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Grèce
3)
La politique linguistique
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1 La politique
linguistique traditionnelle
La Grèce attache une grande importance à la préservation de
la langue et de la culture grecques. Avec la religion, la langue représente
l'une des valeurs les plus importantes de l'identité nationale grecque. Depuis
sa fondation en 1834, l'État grec, suivant en cela le cadre idéologique de la
création d'États-nations en Europe, n'a jamais adopté le bilinguisme ou le
multilinguisme et s'est déclaré un État homogène de langue grecque. Durant près
d'un siècle, toute la politique linguistique de l'État grec consistait à assurer
la continuité du grec ancien au sein de la société grecque. Ce fut la longue
guerre linguistique qui a opposé les tenants du grec ancien ̶ la
katharévousa ou la langue pure ̶ et les partisans du grec
moderne ̶ le démotique ̶ , deux langues de même origine, mais
qui ont évolué de façon fort différente. La question linguistique fut résolue en
1974 lorsque le gouvernement fit adopter le démotique comme seule langue
officielle de l'État.
Depuis l'indépendance, en raison des guerres balkaniques, la
Grèce a néanmoins annexé des territoires au nord, là où des langues étrangères
étaient utilisées par une partie importante de la population: le turc, l’albanais, le
macédonien, le pontique, le bulgare, le
pomaque, l’aroumain,
le romani, l’arménien, etc. La coexistence linguistique existe depuis fort
longtemps dans l'histoire grecque moderne. Depuis la fondation de l'État grec,
le turc et l'albanais ont fait leur apparition aux côtés du grec. Ensuite, avec
l'intégration de la Thessalie et des nouveaux pays, le valaque, le macédonien,
le bulgare et le pomaque ont été ajoutés.
Après la Première Guerre mondiale et la chute de l'Empire
ottoman, des traités internationaux, dont le traité de Lausanne
de 1923, sont venus perturber l'idéologie traditionnelle de la langue unique en
Grèce qui s'est vue aux prises avec une politique linguistique en faveur des
langues minoritaires. Cependant, à plus long terme, la politique linguistique de
la Grèce est vite revenue à sa position traditionnelle bien ancrée, laquelle au
mieux ne tient pas compte des langues minoritaires, au pire, elle les combat. De
fait, l'exercice de la politique linguistique par le passé consistait à imposer
l'enseignement et l'usage du grec dans toutes les écoles des minorités.
À mesure que la Grèce fait partie des institutions et des valeurs européennes,
elle s'est trouvée confrontée à la Charte européenne des
langues régionales ou minoritaires et à la
Convention-cadre pour la protection des minorités nationales. La plupart des
pays d'Europe ont ratifié ces deux traités, mais pas la Grèce qui fait partie de
l'Union européenne depuis 1981. Pourtant, la Grèce semble avoir pris conscience
de la valeur du multilinguisme, mais à sa façon, c'est-à-dire avec une approche
conservatrice.
1.1 Les droits scolaires
Le système d'éducation en Grèce possède une structure
plutôt conservatrice et demeure sous contrôle strict du gouvernement. En
raison de l'accent mis sur le christianisme présenté à partir d'un point
de vue strictement orthodoxe, les élèves non orthodoxes et non chrétiens sont
dispensés des cours de religion. Les programmes sont uniformes pour
toutes les écoles publiques et privées, et ils sont déterminés par le
ministère de l'Éducation et du Culte.
Il existe des écoles maternelles (ou préscolaires) facultatives, le
Nipiagogio, qui accueillent les enfants dès l’âge de trois ans et demi.
L’école est obligatoire en Grèce durant les neufs premières années, soit de de 6
à 15 ans. Les élèves doivent d'abord fréquenter une école primaire, le
Dimotiko, pendant six ans, au cours de laquelle ils doivent apprendre à
maîtriser le grec oral et écrit, puis passer à l'école secondaire, le
Gymnasio (ou collège), pendant trois ans. Il existe aussi en Grèce des
collèges d'éducation musicale, des collèges d'enseignement interculturel et des
collèges dotés d'une section sport. À la sortie du Gymnasio, les élèves
peuvent s’inscrire dans un lycée, le Lykeio, c'est-à-dire un
établissement d’enseignement général, technique ou polyvalent. Pour les élèves
de ce niveau d’études, le système d'éducation propose aussi des écoles
professionnelles et techniques. À partir de la 2e
année, il faut choisir entre la filière dite «théorique» et la filière dite
«sciences et technologie». À la fin de la 3e
année du lycée, les élèves subissent des examens dans le cadre de leur
établissement pour obtenir le diplôme de fin d'études du lycée.
Pour s’inscrire
dans une université ou un institut supérieur de technologie, tout étudiant doit
passer un examen d'admission. Dans tous les établissements d'enseignement, le
grec constitue la langue d'enseignement. L'un des objectifs de l’éducation
grecque est de «développer la conscience nationale et religieuse». Quant aux
écoles privées, elles dispensent leurs cours dans des établissements distincts
pour le primaire et le secondaire, et elles sont tenues de respecter les mêmes
programmes scolaires que les écoles publiques.
1.2 Les écoles interculturelles
Compte tenu de la présence de plus en plus nombreuses de
communautés issues de l'immigration, la Grèce a entrepris de créer en 1996 des
«écoles interculturelles» destinées aux enfants provenant surtout des mariages
mixtes, des enfants d'immigrants, des enfants turcs et tsiganes ou juifs, ou aux
expatriés dont les parents travaillent pour les délégations de leur pays. Ces
écoles sont publiques et gratuites pour tous, et offertes dans tous les
départements du pays (les 51 nomes). Il en existe une trentaine qui sont
publiques, et une douzaine, qui sont privées. La pédagogie est axée sous forme
de jeux (jeux de sociétés, cuisine et danse traditionnelle, folklore, etc.). Les
écoles interculturelles sont présentes dans les maternelles, au primaire et au
secondaire.
Cette éducation dite «interculturelle» (Διαπολιτισμική
Εκπαίδευση) consiste, entre autres, à sensibiliser les élèves à leurs cultures
et leurs valeurs propres. Ces écoles intègrent donc le folklore, la langue, la
littérature, les arts propres à diverses communautés ethniques. On espère ainsi
faire mieux connaître la contribution de chacun des groupes ethnoculturels dans
l’édification de la société grecque. Pour résumer la problématique, l'éducation
interculturelle consiste en principe, d’une part, en un accueil d’intégration, dont
l'objectif est de rendre la culture d'accueil et ses valeurs accessibles aux
autres; d'autre part, en un accueil d'acceptation des autres cultures
pour la société dominante au lieu de chercher uniquement à les transformer.
Normalement, cet enseignement interculturel suppose que les enseignants maîtrisent
la langue maternelle des élèves, que ce soit le turc, l'arménien, le bulgare,
etc. L'objectif principal des écoles interculturelles consiste à mieux intégrer
les enfants d'immigrants dans leur pays d’accueil, tout en souhaitant préserver
la langue et la culture du pays d’origine de leurs parents. Ce sont là les
principes de bases qui devraient guider les établissements d'enseignement qui
ont opté pour l'éducation interculturelle.
Or, en Grèce, cet enseignement apparaît plutôt contestable au point
de vue pédagogique, car les enseignants ne sont pas tenus de maîtriser la langue
maternelle (étrangère) de l’élève; cette langue n’est pas enseignée comme deuxième
langue (après le grec) dans les établissements concernés. Le seconde langue enseignée après le
grec est l'anglais; la troisième, le français. Dans les faits, au lieu de se
familiariser avec leur langue maternelle, les élèves doivent apprendre les
éléments de deux nouvelles langues, la grammaire grecque et la grammaire
anglaise, sinon la grammaire française. En raison des problèmes de communication
et de la diversité des populations réunies, le niveau de ces classes demeure
relativement reste bas. Dans les faits, la mission des écoles interculturelles
est d'enseigner la langue et la culture grecques.
Bref, la présence accrue
d'élèves étrangers dans les écoles primaires et secondaires, ce qui représente
au moins 10 % des élèves, n'a pas eu pour effet de modifier ni le contenu ni la
vision ethnocentrique du système d'éducation grec. Les immigrants ne peuvent pas
apprendre leur langue maternelle; les langues étrangères (anglais et français)
demeurent peu enseignées. Ce sont des cours plus ou moins intensifs de langue et
de culture grecques. Ainsi, ces écoles ne sont interculturelles que de nom,
car ce sont en réalité des classes d'accueil destinées à immerger les enfants
d'immigrants dans la société grecque. À ce stade, nous devons affirmer que
«l'éducation interculturelle» n'est pas encore une réalité dans le système
scolaire grec. Rappelons que le nombre d’élèves dans ces
écoles est estimée en Grèce à environ 1,2 million de personnes. C'est la
loi 2413/96 sur l'organisation des écoles d'éducation
interculturelle qui régit ce type d'école.
