Generalitat de Catalogne

 
PRÉAMBULE

PRÉSIDENCE DE LA GENERALITAT

Loi 1/1998 du 7 janvier sur la politique linguistique

 

LE PRÉSIDENT DE LA GENERALITAT DE CATALOGNE

 

J'informe tous les citoyens que le parlement de Catalogne a approuvé et qu'au nom du roi et conformément à ce que stipule l'article 33.2 du Statut d'autonomie de la Catalogne, je promulgue la présente:

LOI

Préambule

 
I. Portée et situation de la langue catalane

La langue catalane est un élément fondamental de la formation et de la personnalité nationale de la Catalogne, un instrument de communication, d'intégration et de cohésion sociale des citoyens et citoyennes, indépendamment de leur origine géographique; elle constitue le lien privilégié de la Catalogne avec les autres régions catalanophones, qui forment avec elle une seule communauté linguistique, laquelle a apporté une contribution riche et originale à la culture universelle. En outre, elle a toujours été le témoignage de la fidélité du peuple catalan à sa terre et à sa culture spécifique.

Née au sein du territoire catalan, mais également parlée sur d'autres terres, même si elle y reçoit des dénominations populaires, voire juridiques, différentes, la langue catalane a toujours été la langue propre de la Catalogne et, à ce titre, elle a subi les effets négatifs de certains événements historiques, qui l'ont conduite a une situation précaire. Plusieurs facteurs sont intervenus: la persécution politique dont elle a souffert et l'imposition de la langue castillane pendant plus de deux siècles et demi; les conditions politiques et socio-économiques qui ont déterminé les changements démographiques des dernières décennies, ou encore le fait qu'il s'agisse, comme d'autres langues européennes officielles, d'une langue de portée géographique restreinte, d'autant que dans le monde actuel la communication, l'information et les industries culturelles tendent à la mondialisation.

Ces circonstances rendent donc complexe la situation sociolinguistique de la Catalogne. Au fait que cette langue à part entière ne soit pas encore parvenue à sa pleine normalisation, au fait qu'elle possède un nombre restreint de parlants dans le contexte international, vient s'ajouter une autre donnée: de nombreux citoyens et citoyennes du territoire catalan ont pour langue maternelle la langue castillane, dans laquelle ils s'expriment préférentiellement et à partir de laquelle ils ont souvent contribué à enrichir notablement la culture catalane elle-même, comme l'ont fait d'autres citoyens et citoyennes dans d'autres langues. Une telle réalité exige donc une politique linguistique contribuant efficacement à la normalisation de la langue propre de la Catalogne, tout en garantissant un respect scrupuleux des droits linguistiques de tous les citoyens et citoyennes.

II. Le cadre juridique

Le cadre juridique de la langue catalane est déterminé par la Constitution espagnole de 1978 et par le Statut d'autonomie de 1979.

La première, tout en reconnaissant la diversité des peuples qui forment l'État espagnol, établit dans son article 3 que "la langue castillane est la langue espagnole officielle de l'État et que, en tant que telle, "tous les Espagnols ont le devoir de la connaître et le droit de l'utiliser". En outre, la Constitution affirme que "les autres langues espagnoles seront également officielles dans les communautés autonomes respectives conformément à leurs statuts".

L'article 3 du Statut d'autonomie dispose que: 1) La langue propre de la Catalogne est le catalan. 2) La langue catalane est la langue officielle de la Catalogne, de même que le castillan, officiel dans tout l'État espagnol. 3) La Generalitat garantira l'emploi normal et officiel de ces deux langues, prendra les mesures nécessaires pour assurer leur connaissance et créera les conditions permettant d'atteindre leur pleine égalité quant aux droits et devoirs linguistiques des citoyens de Catalogne. 4) Le parler du val d'Aran sera matière d'enseignement et méritera un respect et une protection spécifiques."

Ces dispositions statutaires ont été développées par la loi 7/1983, du 18 avril, sur la normalisation linguistique en Catalogne, loi d'une importance considérable dans l'histoire de la langue, puisqu'elle a supposé la dépénalisation du catalan et a permis, en quatorze ans, d'en assurer la connaissance chez la plupart des citoyens grâce à une politique concertée entre les différents secteurs de la société, politique qui s'est traduite par un processus de normalisation linguistique.

