Communauté forale de Navarre

Navarre

Communauté forale de Navarre 

Comunidad Foral de Navarra
Nafarroako Foru Komunitatea

(Espagne)

Capitale: Pampelune
Population:
528 837 (2001)
Langues officielles:
castillan et basque (partiellement)
Groupe majoritaire:
castillan (90 %)
Groupe minoritaire:
basque (10 %)
Système politique:
l’une des 17 Communautés autonomes d’Espagne
Articles constitutionnels (langue): art. 3 de la Constitution espagnole de 1978; art. 9 du Statut d'autonomie (1982) de la Communauté forale de Navarre

Lois linguistiques:
 Loi forale 18/1986 du 18 décembre sur le basque; Décret foral 338/1990 du 20 décembre établissant les dénominations officielles de la capitale de la Communauté forale; Décret foral 346/1990 du 20 décembre créant l'École officielle des langues de Pampelune; Décret foral 102/1991 du 21 mars créant la Commission sur le bilinguisme de la Direction générale à l'éducation du ministère de l'Éducation, de la Culture et des Sports; Décret foral 270/1991 du 12 septembre régissant l'utilisation par les organismes de la Communauté forale des différentes dénominations officielles adoptées par le gouvernement de Navarre, en vertu de la Loi forale sur le basque; Décret foral 135/1994 du 4 juillet portant sur la réglementation de l’usage de l’euskara dans l’Administration publique de la Navarre; Décret foral 135/1996 du 11 mars créant le Conseil navarrais de l'euskera; Décret foral 372/2000 du 11 décembre réglementant l'utilisation du basque dans l'Administration publique de Navarre; Décret foral 29/2003 du 10 février réglementant l'usage du basque dans l'Administration publique de Navarre;  Décret foral 183/2007 du 10 septembre créant l'organisme autonome Euskararen Nafar Institutua / Institut navarrais du basque.

Lois scolaires:
Décret foral 67/1993 du 22 février établissant le programmes d'études de l'enseignement secondaire dans la Communauté forale de Navarre; Décret foral 23/2007 du 19 mars établissant le programme d'études dans l'enseignement du second cycle dans l'éducation enfantine dans la Communauté autonome de Navarre; Décret foral 24/2007 du 19 mars établissant le programme d'études dans l'enseignement de l'éducation primaire dans la Communauté forale de Navarre; Décret foral 25/2007 du 19 mars établissant le programme d'études dans l'enseignement de l'éducation secondaire obligatoire dans la Communauté forale de Navarre; Décret foral 28/2007 du 26 mars réglementant le premier cycle de l'éducation enfantine dans la Communauté forale de Navarre et établissant les exigences auxquelles doivent satisfaire les établissements qui les dispensent, ainsi que leurs contenus pédagogiques.

Lois à portée linguistique: Loi organique 13/1982 du 10 août sur la réintégration et l'amélioration du Régime foral de Navarre; Décret foral 336/1997 du 10 novembre réglementant l'attribution de stations émettrices de radiodiffusion sonore par ondes métriques avec modulation de fréquence dans la Communauté forale de Navarre; Décret foral 139/2001 du 4 juin modifiant le décret foral 347/1993 du 22 novembre réglementant l'entrée et la vacance des postes de travail dans le Service navarrais de la santé-Osasunbidea; Loi forale 32/2002 du 19 novembre réglementant le système de bibliothèque de Navarre; Décret foral 110/2003 du 12 mai approuvant les statuts de l'Université publique de Navarre; Loi 22/2003 du 9 juillet sur les faillites; Décret foral 172/2004 du 19 avril établissant le régime général pour l'octroi des bourses de formation pour l'Administration de la Communauté autonome de Navarre et ses organismes autonomes; Décret foral 205/2004 du 17 mai approuvant le Règlement régissant les obligations sur la facturation; Loi forale 15/2004 du 3 décembre sur l'Administration de la Communauté forale de Navarre; Décret foral 117/2007 du 3 septembre approuvant les statuts de l'organisme autonome de l'Institut navarrais d'administration publique;

1 Situation générale

La Navarre (Navarra en castillan; Nafarroa en basque) est une Communauté autonome de 528 837 habitants du nord de l'Espagne. Le territoire, d'une superficie de 10 421 km², est limité à l'ouest par le Pays basque, au sud-ouest par le Rioja, à l'est et au sud-est par l'Aragon et au nord par la France (Pays basque français). Pampelune (Pamplona) est la capitale de la Navarre, dont le nom officiel est, en espagnol, Comunidad Foral de Navarra, en basque, Nafarroako Foru Komunitatea, ce qui se traduirait mot à mot en français par Communauté forale de Navarre. Le mot foral vient du latin foris signifiant «dehors» (ou «excepté», «hormis», «sauf») et désignait à l’origine les provinces basques bénéficiant au sein du royaume de Castille de certaines «exemptions». Ce terme est resté dans la dénomination officielle et reflète un certain attachement aux «franchises» du passé accordées à la Navarre par les souverains de Castille.

D’un point de vue historique, la Navarre constitue l’une des sept provinces faisant partie du «Grand» Pays basque (carte1). Parmi ces provinces, quatre sont situées en Espagne (Vizcaya [n° 3], Alava [n° 2], Guipúzcoa [n°1] et Navarre [no 4] (carte 2) et trois en France (le Labourd [n° 5], la Basse-Navarre [n° 6] et la Soule [n° 7]). Le «Grand» Pays basque d’aujourd’hui correspond, d’une part, aux Provincias Vascongadas (ou provinces basques-espagnoles) et, d’autre part, au département français des Pyrénées-Atlantiques. La Navarre ne compte qu'une seule province qui porte le même nom.

Le drapeau de la Navarre représente des chaînes d'or en souvenir du passé glorieux de l'histoire basque, rappelant plus précisément la victoire de Las Navas-de-Tolosa remportée en 1212 sur les Maures par Sanche-le-Fort, roi de Navarre. Au centre des chaînes est placée l'émeraude que le roi maure vaincu, Mohammed El Hacer, portait sur son turban.

2 Le Pays basque et la Navarre

La Navarre fait partie historiquement du Pays basque, même si la Communauté forale de Navarre ne compte que 10 % de locuteurs basques et que la plupart des Navarrais défendent l'idée que leur région est une entité distincte du Pays basque. On prétend que, lors d’un référendum tenu avant 1980, la Navarre aurait majoritairement refusé d’être incorporée au Pays basque et aurait obtenu de se constituer en communauté distincte. Malheureusement, il n'y a jamais eu de référendum en Navarre sur cette question, ni avant 1980 ni après. La Navarre est même la seule Communauté autonome dont les habitants n'ont jamais été consultés directement.

Dans l'ensemble du «Grand Pays basque» (espagnol et français), qui compte une population de 2,9 millions d'habitants, on dénombre environ 700 000 bascophones (environ 25 % de la population totale). Quelque 600 000 d’entre eux résident dans les quatre provinces du Sud (Espagne) et 67 267 dans les trois provinces du Nord (France), ce qui représente respectivement 23 % de la population du Pays basque espagnol et 26,8 % de celle du Pays basque français.

Les Basques sont donc répartis dans deux pays (l’Espagne et la France), sept provinces historiques et, au plan géopolitique, dans trois entités politico-administratives distinctes. Ces entités sont les suivantes:

1) Le département français des Pyrénées-Atlantiques: les provinces du Labourd, de la Basse-Navarre et de la Soule. Pop.: 67 267 bascophones (26,8 %) sur un ensemble de 250 194 habitants.

2) La Communauté autonome du Pays basque: les provinces de Vizcaya (27 % de bascophones), d’Alava (13,3 % de bascophones) et de Guipúzcoa (57,6 % de bascophones). Pop.: 548 100 bascophones (26,1 %) sur sur un ensemble de de 2,1 millions d’habitants.

3) La Communauté forale de Navarre: la province de Haute-Navarre (esp.: Navarra). Pop.: 52 000 bascophones (9,8 %) sur sur un ensemble de de 528 837 habitants.

La carte 3 représente ces trois entités politico-administratives. On constate que les Basques espagnols sont répartis en deux régions autonomes où ils sont minoritaires: la Communauté autonome du Pays basque (trois provinces) et la Communauté forale de Navarre (une seule province). Toutefois, bien que la Communauté forale de Navarre constitue en superficie la plus grande des provinces basques-espagnoles, elle n’est pas la plus peuplée, la province de Guipúzcoa et, surtout, celle de Vizcaya étant numériquement supérieures:

Navarre

528 837 habitants (10 % de bascophones)

Pays basque:

- Vizcaya: 1 163 671 habitants  (27 % de bascophones)
- Alava: 279 702 habitants  (13,3 % de bascophones)
- Guipúzcoa: 684 600 habitants (57,6 % de bascophones)

Quant aux Basques français, ils résident, rappelons-le, dans un département (les Pyrénées-Atlantiques) comprenant trois provinces: le Labourd (204 598 hab.), la Basse-Navarre (29 298 hab.) et la Soule (16 298 hab.). À partir de cette répartition géo-politique, on comprendra que les Basques soient divisés entre trois communautés nationales: ceux qui préfèrent se dire espagnols, ceux qui se considèrent français, et ceux qui s'estiment seulement basques. Il reste à distinguer les Basques espagnols, les Basques français, les Français basques et les Espagnols basques, sans oublier les Basques navarrais et les Navarrais basques!

