomb, le 11 novembre 1493, le jour de la fête de saint Martin (évêque de Tour). L'île de Saint-Martin commença alors à figurer comme possession espagnole sur les cartes du Nouveau-Monde. Mais l'île ne fut guère exploitée par les Espagnols.

Tout au long du XVIe siècle, Saint-Martin fut visitée par les Espagnols, les Hollandais, les Portugais, les Anglais et les Français à la recherche de mouillages ou de ports protégés. Ce fut la grande époque des corsaires et des flibustiers, qui réduisirent les Caraïbes autochtones en esclavage et les arrachèrent à leur île pour les faire travailler dans les îles voisines. Les mauvais traitements et les maladies les décimèrent jusqu’au dernier. Entre 1627 et 1631, la Hollande prit l'initiative de s'installer à Saint-Martin avec comme objectif d'y exploiter les gisements naturels de sel dont elle avait besoin pour elle-même et ses établissements sur le continent nord-américain. Elle y construisit un premier fort, ce qui provoqua une vive réaction de la part de l'Espagne. Une occupation militaire espagnole s'ensuivit à partir de 1638. Finalement, en 1648, les Espagnols abandonnèrent complètement l’île Saint-Martin, jugée trop petite (86 km²) et d’un intérêt limité.

2 L’administration franco-hollandaise

En 1648, l’île de Saint-Martin n’était occupée que par quatre Français et cinq Hollandais. Le 23 mars de la même année, les Français et les Hollandais réglèrent le problème de leur «souveraineté nationale» par la signature du Traité du mont des Accords (ou Mons Concordia). Ils se partagèrent l’île en deux parties: les Français occupèrent la partie nord (52 km²), les Hollandais, la partie sud (34 km²). Dans l’accord de 1648, il était convenu d’assurer la libre circulation des habitants sur toute l’île. Toutes les dispositions de 1648 sont demeurées en vigueur jusqu’à aujourd’hui.

Lorsqu’en 1656 des colons hollandais furent chassés du Brésil par les Portugais, ils se réfugièrent avec leurs esclaves en Martinique, mais surtout en Guadeloupe et à Saint-Martin. Parce que les Hollandais étaient réputés être les détendeurs de la technique de fabrication du sucre, le gouverneur français, Charles Houël, avait considéré que l’arrivée de ces nouveaux immigrants allait favoriser l’essor économique. Dans les siècles qui suivirent, l’île de Saint-Martin se peupla de colons et de corsaires anglais, et de quelques esclaves noirs, tout en demeurant sous la double administration franco-hollandaise.

Cependant, les Français et les Hollandais durent se défendre pour contrer les incessantes attaques anglaises. L'île de Saint-Martin / Sint Maarten fut successivement occupée, abandonnée, évacuée, pillée, attaquée, prise et restituée au traité de Versailles, occupée encore, puis libérée sous la Révolution par Victor Hugues.

Lors du traité d'Utrecht de 1713, la France perdit l’île de Saint-Christophe (aujourd'hui, l'État de Saint-Kitt-et-Nevis) au profit de l’Angleterre. Or, la partie française de Saint-Martin (ainsi que l’île de Saint-Barthélemy) était reliée administrativement à Saint-Christophe (dont elle dépendait). La perte de Saint-Christophe, qui coupait tout lien naturel avec la France, fit que la partie française de Saint-Martin dut ne compter que sur elle-même pendant un certain temps (1713-1763); ce n’est qu’en 1763 qu’elle fut rattachée administrativement à la Guadeloupe (distante de 250 km). Entre 1775 et 1784, la population blanche passa de 300 habitants à 500, mais la masse servile, essentiellement noire, déversée par le commerce ou amenée des îles voisines (surtout des Anguillais anglophones) s'éleva brutalement de 1000 à 2500.

En 1816, la signature du traité de Vienne mit fin aux luttes coloniales et assura définitivement la prédominance franco-hollandaise. En réalité, entre le milieu du XVIIe siècle et le début du XIXe siècle, l’île de Saint-Martin - Sint Maarten subit l’influence de la France, des Antilles néerlandaises, des Antilles anglaises, des îles Vierges américaines, de Porto Rico (espagnol), des États-Unis et de la Suède. On peut imaginer le degré de multilinguisme et de multiculturalisme chez la population insulaire.

