République fédérale
démocratique d'Éthiopie

Éthiopie

የኢትዮጵያ ፌዴራላዊ ዴሞክራሲያዊ ሪፐብሊክ

ye-Ītyōṗṗyā Fēdēralāwī Dīmōkrāsīyāwī Rīpeblīk


 

Capitale: Addis-Abeba
Population:  126,5 millions (2023)
Langues officielles (de travail):  amharique, oromo, somali, afar et tigrigna
Groupe majoritaire:  aucun
Groupes minoritaires:  oromo (32,5%), amharique (25,5%), oromo (28,5 %), somali (6,3%), tigrigna (6,1%), sidamo (4,2%), wolaitta (2,4%)gouragué (1,9%), hadiya (1,8%), afar (1,7%), gamo (1,5%), gédéo (1,4 %), silte (1,3%), etc.
Système politique:  république fédérale formée de 12 États régionaux
Articles constitutionnels (langue): art. 5, 19, 20, 25, 38 et 39 de la Constitution du 21 août 1995
Lois linguistiques: aucune
Lois scolaires: Politique sur l'éducation et la formation (1994); Proclamation n° 650 sur l'enseignement supérieur (2009).
Lois à portée linguistique: Code civil (1960); Code de procédure pénale (1961); Code de procédure civile (1965); Règlement n° 3 de la Chambre des représentants du peuple (1998); Proclamation n° 188 consolidant la Charia dans les tribunaux fédéraux (1999); Proclamation n° 378 sur la nationalité éthiopienne (2003)
; Proclamation n° 686 sur l'enregistrement commercial et les permis commerciaux (2010); Proclamation n° 720 sur la création de la Commission de police fédérale éthiopienne (2011); Proclamation n° 813 sur la concurrence commerciale et la protection des consommateurs (2013); Proclamation  n° 1064 sur la fonction publique fédérale (2017); Proclamation n° 1234 sur les tribunaux fédéraux (2021); Proclamation n° 1249 sur l'octroi d'un permis et sur l'administration du service fédéral de défense (2021).

1 Situation géographique

L'Éthiopie, un pays situé dans la Corne de l’Afrique, est limitée au nord-est par l’Érythrée et Djibouti, au sud-est par la Somalie, au sud-ouest par le Kenya, et à l’ouest par le Soudan du Sud. L’Éthiopie couvre 1133 380 km², soit l'équivalent de la Colombie, de la Bolivie ou de l'Égypte, ou... deux fois la France.  Sa capitale est Addis-Abéba.

Avant 1991, l’Éthiopie avait un gouvernement unitaire centralisé qui réprimait la diversité ethnique; elle interdisait aux groupes ethnolinguistiques d’employer leur langue dans les événements officiels et les établissements d'enseignement. L’Éthiopie a adopté le fédéralisme en 1991 lorsque le Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien (EPRDF) – une coalition de quatre grands partis – est arrivé au pouvoir. Cela faisait suite à 17 ans d’insurrections pour renverser le Derg, une junte militaire communiste qui a dirigé le pays de 1974 à 1991. L’objectif principal du fédéralisme éthiopien est de s’adapter aux divers groupes ethnolinguistiques du pays.

1.1 La fédération actuelle

Depuis 1995, la nouvelle Constitution a découpé le territoire en États ou «États régionaux», formés en principe sur une base ethnolinguistique et deux villes à charte (Addis-Abéba et Diré-Dawa) ou «États administratifs». L'Éthiopie est donc une fédération; le gouvernement fédéral éthiopien emploie le terme anglais State, ce qui correspond au terme français État, plutôt que province ou région.

Entre 2019 et 2023, il s'est créé trois régions supplémentaires (Éthiopie du Centre, Éthiopie du Sud-Ouest et Éthiopie du Sud) pour un total de 12 (voir la carte détaillée). Chacun de ces États régionaux dispose de pouvoirs étendus, par exemple, l’élaboration des politiques, l’élaboration de la Constitution régionale, le choix d’une langue de travail ou d'une langue officielle et le maintien de la police régionale et des services civils.

L’Éthiopie actuelle est une fédération composée de nations et de nationalités, chacune possédant une souveraineté, telle que définie à l’article 8 de la Constitution. Les nations et les nationalités ayant des patries territoriales définies ont le droit d’établir leur propre État régional. De plus, l'article 39.4 de la Constitution accorde aux groupes ethnolinguistiques le droit à l’autodétermination et à la sécession. Ainsi, un groupe ethnique peut théoriquement former son propre État régional ou devenir un pays indépendant. Cette approche a suscité à la fois des éloges et des critiques.

1.2 Les difficultés du fédéralisme éthiopien

L'un des inconvénients du fédéralisme actuel vient du fait que les partis politiques dominent l'organisation du système contrôlé fortement par le Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien (EPRDF). Dans les faits, ce parti ou une coalition de partis contrôle étroitement les gouvernements régionaux. Les normes des partis l’emportent souvent sur les principes constitutionnels, tandis que les crises internes des partis ont tendance à conduire à l’instabilité gouvernementale et à des conflits récurrents.

D'ailleurs, l'un des principaux défis du fédéralisme éthiopien réside dans son incapacité à résoudre entièrement les conflits. Ainsi au cours de l’année 2020, de nombreux rapports ont fait état de personnes tuées à la suite de conflits ethniques, entraînant le déplacement de plus d’un million de personnes, selon l’Organisation internationale pour les migrations ("International Organization for Migration"). Un second problème réside dans le fossé entre la Constitution et la pratique des droits politiques; certains groupes ethniques n’ont jamais exercé leurs droits en raison de la répression politique. Un troisième problème demeure la domination du parti au pouvoir (l'EPRDF, devenu le Parti de la prospérité) et l’absence de démocratie. En pratique, les règles des partis politiques tendent continuellement à éroder les principes constitutionnels, ce qui jette une ombre sur le système fédéral, bien que l'article 9 de la Constitution assure la suprématie de celle-ci sur toute organisation politique. Dans les faits, même si le fédéralisme peut exister dans la forme, il a du mal à fonctionner efficacement sans démocratie et sans un système multipartite.