3 Les données démolinguistiques

En 2001, la Navarre comptait 528 837 habitants, mais 600 231 habitants en janvier 2006. Cette année-là, les étrangers (ou immigrants) représentaient 9,1 % de la population navarraise. Au plan démolinguistique, quelque 24 % des habitants du Pays basque espagnol sont de langue maternelle basque (famille basque); ces locuteurs sont donc minoritaires dans les deux communautés autonomes.

Pays_basque-historique Quant aux territoires sous la juridiction de la Communauté autonome du Pays basque, seule la province administrative de Guipúzcoa (no 1) est majoritairement bascophone avec 57,6 % de la population; dans la province de Vizcaya (no 3), les bascophones forment 27 % de la population et seulement 13,3 % dans la province d'Alava (no 2).

Pour ce qui est des 52 000 bascophones de la Communauté forale de Navarre (no 4), ils comptent pour moins de 10 % de la population de cette région (env. 528 837 habitants), mais atteignent près de 25 % dans la zone bascophone du Nord. Contrairement à la Communauté autonome du Pays basque où le castillan et le basque sont co-officiels sur tout le territoire, le castillan est la seule langue officielle sur tout le territoire de la Communauté forale de Navarre. Cependant, le basque a également acquis ce statut dans la zone bascophone tout au nord du territoire de la Communauté forale de Navarre.

La figure qui suit représente le pourcentage des bascophones dans la Communauté forale de Navarre. Les grandes zones bascophones sont situées au nord, qui compte de 75 % à 100 % de locuteurs su basque. Au centre, on trouve une zone plus mixte où réside les bascophones dans des proportions allant de 5 % à 40 %. Le Sud est presque totalement castillanophone.

4 La langue basque

La langue basque (appelée euskara en basque) fait partie de la famille basque, car aucun lien de parenté n'a pu être établi de façon convaincante avec d'autres groupes linguistiques, pas même avec le finnois, le hongrois ou l'estonien. Le basque en Navarre est parlé par environ 10 % de la population, les autres parlant massivement le castillan. On sait que le basque se compose de plusieurs variétés dialectales dont les plus importantes sont, pour l’Espagne, le guipúzcoan, le biscayen et le haut-navarrais; pour la France, le labourdin et le bas-navarrais.

Or, la Navarre compte plusieurs variétés de basque: le haut-navarrais septentrional, le haut-navarrais méridional, le haut-navarrais oriental, le bas-navarrais occidental, le labourdin et le guipúzcoan. La plupart de ces variétés sont également parlées à l'extérieur de la Communauté forale de Navarre (voir la carte de gauche).

Bien que l’intercompréhension reste possible entre les différentes variétés linguistiques, la communication peut néanmoins en être gênée considérablement. Depuis environ 25 à 30 ans, un basque normalisé a été adopté, essentiellement à l'écrit, et pour remplir certaines fonctions sociales, particulièrement en Espagne de la part des gouvernements autonomes du Pays basque et de la Navarre.

Cela étant dit, on constate que l’érosion de la langue basque face au rouleau compresseur de l'espagnol et du français se poursuit malgré les politiques de promotion à son égard.

5 Données historiques

Les ancêtres de la communauté basque actuelle auraient occupé la région quelque 5000 ans avant notre ère, soit avant les premières colonisations indo-européennes. Il s’agit des Vascons qui firent officiellement leur apparition dans l'histoire à la fin du Ier siècle (avant notre ère), alors qu'ils repoussaient victorieusement les envahisseurs romains venus d'Espagne; cependant, ils durent se réfugier dans les montagnes du pays afin de préserver leur indépendance. L'origine du nom Basque utilisé aujourd'hui vient d'une déformation de Vascones qui était l'appellation que les Romains avaient donné à ce peuple qui occupait alors une partie du nord de l'Espagne. Les Vascons se convertirent au christianisme entre le IIIe et le Ve siècle, mais surent conserver leur langue ancestrale.

5.1 Le royaume de Navarre

Au VIe siècle, les Vascons combattirent les Wisigoths et les vainquirent. À la fin du VIe siècle, des groupes de Vascons espagnols émigrèrent vers le nord en traversant les Pyrénées jusqu'en Aquitaine (France), qui fut alors connue sous le nom de Gascogne (par altération du mot espagnol Vascones ou du français Vascons désignant les ancêtres des Basques). Les Vascons réfugiés dans leurs montagnes d’Espagne réussirent à résister aux Arabes qui dominèrent la plus grande partie de la péninsule ibérique (du VIIIe au XIe siècle).

C'est à Ronceveaux (Roncesvalles en espagnol et Orreaga en basque) que, selon la légende, Roland, qui conduisait l'arrière-garde de l'armée de Charlemagne, fut surpris par les Vascons le 15 août 778. Il sonna son cor, trop tard de telle sorte que Charlemagne ne put lui prêter assistance. Cette histoire de Roland inspira la plus célèbre des chansons de geste de l'époque.

Le royaume basque de Pampelune fut fondé en tant qu’entité politique indépendante vers 830. À la fin du Xe siècle, il devint le royaume de Navarre, englobant alors une partie du sud de la France (la Basse-Navarre). Ceux qui étaient devenus des Basques réussirent non seulement à préserver leur autonomie, mais aussi à étendre leur royaume jusqu’au-delà des Pyrénées: la Navarre comprenait alors la Haute-Navarre (la Navarre espagnole actuelle) et la Basse-Navarre (la Navarre française). Sous le règne de Sancho III (999-1035), la plupart des Basques vivaient sous une même autorité politique.

Cependant, après la mort de Sancho III en 1035, les nouveaux souverains de Castille et d’Aragon, frères de l'héritier de la couronne navarraise, rejetèrent la souveraineté du royaume de Navarre. Dès le début du XIe siècle, le royaume de Navarre entra dans une période d'isolement et de démembrement territorial.

L’unité basque s’effrita et, entre 1200 et 1370, toutes les provinces basques espagnoles (Guipúzcoa en 1200, Alava en 1331 et Vizcaya en 1370), la Haute-Navarre, finirent par être intégrées au royaume de Castille. De l’autre côté des Pyrénées, les provinces du Nord passèrent à la couronne d'Angleterre du XIIe au XIVe siècle (du temps de Jeanne d'Arc, la ville de Bayonne était «anglaise»). En 1512, le royaume de Navarre disparut, annexé par Ferdinand d’Aragon au royaume de Castille. Quant à la Basse-Navarre, elle réintégra définitivement la France; Henri IV (1572-1610) fut à la fois roi de France et de Navarre (celle du Nord). La couronne de Navarre (Basse-Navarre, celle du Nord) fut réunie à la couronne de France en 1620 par Louis XIII, puis disparut lors de la réorganisation administrative de 1789 pour être intégrée au département français des Pyrénées-Atlantiques, avec comme capitale Saint-Jean-Pied-de-Port. Celle-ci doit son nom à sa situation au pied du port (ou col) de Roncevaux au confluent des trois «nives» (rivières) d'Arnéguy, de Laurhibar et de Béhorléguy.

5.2  Les «fueros»

Malgré leur intégration au royaume de Castille, les Basques purent jouir de privilèges spéciaux et adopter leurs propres lois grâce aux fueros. Les fueros proviennent des coutumes de l'Ancien Régime appliquées par les assemblées locales que le roi de Castille devait jurer de respecter afin d’obtenir l'allégeance des provinces basques. Les fueros reconnaissaient aux Basques des droits particuliers, notamment des franchises, des exemptions d'impôts, une certaine autonomie locale et certains privilèges en principe réservés à la noblesse. Le fonctionnement de l'administration basque et le respect des lois étaient contrôlés par des assemblées locales démocratiquement élues. La Navarre, comme toutes les provinces basques espagnoles (Guipúzcoa, Alava en et Vizcaya), resta très attachée à ses franchises (fueros). Cependant, au XIXe siècle, l'État espagnol devint de plus en plus centralisateur et retira aux provinces basques (dont la Navarre) leurs privilèges, car elles s'étaient dressées contre Madrid et avaient pris position pour le «carlisme».