Autour de 1843, l'amiral Alphonse-Louis-Théodore de Moges (1789-1850), alors qu'il était commandant en chef de la station des Antilles et du golfe du Mexique et gouverneur de la Martinique, écrivait au ministre de la Marine française: «Malgré la double occupation (française et hollandaise), c'est la langue anglaise qui est la seule familière à l'ensemble de la population. Cette circonstance s'explique par le peu d'intérêt que la Hollande accorde à cette possession et par l'abandon où nous-mêmes l'avons laissée pendant de longues années.» Remarquons que la situation linguistique n'a guère changé depuis cette époque, bien que l'île soit envahie annuellement par un demi-million de touristes, dont surtout des Américains, puis des Français, des Canadiens, des Néerlandais, etc. 

La France abolit l’esclavage lors du décret d'abolition de l'esclavage du 27 avril 1848, qui avait été préparé par le sous-secrétaire d'État français à la Marine chargé des colonies, Victor Schoelcher (1804-1893). Presque aussitôt, le gouverneur de la Guadeloupe (dont Saint-Martin faisait alors partie), Laryle, décida, le 27 mai 1848, d’appliquer le décret d'abolition dans l’archipel; l’esclavage fut aboli la même année à l’île de Saint-Martin pour la partie française, mais seulement en 1863 pour la partie hollandaise. Or, les «esclaves hollandais» n’avaient qu’à franchir la frontière séparant les deux zones pour devenir libres.

Mais l’abolition de l’esclavage fit décliner les échanges commerciaux, car la production sucrière de l'île cessa en 1875 et celle du coton en 1923. Le déclin économique força de nombreux Saint-Martinois français et néerlandais à l'exil; beaucoup émigrèrent vers les îles d’Aruba et de Curaçao, attirés par les raffineries de pétrole que la Dutch-British Shell Oil Company avait installées dans les années 1919-1920. Les historiens signalent une baisse de 18 % de la population de l’île de Saint-Martin / Sint Maarten entre 1920 et 1929; les Saint-Martinois «français» bénéficièrent des mêmes conditions d'immigration que les citoyens «néerlandais». En 1939, la France et les Pays-Bas abolirent les droits de douane et des contributions indirectes entre les deux zones (néerlandaise et française), ce qui permit de développer sans entraves les relations commerciales et économiques entre les deux parties de l'île.

Lors de la Seconde Guerre mondiale, les Américains devinrent le fournisseur unique de toute l’île, car l’Administration française de l’île avait reconnu officiellement le gouvernement français de Vichy et, de ce fait, avait subi le blocus des forces alliées. Dès 1943, Washington fit de Juliana (partie hollandaise) une base aérienne importante et un élément-clé de son dispositif de lutte contre les sous-marins allemands. La guerre contribua ainsi à américaniser et angliciser grandement la population de Saint-Martin / Sint Maarten. Par la suite, l'anglais devint la grande langue véhiculaire sur l'ensemble de l'île et concurrença le français au nord, le néerlandais au sud.

3 Après l'autonomie néerlandaise

Depuis 1955, l’île de Saint-Martin / Sint Maarten a lié massivement son économie au tourisme. L’île est devenue l'un des centres touristiques les plus fréquentés de toutes les Antilles. Elle a attiré de nombreux ressortissants de la Guadeloupe, mais aussi des Antilles anglophones (Anguilla, Saint-Kitts, Niéves, etc.), hispanophones (République Dominicaine) et créolophones (Haïti).

La langue officielle continue d’être le français au nord, le néerlandais et l'anglais au sud. Dans la partie française comme dans la partie néerlandaise, la majorité des insulaires parle l'«anglais des îles», c'est-à-dire une variété d'anglais caraïbéen comme langue maternelle; ce n'est pas l'anglais standard, ni l'anglo-américain, ni le «Black English», mais un anglais saint-martinois (en anglais: West Indian English). À Saint-Martin même, cet anglais est parfois qualifié de patois ou d'English patois, d'anglais-pays et de broken English). Il s'agit d'un anglais caractérisé par de nombreux écarts par rapport à l'anglais standard, et ce, sur les plans de la phonétique, de la phonologie, de la morphologie et du vocabulaire. Quelques petites communautés parlent le français, le néerlandais, le créole guadeloupéen, le créole haïtien, le papiamento, l'espagnol, etc.

Le français demeure la langue de l'école et de l'Administration au nord, mais c'est le néerlandais au sud. L’anglais standard, appelé le King's English, demeure la grande langue véhiculaire dans toute l’île, car il sert d'instrument de communication efficace entre la quarantaine d'ethnies. Il est régulièrement employé et diffusé par les médias électroniques, mais l'anglo-américain participe également à la dynamique linguistique saint-martinoise, les chaînes de télévision américaines étant captées par presque tous les insulaires.

Dernière révision en date du 16 déc. 2015

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Saint-Martin
(partie française)

Sint Maarten
(partie néerlandaise)