[Guatemala]
République de Guatemala

  Guatemala

República de Guatemala

 

Capitale: Ciudad Guatemala
Population: 12,5 millions (2005)
Langue officielle: espagnol (68 %)
Groupe «major
itaire»: espagnol
Groupes minoritaires: environ 55 langues autochtones, dont 21 langues maya
Système politique: république présidentielle démocratique
Articles constitutionnels (langue): art. 58, 66, 76, 143 et 18 (Dispositions finales) de la Constitution de 1985, modifiée au 17 novembre 1993
Lois linguistiques: Loi sur l’alphabétisation (1986); Loi sur l'appareil judiciaire (1989); Loi sur l’Académie des langues mayas du Guatemala (1990); Règlement sur la loi de l'alphabétisation no 137-91 (1991); Loi sur l’éducation nationale (1991); Code de procédure pénale (1992); Accord gouvernemental no 726-95 du 21 décembre 1995 instituant la Direction générale de l'éducation bilingue interculturelle (1995); Code de l'enfance et de la jeunesse (1996); Accord sur l'identité et les droits des peuples indigènes (1995); Loi sur les langues nationales (2003); Règlement sur la Loi électorale et les partis politiques (2007).

1 Situation géographique

Amérique centrale La république du Guatemala est un pays d'Amérique centrale d’une superficie de 108 889 km², soit près de 20 fois plus petit que le Mexique, mais trois fois plus grand que la Belgique. Le Guatemala est limité à l'ouest et au nord par le Mexique, à l'est par le Belize et la mer des Caraïbes (golfe du Honduras), au sud-est par le Honduras et le Salvador, et au sud par l'océan Pacifique. La capitale est Guatemala la Ciudad

Le Guatemala est divisé en 22 départements administratifs, dirigés chacun par un gouverneur nommé par le président: Alta Verapaz, Baja Verapaz, Chimaltenango, Chiquimula, El Petén, El Progreso, El Quiché, Escuintla, Guatemala, Huehuetenango, Izabal, Jalapa, Jutiapa, Quetzaltenango, Retalhuleu, Sacatepéquez, San Marcos, Santa Rosa, Sololá, Suchitepequez, Totonicapán et Zacapa  (voir la carte du Guatemala).

La plus grande ville du pays est Guatemala (Ciudad), avec une population dépassant les 2,3 millions d’habitants. Les autres villes les plus importantes sont Quezaltenango (103 631 habitants), le centre commercial et industriel, Puerto Barrios (39 379 habitants), le principal port de la mer de la côte ouest, puis Mazatenango et Antigua.

Le nom de Guatemala viendrait du mot nahuatl Coactlmoctl-lan, qui signifie «le pays de l'oiseau qui mange des serpents». La monnaie nationale du Guatemala est le quetzal, un magnifique oiseau sacré chez les Aztèques qui utilisaient les longues plumes de sa queue pour faire des objets de luxe.

2 Données démolinguistiques

Bien que le Guatemala ne compte que 12,5 millions d’habitants, c’est l’un des pays les plus peuplés d'Amérique centrale, soit une densité de 119 habitants au km². Mais la population est inégalement répartie sur le territoire. Les terres du Nord sont très peu peuplées et la majorité des habitants est concentrée sur les hautes terres de l'Ouest et du Centre.

2.1 Les groupes ethniques

En août 1994, la COPREDEH, la Commission présidentielle de coordination de la politique du pouvoir exécutif en matière de droits de l'homme (Comisión Presidencial Coordinadora de la Política del Ejecutivo en Materia de Derechos Humanos), publiait un document sur les populations autochtones du Guatemala. Cette commission indiquait que, selon les résultats du recensement de 1989, la population du Guatemala était de 8,6 millions d’habitants (elle était estimée à 10,8 millions en 1998). La population autochtone était, pour sa part, évaluée à 5,4 millions d’habitants, soit 59 % de la population totale.

Mais le recensement de 2002 signalait que le Guatemala est composée de quatre «peuples» ou communautés ethniques: les Ladinos, les Mayas, les Garifuna et les Xinka. Les Ladinos sont les descendants des colons espagnols arrivés au XVIe siècle, même si la majorité des Ladinos sont des Métis hispanophones; ils forment aujourd'hui 60 % de la population (4,4 millions d'individus). Les Mayas constitue le second peuple en importance au point de vue démographique, car il représente 39,26 % de la population (2,8 millions). Suivent les Xinka avec 16 224 membres (0,14 % de la population). Enfin, les Garifuna, présents sur toute la côte caribéenne de l'Amérique centrale, depuis le Nicaragua jusqu'au Guatemala, en passant par le Honduras et le Belize, ne représentent que 0,04 % des Guatémaltèques, soit 5040 individus.

On croit aujourd’hui que près de 55 % des Guatémaltèques sont des «Indiens» descendants des Mayas; on compte 44 % de Métis (les «Ladinos») et 1 % de Blancs. Les locuteurs de l’espagnol comme langue maternelle sont minoritaires au Guatemala: ils forment 42,5 % de la population. Toutefois, l’espagnol est toujours la langue officielle et la langue de l’État. Dans les écoles, les centres de services sociaux et services de santé, les bureaux, etc., la langue espagnole s’impose partout.

2.2 Les langues

D'après l'Instituto Nacional de Estadística de 2002 (Censo Nacional XI de población, INE), 68,9 % de la population parle l'espagnol. Il s'agit en fait de l'«espagnol guatémaltèque» («español guatemalteco»), c'est-à-dire un espagnol local, comme on en trouve un peu partout en Amérique latine: español argentino, español boliviano, español chileno, español colombiano, español costarricense, español cubano, español ecuatoriano, español hondureño, español mexicano, español nicaragüense, español panameño, español paraguayo, español peruano, español venezolano, español uruguayo, español salvadoreño, etc.). Au Guatemala, c'est une variété d'espagnol qui demeure tout de même assez près de l'espagnol standard, mais avec des différences lexicales (cf. des emprunts aux langues mayas) et phonétiques.

Selon l’Académie des langues mayas du Guatemala, il existe 21 langues mayas officiellement recensées et, en vertu d’un décret gouvernemental du 23 novembre 1987, chacune de ces langues dispose d’un alphabet officiel. La langue maya constitue en fait une famille linguistique comptant une trentaine de variétés linguistiques parlées dans une grande partie du Guatemala, mais aussi au Mexique (dans les États du Veracruz, du Yucatán, du Campeche, du Tabasco et du Chiapas) et dans certaines régions du Belize, du Honduras et du Salvador. Les Mayas de la péninsule du Yucatán formaient le principal peuple de ce groupe, auquel ils donnèrent leur nom; les autres, d'importance politique moindre, étaient les Huaxtèques du nord de Veracruz, les Tzentals de Tabasco et du Chiapas, les Chols également du Chiapas, les Quichés, les Cakchiquels, les Pokonchis et les Pokomams des hauts plateaux du Guatemala, ainsi que les Chortis de l'est du Guatemala et de l'ouest du Honduras. Depuis la conquête espagnole, beaucoup de tentatives ont été faites pour supprimer les langues mayas, mais celles-ci semblent connaître un certain essor, quoique bien limitée.

La plupart des Mayas du Guatemala (Chujs, Kakchikes, Quichés, etc.) vivent dans des villages dispersés au milieu des régions montagneuses de l’Ouest. Les autochtones sont concentrés dans cinq départements des montagne du Sud, où ils composent bien 90 % de la population. Près de trois millions d'habitants, soit 32 % du total, communiquaient au sein de leurs groupes respectifs dans l'une des langues autochtones, soit 29 % en quiché, 25 % en kakchiquel, 14 % en kekchí, 4 % en mam, et les 28 % restants, dans d’autres langues telles que le pocomchí, le pocomam, le tzutuhil, le chortí, le canjobal, l'aguacateco et le maya. Le document de la Commission présidentielle de coordination de la politique du pouvoir exécutif en matière de droits de l'homme (COPREDEH) révélait aussi qu’il existait dans certaines régions du pays des pourcentages élevés d'autochtones utilisant une seule langue:

- dans la région nord: Alta Verapaz, 95 %;
- dans la région sud-ouest: Sololá, 85 %; Totonicapán, 85 %; San Marcos, 80 %;
- dans la région nord-ouest: Quiché, 80 %; Huehuetenango, 85 %.

De leur côté, les organisations mayas estiment qu'il existe 20 communautés linguistiques dans le pays et que le quiché est parlé dans 75 municipalités, le mam dans 56, le kakchiquel dans 49 et le kekchí dans 23. Cependant, ce sont les citoyens les plus pauvres du pays, alors que le Guatemala reste le pays le plus pauvre de l’Amérique du Sud après Haïti. Bref, les descendants de l’antique empire maya vivent aujourd’hui dans la misère. 

Après le recensement de 2002, le gouvernement guatémaltèque a publié la répartition des langues employées dans le pays. Voici le résultat de l'Instituto Nacional de Estadística de 2002 (Censo Nacional XI de población y VI de habitación, INE):

  Langue Locuteurs Proportion

1

achi  82 640 0,8%
2 akateko  35 763 0,3%
3 awakateco    9 613 0,1%
4 ch´orti´ (chorti)  11 734 0,1%
5 chuj  59 048 0,6%
6 itza     1 094 0,0%
7 ixil  83 574 0,8%
8 jakalteco  34 038 0,3%
9 kaqchikel 444 954 4,3%
10 k´iche´ (quiché) 890 596 8,7%
11 mam 477 717 4,6%
12 mopan    2 455 0,0%
13 poqomam  11 273 0,1%
14 poqomchi  92 941 0,9%
15 q´anjob´al 139 830 1,4%
16 q´eqchi´ (quechi) 716 101 7,0%
17 sakapulteko     6 973 0,1%
18 sipakapense     5 687 0,1%
19 tekiteko     1 144 0,0%
20 tz´utujil (tzutujil)   63 237 0,6%
21 uspanteko     3 971 0,0%
22 xinka     1 283 0,0%
23 garifuna     3 564 0,0%
24 ladino 0 0,0%
25 espagnol 7 080 909 68,9%
26 aucune de ces langues 0 0,0%
27 Autres langues      23 248 0,2%

À la lumière de ces statistiques, seules quelques langues sont parlées par plus de 50 000 locuteurs: le k´iche´, le q´eqchi´, le mam, le kaqchikel, le q´anjob´al, le poqomchi, le chuj et l'achi.