Rappelons que les partisans du carlisme (< don Carlos de Bourbon, prétendant au trône d’Espagne) invoquaient le respect de la «loi salique» (qui excluait les femmes du droit à la succession à la terre) abrogée par Ferdinand VII (1833). Lors de la guerre civile (ou première guerre carliste) de 1833 à 1839, la plupart des Basques et des Navarrais se rangèrent du côté des carlistes, partisans d'une monarchie absolue, mais qui soutenaient les Basques dans leurs revendications autonomistes. À l'issue de la dernière insurrection carliste (1874-1876), sévèrement réprimée par le roi Alphonse XII, les fueros furent officiellement abolis en 1876. Les gouvernements espagnols successifs imposèrent des administrateurs unilingues castillans ainsi que l'usage de la seule langue castillane, ce qui provoqua un ressentiment profond de la part des Basques à l’égard de Madrid.

Aujourd’hui encore, plusieurs nationalistes basques justifient leurs revendications en fonction des droits historiques hérités des fueros, droits qu’ils prétendent ne jamais avoir consenti à perdre. Pour la plupart des Espagnols cependant, cette obstination à vouloir recouvrer un statut d'Ancien Régime est difficile à concevoir, les fueros étant à leurs yeux d'anciennes coutumes locales dénuées aujourd’hui de tout sens politique.

5.3 La politique répressive du général Franco (1936-1975)

Au cours de la guerre civile de 1936-1939, un État basque autonome fut reconnu par le gouvernement républicain espagnol. Toutefois, cette autonomie fut de courte durée et elle fut supprimée dès 1937 avec la victoire des nationalistes menés par le général Francisco Franco. Les Navarrais, quant à eux, se rallièrent au général Franco. Par la suite, le régime autoritaire de Franco interdit l'usage du basque en Espagne, brûla publiquement les livres écrits en cette langue et supprima les noms basques de la toponymie et des registres d’état civil. Cette politique répressive amena les bascophones à croire qu’ils constituaient toujours une nation occupée par l'Espagne. Puis l’ensemble de la Navarre se vida progressivement de ses bascophones qui se concentrèrent au nord de la province, près de la Communauté autonome du Pays basque.

En 1982, la Navarre devint une communauté autonome (la Comunidad Foral de Navarra), et le basque acquit le statut de co-officialité, mais dans la seule zone bascophone. Pour les nationalistes basques, particulièrement au Pays basque, ce statut d’autonomie est de première importance puisqu'il signifie que les compétences obtenues correspondent à des droits antérieurs à la Constitution de 1978, c’est-à-dire aux fueros. Cependant, cette perception n’obtient pas l’adhésion de la plupart des Navarrais.

6 Les langues co-officielles: le castillan et le basque

Comme pour toutes les Communautés autonomes, la Navarre est soumise à la Constitution espagnole de 1978. Conformément à l'article 3 de cette constitution, le catalan (Catalogne, Communauté valencienne, Baléares), le basque (Pays basque et Communauté forale de Navarre) et le galicien (Galice) sont reconnus comme langues co-officielles avec le castillan dans les régions où ces langues sont parlées:

Article 3

1) Le castillan est la langue espagnole officielle de l'État. Tous les Espagnols ont le devoir de le connaître et le droit de l'utiliser.

2) Les autres langues espagnoles seront également officielles dans les différentes Communautés autonomes en accord avec leurs Statuts.

3) La richesse des diverses modalités linguistiques de l'Espagne est un patrimoine culturel qui doit être l'objet d'une protection et d'un respect particuliers.

Rappelons que, si tous les Espagnols ont le devoir de connaître le castillan, cette obligation ne s'applique pas au basque (comme au catalan et au galicien). L'utilisation d’une langue minoritaire officialisée en Espagne ne constitue pas une obligation mais simplement un droit. Les langues ne sont donc pas officielles au même degré: la langue officielle de toute l'Espagne demeure le castillan, ce qui lui assure une préséance certaine. D'ailleurs, la reconnaissance des diverses langues de l'Espagne ne doit pas nuire à l'utilisation ou à la présence de la langue officielle de l'État espagnol: le castillan (espagnol).

On comprendra que le Statut d’autonomie de 1982 de la Navarre (appelé aussi Ley Orgánica 13/1982, de 10 de agosto, de Reintegración y Amejoramiento del Régimen Foral ou Loi organique 13/1982 du 10 août relative à la réintégration et à l'amélioration du régime foral) reste conforme aux dispositions constitutionnelles de l’État espagnol. Le castillan est la langue officielle de la Navarre, mais le basque l'est également dans les zones bascophones de Navarre. Autrement dit, on parle alors d'une «officialité partielle» du basque (euskara), parce que le statut de co-officialité de cette langue ne s’étend que sur une partie du territoire et que la loi ne reconnaît des droits linguistiques qu’à une partie de la population navarraise de langue basque. L’article 9 de ce Statut d’autonomie énonce les principes suivants:

Artículo 9

1) El castellano es la lengua oficial de Navarra.

2) El vascuence tendrá también carácter de lengua oficial en las zonas vascoparlantes de Navarra.

Una ley foral determinará dichas zonas, regulará el uso oficial del vascuence y, en el marco de la legislación general del Estado, ordenará la enseñanza de esta lengua.

Article 9

1) Le castillan est la langue officielle de la Navarre.

2) Le basque a aussi le statut de langue officielle dans les zones bascophones de Navarre.

Une loi forale déterminera ces zones, régira l'usage officiel du basque et, dans le cadre de la législation générale de l'État, ordonnera l'enseignement de cette langue.

Le Statut d'autonomie a été modifié par la loi organique n° 7/2010, mais les modifications ne concernaient pas la langue.

La «loi forale» dont il est question à l'article 2, c'est la Loi forale du 18 décembre 1986 sur le basque (Ley Foral 18/1986, de 15 de diciembre, del vascuence), qui reprend dans des termes similaires, à l’article 2, les mêmes dispositions:

Article 2

1) Le castillan et le basque sont des langues particulières de la Navarre et, par conséquent, tous les citoyens ont le droit de les connaître et de les utiliser.

2) Le castillan est la langue officielle de la Navarre. Le basque l’est également, selon les dispositions prévues à l’article 9 de la Loi organique de réintégration et d’amélioration du régime foral de Navarre et selon les dispositions de cette même loi.

Si le castillan est officiel dans toute la Navarre, le basque ne l'est que dans les zones bascophones et les zones mixtes.

7 La législation sur le basque

La Navarre a beaucoup légiféré sur la langue basque (euskara). Citons notamment les décrets suivants qui se sont suivis et dont les dispositions à l'égard du basque furent substantiellement modifiées, souvent à la baisse, à chaque fois:

- le décret foral 70/1994 du 21 mars (Decreto Foral 70/l994, de 21 de marzo) [abrogé]

Ce décret réglementait le mécanisme administratif de l'emploi du basque (euskara) dans les services centraux de la Communauté forale de Navarre. Le décret assignait au basque un territoire institutionnel et prévoyait l'introduction et l'évaluation de cette langue dans l'accès aux postes de travail et son emploi tant dans la zone bascophone ("zona vascófona") que dans la zone mixte ("zona mixta").

- le décret foral 135/1994 du 4 juillet (Decreto Foral 135/1994, de 4 de julio)

Le décret précédent du 21 mars n'étant pas suffisamment explicite, il a été substitué par ce décret 135/1994 du 4 juillet. Il semble que les membres du parti politique (UPN: Unión del Pueblo Navarro) qui l'avait introduit considéraient que le décret contenait des articles anticonstitutionnels ou contraire au système juridique, ce qui n'a jamais été confirmé. Le décret 135/1994 a lui-même été modifié en réduisant la portée de certaines dispositions; on y a introduit les «circuits administratifs bilingues» en insérant des exigences sur la connaissance du basque (euskara) pour accéder à des postes de l'Administration forale de Navarre.

Dans la zone bascophone, le décret permet l'emploi indistinct de chacune des deux langues officielles en tant que langue de travail et langue de service auprès du citoyen. Dans la zone mixte, le décret vise à organiser et former le personnel nécessaire pour permettre l'exercice des droits linguistiques des citoyens dans cette même zone. On énonce que, lorsque des circuits administratifs bilingues seront créés, il y aura un personnel suffisant que que les fonctionnaires puissent rendent leurs services en basque si le citoyen l'exige.

- le décret foral 372/2000 du 11 décembre (Decreto Foral 372/2000, de 11 de diciembre)

Ce décret modifie le décret 135/1994 du 4 juillet, afin de renforcer le principe de la sécurité juridique et rendre effective l'utilisation du basque, et pour répondre à la réalité sociolinguistique de la Navarre. La zone mixte est comparée à la zone non bascophone et la zone bascophone a vu sa protection quelque peu diminuée. Ainsi, les «circuits administratifs bilingues» sont disparus dans ce décret parce qu'ils n'ont jamais pu être mis en pratique. Dans la zone mixte, les dispositions sur les enseignes bilingues et la signalisation routière bilingue ont été supprimées; enseignes et signaux routiers furent donc remplacés par des inscriptions unilingues castillanes. De plus, la connaissance du basque (euskara) s'est limitée exclusivement à des postes de travail destinés à des tâches de traduction du castillan au basque; selon l'article 22, les administrations publiques de Navarre ayant leur siège dans la zone mixte n'ont aucune obligation d'imposer la connaissance du basque afin d'accéder ou de pourvoir les postes de travail au sein de leur personnel, sauf ceux consacrés à des tâches de traduction du basque au castillan. C'est seulement dans la zone bascophone que la maîtrise du basque demeure nécessaire, ainsi que celle des langues étrangères. 