Pour les voyageurs, les régions frontalières (avec Érythrée, le Soudan, le Soudan du Sud, le Kenya et la Somalie), y compris les frontières régionales (presque toutes), sont souvent le théâtre d’activités criminelles et de violences plus intenses, y compris dans les zones rurales. Les affrontements entre les groupes du crime organisé, les groupes ethniques et les autorités éthiopiennes constituent un risque.

1.3 Les avantages du fédéralisme éthiopien

Le fédéralisme éthiopien semble générer néanmoins trois avantages majeurs. Premièrement, il autorise la liberté linguistique et culturelle des peuples qui le composent. Les 80 groupes ethnolinguistiques du pays ont dû se battre longtemps et durement pour garantir leurs droits à leur culture, à leur langue et à leur identité. Plus de 57 des 80 langues éthiopiennes sont aujourd'hui employées comme moyens d’enseignement dans les écoles.

Deuxièmement, le système a permis à de nombreux groupes ethnolinguistiques d’exercer leur autonomie dans les États régionaux où ils constituent la majorité. Les minorités ethniques ont également le droit de former des mini-gouvernements locaux, par exemple dans l'administration des districts. On peut consulter une carte présentant à la fois les aires linguistiques et les frontières des États régionaux en cliquant ici s.v.p.

Enfin, le système fédéral éthiopien a contribué à la croissance économique du pays et à sa relative stabilité. Il y est parvenu en décentralisant le pouvoir et les ressources vers les régions et les gouvernements locaux. Toutefois ce système, s'il a désamorcé beaucoup de tensions, a aussi connu quelques échecs, ne parvenant pas à convaincre les séparatistes des deux «Fronts de libération» séparatistes du Tigré (FLPT) et des Oromo (FLO) soutenus par l'Érythrée, d'où la guerre civile du Tigré (2020-2022).

2 Données démolinguistiques

La population éthiopienne était estimée à 126 millions d'habitants en 2023, l'un des plus peuplés de l'Afrique avec le Nigéria (218 millions). Les États les plus peuplés sont l'Oromia (40,8 millions), l'Amhara (23,2 millions) et le Somali (12,6 millions). Suivent le L'Éthiopie du Sud (7,5 millions), le Tigré (5,8 millions) et l'Éthiopie du Sud-Ouest (4,1 millions).
 
Oromia: 40,8 millions
Amhara: 23,2 millions
Somali: 12,6 millions
Sud: 7,5 millions
Tigré: 5,8 millions
Sidama: 5,3 millions
Sud-Ouest: 4,1 millions
Afar: 2,0 millions
Addis-Abéba (ville): 3,9 millions
Benishangul-Gumuz: 1,2 million
Diré-Dawa (ville): 551 000
Gambela: 525 000
Harar: 283 000
Centre: non disponible

Addis-Abéba, la capitale de l'Éthiopie, compte 3,9 millions d'habitants; la ville de Diré-Dawa, 551 000.

2.1 Les États régionaux

Le tableau ci-dessous présente la liste de ces États régionaux avec leur population, leurs langues principales, leur superficie et leur capitale (voir la carte détaillée). Bien que la plupart des États soient découpés sur une base ethnolinguistique, il n'a pas été possible de le faire pour tous les États, car la diversité et le mélange des peuples dans un même territoire ne le permettaient pas, notamment dans les États de l'Ouest et du Sud-Ouest. C'est ainsi que plusieurs États ont choisi l'amharique comme langue officielle, alors qu'elle n'est parlée que par une minorité comme langue maternelle.    

Afar Amhara Benishangul-
Gumuz
Centre
de l'Éthiopie
Gambela Harar Oromia Somali Sidama Tigré Sud-Ouest / Sud
afar: 89,3
amharique: 6,9
tigrigna: 1,1
wolaitta:0,8
amharique: 92,9
awngi: 2,7
oromo: 2,6
qimant: 1,1
berta: 25,3
amharique: 22,3
gumuz: 20,2
oromo: 17,9
gouragué: 35
hadiya: 35
amharique: 20
oromo: 6
nuer: 45,9
anuak: 22,2
amharique: 10,5
oromo: 4,8
oromo: 57,6
amharique: 28,0
harari: 7,0
somali: 3,2
oromo: 86,9
amharique: 9,2
gédéo: 0,9
somali: 0,6
somali: 96,9
amharique: 0,7
oromo: 0,5
kistané: 0,4
sidamo: 94,2
oromo: 2,5
amharique: 1,9
autre: 1,4
tigrigna: 95,0
amharique: 3,1
saho: 0,7
qimant: 0,3
sidamo: 19,6
wolaitta: 10,4
hadiya: 7,9
kistané: 7,1
72 051 km² 154 709 km² 50 699 km² non disponible 29 783 km² 311 km² 284 538 km² 335 252 km² 12 000 km² 50 079 km² 84 609  km²
Sémara Baher Dar Asosa Hosaïna Gambela Harar Addis-Abéba Djidjiga Hawassa Me Wolaita Sodo et Bonga
2,0 millions 23,2 millions 1,2 million - 525 000 283 000 40,8 millions 12,6 millions 5,3 millions 5,8 millions 11,6 millions

Les données numériques du tableau ci-dessus correspondent aux pourcentages des quatre premières langues parlées par État régional. L'État du Sud-Ouest et l'État du Sud n'ont été créés qu'en 2023, ce qui signifie que les données numériques datent d'avant la partition.

Les États régionaux à forte prédominance ethnolinguistique sont l'Afar (afar: 89,3%), l'Amhara (amharique: 92,9%), le Harar (oromo: 57,6%), l'Oromia (oromo: 86,9%), le Somali (somali: 96,9%), le Sidama (sidamo: 94,2%) et le Tigré (95,0%). Les États multiethniques (Benishangul-Gumuz, Centre, etc.) ont tendance à choisir l'amharique comme langue officielle (de travail); même le petit État de Harar (311 km²) a choisi l'amharique et l'oromo comme langues de travail. En fait, les plus petits États multiethniques, tels le Centre, le Sud-Ouest et le Sud, ont également choisi l'amharique comme langue de travail de façon à ne pas se distinguer du gouvernement fédéral, et ce, d'autant plus qu'ils n'ont aucune langue majoritaire. Cependant, l'État du Sidama a une langue majoritaire parlée par 94,2 % de la population et a choisi le sidamo et l'amharique comme langues de travail.