3 Données historiques

Ixchel, dieu de la Lune Le Guatemala fut le siège de l'Empire maya (de 1500 avant notre ère à 250 de notre ère). Cette civilisation se développa dans les basses terres tropicales du Petén, au nord de l’actuel Guatemala. Son apogée se situa entre le VIIIe et le IXe siècle. La ville de Tikal, la capitale maya, comptait alors 45 000 habitants; les autres cités importantes sont El Mirador, Palenque, Copán, Tonina et Bonampak. Après l’an 900, ce fut la période de déclin: les Mayas abandonnèrent la forêt pour fonder, sous la domination des Aztèques (Toltèques) venus du Nord, une nouvelle civilisation qui s’implanta essentiellement sur la presqu’île du Yucatan au Mexique (Chichen Itza et Uxmal).

Le territoire habité par les Mayas occupait 400 000 km² (voir la carte maya); il correspondait à la partie sud du Mexique (Yucatan), ainsi que le Guatemala, le Belize et une partie du Honduras et du Salvador. Les Mayas étaient ainsi éparpillés dans des cités-États (Tikal, Palenque, Uxmal, Copan, etc.) dominées par de gigantesques pyramides. Ce qu’on appelle l’empire maya n’a jamais existé: chacune des cités-États formait un petit royaume en soi, lesquelles se faisaient souvent la guerre.

Les moeurs, les coutumes sociales, les rites religieux et les langues se ressemblaient, mais ne formaient aucune unité. Cet éparpillement à la fois géographique et social a favorisé la fragmentation linguistique, alors que les langues proviennent toutes d’une même souche. Ces langues ont tellement évolué différemment que leurs locuteurs aujourd’hui (environ deux millions) ne peuvent plus se comprendre entre eux. Les Mayas avaient développé une écriture complexe, à la fois idéographique (symboles exprimant une idée) et phonétique (symboles représentant des sons), avec des variantes régionales qui compliquent le décryptage (encore mal résolu).

3.1 Les Espagnols

En 1523, un des lieutenants d'Hernan Cortés, Pedro de Alvarado, surnommé Tonatiuh par les autochtones, pénétra au Guatemala, le pays maya par excellence, c’est-à-dire le pays du quetzal, l’oiseau sacré des Mayas. 

Le lieutenant Alvarado vainquit facilement les Mayas qui, déjà divisés entre eux et considérablement affaiblis, étaient rassemblés sur les hauts plateaux de l’Ouest. La première capitale coloniale du pays, Santiago el Mayor, fut fondée en 1527.

En 1542, les Espagnols créèrent la Audiencia y Capitanía General de Guatemala («Audience et Capitainerie générale du Guatemala») qui dépendait de la vice-royauté du Mexique et comprenait sept provinces: le Soconusco, le Chiapa, le Verapaz, le Guatemala, le Honduras, le Nicaragua et le Costa Rica.

Étant devenu le siège de l’Audience et Capitainerie générale du Guatemala en 1554, le Guatemala gouverna toute l’Amérique centrale, à l’exception de Panama. Les populations indiennes, qui vivaient de l’agriculture, restèrent isolées, tandis qu’une riche aristocratie terrienne se constituait. Après que l'ancienne capitale Antigua ait été détruite par un tremblement de terre (1773), la nouvelle capitale, Ciudad de Guatemala, fut fondée en 1776 et dotée d'une université dès cette époque. 

3.2 Les tentatives d’Union

En 1821, le Guatemala accéda à l’indépendance, pour être aussitôt incorporé à l’empire mexicain d’Iturbide, dont il se détacha en 1823 pour former, le 1er juillet de la même année, une république fédérative indépendante portant le nom de Provincias Unidas del centro America (Provinces-Unies d'Amérique centrale, de 1823 à 1839) et comprenant les États du Guatemala, du Honduras, du Nicaragua, du Salvador et de Costa Rica. Les dissensions entre deux factions politiques — les libéraux et les conservateurs — apparurent peu après et chacune voulut prendre le contrôle du gouvernement récemment formé. 

Des guerres éclatèrent entre les États de la fédération et les factions rivales. Puis le pays se disloqua en 1839 pour former cinq nouveaux États indépendants: le Guatemala, le Salvador, le Honduras, le Nicaragua et le Costa Rica.

3.3 De dictature en dictature

Dès lors, le Guatemala vit se succéder une série de dictatures militaires. Ce fut d’abord celle de Justo Rufino Barrios (1873-1885) qui, en despote éclairé, s’attaqua à l’aristocratie et au clergé afin de stimuler l’agriculture. Mais il échoua, ce qui le força à ouvrir son pays à l’influence étrangère et surtout aux compagnies fruitières des États-Unis et, par voie de conséquence, à l'ingérence politique et à la corruption, au détriment de toutes tentatives de réformes (surtout agraires). Le pays resta toujours marqué par ces rapports sociaux capitalistes fondés sur une main-d’oeuvre indigène trop peu coûteuse et favorisant l’exportation du café à bas prix.

Au début du XXe siècle, la dictature de Manuel Estrada Cabrera (1898-1920) réussit à se maintenir longtemps au pouvoir au moyen de plébiscites frauduleux. Rompant avec la monoculture caféière, Estrada Cabrera octroya des concessions sans conditions à des entreprises bananières et ferroviaires étrangères (américaines), inaugurant le règne omnipotent de la United Fruit Compagny, immortalisée sous le nom de la «pieuvre verte» par le poète guatémaltèque Miguel Angel Asturias. Les masses indigènes continuèrent d’être exploitées, tandis que les conflits internes minaient le régime. La crise culmina en 1920 avec la «semaine tragique» entraînant la chute d’Estrada Cabrera après vingt ans de dictature.

Après une série de coups d’État, le général Jorge Ubico Castañeda (1931-1944) fut élu président; il instaura, lui aussi, une régime autoritaire fondé sur un parti unique et étroitement lié aux États-Unis. Il fut enfin chassé du pouvoir en 1944 par un coup d’État, qui ouvrit la voie au premier régime démocratique de l’histoire du pays. Le président Juan José Arevalo (1945-1951), élu avec 86 % des voix, accorda le droit de vote aux analphabètes et aux femmes, la liberté de presse et l’autonomie municipale; mais il dût, au cours de son mandat, faire face à 28 tentatives de coup d'État. Son successeur, le colonel Jacobo Arbenz Guzmán (1951-1954), un progressiste, amorça une profonde réforme agraire dans un pays où 2 % des propriétaires accaparait alors 70 % des terres cultivables; il expropria la United Fruit Compagny et stimula la concurrence privée en matière de concessions ferroviaires. Mal lui en prit, car ayant osé léser les intérêts américains — la United Fruit n'ayant pas accepté de se voir enlever 84 000 hectares de terres en friche —, le colonel Arbenz Guzmán fut renversé en 1954 avec l’aide de la CIA et remplacé par le colonel Carlos Castillo Armas, un homme de mains des Américains. Celui-ci instaura un régime de terreur systématique, contre tous ceux qui s’opposèrent à lui; il frappa en particulier les populations indigènes et de nombreux villages mayas furent bombardés par l’armée. Castillo Armas fut assassiné en 1957.

Dès lors, le pays fut ébranlé par une succession de nouveaux coups d’État militaires, et maintenu dans un climat de terreur par d’innombrables assassinats. Le Guatemala connut ensuite des guerres civiles à répétition, soit jusqu’en 1985. Cette année-là, le pays connut un retour à la démocratie avec l'élection de Vinicio Cerezo. Mais les guerres se perpétuèrent de 1986 à1991, puis de 1991 à1993. Durant toutes ces décennies, une guérilla pourvue de faibles moyens, l’Union nationale révolutionnaire guatémaltèque (UNRG), s’opposa aux forces gouvernementales assistées militairement par les États-Unis, ce qui entraîna des opérations génocidaires contre les populations indiennes soupçonnées de collaboration avec l’UNRG, des innombrables tortures et de nombreuses disparitions. On comprendra que de tels régimes ne favorisent aucunement les droits des peuples autochtones, encore moins leurs langues.

De fait, les Mayas écopèrent, car les forces gouvernementales les combattirent par les armes; il est vrai que l’UNRG recrutait surtout au sein de la population indienne des hauts plateaux de l’Altiplano (à l’ouest, dans la cordillères des Andes guatémaltèques où habitent les Quiché, Cakchiquel, Mam, Kekchi, etc.). La guerre civile fit au moins 100 000 victimes (on parle aussi de 200 000 morts), surtout parmi les pauvres paysans mayas, sans oublier les 50 000 blessés, le million de déplacements internes et environ 100 000 autres qui trouvèrent refuge au Mexique. 