- le décret foral 139/2001 du 4 juin (Decreto Foral 139/2001 de 4 de Junio)

Ce décret concerne le Service navarrais de la santé dont est exigée désormais la connaissance du basque (euskara) dans tous les postes relatifs à la santé, tant dans la zone bascophone que dans la zone mixte.

- le décret foral 29/2003 du 10 février (Decreto Foral 29/2003, de 10 de febrero)

Ce décret actuellement en vigueur porte comme titre complet Decreto Foral 29/2003, de 10 de febrero, por el que se regula el uso del vascuence en las Administraciones Públicas de Navarra, c'est-à-dire en français Décret foral 29/2003 du 10 février réglementant l'utilisation du basque dans l'Administration publique de Navarre.

Il convient de mentionner également la Loi forale sur le basque (Ley Foral del Vascuence) ou loi forale 18/1986 du 15 décembre sur le basque (Ley Foral 18/1986, de 15 de diciembre, del Vascuence). C'est la loi linguistique la plus importe, car elle porte exclusivement sur les modalités de l'emploi du basque et du castillan dans la zone bascophone, dans la zone mixte et dans la zone non bascophone (castillan). De plus, soulignons l'adoption du Décret foral 183/2007 du 10 septembre créant l'organisme autonome Euskararen Nafar Institutua / Institut navarrais du basque (Decreto Foral 183/2007, de 10 de septiembre, por el que se crea el organismo autónomo Euskararen Nafar Institutua/Instituto Navarro del Vascuence). Il existe aussi un grand nombre de lois non linguistiques contenant certaines dispositions linguistiques (voir les lois diverses).

Dans les faits, la législation en vigueur prévoit trois zones linguistiques différentes en Navarre, dont une zone bascophone (zona vascófona) dans laquelle la langue basque est co-officielle avec le castillan. Dans la zone mixte (Zona mixta) et la zone non bascophone (Zona no vascófona), le basque n’a pas de statut officiel, mais certains services bilingues sont néanmoins prévus pour les citoyens bascophones dans leurs relations avec l’Administration navarraise centrale.

1) Au nord, la zone bascophone (en rouge), compte une soixantaine de municipalités, où le castillan et le basque ont un statut de co-officialité.

2) Au centre-nord, la zone mixte (en vert), comptant près d’une cinquantaine de municipalités, prévoit des services bilingues à l’intention des bascophones.

3) Au sud, la zone non bascophone (en jaune) prévoit quelques services en langue basque, surtout avec l'Administration navarraise centrale.

- La zone bascophone

Cette zone est composée par les municipalités suivantes:  Abaurrea Alta, Abaurrea Baja, Alsasua, Anue, Araiz, Aranaz, Arano, Araquil, Arbizu, Areso, Aria, Arive, Arruazu, Bacáicoa, Basaburúa Mayor, Baztán, Beinza-Labayen, Bertizarana, Betelu, Burguete, Ciordia, Donamaría, Echalar, Echarri Aranaz, Elgorriaga, Erasun, Ergoyena, Erro, Esteríbar, Ezcurra, Garayoa, Garralda, Goizueta, Huarte-Araquil, Imoz, Irañeta, Ituren, Iturmendi, Lacunza, Lanz, Larráun, Leiza, Lesaca, Oiz, Olazagutía, Orbaiceta, Orbara, Roncesvalles, Saldías, Santesteban, Sumbilla, Ulzama, Urdax, Urdiáin, Urroz de Santesteban, Valcarlos, Vera de Bidasoa, Villanueva de Aezkoa, Yanci, Zubieta et Zugarramurdi.

Deux autres municipalités ont été ajoutés ultérieurement, à partir du partage de certaines municipalités: Lecumberri et Irurzun.

En 2007, le recensement faisait état de 57 334 habitants dans la zone bascophone. Ce sont 61 petites municipalités, dont aucune ne dépasse les 10 000 habitants, qui représentent, selon des données de 2001, quelque 47 % des bascophones de Navarre, soit 67,3 % de la population totale de la zone bascophone.

Les citoyens résidant dans cette zone peuvent choisir la langue de communication avec les différentes administrations navarraises. En ce qui a trait aux postes de travail, l'Administration doit préciser les postes pour lesquels la connaissance du basque est obligatoire. Pour les autres, cette connaissance est évaluée au mérite. Dans cette zone, les toponymes portent une dénomination officielle en basque, à moins qu'il n'existe une dénomination différente en castillan; dans ce cas, les deux appellations sont officielles.

Dans le domaine de l'éducation, les élèves reçoivent l'enseignement dans la langue officielle que choisissent les parents ou le tuteur, ou encore, le cas échéant, l'élève lui-même. Dans les niveaux d'enseignement non universitaires, l'enseignement du basque et du castillan demeure obligatoire, de telle sorte que les élèves, à la fin de leur scolarisation, doivent posséder un niveau suffisant de maîtrise des deux langues. Seuls sont exemptés de l'enseignement du basque ceux qui ont commencé leurs études à l'extérieur de la zone et ceux qui peuvent justifier formellement leur lieu de résidence habituel hors de la zone bascophone. Cela étant dit, les locuteurs du castillan assurent leur présence sur tout le territoire, car leur langue est prédominante dans ses fonctions sociales et économiques.

- La zone mixte

La zone mixte est composée des municipalités suivantes : Abárzuza, Ansoáin, Aoiz, Arce, Atez, Barañáin, Burgui, Burlada, Ciriza, Cendea de Cizur, Echarri, Echauri, Egüés, Ezcároz, Esparza de Salazar, Estella, Ezcabarte, Garde, Goñi, Güesa, Guesálaz, Huarte, Isaba, Iza, Izalzu, Jaurrieta, Juslapeña, Lezáun, Lizoáin, Ochagavía, Odieta, Oláibar, Olza, Ollo, Oronz, Oroz-Betelu, Pamplona, Puente la Reina, Roncal, Salinas de Oro, Sarriés, Urzainqui, Uztárroz, Vidángoz, Vidaurreta, Villava, Yerri et Zabalza.

À la suite d'une réorganisation, quatre municipalités se sont ajoutées: Berrioplano, Berriozar, Orkoien et Zizur Mayor.

Au total, il s'agit de 48 municipalités comptant 329 979 habitants (en 2007). Selon des données de 2001, on trouve 47 % de la population bascophone, soit 18,4 % de la population totale de la zone mixte.

Dans cette zone, les citoyens ont le droit d'utiliser le basque avec l'Administration. Celle-ci peut évaluer quels sont les postes obligatoires pour la connaissance du basque. Dans la pratique, malgré la législation en vigueur, la connaissance du basque n'est pas toujours évaluée au mérite. De plus, la connaissance le français, de l'anglais ou de l'allemand, comme langues de travail de l'Union européenne, est appliquée dans cette zone. Les dénominations officielles sont celles qui existaient au moment de la promulgation de la loi (d'origine romane ou castillanisée), à moins qu'il ne subsiste une appellation différente, traditionnelle ou d'origine basque; dans ce cas, les deux sont officielles.

L'enseignement en basque est dispensé sur demande, mais implanté de façon progressive selon les municipalités.

- La zone non bascophone

Ce sont toutes les autres municipalités n'appartenant pas aux deux zones précédentes. Selon le recensement de de 2007, quelque 218 500 personnes habitent cette zone. Selon les données de 2001, il s'agit de de 6 % de la population bascophone de Navarre, ce qui représente quelque 6,8 % de la zone non bascophone.

Dans cette zone, les citoyens ont en principe le droit de s'adresser en basque dans une administration publique navarraise, mais les fonctionnaires peuvent demander aux intéressés une traduction en castillan ou utiliser les services de traduction.

L'enseignement du basque est encouragé et, le cas échéant, financé totalement ou partiellement par les pouvoirs publics avec des critères d'évaluation, conformément à la demande des parents. En réalité, il n'existe pas d'enseignement public en basque dans la zone non bascophone. Mais les élèves qui désirent un enseignement dans cette langue, alors qu'ils habitent à proximité de la zone mixte peuvent se déplacer et fréquenter une école basque. Ceux qui résident dans des municipalités trop éloignées de la zone mixte peuvent fréquenter une ikastola, c'est-à-dire un établissement basque privé avec lequel l'Administration forale a conclu des ententes depuis 2006.