Pendant la période d'application de la présente loi, des changements cruciaux se sont produits: dans le domaine technologique, l'usage de l'informatique et des autoroutes de l'information s'est généralisé; dans le domaine culturel et commercial, s'est instaurée la liberté du commerce, qui a multiplié les emprunts culturels, notamment dans le monde des communications et de l'audiovisuel; dans le domaine politique, d'une part, l'Espagne est entrée dans la Communauté économique européenne, aujourd'hui Communauté européenne, régie par le principe du plurilinguisme, de l'autre, la Generalitat a assumé nombre des compétences prévues par son Statut d'autonomie; dans le domaine social et sociolinguistique, la connaissance du catalan s'est généralisée, ce qui n'a pas toujours supposé un accroissement proportionnel de son emploi public, et il s'est produit un changement notable dans les flux migratoires. On a également assisté a une évolution importante du droit linguistique dans notre pays, due, en partie à la jurisprudence du Tribunal constitutionnel, en partie à la législation catalane et aux études doctrinales. Finalement, il faut souligner le contenu de plusieurs résolutions du Parlement européen: celle du 30 novembre 1987 sur la situation des langues et des cultures des minorités ethniques au sein de la Communauté européenne; celle du 9 février 1994 sur les minorités culturelles et linguistiques de la Communauté européenne; celle du 11 décembre 1990 sur la situation des langues de la Communauté et du catalan, et celle enfin du 9 février 1994 sur les minorités culturelles et linguistiques de la Communauté européenne. Il faut également mettre l'accent sur la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires adoptée en tant que convention par le Comité des ministres du Conseil de l'Europe le 5 novembre 1992, et la Déclaration universelle des droits linguistiques, approuvée par la Conférence mondiale des droits linguistiques le 6 juin 1996, à Barcelone, et ayant bénéficié du soutien unanime du Congrès des députés et du parlement de Catalogne.
 
III. Les objectifs de la présente loi

L'ensemble de ces circonstances ont rendu souhaitables la modification et l'actualisation de la loi de 1983, ainsi que la reconduction de l'accord politique et social qu'elle avait suscité, afin de consolider le processus mis en oeuvre par la Loi sur la normalisation linguistique dans le domaine de l'administration et de l'enseignement, d'adapter aux besoins d'aujourd'hui la réglementation des médias et des industries culturelles et d'établir des normes linguistiques destinées au monde socio-économique, le tout visant à favoriser la connaissance complète et l'emploi normal de la langue catalane, ce qui devrait permettre de donner un nouvel élan à son usage social.

La modification et actualisation de la loi de 1983 devrait permettre, en outre, de raffermir un des engagements du Statut d'autonomie: celui d'obtenir la pleine égalité des droits et des devoirs linguistiques, notamment en ce qui concerne la connaissance des deux langues officielles et leur emploi, ce qui signifie, conformément au cadre statutaire en vigueur, que les citoyens et citoyennes de Catalogne auront le devoir de connaître la langue catalane et la langue castillane et le droit de les employer.

Pour favoriser cet élan, il est indispensable de modifier les normes étatiques et européennes, de renforcer les politiques d'encouragement et de leur assigner les ressources budgétaires appropriées.
 
IV. Le contenu et la structure de la présente loi

La présente loi formule les concepts juridiques de langue propre et de langue officielle. Ainsi, le concept de langue propre appliqué à la langue catalane oblige les pouvoirs publics et les institutions de Catalogne à la protéger, à l'employer de fac, on généralisée et à en promouvoir l'usage public à tous les niveaux. Le concept de langue officielle appliqué au catalan et au castillan garantit aux citoyens et citoyennes leurs droits subjectifs, explicitement proclamés, à apprendre les deux langues et à les employer librement dans toutes leurs activités publiques et privées; à choisir la langue dans laquelle l'administration et, de façon progressive, les agents sociaux qui prêtent leurs services au public, les accueilleront et traiteront leur problème; et à ne souffrir aucune discrimination pour des raisons linguistiques. Compte tenu de ces principes, la loi réglemente l'usage des deux langues officielles en Catalogne et établit des mesures de protection et de promotion de l'emploi du catalan pour en assurer la normalisation et des mesures d'encouragement pour garantir sa présence dans tous les domaines.