L'Éthiopie a approuvé une politique visant à introduire quatre langues de travail supplémentaires aux côtés de l'amharique, qui est la langue de travail de la nation. À l’avenir, l'oromo, la langue la plus parlée en Éthiopie, l’afar, le somali et le tigrigna sont tous adoptés comme «langues de travail» du gouvernement.

La politique linguistique fédérale de l'Éthiopie adoptée au cours des deux derniers régimes successifs du pays a donné la priorité à l'amharique comme seule langue officielle de l'État. Bien qu’il n’y ait aucune raison formulée pour que l’amharique soit la langue dominante du gouvernement fédéral, l’histoire montre qu’elle a été renforcée à l’époque de l’empereur Hailé Sélassié (1930-1974), qui en a fait la seule langue de travail du pays.

Les critiques ont souligné que sous le Parti de la prospérité (anciennement Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien), certaines régions ont été autorisées à faire d'une langue régionale leur langue de travail, mais il y a eu peu de changements pour refléter la diversité de la population au niveau national. Cela est devenu de plus en plus important en raison de l’instabilité croissante du pays sur les plans politique et ethnique.

2.2 Les groupes ethniques

En Éthiopie, les noms des groupes ethniques (Afar, Somali, Oromo, Amhara) sont invariables comme noms propres, de même comme adjectifs où leur initiale est écrite en minuscule, moins qu'ils soient francisés (p. ex. Tigréens). L'Éthiopie constitue une mosaïque de plus de 85 ethnies. Les plus nombreux sont les Oromo (appelés aussi Galla); ils représentent environ 32 % de la population. Ils sont suivis des Amhara (25%), des Somalis (6,3%) et des Tigréens (6,1%). Les autres groupes ethniques numériquement importants sont les Sidama, les Wolaïtta, les Kistané, les Hadiyya, les Afar, les Gamo, les Gédéo, etc.  

Afar
Alaba
Agew/Awingi
Agew/Kamyr
Amhara
Anyiwak
Arborie
Argoba
Ari (Shankella)
Badi
Basketo
Bench
Burji
Charra
Dasenech
Dime
Dizi
Dorzie
Fekashi
Falacha
Gamo
Gamili
Ganjule
Gebato
Gedeo
Gewada
Gidole
Goffo
Guagu
Gurage
Hadiyya
Hamer
Harari/Adare
Jebelawi
Kebena
Kechama
Keffa
Kemant
Kembata
Konta
Kulo
Kewama
Koma
Konso
Koyra
Kunama
Mabaan
Macha
Mareko
Mao
Me'en
Malie
Mello
Mer
Mesengo
Mossiya
Mursi
Nao
Nuer
Nyangatom
Oromo
Oyda
Saho
She
Sheko
Shinasha
Shita
Sidama
Soddo
Somalis
Suri
Tigréens
Timbaro
Tsamay
Welaytta
Werji
Weyito
Yemsa
Zeysie
Zergula

 2.3 Les langues éthiopiennes

L'Éthiopie compte autant de langues que d'ethnies: plus de 85, sans parler des innombrables variétés linguistiques (plus de 200). Toutes les langues parlées en Éthiopie appartiennent à deux familles principales: la famille afro-asiatique (groupes sémitique, couchitique et omotique) et la famille nilo-saharienne. Le tableau qui suit ne présente que les langues parlées par plus de 150 000 locuteurs, ce qui ne dépasse pas 35 sur 85.

Groupe ethnique Population Pourcentage Langue Filiation Religion
Oromo 41 185 000 32,5 % oromo groupe couchitique christianisme orthodoxe
Amhara 32 333 000 25,5 % amharique groupe sémitique christianisme orthodoxe
Somali 8 012 000 6,3 % somali groupe couchitique islam
Tigréen 7 772 000 6,1 % tigrigna groupe sémitique christianisme orthodoxe
Sidama 5 326 000 4,2 % sidamo groupe couchitique christianisme orthodoxe
Wolaitta 3 065 000 2,4 % wolaitta groupe omotique christianisme orthodoxe
Gouragué 2 417 000 1,9 % gouragué groupe sémitique islam, christianisme orthodoxe
Hadiya 2 306 000 1,8 % hadiya groupe couchitique christianisme orthodoxe
Afar 2 155 000 1,7 % afar groupe couchitique islam
Gamo 1 988 000 1,5 % gamo groupe couchitique christianisme orthodoxe
Gédéo 1 772 000 1,4 % gédéo groupe couchitique christianisme orthodoxe
Silte 1 689 000 1,3 % silte groupe sémitique islam
Kafa 1 208 000 0,9 % kafa groupe omotique religion ethnique
Awi 1 020 000 0,8 % awi groupe couchitique christianisme orthodoxe
Dawro 975 000 0,7 % dawro groupe couchitique christianisme orthodoxe
Kambata 924 000 0,7 % kambaata groupe couchitique christianisme orthodoxe
Gofa 652 000 0,5 % gofa groupe omotique christianisme orthodoxe
Bench 635 000 0,5 % bench groupe omotique christianisme orthodoxe
Aari 521 000 0,4 % aari groupe omotique religion ethnique
Gumuz 492 000 0,3 % gumuz famille nilo-saharienne christianisme orthodoxe
Konso 463 000 0,3 % konso groupe couchitique christianisme orthodoxe
Mesqan 451 000 0,3 % mesqan groupe sémitique islam
Ximre 433 000 0,3 % ximre groupe couchitique christianisme orthodoxe
Alaba 419 000 0,3 % alaba groupe couchitique islam
Yem 288 000 0,2 % yemsa groupe omotique christianisme orthodoxe
Koore 282 000 0,2 % koorete groupe omotique christianisme orthodoxe
Nuer 280 000 0,2 % nuer famille nilo-saharienne christianisme orthodoxe
Me'en 272 000 0,2 % me'en famille nilo-saharienne christianisme orthodoxe
Kemant 239 000 0,1 % amharique groupe sémitique islam
Argobba 126 000 0,0 % argobba groupe sémitique christianisme orthodoxe
Tembaro 177 000 0,0 % kambaata groupe couchitique christianisme orthodoxe
Anuak 171 000 0,0 % anuak famille nilo-saharienne christianisme orthodoxe
Maalé 168 000 0,0 % maalé groupe omotique religion ethnique
Konta 150 000 0,0 % dawro groupe couchitique christianisme orthodoxe
Autres langues 6 161 000 4,8 % - - -
Total 2023 126 527 000 100 %      

- Les langues de la famille afro-asiatique

C'est la famille des langues afro-asiatiques qui est la plus importante. Elle se divise en trois sous-groupes: les langues sémitiques (comme l'arabe et l'hébreu), les langues couchitiques et les langues omotiques.