8 La langue de la législation et de la justice

Le basque est admis au Parlement navarrais au même titre que le castillan et les lois sont rédigées à la fois en castillan et en basque, dans des versions distinctes. Cependant, étant donné le petit nombre de représentants basques au Parlement, l’emploi de la langue basque demeure relativement marginal.

En vertu de l’article 14 de la Loi forale du 18 décembre 1986 sur le basque, les procès en basque sont autorisés dans la zone bascophone du Nord.

Article 14

Dans ses rapports avec l’administration de la justice, tout citoyen pourra utiliser la langue officielle de son choix, conformément aux dispositions de la législation en vigueur.

Dans la zone mixte et la zone non bascophone, les procès se déroulent en castillan, mais un citoyen peut être autorisé à utiliser le basque à la condition d’accepter la présence d’un interprète.

Ajoutons aussi que, dans le cas de l'administration de la justice, ce sont les dispositions relatives (art. 231) à la Loi organique sur le pouvoir judiciaire, un loi de l'État espagnol, qui s'appliquent.

Article 231

1) Dans toutes les procédures judiciaires, les juges, magistrats, procureurs, secrétaires et autres fonctionnaires des cours et des tribunaux utiliseront le castillan, langue officielle de l'État.

2) Les juges, magistrats, procureurs, secrétaires et autres fonctionnaires des cours et des tribunaux pourront aussi utiliser la langue officielle propre à la Communauté autonome si aucune des parties ne s'y oppose en alléguant une méconnaissance de la langue susceptible de produire un manque de défense.

3) Les parties, leurs représentants et ceux qui les dirigent de même que les témoins et les experts pourront utiliser, tant sous forme orale que sous forme écrite, la langue qui est aussi officielle dans la Communauté autonome où ont lieu les procédures judiciaires.

4) Les procédures judiciaires effectuées et les documents présentés dans la langue officielle d'une Communauté autonome auront, sans qu'il ne soit nécessaire de recourir à une traduction castillane, pleine valeur et efficacité. On procédera d'office à leur traduction quand devront s'ensuivre des effets à l'extérieur de la juridiction des organismes judiciaires installés dans la Communauté autonome (sauf si, dans ce dernier cas, il s'agit de Communautés autonomes dont la langue officielle est la même), ou lorsqu'il y a ordre du juge ou encore à la requête d'une partie qui allègue le manque de défense.

5) Dans les procédures orales, le juge ou la cour pourra habiliter comme interprète quiconque connaît la langue utilisée, moyennant son serment ou sa promesse.

Dans les faits, cela signifie que le basque n'est pas obligatoire, car les juges, témoins, accusés, etc., peuvent recourir à la langue co-officielle seulement si toutes les parties sont d'accord; dans le cas où survient un désaccord, le tribunal doit utiliser la langue de l'état, le castillan.

9 Les langues de l’administration

Dans le domaine des services publics auprès de la population, l’emploi des langues officielles varie selon la zone linguistique (bascophone, mixte et non bascophone).

9.1 La zone bascophone

Dans la zone bascophone du Nord qui compte une soixantaine de municipalités (voir la carte de la zone bascophone), le bilinguisme est de rigueur dans la fonction publique de la Navarre et les administrations municipales. La politique de bilinguisme officiel est précisée dans deux textes juridiques importants: la Loi forale du 18 décembre 1986 sur le basque (art. 10-14) et le Décret foral 29/2003 du 10 février réglementant l'usage du basque dans l'Administration publique de Navarre. Les articles 10 à 14 de la Loi forale sur le basque ont la teneur suivante: 

Article 10

1) Tous les citoyens ont le droit d’utiliser aussi bien le castillan que le basque dans leurs relations avec l’Administration publique; ils ont également droit à ce qu’on leur réponde dans la langue officielle qu’ils choisiront à cet effet ; des mesures seront adoptées et des moyens seront fournis pour garantir progressivement l’exercice de ce droit.

2) Dans les actes ou demandes auxquels participent plus d’une personne, les pouvoirs publics utiliseront la langue que les parties concernées conviendront de choisir.

Article 11

Tous les actes administratifs sont valides et absolument admissibles du point de vue juridique, indépendamment de la langue officielle dans laquelle ils sont formulés. Par conséquent, tous les actes dans lesquels intervient un organisme de l’Administration publique, ainsi que tous les avis et toutes les communications administratives doivent être rédigés dans les deux langues, sauf si toutes les personnes intéressées choisissent expressément l’utilisation d’une seule d’entre elles.

Article 12

1) Tous les documents publics doivent être rédigés dans la langue officielle que choisissent les parties intéressées ou, au cas où il y en aurait plus d’une, dans celle qu’elles conviennent de choisir.

2) Les administrateurs publics doivent émettre en castillan ou en basque, selon le choix de la personne intéressée, les exemplaires ou documents et traduire si nécessaire les registres et les documents sous leur responsabilité.

3) Dans tout les cas, des exemplaires des documents doivent être émis en castillan lorsque ceux-ci seront entrés en vigueur hors de la zone bascophone.

Article 13

1) Dans les registres publics, les inscriptions se font dans la langue officielle dans laquelle est rédigé le document, et également en castillan dans tous les cas.

2) La remise de tout document ou duplicata est effectuée dans chacune des langues officielles.

Article 14

Dans ses rapports avec l’administration de la justice, tout citoyen peut utiliser la langue officielle de son choix, conformément aux dispositions de la législation en vigueur.

Article 15

1) L’Administration publique et les entreprises à caractère public encouragent la formation progressive en langue basque du personnel assigné dans la zone bascophone.

2) Dans le cadre de leurs compétences respectives, chaque administration précise les postes pour lesquels la connaissance de la langue basque est nécessaire et, pour ce qui est des autres postes, cette connaissance est considérée, entre autres, au mérite.

En vertu de la législation en vigueur, non seulement tous les documents administratifs doivent être rédigés dans les deux langues officielles, mais les employés doivent également répondre oralement dans n’importe laquelle des langues officielles choisies par le citoyen. L'article 10 du Décret foral 29/2003 du 10 février réglementant l'usage du basque dans l'Administration publique de Navarre (2003) oblige l'Administration située dans la zone bascophone à utiliser le bilinguisme:

Article 10

1) Les communications et les avis adressés à des personnes physiques ou morales de la zone bascophone elle-même doivent être bilingues, sauf si les intéressés sollicitent formellement l'utilisation de l'une des deux langues officielles, conformément aux dispositions prévues à l'article 11 de la Loi forale sur le basque.

2) Quand la communication découle de procédures par lesquelles les citoyens ou les autres administrations publiques démontrent leur intérêt, selon les termes prévus aux articles 8.2 et 9.5 du présent décret foral, il est possible d'utiliser des imprimés, modèles et formulaires rédigés en castillan, en basque ou en version bilingue.

3) Dans leurs communications orales, les fonctionnaires pourront servir les citoyens dans l'une des deux langues officielles qu'ils auront choisie.

Le gouvernement navarrais a d’ailleurs prévu des dispositions exigeant le bilinguisme de la part de ses employés. L'article 11 du même décret que les étiquettes indicatives des offices, bureaux et dépendances, les vignettes ou en-têtes de la papeterie, des timbres officiels et de certaines autres éléments d' identification et de signalisation doivent être rédigés en version bilingue (castillan-basque).

Article 11

1) Les étiquettes indicatives des offices, bureaux et dépendances, les vignettes ou en-têtes de la papeterie, les timbres officiels et certains autres éléments d'identification et de signalisation doivent être rédigés en version bilingue.

2) Les présentations formelles et leur publication dans le Bulletin officiel comme formalité d'efficacité, ainsi que la composition du texte des voies urbaines et des noms propres de lieu sont effectuées en castillan et en basque, conformément à l'article 16 de la Loi forale sur le basque.

L'Institut navarrais de l'administration publique et la Direction générale de la politique linguistique de la Navarre ont prévu des stages de formation en langue basque afin de pouvoir assurer un nombre nécessaire et suffisant d’employés, ce qui devrait permettre d’atteindre les objectifs prévus par la loi.

Dans la zone bascophone, l'affichage public tend à être résolument bilingue. Dans les entreprises privées, l'usage du seul castillan est courant, mais certains messages peuvent occasionnellement être en basque.

9.2 La zone mixte

La langue basque n’a pas le statut officiel dans la zone mixte située au centre-nord de la Navarre. Néanmoins, la loi a prévu, pour la minorité bascophone de la «zone mixte», des droits similaires à ceux de la minorité de la «zone bascophone». Ainsi, conformément à l’article 17 de la Loi forale sur le basque, tous les citoyens ont le droit d’utiliser aussi bien le castillan que le basque pour s’adresser à l’Administration publique de la Navarre:

Article 17

Tous les citoyens ont le droit d’utiliser aussi bien le basque que le castillan pour s’adresser à l’Administration publique de la Navarre.