1.3 L'enseignement des langues étrangères
L’anglais est une matière obligatoire pour tous les élèves
à partir de la 3e année du primaire en raison de trois heures par
semaine. Au secondaire (Gymnasio), les élèves doivent choisir entre
le français et l’allemand en tant que 2e langue étrangère obligatoire.
L’anglais est enseigné à raison de trois heures par semaine en première année,
et de deux heures par semaine en 2e et 3e
année. Le français et
l’allemand sont offerts pendant les trois années en raison de deux heures par
semaine. En fait, le français tient le statut de seconde langue étrangère après
l’anglais. Un enseignement de rattrapage est offert l’après-midi aux élèves qui
en ont besoin, sous forme de cours spéciaux de langues vivantes.
Dans l'enseignement secondaire supérieur, le lycée ou
Lykeio, l'anglais demeure l'une des matières enseignées dans le cadre de
l'enseignement général. Lors de la première année, l'anglais est enseigné trois
heures par semaine et dans les 2e et 3e année, l'anglais est enseigné durent
deux heures par semaine. Le français ou l'allemand reste une matière facultative
dans le programme. Dans les écoles professionnelles techniques (TEE), dans les
première et deuxièmes classes du premier cycle de l'enseignement technique et
professionnel, l'anglais est enseigné pendant deux heures par semaine dans
toutes les spécialités, sauf pour les spécialisations des arts appliqués, où le
français est enseigné pendant deux heures par semaine.
Récemment (durant l'année scolaire 2008/09) et à titre d'essai, l'italien,
l'espagnol, le russe et le turc ont été introduits comme options supplémentaires
au lycée. Au secondaire, les langues étrangères enseignées au primaire et au
secondaire ne sont proposées qu'en option. Quant aux universités publiques,
elles proposent des cours au choix dans les langues européennes pour permettre
aux étudiants de toutes les facultés d'acquérir des compétences linguistiques
appropriées.
Dans l'enseignement supérieur, l'anglais est la langue étrangère obligatoire dans
toutes les universités et instituts d'enseignement technologique, suivie par un
enseignement facultatif des langues étrangères, comme le français, l'allemand,
l'italien, l'espagnol, le russe, l'arabe, etc., selon le curriculum de chaque
établissement d'enseignement technologique ou universitaire. Sauf pour les
langues étrangères incluses dans les programmes, il existe aussi des cours de
langues issues des pays voisins comme le bulgare, le roumain, le serbe et le
turc, en fonction de l'offre de la part des établissements d'enseignement.
2 Les
minorités reconnues: les musulmans
En Grèce, le gouvernement maintient que seules les minorités mentionnées par des
traités internationaux encore en vigueur sont reconnues officiellement. Or, il
n’existe qu’une minorité en Grèce, mentionnée dans des traités
internationaux: la minorité musulmane. Le traité de Sèvres de 1920, qui n’a
jamais été en vigueur parce que la Turquie ne l’a jamais appliqué, contient
cette disposition (art. 85) qui référait à la langue et à la religion:
Article 85
La Grèce accepte, en agréant
l'insertion dans un traité particulier, les dispositions qui seront
jugées nécessaires, notamment en ce qui concerne Andrinople, pour
protéger en Grèce, les intérêts des
habitants qui diffèrent de la
majorité de la population par la race, la langue ou la religion. |
2.1 Le traité de Lausanne de 1923
Dans le traité de Lausanne de 1923 (encore en vigueur)
qui engageait la Turquie et la Grèce, les deux États convenaient dun principe de
réciprocité en vertu duquel les Grecs de Turquie obtiendraient les mêmes droits que les
Turcs de Grèce (Thrace). Cest pourquoi larticle 45 contient cette disposition:
Article 45
Les droits reconnus par les
stipulations de la présente disposition
aux minorités non musulmanes
de la Turquie
sont également reconnus par la
Grèce à
la minorité musulmane
se trouvant sur son
territoire.
|
Cet article
accorde à la minorité musulmane de la Grèce les mêmes droits
qu’aux minorités non musulmanes de Turquie, ce qui a permis à chacune des
parties de remettre en cause plusieurs des droits aux citoyens membres de ces
minorités. Alors que le traité de Lausanne instituait la notion de réciprocité
en des termes «positifs», son application s’est étendue, tant en Grèce qu'en
Turquie, de façon «négative».
En effet, la Cour constitutionnelle turque a
interprété ces dispositions selon le principe du «donnant-donnant»: la Turquie
s'engageait à respecter les droits des minorités conférés par le traité aussi
longtemps que la Grèce les respectait. Or, une telle interprétation apparaît
contraire à l’article 45 du traité, qui prévoyait des responsabilités
parallèles, et non interdépendantes, pour chaque partie.
Quant au Conseil de
l'Europe, il estime que la reconnaissance de droits fondés sur la stricte
réciprocité est «inacceptable eu égard au droit international des droits de
l’Homme», «anachronique» et «nuisible à la cohésion nationale en ce que chaque
État punit ses propres citoyens». D'ailleurs, l’article 60.5 de la Convention de
Vienne sur le droit des traités interdit le principe de réciprocité dans le
domaine des droits de l’Homme.
Article 60
5) Les paragraphes 1 à 3 ne s’appliquent pas aux dispositions
relatives à la protection de la personne humaine contenues dans des
traités de caractère humanitaire, notamment aux dispositions excluant
toute forme de représailles à l’égard des personnes protégées par
lesdits traités. |
Au lieu de respecter les clauses du traité, les parties
(Grèce et Turquie) en sont venues à exercer des représailles auprès de leurs
propres citoyens afin de les sanctionner pour le non-respect pratiqué par l'autre
État. L’interprétation faite par la Grèce de certaines dispositions du traité de
Lausanne s'est avérée restrictive, comme en Turquie. Heureusement, depuis les
années 1990, l'idéologie de la réciprocité aurait cessé d'être considérée par
les autorités politiques comme une façon adéquate de traiter une partie de sa
population.
Le traité de Lausanne reconnaît une minorité religieuse
musulmane en Thrace et non une minorité nationale turque. Sur cette base, les
autorités grecques ont refusé l'utilisation du terme «turc» dans les noms des
associations. Saisie de ce refus, la Cour européenne des droits de l’homme a
déjà condamné la Grèce à plusieurs reprises. La position officielle de l’État grec sur la «minorité musulmane se
trouvant sur son territoire» d’après le traité de Lausanne) est qu’il s’agit
d’une minorité essentiellement religieuse. Selon l’interprétation
de l’Administration grecque, cette minorité religieuse serait constituée de
citoyens d’origine turque, pomaque et tsigane, ce qui exclut les Albanais
musulmans, les Turcs chrétiens, les Aroumains orthodoxes, les Arméniens
catholiques, les juifs, etc.
Dans toute la législation grecque, seul le traité de Lausanne de 1923 consacre
la notion de minorité religieuse, non pas celle de minorité linguistique.
Cette interprétation juridique n’est pas sans causer de multiples
confusions puisque l’État n’accorde pas les mêmes droits à des
communautés parlant la même langue mais pratiquement une religion différente
(Turcs musulmans et Turcs chrétiens) et des groupes professant une même
religion mais parlant une langue différente (musulmans turcophones de Thrace et
musulmans albanophones). Autrement dit, la Grèce interprète de façon très
restrictive l’article 45 du traité de Lausanne en ne protégeant
partiellement que les Turcs musulmans de la Thrace occidentale, ce qui inclut
les Pomaques et les Tsiganes considérés officiellement comme des Turcs. Il en
résulte que, sur le plan linguistique, seul le turc est reconnu juridiquement
comme langue minoritaire en Grèce.
Au final, que ce soit pour la minorité musulmane de Thrace ou de la minorité orthodoxe grecque de Turquie, les deux États ont adopté une
perception «extérieure» à l'égard de leur minorité reconnue. En effet, tandis
que la Grèce tente de protéger sa minorité religieuse orthodoxe de Turquie au
moyen d'un bureau des Affaires politiques relevant du ministère des Affaires
étrangères, la Turquie surveille la minorité musulmane de Thrace par un consulat
général situé à Komotini.
2.2 La représentation turque
En Thrace, lors des élections, des interprètes sont présents pour assister
les électeurs turcophones. Mais la loi électorale grecque fixe le seuil d’éligibilité
à 3 % des voix exprimées au plan national. Or, il est extrêmement difficile
pour les membres de la communauté musulmane d’être élus au Parlement grec
à partir de leurs propres listes; il leur faudrait un quota minimum de deux
députés, par exemple, car l’élection d’un candidat turc relève presque
du miracle. D’ailleurs, les candidats turcs aux élections nationales seraient
régulièrement éliminés et quelques rarissimes élus auraient même fait l’objet
d’une contestation électorale, sinon de destitution, voire d’emprisonnement. Néanmoins,
le Parlement compte régulièrement deux à trois élus turcs (souvent du PASOK, le
Parti socialiste). De même, il existe des maires turcs en Thrace, mais
uniquement dans les petites municipalités. Si Komotini ou Xanthi élisait
effectivement un maire non grec, ce serait un véritable séisme local. Malgré
tout, la plupart des élus des municipalités peuplées de turcophones sont des
Grecs.