La lutte des Mayas pour leur liberté fut reconnue par la communauté internationale lors de l’attribution du prix Nobel de la paix, en 1992, à une Indienne maya quiché de 33 ans, Rigoberta Menchú, qui n’a appris l’espagnol qu’à l’âge de 20 ans. Elle se fit la porte-parole des Indiens opprimés de son pays, mais dut s’exiler au Mexique en 1981 pour fuir le répression militaire. Elle milita activement dans un groupe de défense des droits humains au Mexique et s’employa à exercer des pressions sur son gouvernement en donnant de nombreuses conférences aux États-Unis et en Europe.

3.4 Vers un régime démocratique

Le Guatemala s’achemina vers un changement de Constitution amorcé avec le président Ramiro de Léon Carpio, en 1994. En 1996, l’élection du président Avaro Arzu semble avoir marqué le début d’une nouvelle ère. Malgré des pressions de l’armée, la paix a finalement été signée entre le gouvernement et les rebelles de l’UNGR (Unidad Revolucionaria Nacional Guatemalteca: l’Union révolutionnaire nationale guatémaltèque). Avant l’Accord de paix ferme et durable signé le 29 décembre 1996, les parties — le gouvernement et l’UNRG — ont signé six accords de paix visant à résoudre les problématiques qui ont entraîné la guerre: Accord global sur les droits de l’homme (29-03-94), Accord pour la réintégration des populations déracinées par l’affrontement interne (17-06-94), Accord sur l’établissement d’une Commission pour l’éclaircissement historique des violations des droits de l’homme et des faits de violence ayant causé des dommages à la population guatémaltèque (21-06-94), Accord sur l’identité et les droits des peuples indigènes (31-03-95), Accords sur les aspects socio-économiques et la réforme agraire (06-05-96), Accords sur le renforcement du pouvoir civil et le rôle des forces armées dans une société démocratique (19-09-96).

L’État guatémaltèque a depuis reconnu le caractère «multiethnique et multilingue» de la nation et a rompu pour la première fois avec les pratiques ségrégationnistes héritées de l’époque coloniale. Avec la signature de l’Accord de paix ferme et durable, un plan de retour des réfugiés a été organisé sous le contrôle du Haut-Commissariat aux réfugiés. Des milliers de combattants ont été désarmés au cours de l’année 1997, mais de nombreux problèmes sont restés en suspens, tels que l’analphabétisme, le statut des communautés indiennes, l’inégale répartition des terres, la délinquance, la criminalité, etc., sans compter que les crimes commis durant la guerre civile ont toutes les chances de demeurer impunis. Les négociations avec la guérilla ont repris après 1997. Malheureusement, malgré la signature des accords de paix de 1996, qui a mis fin à plus de trente-six ans de guerre civile, le Guatemala demeure aujourd’hui un pays divisé et marqué par la violence. Les groupes de vigilance sociale rapportent encore des cas de violations des droits de la personne, dont les meurtres perpétrés par les escadrons de la mort sur les enfants sans abri, la torture, le viol et les assassinats de fermiers et d'activistes. Bref, bien que les représentants du peuple aient été démocratiquement élus, le Guatemala demeure toujours une démocratie déficiente.

4 Les dispositions constitutionnelles

La Constitution du Guatemala date de 1985, mais elle a été modifiée le 17 novembre 1993. Seuls cinq articles concernent la langue. La Constitution de 1993 fait du Guatemala une nation «multiethnique, multiculturelle, multilingue». C’est l’article 143 (Idioma oficial) du Titre III qui proclame l’espagnol en tant que langue officielle de la République:

Article 143

Languie officielle

La langue officielle du Guatemala est l'espagnol. Les langues vernaculaires font partie du patrimoine culturel de la nation.

Cette disposition signifie que seul l'espagnol bénéficie du statut de «langue officielle», les «langues vernaculaires» ne faisant partie que du «patrimoine culturel de la nation». Une telle mesure laisse beaucoup de place à l'interprétation et, surtout, elle demeure vague dans ses implications. Dans la section II (Cultura), l’article 58 de la Constitution traite de l’«identité culturelle» des «personnes» et des «communautés»:

Article 58

Identité culturelle

Il est reconnu aux personnes et aux communautés le droit à leur identité culturelle en accord avec leurs valeurs, leur langue et leurs coutumes.

Cette disposition étant tout aussi vague, c’est pourquoi l’article 66 de la section III de la Constitution précise ce qui suit au sujet de la protection des groupes ethniques (Protección a grupos étnicos):

Article 66

Protection des groupes ethniques

Le Guatemala est constitué de divers groupes ethniques parmi lesquels figurent les groupes indigènes d'ascendance maya. L'État reconnaît, respecte et promeut leurs formes de vie, leurs coutumes, leurs traditions, leurs formes d'organisation sociale, l'usage du costume indigène pour les hommes et les femmes, leur langue et leur dialecte.

Le statut inférieur des «langues vernaculaires» oblige le législateur à promouvoir les langues des «groupes ethniques». L'article 18 du Titre VIII, intitulé Dispositions transitoires et finales, précise que la Constitution devra être rédigée dans quatre langues mayas:

Article 18

Diffusion de la Constitution

Dans l'année qui suivra son entrée en vigueur, la présente Constitution sera amplement diffusée dans les langues quiché, mam, cakchiquel et kekchi.

Comme toujours, il s'agit de vérifier comment ces dispositions se transposent dans la réalité. La plupart des dispositions constitutionnelles concernant les autochtones renvoient à une loi qui n'a jamais encore été adoptée. Beaucoup d'observateurs croient que ces dispositions n'étaient qu'un «symbole paternaliste» de la part du gouvernement pour se donner bonne conscience. Rien depuis 1985 n'a amélioré considérablement les conditions de vie des autochtones. 

Après une première tentative d'officialisation des langues indigènes en 1998, laquelle ne s'est jamais matérialisée, une nouvelle loi fut adoptée en 2003, la Ley de Idiomas Nacionales (Loi sur les langues nationales). Elle accorde aux locuteurs des langues indigènes les droits ancestraux perdus. La loi de 2003 ne fait pas des langues indigènes des langues «officielles» au même titre que l'espagnol, mais elle concède aux langues maya, garifuna et xinka le statut de langues «nationales» (lenguas nacionales). En principe, la loi doit s'appliquer à toutes les langues nationales, soit un total de 24 langues reconnues.

Cependant, la loi n'est pas encore appliquée, notamment parce que le règlement prévu dans la loi à cet effet n'a jamais été adopté. En août 2009, le ministre guatémaltèque de la Culture et des Sports a annoncé l'adoption du projet de règlement à ce sujet. Ce règlement obligerait les administrations gouvernementales à respecter, promouvoir et employer les langues nationales dans le but de maintenir la nature multi-ethnique, multiculturelle et multilingue du pays. Le même règlement prévoit la création du Secretaría de Pueblos Indígenas de la Presidencia (SEPEDI), c'est-à-dire le Secrétariat des peuples indigènes de la Présidence, qui aurait pour mandat de concevoir, mettre en œuvre, contrôler et évaluer les politiques publiques pour qu'elles correspondent à la nature multi-ethnique, multiculturelle et multilingue du pays.

Malheureusement, beaucoup de Guatémaltèques hispanophones continuent de mépriser les langues indigènes du Guatemala en affirmant que ce sont des «dialectes» («dialectos»), alors qu'ils ignorent que leur propre langue, l'«espagnol guatémaltèque» («español guatemalteco»), est considéré par les linguistes comme un «dialecte de l'espagnol standard». Au Guatemala, il existe 157 municipalités comptant plus de 80 % d'indigènes, lesquels souffrent quotidiennement des préjugés historiques et discriminatoires de la part des unilingues hispanophones qui ignorent la valeur culturelle de ces langues et conçoivent leur apprentissage comme un «retard» («atraso») au point de vue social.

5 La politique linguistique

Le Guatemala n’a pas vraiment de politique linguistique à l’égard de l’espagnol. Il lui suffit de laisser aller les choses, ce qui favorise nécessairement la langue officielle, l’une des deux langues importantes du continent (avec le portugais au Brésil). Par contre, le gouvernement guatémaltèque a commencé à élaborer une politique linguistique d’envergure à l’égard des langues indigènes. Il s’agit, comme on le verra, d’une politique du statut différencié, laquelle promeut et protège en principe les langues des communautés ethniques, mais ne les place jamais sur le même pied que l’espagnol. Même si les instruments juridiques dont s’est doté le Guatemala sont presque impressionnants, il n’en demeure pas moins que la plus grande partie de cette politique reste à se concrétiser, et les embûches sont partout présents.

4.1 L’appareil de l’État

Étant donné le statut privilégié de l’espagnol en tant que langue officielle du Guatemala, il faut s’attendre à ce que cette langue soit présente dans tous les organismes de l’appareil de l’État. Il en est ainsi au Parlement où seul l’espagnol est utilisé, tant dans les débats que dans la rédaction des lois. L'article 9 de la Loi sur les langues nationales adoptée en 2003 oblige (en principe) la traduction et la diffusion des lois, instructions, avis, dispositions, résolutions et décrets de toute nature dans les langues maya, garifuna et xinka:

Article 9

Traduction et diffusion

Les lois, instructions, avis, dispositions, résolutions et décrets de toute nature doivent être traduits et diffusés dans les langues maya, garifuna et xinka, en accord avec leur communauté ou région linguistique, par l'intermédiaire de l'Académie des langues mayas du Guatemala.

Dans les faits, ces traductions apparaissent comme des exceptions, comme ce fut la cas pour la Constitution, la Loi sur l’alphabétisation, la Loi sur l’éducation nationale, la Loi sur les langues nationales, etc., qui sont traduites en quatre langue mayas (quiché, mam, cakchiquel et kekchi). Cependant, ces textes n’ont aucune valeur juridique, ce sont de simples traductions. Seule la version espagnole fait foi.