Les langues sémitiques (environ 45 millions de locuteurs) sont parlées dans le nord-ouest de l'Éthiopie, principalement dans les États du Tigré (tigrigna), d'Amhara (amharique) et de Harar (harari), ainsi que dans la partie septentrionale des petits États du Sud. Citons les langues sémitiques importantes: l'amharique (32,3 M), le tigrigna (7,7 M), le gouragué (2,4 M), l'argobba (126 000), le silte (1,6 M), le mesqan (451 000), l’araire (25 810), etc.

L'amharique est la langue officielle de l'Éthiopie depuis la fin du XIXe siècle. Juridiquement, l'amharique est la langue de travail du gouvernement fédéral (art. 5 de la Constitution).

Les langues couchitiques (environ 65 millions de locuteurs) sont surtout parlées dans la région d'Addis-Abeba dans l'Oromia, dans le Centre, le Centre-Sud et tout l'Est, incluant l'Afar et le Somali. Ces langues occupent des frontières communes avec l'Érythrée, Djibouti, la Somalie et le Kenya. Les langues couchitiques importantes sont les suivantes: l'oromo et ses variantes septentrionale, orientales et méridionales (41,1 M), le somali (8,0 M), le sidamo (5.3 M), l'hadiya 2,3 M), l'afar (2,1 M), le gamo (1,9 M), le gédéo (1,7 M), l'awi (1,0 M), le dawro (1,1 M), le kambaata (1,1 M), le konso (463 000), le ximbre (433 000), 419 000), l'alaba, 419 00), etc.

Les langues omotiques (environ 7 millions de locuteurs) sont parlées au sud-ouest de l'Éthiopie. Ces langues sont très nombreuses, mais, sauf exception, comptent généralement peu de locuteurs: le wolaitta (3,0 M), le kafa (1,2 M), le gofa (652 000), le bench (635 000), l'aar (521 000), le yemsa (288 000), le kooreté (282 000), le maalé (168 000), etc.

- Les langues de la famille nilo-saharienne

Les langues de la famille nilo-saharienne occupent une petite superficie dans presque tout l'ouest du pays, une aire linguistique commune avec le Soudan, le Soudan du Sud et le Kenya. Ces langues sont notamment le gumuz (492 000), le nuer (280 000), le me'en (272 000), l'anuak (171 000), etc. Mais il y en a d'autres qui ne sont pas citées jusqu'ici: le berta, le kacipo-balesi, le komo, le kwama, le majang, le mursi, le nyangatom, l'opuo, le suri et l'uduk. Le nombre total des locuteurs des langues nilo-saharienne de l'Éthiopie est d'environ 725 000 locuteurs.

2.4 Les langues véhiculaires

Certaines langues servent, d'une façon ou d'une autre, de moyen véhiculaire entre les ethnies: l'amharique, le tigrigna et l'oromo parmi les langues nationales, puis le guèze comme langue liturgique, et enfin l'arabe et l'anglais.

- L'amharique et les langues de travail

Depuis l'entrée en vigueur de la Constitution de 1995, l'amharique a perdu son statut de langue officielle. En effet, l'article 5.1 affirme que «toutes les langues éthiopiennes bénéficient de la reconnaissance égale de l'État», alors que l'article 5.2 accorde à l'amharique le statut de «langue de travail du gouvernement fédéral». Cependant, en 2020, quatre autres langues ont acquis le statut de «langue de travail»: l'oromo, le somali, l'afar et le tigrigna.

Parmi les langues numériquement importantes, l'oromo est parlé par 32,5% de la population comme langue maternelle, alors que l'amharique l'est par 25,5%. Il est légitime de se poser la question suivante : pourquoi l'Éthiopie a-t-elle choisi l'amharique comme langue véhiculaire privilégiée, alors que l'oromo est parlé par plus de locuteurs? L'explication de ce choix se trouve dans les 1700 ans de liens avec l'Église orthodoxe éthiopienne. Depuis le IVe siècle, l'Église orthodoxe éthiopienne emploie cette langue sous le nom de «guèze», parfois appelé aujourd'hui «éthiopien ancien», pour ses célébrations liturgiques et ses fonctions littéraires. Or, le guèze a cessé d'être parlé vers le IVe siècle dans la Corne de l'Afrique. Il avait été la langue officielle du royaume d’Aksoum, puis celle de l’empire d’Éthiopie. Selon des analyses anciennes, le guèze serait pour plusieurs langues de la région, notamment l’amharique et le tigrigna, ce que le latin a été pour français. Tandis que le guèze a cessé d'évoluer, l'amharique et le tigrigna ont poursuivi leur évolution tout en se transformant parallèlement.

Même si l'amharique est une langue minoritaire (25,5 %), il constitue la langue officielle et administrative du pays. Le gouvernement fédéral l'utilise comme langue de travail. L'amharique sert également de langue véhiculaire entre les différentes ethnies du centre du pays. On estime que l'amharique est parlé par autant de locuteurs comme langue seconde, ce qui fait qu'au moins 70 % de la population peut s'exprimer d'une manière ou d'une autre dans cette langue. Dans le nord de l'Éthiopie, c'est le tigrigna qui sert de langue véhiculaire, mais c'est l'oromo qui exerce cette fonction dans le Sud. Bref, l'amharique, l'afar, le tigrigna, l'oromo et le somali sont les cinq langues véhiculaires nationales de l'Éthiopie.