Pour garantir l’exercice de ce droit, ladite administration pourra:

a) Spécifier dans l’offre publique d’emploi de chaque année les postes pour l’accès desquels la connaissance de la langue basque sera obligatoire.

b) Estimer comme une aptitude la connaissance de la langue basque dans l’assignation en vue de l’accès aux autres postes.

L'article 12 du Décret foral n° 29 du 10 février réglementant l'usage du basque dans l'Administration publique de Navarre (2003) prescrit l'usage du bilinguisme:

Article 12

1) L'utilisation du basque et du castillan dans les administrations publiques de Navarre situées dans la zone mixte est régie par les critères établis par le présent décret foral.

2) Les administrations publiques de Navarre qui offrent leurs services dans la zone mixte doivent prendre les mesures adéquate destinées à permettre l'exercice du droit des citoyens de s'adresser en basque à l'Administration, comme le reconnaît le présent décret foral.

3) Dans les services centraux de l'Administration de la Communauté forale de Navarre ayant leur siège à Pampelune, dont l'activité est destinée à l'ensemble de la population, une unité administrative de traduction officielle basque-castillan sera instituée et des mesures complémentaires seront adoptées afin de permettre la prestation de leurs services administratifs de base en basque quand l'usager le requerra ainsi. La création par d'autres administrations publiques de Navarre dans la zone mixte d'une unité administrative de traduction par ses services centralisés doit se faire sur une base volontaire. Cette possibilité doit être développée dans le cadre des programmes auxquels réfère l'article 5 du présent décret foral.

L'article 15 du Décret foral n° 29 du 10 février réglementant l'usage du basque dans l'Administration publique de Navarre (2003) prescrit l'usage du castillan, à moins que les intéressés sollicitent formellement l'usage du basque:

   Article 15

1) Les communications et les avis dirigés depuis les services de l'Administration de la Communauté forale de Navarre siégeant dans la zone mixte pour des personnes physiques et morales de la zone bascophone doivent être effectuées en castillan, à moins que les intéressés sollicitent formellement l'usage du basque; dans ce cas, ils pourront être formulés en version bilingue.

2) Dans les imprimés et formulaires destinés aux personnes physiques ou morales de la zone mixte, il est possible d'utiliser le document rédigé seulement en castillan ou en version bilingue castillane-basque, bien que dans des unités distinctes au choix de l'usager selon ce qui correspond à son intérêt.

La seule différence entre la zone bascophone et la zone mixte réside dans le fait que le bilinguisme oral est souvent un service virtuel dans la zone mixte. Les bascophones ne connaissent pas vraiment de problèmes pour obtenir de la documentation en langue basque lorsqu’elle provient de l’Administration publique de la Navarre. La situation est plus aléatoire dans les administrations locales (municipalités ou communes).

9.3 La zone non bascophone

La plus grande superficie de la Navarre (partie sud) couvre la zone non bascophone. L’article 18 de la Loi forale sur le basque prévoit des services en basque à l’intention de la minorité:

Article 18

1) Le droit est reconnu aux citoyens de s’adresser en basque à l’Administration publique de la Navarre.

2) L’Administration publique de la Navarre pourra exiger des personnes intéressées une traduction en castillan ou utiliser les services de traduction prévus à l’article 9.

Dans les administrations locales, d’après l’article 17 du Décret foral n° 29 du 10 février réglementant l'usage du basque dans l'Administration publique de Navarre (2003) (2003), il est possible d’utiliser les services de traduction officiels afin de répondre aux besoins des citoyens quand, dans l'exercice de leur droit, ils s’adressent à l’une d’elles en langue basque.

Article 17

1) Les administrations publiques de la zone non bascophone doivent demander aux intéressés la présentation simultanée de la traduction en castillan des documents adressés en basque ou pourront utiliser les services officiels de traduction pour servir les citoyens quand ceux-ci, dans l'exercice de leurs droits, peuvent s'adresser à ces derniers seulement en basque.

2) Les procédures, les imprimés, les sceaux, la documentation, les avis, les communications, la signalisation, la forme du texte, les publications et la publicité de la part des administrations publiques et des organismes de droit public sous leurs dépendance dans la zone non bascophone doivent être formulés en castillan.

Dans les faits, le bilinguisme demeure extrêmement rare à l’oral, mais les citoyens basques peuvent demander en castillan toute la documentation écrite en basque provenant des organismes centraux de l’Administration navarraise.

Selon l’article 8 de la Loi forale sur le basque, la dénomination officielle des toponymes, dans les zones mixte et non bascophone, sera celle qui existe actuellement, à moins qu’il n’en existe une autre originellement en basque, différente de celle utilisée en castillan.

Article 8

1) Les toponymes de la Navarre portent une dénomination officielle en castillan et en basque selon les principes suivants:

a) Dans la zone bascophone, la dénomination officielle est en basque, sauf s’il existe une dénomination différente en castillan; dans ce cas-là, les deux formes seront utilisées.

b) Dans les zones mixtes et non bascophones, la dénomination officielle est celle qui existe actuellement, à moins qu’il n’en existe une autre originellement et traditionnellement en basque, différente de celle utilisée en castillan; dans ce cas-là, les deux formes sont utilisées.

2) Le gouvernement de Navarre, après avoir étudié le rapport de l’Académie royale de la langue basque, détermine, conformément à ce qui est prévu au premier paragraphe du présent article, les toponymes de cette communauté ainsi que les noms officiels des territoires, localités et voies interurbaines, et devra en rendre compte au Parlement. Les noms des voies urbaines sont fixés par la mairie concernée.

3) Les dénominations adoptées par le gouvernement, d’après ce qui est prévu dans les premiers paragraphes, sont les seules légales dans le territoire de la Navarre, et la signalisation devra s’y adapter. Le gouvernement de la Navarre réglemente la normalisation de la signalisation publique, en respectant dans tous les cas les normes internationales que l’État aura assumées.

En ce cas, les deux formes d'appellation seront officiellement utilisées.

Par ailleurs, le Décret foral 270/1991 du 12 septembre régissant l'utilisation des différentes dénominations officielles précise que les différentes dénominations officielles doivent se conformer aux critères suivants :

Article unique

L'utilisation par les organismes de l'Administration de la Communauté forale de Navarre des différentes dénominations officielles qui, en vertu des dispositions de l'article 8 de la
Loi forale 18/1986 du 15 décembre sur le basque, ont été approuvés par le gouvernement de Navarre doivent se conformer aux critères suivants :

- Dans toutes les activités administratives qui sont formulées en castillan, la dénomination à utiliser doit être, parmi les deux officielles, celle qui correspond à cette langue.

- Dans toutes les activités administratives qui sont formulées en euskara, la dénomination à utiliser doit être, parmi les deux officielles, celle qui correspond à cette langue.

10 Les organismes linguistiques

En Navarre, il existe plusieurs organismes linguistiques destinés à promouvoir la langue basque.

10.1 L'École officielle des langues de Pampelune

L'École officielle des langues de Pampelune (Escuela Oficial de Idiomas de Pamplona ou EOIP) est un établissement destiné à préparer des traducteurs et interprètes. Outre, le basque, on y enseigne certaines langues officielles (idiomas oficiales) de l'Union européenne: le français, l'anglais, l'italien et l'allemand. D'autres langues non officielles (idiomas extraoficiales) sont aussi enseignées: l'espagnol (pour les étrangers), l'arabe, le chinois et le japonais.

Conformément à l’article 9 de la Loi forale sur le basque (1986), une bureau de traduction du basque et du castillan a été institué à Pampelune:

Article 9

Le gouvernement de Navarre établit à Pampelune une unité administrative de traduction officielle du basque et du castillan.

Le Décret foral 346/1990 du 20 décembre créant l'École officielle des langues de Pampelune (Decreto Foral 346/1990, de 20 de diciembre, por el que se crea la Escuela Oficial de Idiomas de Pamplona) a concrétisé l'instauration à Pampelune d'un établissement pour l'enseignement des langues française, anglaise et basque selon le régime d'enseignement libre et en collaboration avec l'École officielle des langues de Bilbao:

Article unique

Il est institué l'École officielle des langues de Pampelune, avec effet au cours de l'année 1990-1991 dans laquelle sont intégrée les ressources humaines et matérielles attribuées à l'École des langues de Navarre.
 

10.2 Le Conseil navarrais de l'euskara

En 1996, un organisme consultatif officiel a de plus été créé: le Conseil navarrais de l'euskara ou Consejo Navarro de l'Euskera. Il s'agit d'un organisme associé ayant des fonctions de consultation, de participation et de recommandations auprès du gouvernement de Navarre en matière de normalisation linguistique, et ce, à des fins de fonctionnement au ministère de l'Éducation et de la Culture. Les fonctions particulières (art. 4) du Conseil navarrais de l'euskara sont les suivantes :

a) Informer sur les programmes généraux et les projets normatifs relatifs à la normalisation linguistique, avant son approbation.
b) Donner son avis sur les questions lui sont soumises par le gouvernement sur la planification et la normalisation linguistique.
c) Faire des propositions au gouvernement en relation avec l'utilisation et la promotion de l'euskara.
d) Tout autre fonction que lui attribuent formellement les dispositions en vigueur.