La loi électorale en vigueur ne donne aucune possibilité aux représentants mayas de se faire élire en tant que Mayas. La Commission présidentielle de coordination de la politique du pouvoir exécutif en matière de droits de l'homme (COPREDEH) signalait que, lors des élections législatives de 1994, seulement huit des 116 députés du Congrès représentaient la population autochtone et que, sur les 330 municipalités, 97 étaient dirigées par des autochtones. En fait, ces personnes ont été élues en tant que représentantes soit du Front révolutionnaire guatémaltèque, soit du Parti pour le progrès national, non en tant que Mayas. Or, tous alignent leurs décisions sur celles des partis qui les ont élus, ce qui ne correspond pas nécessairement à la position des Mayas.

4.2 Les tribunaux

En matière de justice, l’espagnol reste la langue des tribunaux, mais des interprètes sont en principe prévus pour les cas de force majeure. L'article 142 du Code de procédure pénale (1992) prévoit plusieurs mesures à l'intention des justiciables qui ignorent la langue officielle.

Article 142

Langue


1) Les actes de procédure se déroulent en espagnol. Lorsqu'un individu s'exprime avec difficulté dans cette langue, l'aide nécessaire lui sera apportée pour que la procédure puisse se poursuivre.

2) La présentation d'individus ignorant la langue officielle ou à qui il a été permis de faire usage de leur langue maternelle, d'un sourd-muet ne sachant pas se faire comprendre par écrit, de documents ou d'enregistrements dans une langue différente ou dans une autre forme de transmission des connaissances, ne porteront effet qu'une fois effectuée la traduction ou l'interprétation, selon le cas.

3) Les actes de procédure doivent aussi se dérouler dans une langue indigène et traduits simultanément en espagnol. Dans ce cas, les actes et les comptes rendus doivent être rédigés dans les deux langues.

Dans les faits, les tribunaux ne fonctionnent pas très bien au chapitre des droits linguistiques et les autochtones sont généralement victimes de discrimination massive et systématique. Il est fréquent que les tribunaux manquent d’interprètes on ne compte qu'une quarantaine de traducteurs accrédités au ministère de la Justice et que les autorités judiciaires aient des comportements arbitraires, inéquitables et humiliants, ou qu’ils abusent de leurs pouvoirs. Autrement dit, les autochtones sont au préalable «coupables d’être autochtones», et ils sont victimes des «préjugés défavorables» à leur endroit de la part des Ladinos. Pire, l’accès à la justice est très difficile pour la plupart des autochtones, parce qu'ils manquent presque toujours de moyens financiers, qu’ils sont souvent analphabètes ou vivent dans une région trop éloignée pour avoir un accès immédiat auprès des autorités gouvernementales. C’est pourquoi les représentants des autochtones résument la situation en matière de justice par une formule du genre : «Il n'y a jamais de justice pour les autochtones.»

L'article 15 de la Loi sur les langues nationales prescrivait de faciliter l'accès aux services de santé, d'éducation, de la justice, et de la sécurité:

Article 15

Dans les services publics

Il convient de faciliter l'accès aux services de santé, d'éducation, de la justice, et de la sécurité comme des domaines prioritaires pour lesquels la population doit être informée et assurée de recevoir ces services dans la langue propre de chaque communauté linguistique, sans préjudice de l'introduction progressive des autres services, aux termes de la présente disposition.

Heureusement, le Secrétariat chargé des affaires autochtones a été créé au sein du Bureau du procureur général de la nation, lequel est appelé à s'occuper des problèmes juridiques des groupes ethniques. Le Bureau du procureur général a mis en place des mécanismes d'enseignement et d'apprentissage des langues autochtones à l'intention de tous les membres du personnel exerçant leurs activités dans les bureaux régionaux. On a aussi commencé à recruter du personnel connaissant les langues quiché et cakchiquel, afin de favoriser de meilleures communications et réduire les obstacles linguistiques limitant l'accès à la justice. Des traducteurs judiciaires ont suivi une formation et ont reçu un diplôme et des postes de traducteurs ont été créés dans quelques tribunaux. Le gouvernement a promis de former des juges bilingues pour desservir les régions habitées par les Mayas. Mais la situation tarde à changer.

4.3 Les services gouvernementaux

Dans les services gouvernementaux, les fonctionnaires n’utilisent généralement que la langue espagnole, car ils ignorent les langues autochtones, sauf lorsqu’ils sont eux-mêmes «indigènes» (ce qui est peu fréquent). En somme, les langues autochtones ne sont guère connues de la part des employés du gouvernement. De façon générale, il existe une tradition qui fait en sorte que les Mayas et autres indigènes sont perçus par les employés de l’État comme une «nuisance», c’est-à-dire des «Indiens» que certains croient aussi «stupides» qu’«arriérés». Plusieurs fonctionnaires ne voient même d’autre solution que l'extinction de la culture indigène pour unifier la nation. Dans les administrations municipales, les employés sont plus souples, mais ils ont, eux aussi, une nette tendance à exiger l’espagnol. Dans le passé, le recrutement militaire auprès des indigènes a souvent constitué des enlèvements de fait: des jeunes étaient littéralement pourchassés comme des criminels et transportés manu militari dans les baraques de l'armée. Le Guatemala revient de loin!

Par ailleurs, l'article 8 de la Loi sur les langues nationales précise que les langues maya, garifuna et xinka peuvent être utilisées sans restriction dans les communautés linguistiques concernées, dans toutes leurs manifestations, dans les domaines publics et privés:

Article 8

Usage

Sur le territoire guatémaltèque, les langues maya, garifuna et xinka peuvent être utilisés sans restriction dans les communautés linguistiques concernées, dans toutes leurs manifestations, dans les domaines publics et privés, les activités scolaires, universitaires, sociales, économiques, politiques et culturelles.

L'article 14 de la même loi énonce que l'État veille à ce que, dans la prestation des biens et services publics, on respecte la pratique de communiquer dans la langue propre de la communauté linguistique:
 

Article 14

Prestation de services

L'État veille à ce que, dans la prestation des biens et services publics, on respecte la pratique de communiquer dans la langue propre de la communauté linguistique, en encourageant à son tour cette pratique dans le domaine privé.

Il est vrai que la loi n'est pas encore appliquée! De plus, l'Accord sur l’identité et les droits des peuples indigènes (1995) — II - A.2-c — prévoyait que le gouvernement s'engageait à promouvoir l'usage des langues des peuples indigènes en vue de la prestation des services sociaux de l'État au plan communautaire:

c. Promouvoir l'usage des langues des peuples indigènes en vue de la prestation des services sociaux de l'État au plan communautaire;

La situation semble particulièrement préoccupante dans le domaine de la santé. Il est difficile de trouver du personnel médical qualifié et connaissant aussi une langue maya. Lorsqu'une municipalité réussit à attirer un médecin, il est improbable qu'elle le refusera sous prétexte qu'il ne parle que l'espagnol. Or, les barrières linguistiques mettent en danger la santé de milliers de locuteurs du maya, notamment les femmes qui refusent souvent des soins parce qu'elles craignent de ne pas se faire comprendre. Les Guatémaltèques hispanophones, pour leur part, ont le droit de recevoir des services de qualité dans leur langue.

Évidemment, il conviendrait de prendre des mesures de toute urgence afin d’intégrer dans la fonction publique des autochtones et mettre fin à l’exclusion systématique des autochtones à des postes politiques de niveau élevé. Il faudrait également embaucher, en nombre beaucoup plus grand, des autochtones non seulement dans l’administration publique, mais aussi dans la police civile nationale. Ce type de mesures améliorerait les relations entre l’État et les populations indigènes et, surtout, témoignerait de la volonté politique d’adapter l’État au caractère multi-ethnique, multiculturel et multilingue de la nation. Après tout, le gouvernement guatémaltèque a reconnu que les peuples autochtones avaient le droit «de fonder et de diriger leurs propres institutions et de contrôler leur propre développement». C'est ce que prévoyait l'article 25 de la Loi sur les langues nationales:

Article 25

Qualification linguistique

Par l'intermédiaire de ses organismes, et en coordination avec l'Académie des langues mayas du Guatemala, l'État du Guatemala doit assurer une formation linguistique au personnel qui offre un service public au sein des communautés linguistiques.

Le gouvernement a également promis que les autochtones seraient consultés sur les questions administratives qui les concernent et qu’une gestion des terres serait instituée afin de pouvoir gérer les terres ancestrales des Mayas.

4.4 L’éducation

Le système d'éducation du Guatemala est régi par la Constitution de 1993 et les lois scolaires. À l’article 76 de la section IV (Éducation), on peut lire cette disposition constitutionnelle:

Article 76

1) L'administration du système d'éducation est décentralisée et régionalisée.

2) Dans les écoles établies dans les zones où prédomine la population indigène, l'enseignement devra de préférence être dispensé sous forme bilingue.

Outre le fait que l’enseignement devra se donner de préférence sous forme bilingue, ces dispositions ne semblent pas particulièrement précises. La Loi sur l’éducation nationale (Ley de Educación Nacional) de 1991 (décret no 12-91), pour sa part, précise à l’article 1er que «l’éducation au Guatemala est fondée sur les principes suivants» [...], dont celui d'être «définie et [être] dispensée dans un environnement multilingue, multi-ethnique et multiculturelle en fonction des communautés qui en font partie». 

Article 1er

Principes


L'éducation au Guatemala est fondée sur les principes suivants :

1. Est un droit inhérent à la personne humaine et une obligation de l'État.
2. Est dans le respect ou la dignité de la personne humaine et la réalisation effective des droits de l'homme.
3. Considère l'élève comme le centre et l'objet du processus pédagogique.
4. Vise le développement et le perfectionnement intégral de l'être humain au moyen
d'un processus permanent et progressif.
5. Est un instrument qui contribue à la création d'une société juste et démocratique.
6. Est définie et est dispensée dans un environnement multilingue, multi-ethnique et multiculturel en fonction des communautés qui en font partie.
7. Est un processus scientifique, humaniste, critique, dynamique, participatif et transformateur.

