Ordonnance
de Villers-Cotterêts

(10 août 1539)

de François 1er

L'ordonnance de Villers-Cotterêts — du nom de la municipalité française située dans le département de l'Aisne dans la région Hauts-de-France — fait partie d'un ensemble de lois et était plus précisément intitulée «Ordonnance générale sur le fait de la justice, police et finances». Ses dispositions sont contenues dans 192 articles (voir le texte complet). L'ordonnance limite la justice ecclésiastique aux causes purement religieuses, instaure de nouvelles règles pour la procédure pénale, désormais écrite et secrète (l'accusé ignorant même jusqu'au jour de son procès les charges pesant sur lui).

Mais l'histoire a surtout retenu ces deux mesures les plus importantes : la création de l'état civil et l'emploi du français comme langue d'usage obligatoire pour tous les actes administratifs. Pourtant, depuis 1490 jusqu'en 1535, plusieurs ordonnances royales avaient également traité de la langue dans des termes plus ou moins similaires; seule l'ordonnance de 1539 est demeurée dans l'imaginaire collectif.

C'est dans son château de Villers-Cotterêts (à 75 km au nord de Paris, à l'ouest de Reims) que François Ier signa, entre le 10 et le 15 août 1539, la célèbre ordonnance qui imposa le français comme langue administrative au lieu du latin. L'ordonnance fut enregistrée au Parlement de Paris, le 6 septembre 1539. L'ordonnance royale obligeait également les curés de chaque paroisse à tenir un registre des naissances: ce fut le début de l'état civil. 

L'ordonnance de Villers-Cotterêts fut rédigée en «moyen français» par le chancelier Guillaume Poyet (connu aussi sous le nom de Guilelmine ou Guillemine), avocat et membre du Conseil privé, premier personnage du royaume après le roi.

Voici les articles 110 et 111 dans leur version originale (et en transcription moderne):

Version originale écrite

110. Que les arretz soient clers et entendibles. Et affin qu'il n'y ayt cause de doubter sur l'intelligence desdictz arretz. Nous voulons et ordonnons qu'ilz soient faictz et escriptz si clerement qu'il n'y ayt ne puisse avoir aulcune ambiguite ou incertitude, ne lieu a en demander interpretacion.

111. Nous voulons que doresenavant tous arretz ensemble toutes aultres procedeures, soient de nous cours souveraines ou aultres subalternes et inferieures, soient de registres, enquestes, contractz, commisions, sentences, testamens et aultres quelzconques actes et exploictz de justice ou qui en dependent, soient prononcez, enregistrez et delivrez aux parties en langage maternel francoys et non aultrement.

Transcription moderne

110. Afin qu'il n'y ait cause de douter sur l'intelligence des arrêts de nos cours souveraines, nous voulons et ordonnons qu'ils soient faits et écrits si clairement, qu'il n'y ait ni puisse avoir ambiguïté ou incertitude, ni lieu à demander interprétation.

111. Nous voulons donc que dorénavant tous arrêts, et ensemble toutes autres procédures, soient de nos cours souveraines ou autres subalternes et inférieures, soient des registres, enquêtes, contrats, testaments et autres quelconques actes et exploits de justice ou qui en dépendent, soient prononcés, enregistrés et délivrés aux parties en langage maternel françois et non autrement.

Cette mesure, qui faisait du français la langue officielle de l'État, ne fut pas comprise ainsi par les contemporains de François Ier. L'ordonnance de 1539 fut plutôt interprétée comme un choix administratif entre le «françois» du roi et la «langue vulgaire» locale. L'expression «langue officielle» était même inconnue au XVIe siècle, car le mot «officiel» n'est apparu dans la langue française qu'en 1778 après avoir passé par l'anglais official. C'est notamment après la Révolution française qu'on révisa cette partie de l'histoire du français relative à l'ordonnance de Villers-Cotterêts. 

En 2018, le président de la République, Emmanuel Macron, décida d'en faire une Cité internationale de la langue française. Le projet fut confié au Centre des monuments nationaux. En 2022, le château fut classé domaine national par décret en Conseil d’État. L'inauguration de la Cité internationale de la langue française a lieu le 30 octobre 2023.

Dernière mise à jour: 13 janv. 2024

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