- L'arabe et l'anglais

L'anglais est la langue administrative avec l'amharique, mais il est surtout pratiqué dans les centres urbains, notamment dans les hôtels et les lieux touristiques; l'Éthiopien moyen baragouine plus l'anglais qu'il ne le parle. Il en est ainsi de l'italien, encore parlé par les plus âgés. Certaines personnes parlent également le russe ou l'espagnol, un vestige des conseillers soviétiques et cubains. Enfin, le français est connu des employés du chemin de fer éthiopien (et djiboutien).

De plus, l'arabe est une langue enseignée dans les écoles coraniques aux Éthiopiens de religion musulmane, mais l'arabe employé en dehors des domaines laïcs est l'arabe littéral moderne.

- Les alphabets

L'Éthiopie utilise trois alphabets.

- l'alphabet guèze pour l'amharique et le tigrigna;

- l'alphabet latin pour la plupart des autres langues;

- l'alphabet arabe dans les textes religieux pour les musulmans.

L'amharique et le tigrigna utilisent l'alphabet guèze, qui était employé dans la langue liturgique de l'Église orthodoxe éthiopienne). Cet alphabet est assez particulier en plus d'être unique à l'Éthiopie (et à l'Érythrée): il compte 33 lettres, dont chacune réfère à sept caractères, ce qui fait un total de 231 caractères. Cet alphabet est aujourd'hui utilisé pour écrire les langues modernes de l'Éthiopie. La première écriture guèze était un boustrophédon (du grec bous, «bœuf» et strophein, «tourner»: selon le principe du bœuf tirant la charrue d'un sillon à l'autre dans un champ; littéralement «comme tourne le bœuf»). Il s'agit d'une écriture dont les lignes se lisent de droite à gauche, puis alternativement de gauche à droite (et non pas uniquement de gauche à droite, comme on le fait en français ou en anglais). Plus tard, l'écriture de gauche à droite a prévalu sous l'influence grecque, à la différence des autres écritures sémitiques.

2.5 Les religions

Près de la moitié de la population est de religion chrétienne orthodoxe ou copte. C'est le christianisme qui prédomine dans le nord du pays. L’Église d’Éthiopie, rattachée à l’Église copte d’Égypte, était Église d’État jusqu’en 1974.  L'orthodoxie éthiopienne se caractérise par une forte tradition monastique et, jusqu'à la révolution marxiste, le clergé était présent dans pratiquement toutes les villes du pays. Sa vision des valeurs chrétiennes est mêlée à des croyances traditionnelles africaines qui intègrent les esprits et les démons, tandis que les offices religieux accordent volontiers une place à la danse, à l'astrologie et à la divination. La répartition des croyances répond en partie à des critères linguistiques et géographiques. Les Éthiopiens parlant le tigrigna ou l'amharique sont chrétiens à 90 % et ceux de langue sidamo à 60 %.

Quant à l'islam, il est pratiqué par environ 40 % de la population, principalement dans les États régionaux du Sud et ceux de l'Est (Afar et Somali). L'islam a pénétré dans le pays lors des conquêtes territoriales du VIIe siècle. Au cours de l'occupation italienne (1935-1941), la cour de justice islamique, la Charia, devint officielle à Addis-Abéba et dans les régions de l'Afar, du Tigré et de l'Amhara. En 1960, sous la pression musulmane, le gouvernement de Haïlé Sélassié reconnut l'existence de la Charia qui concernait un nombre grandissant de croyants. Quelque 10 % des Éthiopiens sont animistes, notamment parmi certaines ethnies semi-nomades du sud et du sud-ouest du pays.

Il existait, jusqu’au milieu des années 1980, une petite minorité de juifs éthiopiens dans l'État régional de l'Amhara, les falacha (appelés aussi juifs d’Abyssinie). Cette minorité religieuse fut persécutée par les autorités éthiopiennes durant plusieurs siècles. Leur nom vient d'un ancien mot guèze (racine du mot falacha) signifiant «exilés», «émigrés» ou «étrangers». Il désigne notamment une partie de l'ethnie des Agoués, qui vivait sur le haut plateau abyssin avant l'arrivée des fondateurs du royaume d'Aksoum; les anciens Agoués étaient animistes, mais une partie d'entre eux adopta le judaïsme, sans doute aux environs de l'ère chrétienne.

Lorsque vers 320 l'Église d'Éthiopie devint Église d'État, les Agoués juifs se séparèrent des Agoués chrétiens et créèrent leur propre royaume. L'État falacha resta indépendant jusqu'en 1616, date à laquelle il fut intégré à l'Empire abyssin. Ce fut le dernier État juif de l'histoire avant la création d'Israël en 1948. Privés de leurs terres, victimes de l'antisémitisme, les falacha devinrent la communauté la plus pauvre d'Éthiopie. Au XVIe siècle, leur nombre était estimé à 500 000, mais diminua à 70 000 vers 1860 et à moins de 30 000 au milieu du XXe siècle. Une bonne partie de la communauté falacha émigra en Israël en 1984-1985, alors qu'un pont aérien avait été organisé pour faciliter leur transport vers Israël. Il resterait aujourd'hui en Éthiopie quelque 20 000 falachas à attendre depuis des années, dans des camps de transit, l'autorisation de s'envoler pour Israël. Ce sont des juifs noirs éthiopiens, dont la judaïté n'est pas certaine; les autorités israéliennes ont admis 4000 falacha en 1998 et examinent maintenant les demandes cas par cas: environ 250 falachas partent chaque mois pour Israël. Une fois installés en Israël, les falacha feraient face à un racisme administratif particulièrement flagrant. Les falachas sont les seuls juifs parmi les Noirs et les seuls Noirs parmi les juifs.

3 Données historiques

L’Éthiopie est sûrement l'un des plus anciens pays du monde. Rappelons que c'est 1974 que des scientifiques ont découvert en Éthiopie (vallée de l'Aouach) Lucy, une jeune australopithèque ayant vécu il y a environ 3,2 millions d'années. Durant le premier millénaire avant notre ère, des émigrants arabes du royaume de Saba au Yémen traversèrent la mer Rouge et se mêlèrent aux populations chamitiques des hauts plateaux du Tigré. Le métissage entre les deux peuples constitua le fonds de la population actuelle.