Quant au Règlement de la Loi sur l'alphabétisation no 137-91, l’article 3, qui porte sur l’alphabétisation dans les «langues indigènes», déclare que «la population unilingue de langue indigène a le droit d'être alphabétisée dans sa langue maternelle». Par ailleurs, la population bilingue de langue indigène et de langue espagnole a la possibilité de choisir la langue dans laquelle elle souhaite être alphabétisée.

Article 3

Utilisation des langues indigènes dans l'alphabétisation

La population unilingue de langue indigène a le droit d'être alphabétisée dans sa langue maternelle. La population bilingue de langue indigène et de langue espagnole a la possibilité de choisir la langue dans laquelle elle souhaite être alphabétisée.

Article 35

Fonctions


Relève du Département juridique les fonctions suivantes :

b) Effectuer des recherches pour adapter la pédagogie de l'alphabétisation aux différentes caractéristiques culturelles et régionales du pays, afin de promouvoir la connaissance du pluralisme linguistique et la construction de l'identité nationale.

[...]

- L'alphabétisation

L'un des aspects importants des programmes d’éducation et de formation de base concerne l’alphabétisation. En 1986, au moment de l'adoption de la Loi sur l'alphabétisation (Ley de Alfabetización), le taux d'analphabétisme chez les individus âgés de plus de 15 ans dépassait 52 %. Plus de 23 % des analphabètes vivaient dans les zones urbaines et 77% dans les zones rurales. Dans la répartition des sexes, 44 % étaient des hommes, 56 %, des femmes. Il paraissait donc urgent d'intervenir. La Loi sur l'alphabétisation comporte 19 articles ainsi que plusieurs dispositions transitoires. Tous les analphabètes du pays sont tenus de suivre des cours d'alphabétisation s'ils répondent aux critères fixés pas le gouvernement:

Article 2

Sujets du processus d'alphabétisation


Est soumis du processus d'alphabétisation tout analphabète qui réside dans le pays et âgé de quinze ans et plus, en accord avec les priorités établies dans le règlement de la présente loi.

Selon le Règlement de la Loi sur l'alphabétisation (Reglamento de la Ley de Alfabetización) de 1991, les analphabètes âgés de 15 à 30 ans sont soumis en premier au «processus d'alphabétisation:

Article 2

Objectifs du processus d'alphabétisation


Sont soumises au processus d'alphabétisation les analphabètes résidant dans le pays, dont l'intérêt répond à l'ordre de priorité suivant:

1) les personnes âgées de 15 à 30 ans;
2) les personnes âgées de 31 à 45 ans;
3) les personnes âgées de 46 ans ou plus.

En vertu de l'article 3 du règlement, la population unilingue de langue indigène a le droit d'être alphabétisée dans sa langue maternelle; quant à la population bilingue de langue indigène et de langue espagnole, elle a la possibilité de choisir la langue dans laquelle elle souhaite être alphabétisée. L’alphabétisation y est actuellement dispensée en 15 langues locales. Selon les statistiques du ministère de l'Éducation nationale, le taux d'analphabétisme serait tombé à 43 % puis à 38 % depuis 1996, ce qui a permis d'accroître le nombre d'habitants alphabétisés pour participer aux activités sociales, de défendre leurs droits et ne pas être victimes de discrimination dans la vie socio-économique de tous les jours.

Le Guatemala déclare se trouver aujourd'hui dans une phase de «post-alphabétisation» dont l’enjeu est de consolider, d’entretenir et de perfectionner les acquis de l’alphabétisation. Le ministère guatémaltèque de l’Éducation nationale gouvernement considère la post-alphabétisation bilingue comme une partie essentielle de l’éducation de base des adultes.

- La politique d’éducation interculturelle bilingue

De plus en plus, le gouvernement applique une politique d’éducation bilingue connue sous l'appellation de NEUBI: Nuevo Escuela Unitaria Bilingüe Intercultural (ou nouvelle éducation interculturelle bilingue unitaire). L'ancien programme de castillanisation, qui consistait à assimiler les langues mayas et les remplacer par l’espagnol, a été substitué progressivement par un programme d’éducation bilingue. L’instruction est dans un premier temps donnée dans la langue maternelle de l’élève, puis l’espagnol est introduit progressivement comme langue seconde. L’objectif est de passer entièrement à la langue seconde une fois rendu au secondaire. Selon la responsable adjointe de l'éducation pour l'UNICEF-Guatemala, Mme Ana Maria Sanchez: «Plusieurs études ont prouvé qu'un enfant développe une plus grande intelligence, des meilleures capacités de toutes sortes s'il apprend dans sa langue maternelle. Ceci est très lié à l'idée du droit des enfants. L'enfant a le droit d'utiliser sa propre langue pour apprendre et le droit de se développer dans le cadre de sa propre culture.» L'UNICEF et d'autres organismes affirment que l'éducation interculturelle bilingue, combinée aux efforts d'enseignants dévoués, peut assurer une fréquentation scolaire plus prolongée pour les filles et les garçons.

Le chapitre VI de la Loi sur l'éducation nationale porte exclusivement sur l'éducation bilingue:

CHAPITRE VI

Éducation bilingue

Article 56

Définition

L'éducation bilingue répond aux caractéristiques, aux besoins et aux intérêts du pays, dans les endroits façonnés par divers groupes ethniques et linguistiques, et elle est dispensée par l'intermédiaire de programmes dans les sous-systèmes d'enseignement et d'éducation parascolaire ou parallèle.

Article 57

Objectifs de l'éducation bilingue

L'éducation bilingue est dispensée pour affirmer et renforcer l'identité et les valeurs culturelles des communautés linguistiques.

Article 58

Prépondérance

L'éducation dans les langues nationales des zones avec une population indigène doit être prépondérante dans tous les niveaux et les domaines d'étude.

Quant à l'article 93 de la Loi sur l'éducation nationale, il précise que loi et son règlement doivent être traduits et diffusés au moins dans les quatre langues indigènes majoritaires du pays :
 

Article 93

Traduction de la loi et de son règlement


La présente loi et son règlement doivent être traduits et diffusés au moins dans les quatre langues indigènes majoritaires du pays : quiche, cackchiquel, kekchí et mam.

Dans l'Accord gouvernemental no 726-95 instituant la Direction générale de l'éducation bilingue interculturelle, l'article 4 définit ainsi les objectifs de l'éducation bilingue interculturelle:
 

Article 4

Les objectifs de l'éducation bilingue interculturelle sont :

a) Développer scientifiquement et techniquement l'éducation bilingue interculturelle pour la population scolaire du pays dans chacun des niveaux et des régions.

b) Renforcer l'identité des peuples qui forment le pays dans le cadre de leur langue et culture.

c) Développer, mettre en œuvre et évaluer le programme d'études de l'éducation bilingue interculturelle, en conformité avec les caractéristiques des communautés linguistiques.

d) Développer, consolider et préserver les langues maya, xinka et garifuna à travers les actions pédagogiques.

e) Développer un bilinguisme social stable pour la population estudiantine des locuteurs mayas et une coexistence harmonieuse entre les peuples et les cultures.

Le Guatemala reconnaît aussi la post-alphabétisation bilingue comme une partie essentielle de l’éducation des adultes. L’alphabétisation y est dispensée en quelque 15 langues locales. L’Académie des langues mayas poursuit l’objectif d’instaurer une langue maya normalisée en unifiant plusieurs langues locales et en interprétant les différentes significations linguistiques.

- Les problèmes

Cependant, beaucoup de Mayas ont dénoncé cette politique apparemment plus «moderne» et «politiquement correcte», où l'espagnol est ajouté aux langues autochtones. Ils croient qu’il s’agit d’une autre tentative, plus secrète celle-là, de remplacer le maya par l'espagnol et d’assimiler les enfants autochtones.

Effectivement, de graves problèmes semblent toucher le système d'éducation proposé aux indigènes. Dans la plupart des écoles destinées aux indigènes, on compte souvent au moins 60 élèves par classe contre 40 pour les Ladinos, ce qui explique en partie la dégradation de la qualité de l’enseignement et les taux élevés d’abandon scolaire. La moitié seulement des enseignants est d’origine indigène, et les manuels adaptés en langue indigène font cruellement défaut. De plus, il y a beaucoup d'enseignants qui ne sont pas favorables à cet enseignement bilingue, notamment à cause de la persistance des opinions discriminatoires considérant que l’espagnol est la langue d’une culture supérieure. Certains enseignants affirment avoir reçu des plaintes de parents leur rétorquant qu’ils envoyaient leurs enfants à l’école «pour y apprendre l’espagnol». Pour certaines familles, l’emploi, par exemple, de la langue cakchiquel (maya) en classe n’est pas une nécessité, car les enfants la connaissent déjà et que cet enseignement ne fait que les retarder dans leurs études. Le système actuel ne répond pas aux besoins des autochtones, parce que ce sont des programmes nationaux qui n’intègrent aucun élément de la culture indigène. Les élèves autochtones sont toujours tenus d'apprendre une autre langue que leur langue maternelle, ce qui n’est pas le cas des Ladinos. Autrement dit, les autochtones sont obligés de recevoir une instruction bilingue et de développer des habiletés de bilinguisme, alors que les Ladinos s’en tiennent à la seule langue espagnole. Quant aux fonctionnaires du gouvernement, ils estiment que l’alphabétisation en langue maternelle est prise au sérieux et généralisée, qu’elle accroît l’aptitude des individus à apprendre d’autres langues et qu’elle ne doit pas affaiblir le droit de choisir l’apprentissage d’une langue internationale (l’espagnol).