2.3 Les tribunaux
En principe, les Turcs (incluant les Pomaques et les Tsiganes) ont le droit d’utiliser
leur langue dans un tribunal de la Thrace, mais il est interdit au
juge d’utiliser le turc au lieu de la langue officielle. Ceux qui désirent s’exprimer
en turc ou qui ne connaissent pas le grec (ce n’est pas rare chez les plus de
50 ans en Thrace) doivent recourir à un interprète. Il existe à cet effet un
certain nombre d’interprètes agréés par l’État. Cependant, seul le traducteur de
Xanthi reçoit une rétribution pour son travail. De façon générale, la cour
fait plutôt appel à un volontaire parmi le personnel judiciaire lorsqu’elle a besoin
d’un interprète. Cette procédure fréquemment utilisée n’apparaît pas
très conforme à la loi, car certains points importants peuvent être jugés
non pertinents par l’interprète improvisé et omis dans sa traduction.
Cela dit, il existe un autre type de tribunal: les müftülüks. Dans
chacune des trois préfectures de la Thrace occidentale, on compte un müftülük,
une sorte de tribunal musulman habilité à juger les questions de droit
familial et successoral. L’autorité musulmane suprême est représentée par
un müfti qui dispose d’un pouvoir judiciaire qu’il délègue à un cadi
(juge religieux). Celui-ci applique le Code civil grec dans les mariages, les
divorces, les décès, l’émancipation des jeunes, les testaments, etc. Quant
au müfti, il choisit en plus les candidats à l’Université coranique
musulmane. Généralement, toutes ces affaires se déroulent en turc, tant à l’oral
qu’à l’écrit.
Cependant, depuis l’adoption de la loi n° 1920 du 4 février 1991, les
décisions des müftis ne sont plus forcément exécutoires, car elles n’ont
plus aucune valeur légale. Un tribunal de première instance a même refusé de
reconnaître les effets de la loi islamique sur le Code civil grec. Depuis ce
temps, les müftis sont harcelés par les autorités grecques, surtout
les müftis élus par les associations minoritaires — il y a aussi des müftis
nommés par l’État. Certains müftis élus, par exemple dans les
villes de Xanthi et de Komotini, ont été condamnés à des peines de prison pour
«manifestation d’autorité», alors qu’ils avaient seulement utilisé leur
titre de müfti dans des documents écrits.
Le problème des muftis est le même que celui des imams en
France. L'islam ne connaît pas de clergé institué, donc peut se déclarer imam
ou müfti toute personne élue par une communauté donnée. Le problème est
grand quand le jeu devient politique entre consulat de Turquie et l'autorité
régionale grecque. Pour éviter que se multiplient des muftis professant des
idées nationalistes, les autorités grecques ont décidé d'obliger les müftis
à être agréés par les autorités régionales, un peu comme ce qui se fait en
France avec les imams pour limiter les mosquées islamistes. Évidemment, une telle
initiative est source inévitable de conflits au plan local.
En somme, en vertu d’une loi centenaire, les quelque 110 000 musulmans
d’origine turque, rom ou pomaque (slaves islamisés) vivant dans cette région au
nord-est de la Grèce ont dû recourir à la loi islamique appliquée par l’un des
trois muftis en poste, ces juges religieux nommés par l’État grec. Cependant, le
9 janvier 2018, une loi adoptée par le Parlement grec permet dorénavant à la
minorité grecque musulmane de Thrace de faire appel aux tribunaux civils pour le
règlement des affaires familiales. Depuis plus d’un siècle, celle-ci devait
obligatoirement recourir à la loi islamique.
2.4 L’administration publique
Le turc est absent de tout usage officiel dans l’Administration grecque,
puisqu’en vertu du traité de Lausanne la langue de la minorité doit
concerner les affaires religieuses (celles de l’islam). Ainsi, tous les
services publics, incluant les hôpitaux et les soins de santé, ne sont
assurés qu’en grec.
Depuis 1977, tous les noms de lieux et noms de rues de trois préfectures où
les Turcs étaient concentrés ont été changés: les noms turcs ont été
supprimés et remplacés par des noms grecs. De plus, un décret interdisait l’emploi
des anciens noms à des fins officiels sous peine d’amende ou d’emprisonnement.
La mention du toponyme ou de l’odonyme turc entre parenthèses après ou en-dessous de celui en grec a été également interdite par les autorités. Cette
pratique a été étendue à tout le pays et il n’existe à l’heure actuelle
aucune affiche en une autre langue que le grec ou... l’anglais. En effet,
l'affichage en langue anglaise est accepté dans les lieux touristiques pour des
raisons pratiques. En fait, cette tolérance ne change en rien la règle de
l'unilinguisme grec aux dépens des langues minoritaires du pays (macédonien,
bulgare, turc, albanais ou arménien).
Le gouvernement grec a lui-même reconnu il y a quelques années qu’il
existait un régime de discrimination administrative au détriment des
minorités. Depuis, l’Administration grecque en Thrace semble plus tolérante.
Des fonctionnaires turcs prennent l’initiative de diffuser des communiqués et
autres publications pratiques en turc, sans trop encourir de tracasseries
administratives.
2.5 Les langues d'enseignement
Pour les minorités, c’est encore le traité de Lausanne qui
fixe le cadre de l’enseignement
en langue turque pour la Thrace. Mais cet enseignement ne s’est réellement
concrétisé qu’à partir de 1951. Depuis, le gouvernement a adopté une série de lois scolaires réglementant
l’accès et les droits à l’enseignement en turc: la loi 694 du 16 septembre
1977 sur les écoles minoritaires de la communauté musulmane de la Thrace
occidentale; la loi 682/1977 sur l'instruction privée; la loi 695 du 16
septembre 1977 sur le règlement des problèmes concernant l'enseignement et le
personnel de surveillance dans les écoles minoritaires et à l’École normale
spéciale; le décret ministériel n° 55369 du 16 mai 1978 sur les problèmes
d'inscription, de transport, des études, des examens, des diplômes et autres
sujets scolaires relatifs aux écoles minoritaires de la minorité musulmane en
Thrace occidentale. Les autorités grecques n'ont jamais permis aux Pomaques de
recevoir leur instruction dans leur langue, le pomaque, de peur de les
rapprocher culturellement de la Bulgarie. Tout au plus, le pomaque est toléré dans les écoles
maternelles comme langue véhiculaire entre enseignants et parents. Comme ils
sont de religion musulmane, les Pomaques ont aussi accès à un enseignement en
arabe, comme les turcophones. Généralement, les Pomaques sont trilingues: ils
parlent le pomaque, le grec et le turc, l'arabe demeurant une langue liturgique.
Conformément à la législation en vigueur, la parents turcophones ou
considérés comme tels (par exemple, les Tsiganes et les Pomaques) ont le droit d’exiger, sur demande expresse, que leurs enfants fréquentent une école primaire
— il
n’y a pas d’écoles maternelles turques — où l’on garantit un
enseignement en turc dès la première année. Cet enseignement est assuré
durant les six années du primaire et il est cofinancé par l’État grec.
Toutes les écoles turques — de confession musulmane — sont ouvertes aux
Pomaques et aux Tsiganes, mais aussi aux slavophones (orthodoxes) habitant en
Thrace occidentale.
On dénombre environ 250 écoles primaires turques regroupant quelque 12 000 élèves.
Toutes ces écoles sont tenues d’offrir un enseignement bilingue: la moitié
des disciplines est enseignée en turc, l’autre, en grec. Depuis la nouvelle
loi scolaire de 1995, l’enseignement de l’anglais et devenu obligatoire. Il faut
ajouter aussi que l'instruction, telle qu'elle est pratiquée chez les
turcophones de Grèce, apparaît comme totalement inadaptée au monde moderne: les
enfants sont scolarisés dans la langue turque, alors qu'ils parlent le «turc de
Thrace», le bulgare (pomaque) ou le tsigane (Roms). De plus, ils sont placés
sous l’autorité de l’État grec et des autorités musulmanes qui emploient l'arabe
coranique.
Au secondaire, l’enseignement en turc n’est plus garanti; on ne compte
que deux écoles secondaires turques, qui doivent demeurer bilingues et exiger
à l’admission la réussite d’un examen en langue grecque. C’est pourquoi
une majorité d’élèves (de 60 % à 70 %) préfère poursuivre ses études en
Turquie; les autres fréquentent les établissements grecs.
Pour ce qui est de l’enseignement supérieur, jusqu’en 1991, tous les
turcophones (et les autres minorités) étaient exclus de l'enseignement
supérieur sous prétexte qu'ils ne connaissaient «pas suffisamment le grec».