On peut consulter le texte du Décret foral 135/1996 du 11 mars créant le Conseil navarrais de l'euskera (Decreto Foral 135/1996, de 11 de marzo, se crea el Consejo Navarro del Euskera).

10.3 L'Institut navarrais du basque

L'Institut navarrais du basque (fondé en 2007) porte officiellement une appellation bilingue: Euskararen Nafar Institutua / Instituto Navarro del Vascuence (ENAI/INAV). Les objectifs généraux de l'organisme sont de protéger le droit des citoyens de connaître et d'employer le basque, et de définir les instruments pour rendre ce droit effectif, ainsi que de protéger sa récupération et son développement. On peut consulter le texte du décret créant cet institut: Décret foral 183/2007 du 10 septembre créant l'organisme autonome Euskararen Nafar Institutua / Institut navarrais du basque (Decreto Foral 183/2007, de 10 de septiembre, por el que se crea el organismo autónomo Euskararen Nafar Institutua/Instituto Navarro del Vascuence).

10.4 La Commission sur le bilinguisme

Plus précisément, il s'agit de la Commission sur le bilinguisme de la Direction générale à l'éducation, sous la juridiction du ministère navarrais de l'Éducation, de la Culture et des Sports.

Les fonctions de cette commission, créé en 1991, sont les suivantes :

a) Faire appliquer la Loi forale sur le basque dans l'enseignement en Navarre, et en assurer le suivi et l'évaluation;
b) Coordonner les activités des différents services pédagogiques sous la juridiction de la Direction générale de l'éducation en matière de bilinguisme;
c) Coordonner les activités en matière de bilinguisme avec d'autres administrations et secteurs de l'éducation correspondant à d'autres niveaux en éducation et à d'autres territoires:
d) Recevoir et tenir compte des demandes relatives au bilinguisme formulées par les différents secteurs de la communauté éducative de Navarre.

On peut lire le Décret foral 102/1991 du 21 mars créant la Commission sur le bilinguisme de la Direction générale à l'éducation du ministère de l'Éducation, de la Culture et des Sports (Decreto foral 102/1991, de 21 de marzo, por el que se crea la comisión de bilingüismo de la dirección general de educación del departamento de educación, cultura y deporte).

10.5 L'Académie royale de la langue basque

L'Académie royale de la langue basque ou Euskaltzaindia est l'institution officielle consacrée à la défense de l'euskara (le basque). Cette institution, fondée en 1919, est reconnue formellement en Espagne depuis 1976, c'est-à-dire un an après la fin de la dictature de Franco, en obtenant le statut de Real Academia (en français: «Académie royale»); la France l'a reconnue comme organisme «d'utilité publique» en 1995. Le siège officiel de l'Académie est situé à Bilbao (Biscaye) et possède des «délégations» (succursales) pour la Navarre à Pampelune, pour le Guipuzcoa à Saint-Sébastien, pour l'Alava à Vitoria/Gasteiz et pour le Pays basque français à Bayonne (voir la carte des Pays basques). L'Académie a pour emblème le chêne, et pour devise "Ekin eta jarrai" («Commencer et poursuivre»).

L'Académie est régie par le Décret 573/1976 du 26 février reconnaissant l'Académie de langue basque sous la dénomination de Académie royale de la langue basque et le Décret royal 750/2006 du 16 juin modifiant les Statuts de l'Académie royale de la langue basque.

L'Académie royale de la langue basque a pour objectifs, entre autres, d'effectuer des recherches et de formuler les bases grammaticales de la langue basque; de donner des orientations et des normes pour la culture littéraire de cette langue; d'élaborer, par la formation d'un langage littéraire unifié, un lexique, une grammaire et une graphie; de promouvoir l'usage du basque (euskara); de rendre cette langue apte à devenir le moyen d’expression de toute la communauté bascophone; de promouvoir les études philologiques et linguistiques en favorisant la création de chaires de langue et de littérature basques.

L'Académie royale de la langue basque est composée de 24 académiciens en titre, d'académiciens émérites, d'académiciens correspondants et d'académiciens honorifiques. Pour les académiciens correspondants et les académiciens honorifiques, il n'existe pas de nombre établi. La plupart des académiciens ont le basque comme langue maternelle. Au sein de cette Académie, des commissions de travail sont responsables de différentes tâches dans le cadre de l'étude de la langue basque, notamment en matière de lexicographie, de grammaire, de phonétique et de phonologie, d'atlas linguistique, de toponymie, de langue orale et de littérature.

Le travail de l'Académie royale de la langue basque a longtemps porté à la création d'une langue unifiée, en dépit des opposants qui la considéraient comme artificielle. Malgré tout, cette nouvelle norme fut rapidement adoptée dans l'administration lors de l'établissement de la Communauté autonome d'Euskadi (1979) et de la Communauté forale de Navarre (1982), ainsi que dans l'enseignement et les médias.

11 Les langues d’enseignement

La Loi forale sur le basque prévoit plusieurs dispositions concernant la langue d’enseignement. En Navarre, tous les citoyens ont le droit de recevoir l’enseignement en basque et en castillan aux différents niveaux d’éducation (art. 19). L’application de la loi diffère selon la zone d’application (bascophone, mixte et non bascophone).

Article 19

Tous les citoyens ont le droit de recevoir l’enseignement en basque et en castillan aux différents niveaux d’éducation, conformément aux dispositions prévues dans les chapitres suivants.

En ce qui a trait à la zone bascophone, voici comment se lit l’article 24 de la Loi forale sur le basque :

Article 24

1) Tous les élèves recevront l’enseignement dans la langue officielle que choisira la personne qui détient l’autorité paternelle ou la tutelle ou, le cas échéant, l’élève lui-même.

2) Dans les ordres non universitaires, l’enseignement de la langue basque et de la langue castillane sera obligatoire, de façon à ce que l’élève, à la fin de sa scolarisation, possède un niveau suffisant de connaissance des deux langues.

3) Les élèves qui auront commencé leurs études primaires hors de la zone bascophone ou ceux qui pourront justifier que leur résidence habituelle est hors de cette zone et ceux qui justifieront dûment leur résidence non habituelle dans celle-ci pourront être exemptés de l’enseignement de la langue basque.

Autrement dit, les citoyens ont le droit de choisir la langue principale d’enseignement pour leurs enfants, mais dans tous les cas l’enseignement de la deuxième langue officielle demeure obligatoire pour tous.

En Navarre, les élèves reçoivent leur instruction en fonction des «modèles linguistiques» choisis. Le ministère navarrais de l'Éducation décrit ainsi ces modèles (A, B, D et G) :

Modelos Lingüísticos

El Decreto Foral 159/1988, de 19 de mayo, por el que se regula la incorporación y uso del vascuence en la enseñanza no universitaria de Navarra, desarrolla la Ley del Vascuence definiendo los modelos lingüísticos A, B, D.

El modelo lingüístico A proporciona enseñanza en castellano, con el euskera como asignatura, en todos los niveles, etapas y modalidades.

El modelo lingüístico B presenta enseñanza en euskera, con el castellano como asignatura y como lengua de uso en una o varias materias según la enseñanza, ciclo o etapa.

El modelo lingüístico D consiste en enseñanza totalmente en euskera, salvo la asignatura de lengua castellana.

Existe además, según la zona lingüística, un modelo que no incorpora la enseñanza en euskera o del euskera, y que ha dado en denominarse modelo G.

En el citado Decreto Foral se autorizan para la zona vascófona los modelos A, B y D, siendo obligatoria por tanto la enseñanza de la lengua vasca; para la zona mixta los modelos A, B, D y G y para la zona no vascófona los modelos A y G.

En cualquier caso, los alumnos que escojan un modelo lingüístico en su incorporación al sistema educativo, deberán continuar en él durante toda su escolaridad. Los posibles cambios requieren la autorización de la Comisión de Bilingüismo, siendo diferente la situación si se desean realizar al finalizar una etapa o dentro de ella.

Modèles linguistiques

Le décret foral 159/1988 du 19 mai réglementant l'intégration et l'utilisation du basque dans l'enseignement non universitaire de Navarre expose la Loi sur le basque en définissant les modèles linguistiques A, B et D.

Le modèle linguistique A dispense l'enseignement en castillan, avec l'euskara comme matière, à tous les niveaux des étapes et des modalités.

Le modèle linguistique B présente l'enseignement en euskara avec le castillan comme matière et comme langue d'usage dans une ou plusieurs matières, selon l'enseignement, le cycle ou l'étape.

Le modèle linguistique D consiste en un enseignement entièrement en euskara, sauf la matière de langue castillane.

Il existe en outre, selon la zone linguistique, un modèle qui ne comprend pas l'enseignement en euskara ou de l'euskera, et qui est appelé le modèle G.