Les principaux obstacles à cette instruction bilingue sont importants. C'est d'abord la grande pauvreté qui frappe les populations indigènes, puis les difficultés d’accès à l'école de la part de ces populations, auxquelles s'ajoute le manque d’infrastructures. D'après le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), 51 % de la population guatémaltèque vit sous le seuil de pauvreté et 15,2 % dans une misère extrême, avec moins d’un dollar par jour. Parmi les plus démunis, on retrouve surtout des populations des zones rurales, des femmes et des communautés indigènes.

Il n’en demeure pas moins que tous ces problèmes sont quasi absents du Programme national d’autogestion éducative. Il semble que la situation soit due d’abord au manque d’appui du gouvernement guatémaltèque en cette matière, puis au nombre peu élevé d’écoles bilingues, à l’insuffisance des ressources humaines, la pénurie d’écoles normales bilingues pour former les professeurs et la diffusion insuffisante de manuels bilingues. Soulignons aussi que la plupart des autochtones n'ont qu'un accès encore fort limité à l'éducation. En effet, le gouvernement estime que l’analphabétisme était jusqu’en 1996 d’environ 60 % chez les Mayas et d’autres populations autochtones, mais dans beaucoup de régions l’analphabétisme atteignait 100 % de la population locale. En 2002, le taux d’analphabétisme chez les personnes âgées de plus de 15 ans s’élevait à 23,9 % pour les hommes et 38,8% pour les femmes, d’après les statistiques de l’ONU. Ce taux était nettement plus élevé dans la population autochtone. De fait, le taux d’analphabétisme pour l’ensemble des femmes autochtones variait entre 50 % et 90 % selon les départements. De façon générale, c’est dans les départements à plus forte concentration autochtone qu’on trouve les taux d’analphabétisme les plus élevés du pays.

Cependant, l’objectif visant à scolariser pendant au moins trois ans tous les enfants âgés de 7 à 12 ans d’ici à l’an 2000 n’a malheureusement pas été atteint; le taux de scolarisation au primaire n’a que fort peu augmenté depuis 1994. Le taux d’analphabétisme des populations autochtones demeure encore nettement supérieur à celui du reste de la population guatémaltèque. Les statistiques officielles les plus récentes (2002) estiment généralement que trois adultes sur dix sont analphabètes au Guatemala et que l’analphabétisme touche en majorité la population indigène. Enfin, peu de progrès semble avoir été réalisé en ce qui a trait aux autres engagements gouvernementaux, comme la mise en place d’un programme national d’instruction civique, l’éducation et la formation parascolaire, la formation des professeurs et des administrateurs, ainsi que la réforme des programmes scolaires.

Selon divers organismes internationaux, compte tenu de l’inertie traditionnelle et de la répression systématique du Guatemala en la matière, ce sont là des progrès remarquables, qui ne doivent pas nous faire oublier les graves lacunes du système. On ne passe pas de cinq siècles de répression à un État de droit en l’espace de quelques années. Concrètement, il n’existe encore aucune véritable politique officielle reconnaissant la composition multiethnique de la société guatémaltèque. La Constitution du pays proclame bien le droit à l'égalité (bien qu'irréelle), mais ne proclame guère le droit à la diversité ethnique. En termes juridiques, on peut affirmer que les autochtones n'existent pas! Le gouvernement continue d’être totalement centralisé, alors que toutes les décisions sont prises dans la capitale nationale pour le pays tout entier, ce qui inclut les diverses communautés ethniques.

Terminons en disant que le plus grave problèmes du Guatemala en matière d'éducation provient du maigre budget consacré à l'éducation. Dans la plupart des pays, les dépenses publiques en éducation varient autour de 5 % à 7 %, ce qui se vérifier dans un grand nombre d'États. Or, le budget affecté dans ce secteur se situe à moins de 2 % au Guatemala, comme aux Émirats arabes unis, en Guinée équatoriale, à Myanmar (Birmanie), en République Dominicaine et en Zambie.

- L’enseignement universitaire

Au Guatemala, comme d’ailleurs dans les autres pays d’Amérique centrale, les établissements d'enseignement supérieur ne répondent pas aux besoins des autochtones. Très peu d’autochtones fréquentent les universités; ils sont nettement sous-représentés dans la mesure où ils ne représentent que 20 % des étudiants, alors que les autochtones constituent 70 % de la population. Les universités ne dispensent pas d'enseignement en langue autochtone, ignorent les connaissances concernant les droits des autochtones et les droits de l'homme. Les programmes et les méthodes d'enseignement ne reflètent pas la conception de l'éducation que se font les autochtones, notamment au sujet de la place de la spiritualité, du respect dû aux anciens et à leurs connaissances, et au bien-être physique. La plupart de ces établissements ne proposent pas de cours favorisant une amélioration des conditions sociales et économiques des autochtones.

Pour beaucoup de leaders mayas, l'enseignement universitaire, tel qu’il s’est appliqué au Guatemala et continue de s’appliquer, contribue à l'aliénation des autochtones au sein de leur propre peuple et entraîne une fuite des cerveaux de leurs communautés respectives. Les peuples autochtones demandent qu'un équilibre soit établi dans l'enseignement des connaissances autochtones et celles des non-autochtones.

- De nouvelles stratégies en éducation

Heureusement, de nouvelles stratégies éducatives sont en train de voir le jour au Guatemala. Le système d’éducation a été étendu dans les zones urbaines marginales et rurales au moyen d’un «enseignement bilingue interculturel», ce qui a permis de scolariser 337 000 enfants de plus au niveau de la maternelle et du primaire bilingue et unilingue dans les zones urbaines et rurales. Le programme national d'éducation bilingue (PRONEBI) a été systématisé et doté d'un budget propre sous l'administration d'un personnel technique maya et ladino. Des mécanismes ont été établis pour donner la possibilité aux communautés mayas de participer à l’élaboration des programmes scolaires et au choix des enseignants affectés aux écoles communautaires. De concert avec l’UNICEF, le Fonds national pour la paix a contribué au financement, depuis 1995, de la construction de 279 écoles, de l'équipement de 378 établissements scolaires et de l'agrandissement de 104 autres ainsi qu'à la création de 795 postes d'enseignants en milieu rural. Le Programa de Educación Bilingüe Intercultural ou Programme national d'éducation bilingue intercuturel (PRONEBI) a aussi élaboré un programme pour établir un système permanent de formation d'enseignants bilingues, l'aménagement d'un processus de formation et de recyclage des enseignants et d’administrateurs chargés de l'enseignement bilingue, la mise au point et l'élaboration de matériel bilingue ainsi que l'accroissement du nombre de personnes scolarisées dans le cadre du programme général. Comme partout ailleurs en Amérique latine, l'éducation interculturelle se confine à l'intégration des communautés autochtones dans un environnement où l'espagnol est la langue commune de la vie publique. Il n'existe pas de réciprocité interculturelle!

De sont côté, l’Académie des langues mayas (ALM) poursuit l’objectif d’instaurer une langue maya universelle en unifiant plusieurs langues locales, et en interprétant les différentes significations linguistiques.

4.5 Les médias et la vie économique

Les autochtones sont complètement absents de la vie économique du Guatemala. Ils restent à l’écart de l’économie du pays et au moins 80 % d’entre eux vivent sous le seuil de la pauvreté. Dans ces conditions, les langues autochtones demeurent absentes du paysage.

Du côté des médias, la présente autochtone est encore bien faible, car l’espagnol est omniprésent, que ce soit dans la presse électronique ou écrite. Les représentants autochtones ont proposé au Parlement des modifications à la Loi sur les radiocommunications afin d'attribuer des fréquences à des projets autochtones. Des négociations entre le gouvernement et la Coordination des organisations du peuple maya du Guatemala (en esp.: la Coordinadora de Organizaciones del Pueblo Maya de Guatemala), la COPMAGUA, ont été entreprises pour attribuer des fréquences radio à des projets autochtones, mais ces négociations n’ont pas abouti. Le gouvernement a proposé de donner pendant quinze ans l’usufruit de cinq fréquences de modulation d’amplitude (AM) à un comité d’organisations de la société civile, qui comprendrait des organisations représentant des autochtones. Cette proposition fait actuellement l’objet de nouvelles négociations. En même temps, le maintien de l’attribution des fréquences radio par adjudication continue de susciter le mécontentement et la frustration des organisations autochtones, qui n’ont pas les moyens de les acquérir et se voient donc finalement privées d’un moyen fondamental d’expression, notamment dans les régions rurales.

Bien sûr, les stations religieuses du Guatemala ont fait un travail remarquable pour employer des langues indigènes. Mais certains autochtones estiment que leur culture et leur langue feraient réellement partie intégrante de société guatémaltèque si les langues autochtones étaient employées par les autres journalistes du pays.  En réalité, les stations de radio du gouvernement ignorent les langues indigènes. La station La Voz de Guatemala reste la radio officielle d'un gouvernement national qui ignore les langues maternelles de plus de la moitié de ses citoyens. 

Dans la presse écrite, des projets commencent à voir le jour afin de doter certaines communautés d’une presse autochtone. Les résultats sont médiocres ou se font attendre.