Ceux qui désiraient fréquenter l’université devaient s’expatrier en
Turquie. Depuis 1995, la loi scolaire oblige les universités de Thrace à
pratiquer un programme de discrimination positive à l’intention des élèves
turco-musulmans désirant accéder aux études supérieures. La loi prévoit que
200 places (soit 2 %) doivent obligatoirement être occupées par des étudiants
musulmans. Jusqu’ici, environ 50 élèves ont soumis chaque année une demande
d’admission dans ces universités.
Cela dit, les écoles turques vivent de graves problèmes. Le plus
préoccupant semble concerner la formation insuffisante des enseignants. Avant
1968, la plupart des professeurs embauchés provenaient du monde arabe en raison
de leur familiarité avec l’islam. Depuis, seuls les musulmans diplômés de l’École
normale spéciale de Thessalonique et ceux des universités grecques
ont le droit d’enseignement dans les écoles turques de Grèce. Or, les futurs
professeurs grécophones orthodoxes, même après quatre années d’études, ne
reçoivent aucune formation pour enseignement le grec comme langue seconde,
alors que les candidats turcophones ne bénéficient que d’une formation
sommaire de deux ans.
Un autre problème provient de la mauvaise qualité des manuels scolaires
de langue turque. La plupart des élèves disposent encore de vieux manuels datant
des années cinquante. La cause est complexe : la Turquie ne veut pas que soient
imprimés en Grèce des manuels en turc, car elle estime qu'elle seule peut
fournir de tels manuels. Mais la Grèce bloque l'importation de manuels turcs en
rétorsion à la non-application des accords de Lausanne par la Turquie. Lorsque
le gouvernement grec a déjà, dans le passé, fait imprimer certains livres
modernes en turc, il s’est heurté à une vivre opposition non seulement de la
part de la Turquie, mais aussi de la part de la minorité. Pourtant, un ministre
de l'Éducation, M. Georges Papandréou, le fils de l'ancien premier ministre, a
admis en juin 1995 que le système scolaire grec véhiculait des stéréotypes
racistes et antisémites, et que les manuels scolaires alimentaient non seulement
l'antisémitisme, mais aussi les sentiments de xénophobie.
Pour les manuels
scolaires grecs, plusieurs commissions bilatérales de révision des manuels ont
été instituées entre la Grèce et la Turquie et, récemment, entre la Grèce et
l'Albanie. Le but était de «nettoyer» les mentions hostiles et xénophobes vis-à-vis
des voisins dans chacun de ces pays. Pour la vétusté des manuels turcs, c'est
une situation indéniable. Par ailleurs, l'état de l'enseignement aux Grecs de
Turquie est encore plus lamentable (nomination des enseignants systématiquement
reportés au second trimestre empêchant la tenue des enseignements durant
l'automne, manuels datant des années cinquante, écoles confisquées régulièrement
par l'État). Dans ce jeu de chassé-croisé diplomatique, les minorités de Thrace
s'avèrent être les éternels otages.
Enfin, les faits démontrent qu’un nombre important d’élèves habitant
les régions rurales et les villages ne complètent pas leur cours secondaire.
Conséquemment, beaucoup d’entre eux sortent de l’école primaire avec une
connaissance plus ou moins limitée de la langue grecque.
Les inspecteurs du Conseil de l'Europe ont constaté de
grandes disparités de niveau entre les écoles minoritaires et les écoles de la
majorité grecque en Thrace. Les écoles minoritaires ne sont pas du même niveau
que les écoles de la majorité. C'est pourquoi beaucoup de membres de la minorité
choisissent d'envoyer leurs enfants dans les écoles de la majorité afin de leur
garantir une instruction de qualité. Il n'existe que deux établissements
secondaires supérieurs pour les minorités en Thrace et deux écoles religieuses (medrese)
à Komotini et Echinos. De plus, l'accès à une instruction de qualité semble
particulièrement difficile dans les villages de montagnes, là où habitent
essentiellement les Pomaques.
2.6 Les médias
Les turcophones se sont dotés de plusieurs journaux (une dizaine de
périodiques) dans leur langue. Il y a peu de temps, les journalistes turcs
étaient
souvent harcelés par la police qui les empêchait de faire leur travail. Il en
était ainsi pour les journalistes étrangers qui voulaient faire des reportages, par
exemple, sur les Turcs, les Macédoniens ou les Bulgares. Cependant, cette
situation n'a plus cours. Pour qui lit régulièrement la presse grecque, un
effort semble être fait depuis quelques années en faveur d'une meilleure
perception des étrangers, tandis que les dérives xénophobes sont régulièrement
l'objet de critiques. De même, la presse turque en Thrace est en principe libre,
même s'il y a une volonté des autorités locales de maintenir le statu quo,
la peur principale est un «dérapage à la bosniaque».
La radio d’État diffuse quotidiennement en turc de courts bulletins de
nouvelles et quelques rares émissions d’information. La mairie de Komotini en
Thrace retransmet depuis quelques années une chaîne privée en langue turque. Comme
les ondes ne sont plus brouillées entre la Grèce et la Turquie, les
turcophones de Grèce peuvent capter, grâce à des antennes paraboliques, la
plupart des émissions de radio et de télé en provenance de la Turquie.
La presse est libre en Grèce, mais un certain nombre de sujets
peuvent entraîner l’emprisonnement
de journalistes pour «diffamation» et «insulte», notamment les critiques à
l’égard de la religion, les relations avec les pays voisins, surtout la
Macédoine, la Bulgarie et la Turquie, et... la question des minorités. À ce
propos, la presse grecque est reconnue en Europe comme étant l’un des plus
grands générateurs de haine raciale dans ce pays. Les minorités nationales
sont plus souvent qu’à leur tour prises à partie par les médias.
3 Les
minorités non reconnues
Les minorités qui ne bénéficient d’aucun statut juridique sont,
rappelons-le, les Turcs chrétiens, les Macédonien, les Bulgares, les Aroumains et les Albanais. Toutes ces minorités linguistiques n’habitent pas
la Thrace et ne bénéficient pas des dispositions du
traité de Lausanne. Il ne reste d’autre texte juridique que l’article 5 de la
Constitution grecque de 1975:
Article 5
Toute personne vivant sur le territoire grec verra sa vie, son honneur et
sa liberté entièrement protégés sans que sa nationalité, sa race ou sa
langue et ses croyances religieuses ou politiques soient prises en compte. Les
seules exceptions acceptées sont celles prévues par le droit international.
|
Il s’agit de dispositions relatives au principe de la non-discrimination.
Or, on sait ce que valent de telles dispositions. Pour simplifier, on peut dire
que ces textes ont constitué un formidable écran de fumée destiné à
endormir les puissances alliées de l’époque... et les minorités. Le
traité de Lausanne en 1923 était peut-être révolutionnaire pour l’époque, mais
les mentalités ont bien changé aujourd’hui en ce qui a trait aux minorités
nationales... sauf en Grèce.
La situation actuelle est très simple. Aucune des minorités mentionnées
ici — Turcs chrétiens, Macédoniens, Bulgares, Aroumains et
Albanais — n’ont obtenu un droit linguistique quelconque. En effet,
nul ne bénéficie d’un service public, ni d’une présence dans l’enseignement.
Un exception: les slavophones de la Thrace peuvent fréquenter les écoles de
langue turque si cela leur convient. Dans les médias, les Albanais et les
Aroumains n’ont pas de journaux et encore moins d’émissions radiophoniques
ou télévisées. Dans certaines régions slavophones, il est possible de capter
des émissions en provenance de radios ou de stations de télévision de la
Bulgarie et de la république de Macédoine du Nord. Par ailleurs, un mensuel bilingue
(grec-macédonien) est publié à Florina.
3.1 La propagande anti-minoritaire
En Grèce, il est considéré comme normal que des personnalités politiques
importantes prennent ouvertement position pour nier l’existence des minorités
ethniques, que ce soi les Turcs, les Macédoniens, les Albanais, etc. D’ailleurs,
en décembre 1998, le ministre grec des Affaires étrangères, M. Thedoros
Pangalos, déclarait au sujet de la question des minorités à des
journalistes occidentaux: «C’est une invention d’intellectuels et de
journalistes pervers.» On peut trouver d’autres cas similaires. Ainsi, en
août 1998, le président du Parlement grec, Apostolos Kaklamanis, a nié
l'existence d'une minorité nationale turque et appelé à
«l'homogénéisation» de la «population grecque orthodoxe et musulmane de la
Thrace». En décembre de la même année, de savants nationalistes grecs ont
été honorés par l’Académie de Grèce et décorés par le président de la
République, alors qu’ils avaient ouvertement contribué à la propagande
anti-minoritaire.
L’État grec reste le seul État balkanique qui refuse
encore de reconnaître l'existence de minorités nationales sur son territoire.