Conformément au décret foral, les modèles A, B et D sont autorisés pour la zone bascophone, en tant que matières obligatoires dans l'enseignement de la langue basque; pour la zone mixte, les modèles A, B, D et G et, pour la zone non bascophone, les modèles A et G.

Dans tous les cas, les élèves qui choisissent un modèle linguistique dans leur intégration au système d'éducation doivent le poursuivre durant toute leur scolarité. Les possibles changements requièrent l'autorisation de la Commission sur le bilinguisme, la situation étant différente si l'on souhaite procéder à la fin d'une étape ou à l'intérieur de celle-ci.

Dans la zone bascophone, pour tous les cycles d’études, les élèves peuvent choisir entre le modèle D (enseignement entièrement en basque, sauf la matière «langue espagnole») et le modèle A (enseignement entièrement en espagnol, avec la langue basque comme matière).

Dans la zone mixte, l’enseignement de la langue basque n’est pas systématique. Il n’est disponible que dans certains centres éducatifs pour ceux qui le sollicitent. Les élèves qui le désirent peuvent recevoir des cours de langue basque de façon à ce qu’à la fin de leur scolarisation ils possèdent un niveau suffisant de connaissance dans cette langue. Dans la zone mixte, les élèves peuvent choisir entre le modèle D (enseignement en basque, sauf pour les cours d’espagnol), le modèle A (enseignement en espagnol, sauf pour les cours de basque) et le modèle G (enseignement entièrement en espagnol, sans enseignement du basque).

Quant à la zone non bascophone, conformément à la demande, l’enseignement de la langue basque y est encouragé et, le cas échéant, financé en totalité ou en partie par les pouvoirs publics selon des critères de promotion prévus dans la réglementation en vigueur. Dans l’enseignement public de la zone non bascophone, il est possible de choisir entre le modèle A (enseignement en espagnol, sauf pour les cours de basque) et le modèle G (enseignement entièrement en espagnol, sans cours de basque). De plus, des établissements privés offrent le modèle D (enseignement en basque, sauf pour l’espagnol).

Pour l’année scolaire 1996-1997 dans l’ensemble de la Navarre, 60,6 % des élèves (primaire et secondaire) recevaient leur instruction selon le modèle G (enseignement entièrement en espagnol, sans cours de basque). Il semble que ce modèle G soit appelé à diminuer de plus en plus, car depuis l’année scolaire 1992-1993 la proportion des élèves a chuté de 13 %. Cette diminution n’est pas due à un regain soudain du basque, mais à la baisse considérable de la natalité chez les hispanophones. Ces faits montrent bien que la minorité bascophone réussit à obtenir un enseignement dans sa langue bien qu’elle ne constitue que 10 % de l’ensemble de la Communauté forale de Navarre.

Par ailleurs, 14 608 élèves (21,7 %) poursuivaient leurs études selon le modèle D (enseignement en basque, sauf pour l’espagnol) et 9847 élèves (17,2 %) recevaient un enseignement selon le modèle A (enseignement en espagnol, sauf pour les cours de basque).

Il existe aussi un modèle B, strictement sur papier, dans lequel l’enseignement pourrait être offert en basque, avec l’espagnol comme matière dans tous les cours et cycles, et comme langue d’usage dans une matière ou aire du cycle et deux du cycle supérieur.

En ce qui a trait aux études universitaires, la plupart des élèves navarrais les poursuivent en castillan à l’Université publique de Navarre créée en avril 1987, mais la présence du basque semble augmenter progressivement. C'est le Décret foral 110/2003 du 12 mai approuvant les statuts de l'Université publique de Navarre (Decreto Foral 110/2003, de 12 de mayo, por el que se aprueban los Estatutos de la Universidad Pública de Navarra) qui régit l'enseignement universitaire et l'emploi des langues. L'article 118 de ce décret énonce que le castillan et l'euskara sont des langues propres à la Navarre et, par conséquent, que tous les membres de l'Université publique de Navarre ont le droit de connaître et d'utiliser les deux langues:

Article 118

1) Le castillan et l'euskara sont des langues particulières à la Navarre et, par conséquent, tous les membres de l'Université publique de Navarre ont le droit de connaître et d'utiliser les deux langues, selon les dispositions prévues à l'article suivant.

2) L'usage administratif de l'euskara à l'Université publique de Navarre prend comme référence les directives linguistiques émanant des organismes compétents en accord avec la réglementation en vigueur.

Cela signifie (art. 119) que tous les membres de la communauté universitaire ont le droit de s'adresser aux organismes du gouvernement et aux services administratifs universitaires dans chacune des langues propres de la Communauté forale; de s'exprimer dans les assemblées universitaires dans chacune des langues propres de la Navarre; de recevoir et d'offrir un enseignement, ainsi que d'effectuer des travaux, examens ou épreuves en euskara, dans les disciplines que l'Université offre dans cette langue. Tous les organismes de l'Université, dans leurs domaines respectifs de leur compétence, sont tenus de garantir l'exercice de ces droits.

Actuellement, les futurs instituteurs peuvent recevoir un enseignement totalement en basque lorsqu’ils se destinent à l’enseignement de la maternelle et à l’enseignement primaire. En plus de la carrière d’instituteurs, d’autres choix sont possibles en basque: l’économie, l’administration et la direction d’entreprises, les sciences de l’entreprise, la sociologie et le génie technique agricole.

12 Les langues des médias

Dans le domaine des médias, l’article 27 de la Loi forale sur le basque précise que l’Administration publique doit encourager la présence progressive de la langue basque dans les médias publics ou privés.

Article 27

1) L’Administration publique encouragera la présence progressive de la langue basque dans les médias publics ou privés.

Dans ce but, le gouvernement de Navarre rédigera des plans de soutien économique et matériel pour que les médias emploient la langue basque de façon courante et progressive.

2) Dans les stations de radio, de télévision et d’autres médias gérés par le gouvernement de la Navarre, on veillera à ce que la langue basque ait une présence suffisante.

Dans ce but, le gouvernement de Navarre entend rédiger des programmes de soutien économiques et matériels pour que les médias emploient la langue basque de façon habituelle et progressive. Dans les stations de radio, de télévision et d’autres médias gérés par le gouvernement de la Navarre, il convient de veiller à ce que la langue basque ait une présence suffisante.

Présentement, on compte un seul quotidien basque, l’Egunkaria, et deux hebdomadaires, sans parler de la station de radio Xorroxin Irrati i Euskadi Irrati et la station de télé Euskal Televista. On peut consulter une version française de la  Loi forale du 18 décembre 1986 sur le basque

Compte tenu de la faible proportion des bascophones en Navarre (moins de 10 %), force est de constater que les droits linguistiques de la minorité sont bien protégés, particulièrement dans la zone bascophone. En effet, ces bascophones bénéficient des mêmes droits linguistiques que les castillanophones, dans la mesure où ceux-ci concernent l’Administration publique de la Navarre ainsi que les administrations locales. Ces droits sont très limités lorsque les bascophones s’adressent à l’Administration de l’État espagnol ou aux entreprises privées sur le même territoire. D’une part, exception faite de certaines cours de justice, l’État espagnol ne reconnaît que les droits relatifs à la majorité castillane; d’autre part, les services offerts en basque par les entreprises privées sont laissées à l’initiative de celles-ci, ce qui, dans la plupart des cas, se réduit à peu de choses.

Dans les zones mixte et non bascophone, les droits linguistiques demeurent forcément limités, mais le gouvernement navarrais semble faire des efforts pour que les bascophones bénéficient d’un minimum de services dans leur langue. Quoi qu’il en soit, les bascophones de ces zones bénéficient de droits beaucoup plus considérables que ceux habitant le département français des Pyrénées-Atlantiques.

Cela étant dit, on peut quand même regretter que l’État espagnol ait partagé la minorité bascophone en deux communautés autonomes: celle du Pays basque et celle de la Communauté forale de Navarre. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles les nationalistes basques se montrent si insatisfaits de la situation actuelle: ils accusent l’État espagnol de les avoir dilués dans deux Communautés autonomes et de les avoir rendus minoritaires dans les deux régions. Pour éviter une telle situation, il aurait fallu que l’État espagnol fasse coïncider les frontières linguistiques avec les frontières politiques et qu’il remette en question les anciennes frontières historiques, lesquelles paraissent aujourd’hui anachroniques dans la mesure où elles proviennent de l'organisation médiévale de l'Espagne. Le débat qui touche la Constitution de 1978 ne fait que commencer en Espagne; il faudra sans doute s'attendre à des réformes importantes à ce sujet dans les années à venir. Loin d’avoir apaisé le nationalisme basque, le système actuel semble même l’avoir stimulé. Les enjeux et les tensions sont donc inévitables dans tout le Pays basque dont la Navarre est, bien malgré elle, partie prenante.

Dernière mise à jour: 18 févr. 2024  
   

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