5 Une nouvelle approche

Dans les lignes qui précèdent, il est facile de voir que les problèmes liés aux droits autochtones sont loin d’être tous résolus. C’est le résultat de plusieurs siècles d’inertie, voire de répression. Afin de mette fin à cette situation que tous les observateurs ont qualifiée de scandaleuse, le gouvernement guatémaltèque devait changer de voix, en finir avec la dictature et s’ouvrir à la démocratisation. Le gouvernement a consenti à adopter une loi pour criminaliser la discrimination raciale et à abroger toute loi «qui pourrait avoir des implications discriminatoires pour les peuples autochtones». Le gouvernement a promis de promouvoir les droits des Indigènes par «l'éducation, les médias et d'autres moyens», en soutenant les organismes de défense des indigènes.

Rappelons que c’est en 1996, avec l’élection du président Avaro Arzu, qu’une nouvelle ère semble avoir commencé. Malgré des pressions de l’armée et après presque 40 ans de guerres civiles, la paix a finalement été signée entre le gouvernement et les rebelles de l’UNGR, l’Union révolutionnaire nationale guatémaltèque. Avant l’Accord de paix ferme et durable signé le 29 décembre 1996, les deux parties, le gouvernement et l’UNRG, ont signé, rappelons-le, six accords de paix visant à résoudre les problématiques qui ont entraîné la guerre:

- Accord global sur les droits de l’homme (29-03-94);
- Accord pour la réintégration des populations déracinées par l’affrontement interne (17-06-94);
- Accord sur l’établissement d’une Commission pour l’éclaircissement historique des violations des droits de l’homme et des faits de violence ayant causé des dommages à la population guatémaltèque (21-06-94);
- Accord sur l’identité et les droits des peuples indigènes (31-03-95);
- Accords sur les aspects socio-économiques et la réforme agraire (06-05-96);
- Accords sur le renforcement du pouvoir civil et le rôle des forces armées dans une société démocratique (19-09-96).

De plus, le Guatemala a ratifié, en juin 1996, la convention no 169, c’est–à-dire la Convention relative aux peuples indigènes et tribaux de l’Organisation internationale du travail (OIT), conformément à l'un de ses engagements pris en vertu de l'accord de paix. À la suite de cette ratification, l'OIT a dispensé au début de 1997, à la demande de l'ombudsman du Guatemala, une formation approfondie aux services du Bureau de l'ombudsman sur les incidences pratiques de la Convention.

De tous ces accords, trois méritent une attention particulière: l’Accord sur l’identité et les droits des peuples indigènes du 31 mars 1995, l’Accord de paix ferme et durable du 29 décembre 1996 et la Convention relative aux peuples indigènes et tribaux de l’OIT, ratifiée par le Guatemala le 5 juin 1996.

5.1 L’Accord sur l’identité et les droits des peuples indigènes

L’Accord sur l’identité et les droits des peuples indigènes (Acuerdo sobre identidad y Derechos de los Pueblos Indígenas) du 31 mars 1995 semble être l’un des plus novateurs en matière de protection des langues autochtones. C’est même tout un programme! Si toutes ces mesures étaient toutes mises en application, les autochtones du Guatemala obtiendraient une reconnaissance presque sans égal en Amérique latine.

En vertu de cet accord, le gouvernement guatémaltèque devait créer une Commission d'officialisation des langues autochtones, composée de représentants des communautés linguistiques et de l'Académie des langues mayas du Guatemala, laquelle étudiera les modalités d’application pour ce faire, en tenant compte de critères linguistiques et territoriaux (III-A.2-g).

g. Promouvoir l'officialisation des langues indigènes. À cet effet, une commission d'officialisation sera créée avec la participation des représentants des communautés linguistiques et de l'Académie des langues mayas du Guatemala, commission qui étudiera les modalités d'officialisation en tenant compte des critères linguistiques et territoriaux. Le gouvernement devra promouvoir devant le Congrès de la République une réforme de l'article 143 de la Constitution politique de la République en conformité avec les résultats de la Commission d'officialisation.

Cette commission a effectivement été créée et est devenue fonctionnelle. Elle a présenté son premier rapport au gouvernement, le 23 mars 1998. Pour sa part, l’Académie des langues mayas du Guatemala a élaboré un avant-projet de loi relative aux langues ayant pour objet de fixer les règles régissant l’usage des langues autochtones dans la vie du pays.

- L'officialisation des langues autochtones

Conformément aux résultats des travaux de la Commission d'officialisation des langues autochtones, l’État guatémaltèque s’engage à promouvoir, d’une part, l'emploi des langues autochtones dans la prestation des services sociaux publics au plan communautaire et, d’autre part, la formation de juges et d'interprètes bilingues dans les tribunaux. Ainsi, il faudra favoriser la formation de juges et d’interprètes judiciaires bilingues, mais aussi assurer l’information des populations dans leur langue respective, renforcer les instances telles que l’Académie des langues mayas et promouvoir l’officialisation des langues indigènes. La promotion des langues indigènes implique leur développement, leur pratique réelle, notamment dans le système éducatif «en faisant particulièrement la promotion de l’éducation bilingue et interculturelle et des instances telles que les écoles mayas et autres expériences éducatives indigènes».

Le rapport de la Commission d'officialisation des langues autochtones a recommandé de reconnaître trois catégories de langues. La première catégorie comprendrait des langues territoriales, définies comme celles comptant plus de 300 000 locuteurs et plus de 20 municipalités. Quatre langues se qualifieraient en vertu de ce critère: le mam, le kakchiquel, le quiché et le kekchi. Celles-ci bénéficieraient du statut de «langues officielles» partout dans les régions où elles sont parlées et elles seraient employée par les administrations municipales, les tribunaux, les cliniques médicales et les écoles.

La deuxième catégorie concernerait les langues des communautés, c’est-à-dire celles employées de façon importante dans des communautés particulières, mais qui ne correspondent pas aux critères relatifs aux «langues territoriales». Les «langues des communautés» ne seraient reconnues comme officielles que dans les villages où elles sont parlées. La Commission d'officialisation des langues autochtones a nommé 16 langues dans cette catégorie: le quanjobal, le tzutujil, le poqomchi, l’ixil, le poqomam, le chuj, le jakalteko, le chorti, l’achi, le sakapulteko, l’akateko, l’uspanteko, le mopan, le sipakapense, le tektiteko et le garí funa.

Enfin, les langues spéciales forment la troisième catégorie proposée par la Commission d'officialisation des langues autochtones. Ces langues ne comptent que deux langues en voie d’extinction: le xinca et l’itza. La Commission a recommandé qu'elles soient retenues et sauvegardées comme «faisant partie intégrante de l'héritage national».

La Commission d'officialisation des langues autochtones a également recommandé que le gouvernement promeuve le bilinguisme dans la population de langue espagnole et que la toponymie soit progressivement modifiée afin de refléter l'utilisation des langues indigènes.

L’État s’engage également à promouvoir l’emploi des langues autochtones et l’enseignement bilingue. Pour ce faire, il faudra décentraliser le système éducatif, accorder un rôle important aux parents pour définir les programmes et nommer les enseignants, former des maîtres bilingues et modifier les manuels scolaires, intégrer la culture maya dans l’enseignement, améliorer les conditions socio-économiques, créer une université maya et accorder des bourses d’étude aux étudiants, assurer un meilleur accès aux moyens de communication afin de diffuser le patrimoine culturel indigène (en langue indigène) et faciliter l’accès des populations indigènes à la radio pour qu’elle offre des émissions sur les cultures indigènes, et ce, dans leurs langues.

- L’autogestion

En vertu de cet accord, il est reconnu aux peuples autochtones le droit de contrôler et de concevoir leurs propres établissements d'enseignement supérieur et instituts de recherche, et de voir à ce que ces établissements soient reconnues et soutenues financièrement par l'État. D’ailleurs, la Convention relative aux peuples indigènes et tribaux de l’OIT reconnaît que les États dont relèvent les autochtones ont l'obligation de garantir la réalisation de ces droits. L’État devra créer une commission paritaire pour entreprendre une réforme de l'enseignement qui tienne compte de la diversité culturelle et ethnique du Guatemala; cette commission paritaire sera composée de représentants du gouvernement et des organisations autochtones.

Il faudra procéder de plus à «une régionalisation administrative» des services de l’éducation, de la santé, de la culture des peuples indigènes et leur participation à la gestion éducative et culturelle au plan local. L’accord reconnaît aux peuples maya, garifuna et xinca «le droit à la création et à la direction de leurs propres institutions, au contrôle de leur développement et à l’opportunité réelle d’exercer librement leurs droits politiques, en reconnaissant et rappelant également que le libre exercice de ces droits rendent valides leurs institutions et renforce l’unité de la nation.» Par ces moyens, on croit que les communautés indigènes pourront jouer un rôle primordial dans le cadre de l’«autonomie municipale» reconnue, afin que les peuples indigènes décident eux-mêmes des questions les concernant (éducation, santé, culture, infrastructures, etc.). Les affaires autochtones pourraient être réglées selon le droit coutumier et il en serait tenu compte dans le Code pénal qui devra être modifié. Il faudra former les juges à la connaissance de ce droit et promouvoir une aide juridique gratuite.

Les autochtones ont déjà fondé une Assemblée nationale permanente afin d’entreprendre une réforme en profondeur des lois guatémaltèques.

5.2 L’Accord de paix ferme et durable

L’Accord de paix ferme et durable signé le 29 décembre 1996 entre le gouvernement et l’Union révolutionnaire nationale guatémaltèque (UNRG) vise à résoudre en partie les problèmes entraînés par plusieurs décennies de guerres civiles. Il n’y a pas à proprement parler de dispositions concernant la langue dans cet accord. L’article 2 de l’accord engage l’État «à garantir et protéger le plein respect des droits de l’homme, tout comme sa volonté à les faire respecter». Le gouvernement de la République s’engage à assurer le retour des populations déplacées et leur réinstallation dans des conditions de dignité et de sécurité (art. 3). L’État guatémaltèque proclame à l’article 5 ce qui suit:

Artículo 5

El reconocimiento de la identidad y derechos de los pueblos indígenas es fundamental para la construcción de una nación de unidad nacional multiétnica, pluricultural y multilingüe. El respeto y ejercicio de los derechos políticos, culturales, económicos y espirituales de todos los guatemaltecos, es la base de una nueva convivencia que refleje la diversidad de su nación.