D'ailleurs, dans son troisième rapport sur la Grèce (5 décembre 2003), la
Commission européenne contre le racisme et l’intolérance (ECRI) notait
qu’en Grèce les personnes qui souhaitent exprimer leur identité
macédonienne, turque ou autre, ont à faire face à des préjugés et des stéréotypes,
et sont parfois victimes de discrimination et d’atteintes à leur liberté
d’association.
3.2 Les Turcs
La Turquie constitue l’un des sujets les plus litigieux qui soient dans le
pays et la langue turque apparaît comme le symbole de l'ennemi héréditaire de
la Grèce. Les conflits incessants entre la Grèce et la Turquie à propos de l’île
de Chypre revendiquée par les deux États n’ont certes pas aidé la cause des
«Turcs de Grèce».
Depuis de nombreuses années, la Grèce a même développé une véritable
politique répressive à l’égard de «ses» Turcs. Plusieurs faits peuvent
illustrer cette réalité. Il y a plusieurs dizaines d’années, en France, on
punissait les enfants bretons qui parlaient breton à l’école. En Grèce, on
punissait encore, il y a quelques années seulement, les petits enfants qui
parlaient bulgare, albanais ou turc en les confiant à des crèches
hellénophones d’État pour leur faire apprendre le grec. On ne procède plus ainsi
aujourd’hui, mais il est curieux de constater que les autorités aient
interdit l’emploi de l’adjectif turc dans les titres
identifiant les associations et autres formes de corporation publique.
C’est
ainsi qu’en 1986 l’Association des enseignants turcs de la Thrace
occidentale était dissoute par un tribunal de la ville de Komotini. En
1996, un professeur d’une école minoritaire de la ville de Xanthi a été
suspendu pour une année parce qu’il avait qualifié son école d’école
turque plutôt que d’école de la minorité. De façon
générale, il est illégal de nommer turc / turque un
établissement public ou une association quelconque. C’est pourquoi toutes les
associations dites «turques» ont été dissoutes. D’après de nombreux
journalistes, les «musulmans turcs» font régulièrement l’objet de répression
de la part des forces policières et de l’administration grecque. Il est illégal
d'employer le terme turc, car il transgresse les accords de Lausanne, et
c'est aussi pour les Grecs une mesure d'équivalence à l'interdiction du terme
grec en Turquie. Pensons que le patriarcat grec orthodoxe d'Istanbul doit
d'appeler officiellement «patriarcat turc orthodoxe» ("Türk rumi patriarcanesi").
En octobre 1998, un tribunal de Komotini a refusé à des musulmans
l'inscription de l'«Association d'ecclésiastiques des Saintes Mosquées de
Thrace occidentale», parce que les mots «Thrace occidentale»
«pouvaient être interprétés comme un défi malveillant et intentionnel
lancé au caractère grec de la Thrace». Le tribunal en a décidé ainsi, bien
qu’aucune autre association ne comportait dans sa dénomination ce nom par
ailleurs encore employé comme terme géographique en Grèce. Mais il n’y
a pas que les Turcs de Grèce qui se plaignent de l’attitude répressive de l’État
à leur égard. Si le terme de Thrace occidentale est refusé, il
en va de même en Turquie où le terme de Thrace orientale est tabou: il
rappelle en effet que cette région appartenait à la Grèce jusqu'en 1923.
De plus, depuis les années 1990, le gouvernement grec a
installé dans la région de la Thrace un grand nombre de «Pontiques», ces Grecs
des rivages de la mer Noire, qui ont quitté l’ancienne Union soviétique, dans le
but de modifier les rapports de force ethniques.
3.3 Les Macédoniens et la Macédoine du
Nord
 |
On connaît l'antipathie grecque pour le symbole même de la république de
Macédoine du Nord, ce petit pays qui a dû changer jusqu'à son nom et son
drapeau parce que la Grèce considérait que ceux-ci faisaient partie de son
héritage historique. La Grèce a continué de contester le nom de la «république
de Macédoine» jusqu'au 25 janvier 2019 parce qu’elle considérait qu'aucun autre pays n'avait le droit de
porter le même nom que la province de Macédoine du nord de la Grèce.
En fait, la Macédoine historique touche aujourd'hui quatre pays: la
Grèce, la Bulgarie, la Macédoine du Nord et l'Albanie (voir la
carte).
Quant à
la langue macédonienne, officiellement «elle n’existe pas», car c’est un
«pseudo-langage» purement inventé par des idéologues. En mai 2010, le
président de la Grèce, M. Karolos Papoulias, déclarait à la presse: «Les
Macédoniens n'existent pas comme nation séparée, ce sont des Bulgares qui ont
usurpé l'histoire, et le nom de la Macédoine.» Ces propos témoignent de
l'idéologie xénophobe des dirigeants grecs. Il est vrai que, au moment de
l'indépendance, la Macédoine avait rappelé à l'article 1 de la Constitution sa
«vocation» à «réunifier» tous les
territoires «macédoniens», soit en fait la Macédoine grecque, d'où proviennent
les insignes et le premier drapeau en question de ce jeune pays. Certains
croient aussi que la république de Macédoine du Nord n'avait pas à s'attribuer exclusivement
une appellation régionale («Macédoniens») que les Albanais, les Grecs et les
Bulgares partagent aussi.
|
Quoi qu'il en soit, de nouvelles négociations ont
eu lieu et, après ratifications par la Grèce et la Macédoine (accord approuvé le
11 janvier 2019 par le Parlement macédonien et le 25 janvier par le Parlement
grec), la république de Macédoine s'appelle désormais
Macédoine du Nord.
Le fond du problème est que la «Macédoine» a failli faire
renaître le «conflit macédonien», si sanglant, du début du XXe
siècle, ce qui explique le caractère enflammé des réactions de part et d'autres
(en Bulgarie aussi). N'oublions, pour la petite histoire, que c'est précisément
en Macédoine du Nord, alors ottomane, qu'a été créé le premier mandat international avec
une
gendarmerie étrangère, à l'image ce qui existe de nos jours en Bosnie-Herzégovine, ce qui
permet de mieux saisir la dimension du problème, moins insignifiant qu'il n'y
paraît de prime abord. Les autorités de Skopje (Macédoine), à la recherche compréhensible
d'une doctrine historique assurant la cohésion du pays, cultivent depuis
volontairement la confusion entre le terme géographique de Macédoine et le terme
historique, poursuivant cette exploitation systématique de l'histoire antique si
caractéristique des Balkans. Ainsi, dans les écoles de Macédoine du Nord, il
était encore enseigné récemment qu'Alexandre le Grand était «macédonien» (soit «slave
macédonien» dans ce contexte) et qu'il parlait déjà le «slave», et ce, neuf
siècles avant l'arrivée des populations slaves dans la région!
La minorité macédonienne de Grèce se plaint d’être harcelée et
maltraitée par la police, en plus d’être privée de sa liberté d’expression.
L’organisation Amnistie International a souvent protesté contre le fait que
des Macédoniens seraient même physiquement torturés par la police. De plus,
les Slaves macédoniens affirment qu’il ne leur est pas permis d'ouvrir des écoles
publiques pour instruire leurs enfants dans leur langue maternelle. D'ailleurs, la
Grèce a déjà été condamnée par le Tribunal européen pour les Droits de
l'homme pour la violation de la liberté d'association parce que les tribunaux
grecs n'ont pas permis en 1990 la création de la Maison de la civilisation
macédonienne. Le Tribunal européen a mentionné qu’il était nécessaire
pour le gouvernement grec de respecter les documents de l'OSCE (Organisation pour
la sécurité et la coordination en Europe) qu'il avait signés, mais qu'il avait
considérés comme étant simplement déclaratifs et sans valeur juridique.
3.4 Les Bulgares
Quant aux Bulgares, il n’en est jamais fait mention dans le pays. Les
minorités bulgares sont ignorées parce qu’ils font partie, avec la Grèce,
des «ennemis historiques» de la Grèce. La Bulgarie ne reconnaît pas plus de
minorités (contrairement à la Roumanie) et la situation des Grecs de Bulgarie
n'est pas reluisante. Toutefois, les Bulgares ne représentent plus depuis les
années 1970 l'un des «grands ennemis», date à laquelle Grecs et Bulgares ont
cessé leur revendication territoriale croisés et ont allégé leur dispositif
militaire.
3.5 Les
Arvanites
Les Arvanites (Gréco-Albanais), pour leur part, sont devenus la cible d’une
politique radicale d'assimilation; le gouvernement grecs a interdit l’emploi
public de la langue maternelle et les noms de lieu albanais ont été
hellénisés. Quant à la minorité tsigane, elle est systématiquement soumise
à la discrimination dans les domaines de l’éducation, de l’emploi et du
logement, et est régulièrement expulsée et violentée par la police grecque.