3.1 L'empire d'Axoum

Sous l’empereur Lezanas, l'empire d'Aksoum (qui devait exister de 100 à 940 de notre ère) fut converti au christianisme au IVe siècle par des moines grecs orthodoxes. À son apogée, le Royaume d'Aksoum fut une des quatre plus grandes puissances mondiales de l'époque, avec l'Empire romain d'Orient, l'empire han en chine et l'Empire perse. À partir du VIIe siècle, l'expansion de l'islam en Arabie et dans la région de la mer Rouge isola pour plusieurs siècles le royaume chrétien d’Aksoum (aujourd'hui la métropole religieuse de l'Église copte éthiopienne). Le Royaume d'Axoum perdit l'Érythrée qui s'islamisa; affaibli, le royaume s’effondra au Xe siècle.

Le territoire du royaume d'Aksoum finit par devenir le royaume médiéval d'Abyssinie avec la fondation de la dynastie des Salomoniens vers 1270 dont les rois prétendaient descendre directement du roi biblique Salomon et de la reine de Saba. D'après la tradition chrétienne locale, le fondateur de la dynastie salomonide du royaume d'Aksoum fut Ménélik, le fils que le roi Salomon aurait eu de la reine de Saba.

Les Salomonides furent renversés et remplacés par la dynastie des Zagoué, issue d’une région du plateau central. Mais la religion resta longtemps le fil conducteur de l’histoire de l’Éthiopie, car jusqu’au XVIIe siècle les musulmans et les chrétiens s’affrontèrent sans cesse pour dominer l’empire. Sous le règne de Zara Yacoub, au XVe siècle, l’administration de l’Église éthiopienne, divisée en plusieurs factions, fut réformée et les doctrines religieuses codifiées.

Le royaume d'Abyssinie, fondé au XIIIe siècle, se transforma en Empire éthiopien grâce à une série de conquêtes militaires, ce qui allait perdurer jusqu'au XXe siècle.

3.2 Les influences européennes

L'Éthiopie dut subir les influences des pays européens au cours de son histoire, notamment le Portugal, l'Italie, la Grande-Bretagne et la France. Au XVIe siècle, les musulmans d'Ahmad ibn Ibrahim («le Gaucher») envahirent l’Éthiopie en 1527. Le roi d'Éthiopie demanda l’aide des Portugais dont une première ambassade était installée en 1520 dans le pays. L’Éthiopie fut sauvée par l'intervention d'une armée portugaise conduite par le fils de Vasco de Gama (1541). Les jésuites portugais tentèrent de catholiciser les Éthiopiens, mais ils rencontrèrent une forte opposition de la part des religieux coptes, pour lesquels la religion monophysite était indissociable du pouvoir politique et de l’identité éthiopienne. Ibrahim et le négus Claude furent tués au cours d'une attaque en 1559, tandis que les Galla envahissaient le sud du pays.

Le XVIIe siècle vit la renaissance artistique de la culture éthiopienne, qui se trouva exposée aux influences de l’Europe occidentale et du monde musulman, notamment sous le règne du négus Fasiladas (1603-1667), qui fonda une nouvelle capitale à Gondar en 1632 et sous Iyasou (1682-1706). Puis l’Éthiopie connut une longue période de confusion dynastique et de déclin, durant laquelle le pays se morcela. La seule force d’unification durant cette période demeura l’Église copte d’Éthiopie, qui utilisait le guèze comme instrument de communication linguistique.

Sous le règne de Téwodros II ou Théodore II (1855-1868), l'amharique devint plus important, car il servit à rédiger les chroniques royales à la place du guèze. Pare la suite, les rois éthiopiens continuèrent d'employer l'amharique dans l'administration et comme langue littéraire. Ce faisant, l'amharique acquit un prestige considérable et servit d'instrument unificateur auprès des peuples du pays. Cette langue commença à être enseignée dans les écoles.
 

Au XIXe siècle, l'Éthiopie fascinait les Européens. Considérée par ces derniers comme un «pôle chrétien» au sein d’une «Afrique islamo-animiste», l’Éthiopie faisait figure de «pays civilisé». Lors de l'ouverture du canal de Suez en 1869, toute la zone de la mer Rouge devint la proie des puissances européennes, notamment l’Italie, la France et la Grande-Bretagne, soucieuses de contrôler le passage de leurs navires. Ce fut d'abord l'Italie qui s’empara de deux ports de la mer Rouge, celui d'Assab en 1872, puis celui de Massaoua en 1885. 

Lorsque Ménélik, roi du Choa succéda à Johannès IV en Éthiopie, il se fit couronner empereur d'Éthiopie sous le nom de Ménélik II (1844-1913) en 1889 et rétablit la dynastie des Salomonides. Il fixa sa capitale à Addis-Abéba et réunifia le royaume éthiopien, en poussant ses conquêtes à l'ouest et au sud et en annexant l'Ogaden. Le traité d’Ucciali conclu la même année (le 2 mai) entre l'Éthiopie et l'Italie donna lieu à des interprétations divergentes: la version italienne différait de la version en amharique. Les Italiens prétendaient faire de l'Éthiopie un «protectorat» et y envoyèrent une expédition militaire. Pour l'Éthiopie, il s'agissait simplement d'un «traité d'amitié».

Au cours de son règne, Ménélik II allait favoriser l'enseignement des langues étrangères telles l'anglais, le français et l'italien, mais surtout l'anglais qui devint la langue d'enseignement dans les écoles. 

- Britanniques, Italiens et Français

En 1887, un protectorat britannique fut proclamé sur la Somalie britannique ("British Somaliland"). Ce protectorat fut administré par l'Empire britannique des Indes, puis par les Affaires étrangères ("Foreign Office") et enfin par les Affaires coloniales ("Colonial Office"). L'un des objectifs britanniques était d'assurer le ravitaillement en bétail de sa colonie du port d'Aden (aujourd'hui au Yémen).

En même temps, les Italiens imposèrent en 1887 leur protectorat au sultan de Majeerteen (actuel Puntland). Mais l'expansion italienne fut bloquée au nord par le Somaliland) et au sud (le Kenya) par les colonies britanniques et à l'ouest par l'Éthiopie.