Article 5

La reconnaissance de l’identité et des droits des peuples indigènes est fondamentale pour la construction d’une nation d’unité nationale multiethnique, multiculturelle et multilingue. Le respect et l’exercice des droits politiques, culturels, économiques et spirituels de tous les guatémaltèques sont la base d’une nouvelle coexistence qui reflète la diversité de la Nation.

Il est reconnu aux peuples autochtones le droit effectif de participer pleinement dans tous les secteurs de la société. Dorénavant, la politique économique de l’État doit empêcher que se produisent des «processus d’exclusion socio-économiques», tels que le chômage et l’appauvrissement, et à «optimiser les bénéfices de l’accroissement économique pour tous les Guatémaltèques» (art. 8). Pour ce faire, l’élévation du niveau de vie, la santé, l’éducation, la sécurité sociale et la formation des habitants constituent les conditions fondamentales «pour accéder au développement durable du Guatemala».

On comprendra que l’État doive entreprendre toute une série de réformes dans tous les domaines et modifier une grande quantité de lois discriminatoires. En soi, la mise en œuvre de l’agenda national prévu par les Accords de paix constitue un projet de très grande envergure, qui requiert la participation des organismes de l’État et des diverses composantes sociales et politiques (art. 14). En somme, c’est encore tout un programme en perspective.

5.3 La Convention relative aux peuples indigènes et tribaux

Le gouvernement du Guatemala a signé la Convention relative aux peuples indigènes de l’Organisation internationale du travail (OIT); le Parlement l’a ratifiée le 5 juin 1996. Ce document d’une grande importante implique 14 États, dont en Amérique centrale le Guatemala, le Costa Rica, le Honduras et l’Équateur.

La Convention reconnaît aux peuples indigènes le droit de jouir pleinement des libertés fondamentales, sans entrave ni discrimination (art. 3). Les dispositions de cette convention doivent être appliquées sans discrimination aux femmes et aux hommes de ces peuples. Les gouvernements des États signataires doivent mettre en place des moyens par lesquels les peuples autochtones pourront, à égalité avec le reste de citoyens de leur pays, participer librement et à tous les niveaux à la prise de décisions dans les institutions électives et les organismes administratifs et autres qui sont responsables des politiques et des programmes qui les concernent (art. 6). L’article 7 reconnaît aux populations concernées le droit de contrôler leur développement économique, social et culturel propre. Les États doivent aussi tenir compte des coutumes et du droit coutumier de ces populations (art. 8). L’article 20 de la Convention oblige les gouvernements à «prendre des mesures spéciales pour assurer aux travailleurs appartenant à ces peuples une protection efficace en ce qui concerne le recrutement et les conditions d'emploi». Les gouvernements doivent faire tout ce qui est en leur pouvoir pour éviter toute discrimination entre les travailleurs appartenant aux peuples intéressés.

La partie VI de la Convention est consacrée à l’éducation, donc indirectement à la langue. L’article 26 est très clair sur la possibilité des autochtones d’acquérir leur instruction à tous les niveaux:

Article 26

Des mesures doivent être prises pour assurer aux membres des peuples intéressés la possibilité d'acquérir une éducation à tous les niveaux au moins sur un pied d'égalité avec le reste de la communauté nationale.

Le paragraphe 3 de l’article 27 reconnaît «le droit de ces peuples de créer leurs propres institutions et moyens d'éducation» et que des ressources appropriées leur soient fournies à cette fin. C’est l’article 28 qui semble le plus important en cette matière:

Article 27

1) Lorsque cela est réalisable, un enseignement doit être donné aux enfants des peuples intéressés pour leur apprendre à lire et à écrire dans leur propre langue indigène ou dans la langue qui est le plus communément utilisée par le groupe auquel ils appartiennent. Lorsque cela n'est pas réalisable, les autorités compétentes doivent entreprendre des consultations avec ces peuples en vue de l'adoption de mesures permettant d'atteindre cet objectif.

2) Des mesures adéquates doivent être prises pour assurer que ces peuples aient la possibilité d'atteindre la maîtrise de la langue nationale ou de l'une des langues officielles du pays.

3) Des dispositions doivent être prises pour sauvegarder les langues indigènes des peuples intéressés et en promouvoir le développement et la pratique.

Les États appuieront l'élaboration de programmes scolaires correspondant à la réalité des peuples autochtones et mobiliseront les ressources techniques et financières nécessaires à leur bonne application. Quant à l’article 31, il précise que «mesures de caractère éducatif doivent être prises dans tous les secteurs de la communauté nationale, et particulièrement dans ceux qui sont le plus directement en contact avec les peuples intéressés, afin d'éliminer les préjugés qu'ils pourraient nourrir à l'égard de ces peuples». Dans ces perspectives, il est précisé que «des efforts doivent être faits pour assurer que les livres d'histoire et autres matériels pédagogiques fournissent une description équitable, exacte et documentée des sociétés et cultures des peuples intéressés».

Comme il se doit, les États signataires de la Convention reconnaîtront et établiront des mécanismes pour assurer l'exercice de tous les droits des peuples autochtones, en particulier en ce qui concerne l'éducation, la langue et la culture.

La politique linguistique du Guatemala à l’égard des langues autochtones est toute récente; elle reste d’ailleurs pour l'essentiel à être mise en pratique. Les instruments juridiques dont disposent maintenant les autochtones guatémaltèques sont nombreux, l’Accord sur l’identité et les droits des peuples indigènes du 31 mars 1995 paraissant jusqu’ici le document le plus important sur les questions linguistiques. C’est vrai, la situation générale des populations autochtones guatémaltèques a considérablement changé: elle s'est nettement améliorée par rapport aux années précédentes. Il faut même reconnaître que de tels changements sont remarquables à tous égards.

Néanmoins, on ne se remet pas de quatre siècles de répression et de quarante ans de guerres civiles en quelques années. Les mentalités, tant de la part des Ladinos que des autochtones, n’ont pu suivre aussi rapidement. Les accusations d'incompétence et de corruption mettant en cause le gouvernement ont encore alimenté à plusieurs reprises des rumeurs de coup d'État au Guatemala. Tout cet édifice juridique pourrait s’écrouler advenant une autre guerre civile; il faudrait tout recommencer. Les Guatémaltèques ne sont pas encore au bout leur peines. Les violences à l'encontre de défenseurs des droits fondamentaux et de plusieurs journalistes se sont même multipliées depuis 1996. Les accusations de torture et les exécutions extrajudiciaires sont encore monnaie courante dans ce pays vidé de ses forces vives, qui est resté l’un des plus pauvres de cette partie du monde.

Il reste que l’essentiel de la politique linguistique est encore à venir, et les efforts seront gigantesques, les dérapages, toujours possibles. On évalue à plus de 425 (oui: quatre cent vingt-cinq!) le nombre d'engagements précis pris dans les accords de paix du Guatemala; la plupart d'entre eux engagent directement le gouvernement guatémaltèque. La communauté internationale a demandé aux Nations unies de contrôler en son nom l'application des accords de paix. On sait que, il y a de cela plusieurs années, des accords de paix similaires avaient été conclus conclus au Nicaragua et au Salvador; or, les efforts déployés n'ont pas donné les résultats escomptés, ni dans un pays ni dans l'autre, bien que des progrès importants aient été réalisés. 

Le Guatemala se heurte maintenant à des défis semblables et il ne pourra venir à bout de ses efforts sans l’aide financière et logistique de la communauté internationale. Déjà, quelque 21 organismes internationaux, dont l'Onu, se sont engagés à aider le Guatemala dans son audacieux pari. Dans ce pays, plusieurs organisations non gouvernementales de défense des droits de l'homme — par exemple, le Consejo Etnico Runujel Junam ou Conseil des communautés ethniques Runujel Junam (CERJ) et la Coordinadora Nacional de Viudas de Guatemala ou Coordination nationale des veuves du Guatemala (CONAVIGUA) — veillent au grain.

De plus, de nombreuses organisations représentatives du peuple maya ont été constituées, telles que l'Académie des langues mayas (1990), le Conseil des organisations mayas du Guatemala (1991), l'Instance d'unité et de regroupement maya (1993) et le Groupe de défense maya (1993). Ainsi, de nouveaux instruments se sont concrétisés au sein de la «société civile» pour la reconnaissance du peuple maya. Cependant, il reste, pour consolider la pacification, à traduire ces espoirs sur les plans politique, juridique, éducatif, culturel, économique et social. On peut l’espérer, mais rien n’assure que le Guatemala restera un État de droit! Néanmoins, si l’État atteint une partie de ses objectifs, ce sera tout de même un grand pas en avant vers l’égalité et le respect des autochtones. Mais les Mayas du Guatemala ont beaucoup de chemin à parcourir pour retrouver leur dignité perdue, car il leur faut éradiquer une culture de la violence profondément enracinée au sein de la société guatémaltèque. Quoi qu'il arrive, il faudrait en bout de ligne, pour éviter la disparition des langues amérindiennes au Guatemala comme ailleurs, élargir leurs fonctions sociales et les intégrer à des rôles publics et institutionnels non traditionnels. Mais ce n'est pas pour demain la veille!

 Dernière mise à jour: 03 janv. 2024

 

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L'Amérique du Sud et les Antilles

 
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