3.6 Les enfants tsiganes/roms
En ce qui a trait particulièrement aux enfants tsiganes/roms,
ils sont totalement exclus du système d'éducation dans la mesure où ils sont
victimes de discrimination raciale et, en raison de leur extrême pauvreté, ils
n'ont pas la possibilité de compléter leur instruction primaire de base, que ce
soit en turc ou en grec. En effet, de nombreux enfants tsiganes/roms en Grèce
sont soumis à la ségrégation dans des écoles ghettos ou des classes réservées,
dispensant un enseignement de qualité inférieure. Certaines autorités
municipales et scolaires entravent volontairement l'accès des enfants tsiganes à
l'éducation en refusant d'inscrire les élèves dans les écoles locales ou en les
dispersant loin de leur lieu de résidence, sans parler le refus de leur fournir
un transport scolaire adapté.
En conséquence de cette pratique, les enfants
tsiganes placés dans des écoles éloignées de leur foyer ne sont pas scolarisés,
faute de transport. Cette pratique est fondée sur une notion raciste laissant
supposer que les enfants tsiganes sont moins aptes que les autres enfants et que
leur présence à l'école aura pour effet d'empêcher les enfants non tsiganes
d'atteindre de bons résultats. Dans d'autres cas, les autorités scolaires
«oublient» simplement qu'il existe des enfants tsiganes d'âge scolaire dans leur
région, lesquels doivent être inscrits à l'école. Évidemment, cette attitude
anti-tsigane entretenue par les responsables locaux et la communauté majoritaire
constituent un sérieux obstacle pour l'intégration des Tsiganes dans la société
grecque. Dans son rapport de février 1999 au Comité des Nations unies pour
l'élimination de la discrimination raciale, le gouvernement grec a rédigé ce
commentaire:
Unfortunately, the attitudes of local communities, as expressed
through the attitude of local government bodies, constitutes, in a
number of cases, a basic obstacle in every attempt at reform and
efforts to improve conditions. It is obvious that, in relation to
the perceptions and attitudes of the majority of the population
towards this particular social group, invisible but powerful
mechanisms leading to a way of thinking or mentality that runs
counter to the aims of the programme still exist. |
[Malheureusement, les
attitudes des communautés locales, tel qu'elles sont exprimées à
travers l'attitude des collectivités locales, constituent, dans un
certain nombre de cas, un obstacle fondamental à toute tentative de
réforme et d'efforts pour améliorer les conditions scolaires. Il est
évident que, en ce qui concerne les perceptions et les attitudes de
la majorité de la population envers ce groupe social particulier, il
existe toujours des mécanismes invisibles mais puissants conduisant
à un mode de pensée ou de mentalité allant à l'encontre des
objectifs du programme.] |
Même pour les enfants tsiganes qui
terminent de façon plus ou moins sporadique leur école primaire, il existe
une forte tendance à l'abandon scolaire lorsque les enfants atteignent l'âge
de 12 ans. Selon les propres estimations du gouvernement grec, soixante pour
cent des Tsiganes dans le groupe d'âge des 18-50 ans n'ont jamais fréquenté
l'école et sont en fait des analphabètes; une autre tranche de 22 % est
considérée comme fonctionnellement analphabète, car les individus n'auraient
fréquenté l'école primaire que de façon épisodique. Il ne reste que 18 % des
Tsiganes qui ont terminé avec succès leurs études primaires et ont obtenu un
diplôme d'études, ce qui comprend ceux qui n'ont obtenu qu'un diplôme
primaire seulement sans jamais avoir commencé ou terminé leur secondaire.
Le quasi-refus de reconnaître le droit à
l'instruction à la minorité tsigane touche particulièrement la communauté
musulmane de la Thrace occidentale. Or, comme les Tsiganes musulmans de
Thrace forment une partie de la minorité musulmane, ils ont le droit, en
vertu du traité de Lausanne de 1923, de recevoir leur instruction en turc
(non en tsigane), la seule langue officiellement reconnue chez une minorité
en Grèce. Ce droit est nié dans les faits.
1.1 La politique d'ouverture
En effet, d'un côté, l'accent est mis sur les avantages du
multilinguisme auprès des jeunes générations en guise de politique d'ouverture
aux autres langues. Dans la plupart des cas, la première langue étrangère que
les enfants apprennent est l'anglais, qui est la langue internationale
dominante, tandis que l'allemand, l'italien, l'espagnol et le français sont le
deuxième choix. L'anglais est enseigné comme première langue étrangère
obligatoire dans les écoles publiques grecques à partir de la troisième année,
et les élèves doivent choisir d'étudier le français ou l'allemand comme deuxième
langue étrangère de la cinquième année jusqu'à la fin du lycée.
1.2 La langue des immigrants
Afin de favoriser leur adaptation, l'Union européenne finance
l'enseignement de la langue maternelle des enfants immigrés dans les écoles
publiques. Toutefois, ces langues ne semblent pas être appréciées en Grèce, ce
qui signifie que l'enseignement dans ces langues est difficilement mis en oeuvre.
Un autre cas d'enseignement dans une langue minoritaire est
celui des écoles privées des communautés israélienne et arménienne, où dans
certaines matières l'hébreu et l'arménien sont enseignés respectivement. Plus
précisément, il y a une école primaire israélienne privée à Athènes et une à
Thessalonique, où l'histoire juive et le sujet de l'enseignement religieux en
grec sont enseignés, ainsi que la langue hébraïque à environ 200 de leurs
élèves. Respectivement, dans les trois écoles primaires arméniennes et au lycée
arménien d'Athènes, où environ 250 élèves étudient, la langue, l'histoire et la
religion arméniennes sont enseignées. Cependant, l'ancienne communauté
arménienne de Thessalonique n'a pas eu son propre établissement d'enseignement
depuis 1947. Il en va de même pour les communautés arméniennes de Macédoine, de
Thrace et de Crète.
et du multiculturalisme (la plupart des Grecs connaissent les
langues étrangères comme clé pour trouver du travail) et de l'autre, il y a le
souci de l'identité nationale (par exemple, "l'affaiblissement" du grec moderne
par les jeunes). Néanmoins, le multilinguisme et en particulier les langues des
immigrants des pays tiers ou des Balkans ne sont pas très appréciés. Il convient
de noter que l'enseignement de la langue maternelle des enfants immigrés dans
les écoles publiques est mis en œuvre avec difficulté, bien qu'il y ait un
financement de l'Union européenne. Cependant, la nouvelle position de la Grèce
dans les Balkans et dans l'UE prédispose positivement les Grecs aux contacts
avec d'autres cultures.
En outre, étant donné le pourcentage élevé d'étudiants étrangers dans les écoles
grecques, il est impossible de mettre en œuvre des types de politiques de langue
grecque plus anciens, qui se concentraient uniquement sur le grec comme langue
maternelle à la maison ou à l'étranger (diaspora grecque) et ignoraient
l'exigence du grec comme langue étrangère ou seconde. C'est pourquoi une
politique linguistique innovante pour la promotion du grec comme deuxième langue
commence progressivement à apparaître.
Sans aucun doute au cours des dernières décennies, en raison de la position de
la Grèce dans l'UE, il y a eu une réévaluation de la notion traditionnelle de
politique linguistique. Ce qu'il faut, c'est une politique linguistique qui
promeuve à la fois la langue grecque et les langues d'autres ethnies établies
dans le pays.
Διαβάστε περισσότερα: Pratique des langues en Grèce -
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X
En Grèce, il n'existe aujourd'hui aucune protection juridique
institutionnalisée d'une autre langue que celle ci-dessus, à l'exception du turc
en Thrace, conformément au cadre juridique applicable pour la mise en œuvre des
dispositions du traité de Lausanne, qui garantissent les droits à l'éducation
des musulmans dans leur langue maternelle. Langue. Ainsi, le turc et le grec
sont la langue d'enseignement dans les écoles des minorités en même temps.
L'éducation des minorités couvre principalement l'enseignement primaire (234
écoles primaires), mais aussi dans certains cas l'enseignement secondaire (deux
gymnases et lycées, ainsi que deux séminaires; en outre, cinq gymnases où seule
la matière religieuse est enseignée - à savoir le Koran- en turc). Les problèmes
rencontrés par l'éducation des minorités concernent les 9 500 enfants musulmans
ainsi que leurs enseignants et professeurs. Plus important, entre autres, le
manque d'apprentissage des étudiants en turc et en grec, ainsi que la formation
insuffisante des enseignants (qui sont principalement des diplômés de l'Académie
pédagogique spéciale de Thessalonique).
Les autres langues ne sont pas réglementées. Slavo-macédonien parce qu'ils
étaient au centre de "Makedoniko"; Pomak parce que les Turcs beaucoup plus forts
monopolisaient le cadre institutionnel pour la protection linguistique de la
minorité musulmane; Vlach et Albanais parce qu'ils sont en grande dispersion et
souvent en déclin significatif. Enfin, concernant le roman - la langue des
gitans - avant d'aborder la question de la mise en place de cette langue,
d'autres problèmes vitaux rencontrés par le groupe de locuteurs devront être
résolus.