Dans le domaine officiel et administratif, la présente loi établit que les administrations et les institutions catalanes devront utiliser le catalan de façon générale, sans préjudice du droit des citoyens et citoyennes a s'adresser à elles dans la langue de leur choix; de plus, elle proclame la pleine validité de toute documentation publique et privée écrite dans l'une ou l'autre des deux langues officielles, l'une étant pleinement indépendante de l'autre, dans tous les domaines, y compris l'administration de l'État, l'administration judiciaire et les registres publics.

En ce qui concerne l'enseignement, la présente loi garantit à l'ensemble de la population la pleine connaissance des deux langues, et garantit, en même temps, qu'aucun élève ne souffrira de discrimination ni sera placé dans des groupes spécifiques pour des questions de langue, tout en maintenant le système de conjonction linguistique appliqué en vertu de la loi de 1983, et conformément à la jurisprudence du Tribunal constitutionnel. Elle définit également des mesures d'encouragement de l'enseignement universitaire en catalan.

Dans le domaine des médias, et dans le cadre des compétences de la Generalitat, elle réglemente l'emploi du catalan sur les chaînes de radiodiffusion et de télévision, afin de garantir la présence de la langue propre dans l'espace radiophonique et télévisuel, et elle établit des mesures d'encouragement destinées à la presse écrite. En ce qui concerne les industries culturelles, elle maintient et renforce les mesures d'encouragement que la Loi sur la politique linguistique prévoit pour le cinéma, le livre, la chanson et les arts du spectacle, et elle inclut des références à l'informatique, aux réseaux de communication télématiques et aux produits d'ingénierie linguistique, qui sont devenus la base du traitement de l'information dans tous les domaines.

En ce qui concerne le domaine socio-économique, elle adopte des mesures de réglementation concernant la présence de la langue catalane et son usage dans tous les domaines où, pour des raisons de marché, ou autres, ils ne sont pas suffisamment garantie. De cette façon, les entreprises publiques, les entreprises concessionnaires et les entreprises de services publics s'engageront activement dans le processus de normalisation linguistique, ce qui permettra de garantir les droits linguistiques des consommateurs et consommatrices. L'objectif est de parvenir de façon progressive, à mesure que tous les citoyens et citoyennes de Catalogne acquerront une connaissance complète de la langue catalane, à une situation d'égalité entre les deux langues dans le monde économique, toujours à travers la concertation sociale encouragée par la Generalitat.

Finalement, la présente loi reconnaît, protège et encourage l'enseignement et l'usage de l'aranais dans le val d'Aran, s'appuyant sur la loi 6/l990, du 13 juillet, sur le régime spécial du val d'Aran, dans le plein respect des compétences et des institutions spécifiques du val d'Aran.

La présente loi a un caractère indicatif pour les citoyens et citoyennes et ne crée d'obligations qu'aux administrations et à certaines entreprises, lorsque le caractère de service public de leurs activités et la protection des droits linguistiques des citoyens et citoyennes le rendent souhaitable. Ainsi, seuls les fonctionnaires et les entreprises mentionnées peuvent être l'objet d'une intervention administrative s'ils ne remplissent pas les obligations établies par la présente loi.

Quant à sa structure, cette loi comprend 39 articles, 8 dispositions additionnelles, 3 dispositions transitoires et 3 dispositions finales. Les articles sont divisés en sept chapitres, qui réglementent les principes généraux (chapitre préliminaire), l'emploi institutionnel (chapitre II), l'onomastique (chapitre II), l'enseignement (chapitre m), les médias et les industries culturelles (chapitre IV), l'activité socio-économique (chapitre V) et l'encouragement institutionnel (chapitre VI). La loi suit donc la structure de la loi 7/1983, à laquelle viennent s'ajouter les chapitres consacrés à l'onomastique et à l'activité socio-économique.

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