Après avoir obtenu plusieurs concessions commerciales, la France put en 1885 imposer un «accord» politique avec les «chefs issas» en plaçant un territoire sous souveraineté française (Somalie française). En 1888, un accord territorial avec la Grande-Bretagne fixa les frontières entre les deux protectorats. La même année, le port de Djibouti devint le chef-lieu de la «Côte française des Somalis» créée en 1896. En réalité, la colonie française de Djibouti n'a jamais fait partie de la Somalie, mais elle abritait des Somaliens de langue somalie.

Comme il fallait s'y attendre, la guerre éclata entre l'Éthiopie et l'Italie en 1895, mais les forces italiennes du général Baratieri furent vaincues à Adoua, l’année suivante (le 1er mars 1896), grâce à la collaboration de la France qui avait vendu des armes à Ménélik II. Les Italiens avaient perdu 8000 hommes, dont 4000 tués. L’Italie dut reconnaître l’indépendance de l’Éthiopie en octobre 1896 (paix d’Addis-Abeba), ainsi que les frontières telles qu’elles résultaient de l’expansion de Ménélik II, ce qui correspond aux frontières actuelles.

- Le chemin de fer franco-éthiopien

Le 7 août 1896, la Compagnie des chemins de fer éthiopiens fut fondée, en partenariat avec la France, afin de relier Addis-Abéba à la capitale djiboutienne (Djibouti). Ménélik II accorda au Français Léon Chefneux (1853-1927) et au Suisse Alfred Ilg (1854-1916), l’autorisation de constituer la Compagnie impériale des chemins de fer éthiopiens (CIE). Depuis l'ouverture du chemin de fer en 1917, c'est vers le port de Djibouti que convergèrent les flux économiques et commerciaux de toute l’Éthiopie, d’une bonne partie de l’Afrique de l’Est et du Proche-Orient. Ménélik II, qui mourut en 1914, ne put assister à l’arrivée du premier train et à sa mise en exploitation. Le chemin de fer Djibouti Addis-Abéba, appelé au début «Chemin de fer franco-éthiopien» (puis CED: «Chemin de fer djibouto-éthiopien» en 1981), consacra Djibouti comme porte maritime de l'Éthiopie. Soulignons que le chemin de fer djibouto-éthiopien constituait alors une enclave souveraine française en Éthiopie, ce qui indiquait la faiblesse de l'indépendance éthiopienne à ce moment-là.
L'inscription ci-contre représente la façade de la gare franco-éthiopienne de Diré-Dawa ("Dire Daoua" en français à l'époque), devenue «djibouto-éthiopienne» après la rétrocession de Djibouti par la France. Cette voie ferrée, reliant Addis-Abéba à Djibouti, construite par la France au tout début du XXe siècle, n’est déjà plus qu’un souvenir.

La coopération de la France s'avéra une bonne affaire pour les Français, car le commerce du port de Djibouti devait connaître une croissance remarquable. La France possédera en Djibouti le principal centre économique de toute la région. Depuis cette époque (1917), du moins jusqu'en 1972, le français resta la langue véhiculaire des employés des chemins de fer djibouto-éthiopiens. Même les billets étaient en français jusqu'à ce que les syndicats exigent l'éthiopianisation du chemin de fer; les Français durent partir et les Éthiopiens prirent le contrôle, mais ce fut le début de la dégringolade. Le train devint vétuste, car il ne fut jamais rénové.  L'exploitation de la ligne s'est définitivement interrompue dans les années 2000. Depuis 2016, elle est remplacée par la nouvelle ligne à voie normale reliant Addis-Abeba à Djibouti, un train rapide construit par la Chine qui a remplacée l'ancien train français. Le successeur de Ménélik II, Tafari Makonnen, fut désigné comme héritier et accéda au trône sous le nom de Hailé Sélassié (1892-1975).

- L'Afrique orientale italienne

Par des traités adoptés en 1905 avec les sultans somalis et des conventions avec la Grande-Bretagne, l’Éthiopie et le Zanzibar (Tanzanie), la région bordant la côte de l’océan Indien, au sud du pays, était devenue italienne: ce fut la "Somalia italiana". À la suite du traité de Londres de 1915, l’Italie étendit son contrôle sur l’intérieur du pays en acquérant en 1925 une portion de la colonie du Kenya britannique appelée le Jubaland.

Mais l’arrivée au pouvoir de Benito Mussolini réveilla les ambitions colonisatrices de l'Italie. Invoquant les incidents ayant opposé les Éthiopiens et les Italiens en Somalie, le gouvernement fasciste de Mussolini attaqua l'Éthiopie en octobre 1935. Le 9 mai 1936, Mussolini proclama le roi d'Italie (Victor Emmanuel III) empereur d’Éthiopie et Hailé Sélassié dut s'exiler en Grande-Bretagne.

En 1936, l’Italie réunit les territoires de la Somalia, de l’Eritrea et de l’Etiopia nouvellement conquise pour constituer l’empire colonial de l’Africa Orientale Italiana. C'est ainsi que l'Éthiopie fut réunie à l'Érythrée et à la Somalie pour former l'Afrique-Orientale italienne. Puis Mussolini se résolut à envoyer des millions de colons italiens en Afrique italienne dans le but de rentabiliser les territoires annexés.

Depuis 1930, la Somalie italienne comptait plus de 22 000 colons italiens, soit 2 % de la population du territoire, dont 10 000 résidaient dans la capitale Mogadiscio où se trouvaient des industries manufacturières. En 1935, la colonie comptait plus de 50 000 Italo-Somaliens, constituant 5 % de la population du territoire. Parmi eux, 20 000 résidaient à Mogadiscio, ce qui représentait environ 40 % des 50 000 habitants de la ville. Ces données ne tiennent pas compte des 220 000 soldats italiens stationnés dans le pays.

En trois ans, près de 200 000 Italiens vinrent s’installer en Afrique orientale, dont 120 000 en Libye. La plupart des Italiens n'étaient pas des colons, mais des petits entrepreneurs, des artisans, des commerçants et fonctionnaires désireux de faire fortune. L'italien devint la langue administrative de toute l'Afrique orientale (Éthiopie, Érythrée et Libye). On enseigna aussi l'italien aux enfants éthiopiens, érythréens et somaliens. 