Aujourd'hui et après une longue période d'inactivité , la Grèce montre son
intérêt à s'aligner sur l'environnement juridico-politique international qui
perçoit la promotion des langues minoritaires comme un facteur clé pour accepter
une culture européenne commune par le respect de l'altérité. L'introduction dans
l'ordre juridique grec de dispositions contraignantes pour la protection des
différences linguistiques n'a eu lieu que très récemment. Le Pacte international
relatif aux droits civils et politiques prévoit la non-privation du droit
d'utiliser la langue de la minorité (article 27), tandis qu'une disposition
similaire existe dans le Pacte international relatif aux droits de l'enfant
(article 30). La signature et la ratification attendue de la Convention-cadre
pour la protection des minorités nationales pourraient donner un nouvel élan au
débat.
Les dynamiques sociales et politiques sont le facteur décisif qui renforce ou
affaiblit la position des langues minoritaires: la volonté politique structurée
de la part de l'État et la manifestation détectable d'une revendication
collective de préservation de leur identité linguistique de la part des
locuteurs.
CCCCCCCCCC
Greek language question =
https://en.wikipedia.org/wiki/Greek_language_question
Voir: Greece: law 1976 official language
La nouvelle loi sur l'éducation a été publiée - Loi 4692/2020 "Modernisation de
l'école et autres dispositions"
NOMOΣ ΥΠ’ ΑΡΙΘΜ. 4692 ΦΕΚ Α 111/12.6.2020
Αναβάθμιση του Σχολείου και άλλες διατάξεις.
Άρθρο 2
Δραστηριότητες στην αγγλική γλώσσα στο Νηπιαγωγείο
Στην παρ. 9 του άρθρου 3 του ν. 1566/1985 (Α΄167) προστίθεται περ.
γ΄ ως εξής:
«γ) Με απόφαση του Υπουργού Παιδείας και Θρησκευμάτων, η οποία
εκδίδεται ύστερα από εισήγηση του Ινστιτούτου Εκπαιδευτικής
Πολιτικής, εισάγεται πιλοτικά στο υποχρεωτικό πρόγραμμα του
Νηπιαγωγείου της δημόσιας πρωτοβάθμιας εκπαίδευσης δράση για τη
δημιουργική ενασχόληση των μαθητών με την αγγλική γλώσσα μέσω της
οργάνωσης και υλοποίησης δραστηριοτήτων, κατά τη διάρκεια των οποίων
οι μαθητές αλληλεπιδρούν με έναν εκπαιδευτικό κλάδου ΠΕ06 Αγγλικής
Φιλολογίας παρουσία του Νηπιαγωγού. Με όμοια απόφαση, η οποία
εκδίδεται ύστερα από εισήγηση του Ινστιτούτου Εκπαιδευτικής
Πολιτικής, ορίζονται η χρονική διάρκεια εφαρμογής της πιλοτικής
δράσης, η διάρκεια ενασχόλησης των μαθητών με την αγγλική γλώσσα, ο
αριθμός και η γεωγραφική κατανομή των σχολικών μονάδων στις οποίες
εισάγεται πιλοτικά η ενασχόληση αυτή και ρυθμίζεται κάθε θέμα
σχετικό με την εφαρμογή του πιλοτικού προγράμματος,
συμπεριλαμβανομένων της οργάνωσης και υλοποίησης σχετικών
επιμορφωτικών και υποστηρικτικών δραστηριοτήτων. Με την ολοκλήρωση
της πιλοτικής δράσης, το Ινστιτούτο Εκπαιδευτικής Πολιτικής
συντάσσει έκθεση αποτελεσμάτων και γνωμοδοτεί προς τον Υπουργό
Παιδείας και Θρησκευμάτων αναφορικά με την εισαγωγή ή μη της
δημιουργικής ενασχόλησης των μαθητών του Νηπιαγωγείου με την αγγλική
γλώσσα σε όλα τα Νηπιαγωγεία ή άλλως τη διενέργεια ή μη νέας
πιλοτικής δράσης.».
|
NOME NUMBER 4692 Α 111 / 12.6.2020
Mise à niveau de l'école et autres dispositions.
Article 2
Activités en anglais à la maternelle
Au paragraphe 9 de
l'article 3 de la loi
1566/1985 (AD167) est
ajouté le cas c comme
suit:
<< C) Par décision du
Ministre de l'éducation
et des religions,
publiée sur proposition
de l'Institut de
politique éducative, une
action pour l'engagement
créatif des élèves de
langue anglaise à
travers l'organisation
et le matériel est
introduite dans le
programme obligatoire du
jardin d'enfants de
l'enseignement primaire
public. , au cours de
laquelle les élèves
interagissent avec un
professeur de PE06
Philologie anglaise en
présence du professeur
de maternelle.
Une décision similaire, rendue sur recommandation de l'Institut de politique éducative, définit la durée de l'action pilote, la durée de l'implication des élèves en langue anglaise, le nombre et la répartition géographique des unités scolaires dans lesquelles cette activité est pilotée. et réglemente toutes les questions liées à la mise en œuvre du programme pilote, y compris l'organisation et la mise en œuvre des activités de formation et de soutien pertinentes.
À l'issue de l'action pilote, l'Institut des politiques éducatives prépare un rapport de résultats et conseille le ministre de l'Éducation et des Religions sur l'introduction ou non de l'engagement créatif des élèves de la maternelle avec la langue anglaise dans toutes les écoles maternelles ou autrement non menée action pilote. "
|
7 Le droit international et les minorités
La législation grecque interdit la discrimination fondée sur l'origine
ethnique, mais l'article 19 du Code de la nationalité prévoit que les
citoyens grecs qui n'appartiennent pas à la communauté de souche grecque
peuvent être déchus de la nationalité lorsqu'ils quittent le pays; les
autorités grecques considèrent que ces citoyens partent sans esprit de retour.
En 1994 et en 1995, un certain nombre de personnes ont été touchées par de
telles mesures: quelque 60 000 citoyens grecs, principalement d’origine
turque, ont été ainsi privés de leur nationalité. L'abrogation de cet
article a déjà fait l'objet d'un vaste débat public et le Conseil de l’Europe
considère que l'ajustement du Code de la nationalité sur la
législation européenne commune devrait se faire sans plus tarder. Après de
multiples pressions internationales, la Grèce a finalement consenti à abolir
en 1998 cette disposition de son article 19 du Code de la nationalité,
mais sans effet rétroactif..
Il n’est pas dû au hasard que la Grèce n'ait pas encore signé ou
ratifié la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires et
la Convention de l'UNESCO concernant la lutte contre la discrimination dans
le domaine de l'enseignement. Il serait urgent qu'elle le fasse au plus
tôt. Heureusement, en 1997, le gouvernement grec a signé mais non ratifié la
Convention-cadre pour la protection des minorités nationales. Bien
sûr, le gouvernement a déclaré que la Convention ne s'appliquerait qu'à la
minorité musulmane, puisque c'est la seule reconnue. En outre, le
Conseil de l’Europe recommande à la Grèce d’accepter l'article 14 de la
Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de
discrimination raciale et d’envisager la signature et l'adoption de l'Accord
européen concernant les personnes participant aux procédures devant la
Commission et la Cour européennes des droits de l'Homme. Enfin, on espère
que la ratification du Pacte international relatif aux droits civils et
politiques de 1966, actuellement en cours d'examen au Parlement grec,
interviendra dans les plus brefs délais. À l'heure actuelle, il n'existe pas
en Grèce d'organisme spécialisé chargé des questions de racisme et
d'intolérance.
Pourtant, le pays est encore aux prises avec un évident
climat de xénophobie, bien
encré non seulement dans les mentalités, mais surtout dans les médias et l’Administration
publique. Selon le Greek Helsinki Monitor, les décisions
gouvernementales destinées à instaurer le respect des normes internationales
en matière des droits de l’homme ou des droits des minorités linguistiques
se heurtent trop souvent à la résistance de la part de fonctionnaires qui
agiraient comme un «État fantôme» et saperaient systématiquement les
quelques rares politiques d’ouverture du gouvernement. Par ailleurs, celui-ci semble
se montrer réticent quand il s’agit de s’opposer à cette résistance
bureaucratique.
Terminons en relevant un fait datant du 2 février 2001, qui
illustre la perception qu'on a des langues minoritaires en Grèce. Le 1er juillet 1995, lors de la Rencontre panhellénique annuelle
des Aroumains (Société de culture aroumaine) à Naoussa, M. Sotiris Bletsas,
un architecte grec, a remis au président de ladite association une publication
en langue anglaise du Bureau européen pour les langues moins répandues, dans
laquelle il était mentionné que, dans certaines régions de Grèce, on parle,
outre le grec, «cinq autres langues». L’architecte fut poursuivi pour
«diffusion de fausse information » et déféré devant la 10e cour
d’Athènes, le 2 février 2001. Lors du procès, la cour a décidé que la mention des «langues autres que le grec» parlées en Grèce
constituait «un délit criminel». Et le tribunal a condamné l’accusé
Sotiris Bletsas à 15 mois de prison et à 500 000 drachmes (environ 1300 $US),
l'accusé ayant même aggravé son cas en faisant référence à son «idiome» maternel, le
turc. Des députés du Parlement européen ont dénoncé l’article 191 du Code
pénal grec, qui permet de telles accusations se référant au concept de
«dissémination de fausses information». Selon la 10e cour
d’Athènes: «Nulle part en
Grèce on ne parle d'autre langue que le grec.» Le procureur du gouvernement
grec a
déclaré ce qui suit à l’issue du procès:
Nous avons traité d’un problème important qui peut être résumé par
les vers du poète: «Ma langue est le grec!» La question de la langue est
fondamentale. Nous sommes en train de parler d’un facteur décisif dans la
formation de la conscience nationale, d’un critère racial. L’accusé
aurait dû faire davantage attention en distribuant ce feuillet. |
Il a été également question du Bureau pour les langues moins répandues, l’organisme
responsable du texte incriminé. Le président de la cour a conclu ainsi:
«Peut-être que les Européens n’ont pas été bien informés. La personne
qui a rédigé le texte devrait être identifiée et en subir les
conséquences.» Comme quoi, encore une fois, le ridicule ne tue point en Grèce,
surtout lorsqu'il est question de langue!

En fait, les Grecs mènent la vie dure aux Turcs de leur pays, mais les Turcs de
Turquie font de même à «leurs» Grecs. Il semble que la Grèce redoute une
éventuelle balkanisation de son territoire et qu’elle chercherait ainsi à se
protéger de ses puissants voisins turcs. Les causes d’une telle attitude
d’hostilité et de fermeture de la part de la Grèce envers ses minorités sont
nombreuses. Elles reposent en partie sur l'homogénéisation ethnique du pays, qui
compte près de 90 % de Grecs. Mais le rôle de l'Église orthodoxe grecque n'y est
certainement pas étranger, car depuis des siècles celle-ci n'a jamais cessé de
fournir à l'État grec ses ressources idéologiques et spirituelles, lesquelles
ont permis de façonner la cohésion nationale et la continuité de la souveraineté
de l’État. De plus, l'armée et le système d'éducation ont toujours été des
mécanismes de reproduction de l'idéologie nationaliste. Il faut ajouter à ces
causes une compréhension restrictive des engagements internationaux de la Grèce
au sujet de ses minorités, ainsi qu'une conception juridique étroite et déphasée
des droits civils chez les groupes minoritaires, sans parler du niveau de
culture politique très médiocre à cet égard de la part des dirigeants grecs. Ces
faits ont contribué à considérer avec restriction les droits civils et
communautaires légitimes des membres des minorités en Grèce.
De toute façon, la politique
linguistique de la Grèce n’est pas vraiment excusable. Lorsqu’un État ne peut même
pas accepter la présence d’une faible minorité turque représentant 3 % de la
population dont il n’a rien à craindre, il ne s'agit même plus d’intolérance,
mais de sectarisme et de fanatisme. Pourtant, la Grèce, qui prétend offrir au
monde l’image d’un régime démocratique, ne reconnaît aucunement ses
minorités linguistiques, mais seulement une minorité religieuse, et ne lui accorde que des droits fort limités
(quand elle les lui accorde). En Grèce, il n'existe guère de protection juridique
d'une quelconque langue minoritaire, sauf pour les Turcs dans la région de la
Thrace, en conformité avec le cadre juridique des dispositions du
traité de Lausanne, qui garantissait les
droits linguistiques scolaires pour les musulmans, mais avec les mêmes droits
pour les Grecs de Turquie. Sans cette «compensation» de la part de la Turquie,
jamais la Grèce n'aurait accepté de tels droits à «ses» Turcs. En 1997, le président de la République, M. Kostis Stephanopoulos, faisait la déclaration suivante au Conseil de l'Europe:
La Grèce attache une importance particulière à la lutte contre le
racisme et la xénophobie, sujet qu'elle considère comme une des grandes
priorités. [...] Par ailleurs, la mise en vigueur imminente de la
Convention-cadre pour la protection des minorités nationales, convention
que mon pays vient de signer, constitue un pas très important pour la
protection des groupes minoritaires en Europe et contribuera à la
stabilité et à la paix dans notre continent.
|
Il terminait en citant cette phrase célèbre de Périclès (-495 à
-429): «Nous avons un régime politique qui n'a rien à envier à celui des
autres». Malheureusement, les politiciens contemporains ont souvent eu «l'honneur» d'être
perçus comme les plus mauvais gouvernants de toute l'Europe. Ils ont trafiqué
les livres de l'État et fermé les yeux sur une économie au noir qui dépassait les
20 % du PIB. Ils ont laissé enfler un appareil administratif dont l'obésité n'avait
d'égale que son inefficacité. Les mégaprogrammes sociaux ont été impuissants à
soulager la pauvreté. Et une culture politique fondée essentiellement sur des
pots-de-vin qui auraient atteint, selon Transparency International, les 88
milliards d'euros, soit 120 milliards de dollars US. Comme quoi la naïveté n’a jamais fait mourir personne, parce que,
sur la question des minorités nationales, la Grèce en est encore au siècle de
Périclès! En effet, parmi les États d'Europe, la Grèce traîne nettement la patte en la
matière. L'enseignement des minorités constitue un enjeu de taille pour tous les
pays d'Europe. S'il est vrai que le droit à l'instruction est un droit
fondamental reconnu, il n’en va pas ainsi pour l'enseignement dans les langues
minoritaires en Grèce. D'ailleurs, les instruments contraignants du Conseil de
l’Europe allant en ce sens n’ont jamais été ratifiés par la Grèce... ni par la
Turquie.
Sans un changement fondamental de sa politique, la Grèce
va continuer à être pointée du doigt par les organisations gouvernementales européennes et les
organisations non gouvernementales, qui surveillent le respect des droits de l’Homme
et des droits des minorités dans l’ensemble de l’Europe. La Grèce demeure
l’un des rares pays à ne pas avoir ratifié les traités internationaux de l’Union
européenne reconnaissant des droits réels aux minorités. L’attitude de ce
pays apparemment démocratique est non seulement indéfendable
mais proprement scandaleuse. La Grèce en est restée à la mentalité qui a
prévalu au traité de Lausanne de 1923. Si celui-ci a paru révolutionnaire
pour l’époque, les mentalités ont bien changé depuis en ce qui concerne les
minorités nationales... sauf en Grèce et en Turquie. Ce n'est pas pour rien que la Grèce
n'a jamais ratifié la Convention-cadre pour la
protection des minorités nationales.
La Grèce a bien mérité sa
réputation de «plus mauvais gestionnaire d'Europe». Ces dernières décennies, la Grèce est
devenue un
pays ruiné
et ravagé, incapable de rembourser ses prêts — qui venaient à échéance; elle
obtenait, sur les marchés, des crédits à des taux usuraires qui n'ont fait
qu’aggraver une situation, sa dette étant passée à 175 % de la
taille de son économie du fait de l’interminable récession alimentée par les
mesures d’austérité. La Grèce s'est embourbée
en raison de la lourdeur de son administration publique, de l’inefficacité de
son régime fiscal et de l’inertie de son système économique. La dette publique a
grimpé en 2018 à quelque 335 milliards d'euros (180,4% du PIB contre 176,1%
l'année précédente), mais une baisse était prévue en 2019, à 167,8%. Toutefois,
la Grèce s'est engagée auprès de ses créanciers à continuer à réaliser un
excédent budgétaire de 3,5% du PIB d'ici 2022. Bref, l’économie grecque semble
renouer avec la croissance.
Au cours des quarante
dernières années, les Grecs ont essayé la gauche et la droite avec les résultats
qu’on connaît. Les conservateurs et les socialistes ont été discrédités. Quel que soit le
parti au pouvoir, des réformes s’imposaient de toute urgence.
Aujourd'hui, le gouvernement
grec a finalement compris que le temps des bravades et des psychodrames était
terminé et qu'il ne menait à rien. Il semble vouloir passer à autre chose, d’où
sa décision d’accepter les plans d’aide et de rigueur des Européens. La Grèce a
maintenant besoin de stabilité afin de sortir de l’ornière. Pour y parvenir.
Dans de telles
conditions, les questions linguistiques seront reléguées aux oubliettes pour au
moins une génération. De fait, les experts ont exprimé de nombreuses
préoccupations au sujet des droits des minorités ethniques et religieuses,
qu’elles soient tsiganes/roms, macédoniennes ou musulmanes.
Dernière mise à jour:
17 juil. 2020