3.3 Le régime de Hailé Sélassié et l'imposition de l'amharique

Lors de la Deuxième Guerre mondiale, les Britanniques chassèrent les Italiens et restaurèrent l'autorité de Hailé Sélassié en 1941. Durant l'administration militaire britannique, l'arabe et le tigrigna devinrent les deux langues officielles du pays au grand dam des Éthiopiens partisans de l'amharique. À la fin de la guerre, l'ONU prit en charge le dossier des anciennes colonies italiennes et opta en 1952 pour la fédération de l’Érythrée au sein de l'Empire éthiopien. La nouvelle fédération devait se doter d'institutions démocratiques telles qu'une Assemblée élue au suffrage universel désignant le chef de l'exécutif, des partis politiques et des syndicats libres. Le tigrigna et l'arabe restaient les deux langues officielles du pays, mais l'anglais acquit en même temps la co-officialité de facto, délaissant par le fait même l'amharique. 

Cependant, Hailé Sélassié (dont le nom signifiait «puissance de la Trinité») refusa l'exclusion de l'amharique comme langue officielle, ainsi que l'autonomie accordée à l'Érythrée. En 1955, Sélassié provoqua le renversement de l'Assemblée d'Asmara en Érythrée et fit occuper progressivement tous les rouages du pouvoir, jusqu'à l'annexion totale, en 1962, de la «quatorzième province» éthiopienne, l'Érythrée.

Il s’ensuivit la création d’un mouvement de résistance: le Front de libération érythréenne (FLE). Après plusieurs scissions et une recomposition sous le nom de Front populaire de libération de l'Érythrée (FPLE), le mouvement participera au renversement du régime éthiopien, trente ans plus tard, et obtiendra l’indépendance de l’Érythrée.

Pendant ce temps, Hailé Sélassié avait pensé donner à la langue amharique une fonction nationale d'unification politique. Il avait fait adopter une nouvelle constitution en 1955, dont l'article 125 déclarait que «la langue officielle de l'Empire est l'amharique». Dans les faits, l’amharique fut employé comme la langue d’enseignement à part entière sous le régime impérial. Pour l'empereur, l'amharique devait servir d'instrument d'unité nationale pour réunir tous les peuples de l'Éthiopie. Pour cette raison, la politique linguistique devint effective dans les domaines de l’administration, de la justice et de l’éducation. Sous le régime de Sélassié, l'oromo fut interdit dans l'éducation, dans la conversation publique et dans le domaine administratif.

Cette conception politique de la langue fut influencée à l'époque par la France, qui pratiquait depuis longtemps une politique similaire avec le français. En 1959, le gouvernement éthiopien confia au Français Roger Schneider (1917-2002), linguiste, philologue et polyglotte, la tâche de concevoir une Académie éthiopienne dont le rôle serait de légiférer sur le «bien parler» et le «bien dire», à l'exemple de l'Académie française.

De leur côté, les Érythréens s'établirent dans toutes les villes d'Éthiopie dans le commerce et dans le transport routier, où l'italien était devenu la langue véhiculaire, car le marché éthiopien parut une aubaine pour les Érythréens. Le commerce avec l'Éthiopie favorisa le développement économique de l'Érythrée. Toutefois, dans l'administration, les Érythréens durent faire face à la concurrence des Amhara et de la langue amharique. Ainsi, l'examen d'amharique d'entrée à l'université d'Addis-Abéba eut pour effet de détourner les étudiants musulmans érythréens vers les pays arabes voisins. Dans toutes les écoles primaires, l'amharique était devenu, sous Hailé Sélassié, l'unique langue d'enseignement.

Au cours de la décennie 1960, l'empereur Hailé Sélassié joua un rôle de premier plan dans la formation de l’Organisation de l’unité africaine (OUA), dont le secrétariat fut fixé à Addis-Abéba. Cependant, cette période marqua également le début des conflits avec la Somalie et le Soudan. D'un côté, la Somalie cherchait à réunir les Somalis de l’Ogaden; de l'autre, le Soudan soutenait le mouvement des indépendantistes érythréens.

Hailé Sélassié commença à négliger les problèmes intérieurs de l’Éthiopie tels que les inégalités sociales, le sous-développement et les famines très graves de 1972-1973, qui firent plus de 100 000 morts. Ces événements mécontentèrent la population et l’année de 1974 vit se succéder d’importantes manifestations contre l'incompétence du gouvernement face à la sécheresse. La destitution d’Hailé Sélassié eut lieu le 12 septembre, tandis qu’une junte militaire, le Derg (Conseil militaire administratif provisoire), prit le pouvoir, après 44 ans de règne du négus. Le décès de ce dernier, à l'âge de 83 ans, fut attribué officiellement, dans la nuit du 26 au 27 août, à une «défaillance circulatoire» (lors d'une intervention chirurgicale), mais pour la majorité des historiens, Hailé Sélassié avait été assassiné (étouffé entre deux matelas) par le nouveau régime révolutionnaire dirigé par Mengistu Hailé Mariam, aujourd'hui en exil au Zimbabwe.

3.4 Le régime autoritaire de Mengistu et le multilinguisme

Le nouveau régime nationaliste, le Derg, une dictature militaire marxiste-léniniste, lança le slogan Ethiopia Tikdem (« l’Éthiopie d’abord ») et prit les premières mesures de gouvernement par la nationalisation de l’économie et l'abolition de la monarchie. Mais aussitôt, les oppositions entre extrémistes et modérés se firent sentir. Le 22 novembre 1974, le chef du gouvernement, le général Aman Andom fut assassiné; le lendemain, c’était le tour de 59 autres personnalités. Le lieutenant-colonel Mengistu Hailé Mariam, un militaire du Sud, s’affirma comme la principale figure politique du pays. Surnommé le «négus rouge», Hailé Mariam Mengistu devient en 1977 président du Conseil des ministres et du Conseil militaire, puis il inaugura une période de purges et de terreur. Il devait diriger l’Éthiopie, qui comprenait alors l’Érythrée actuelle, de 1974 à 1987, lorsque le commandement militaire ou la junte fut officiellement «civilianisé», mais est resté au pouvoir jusqu’en 1991

Mengistu accentua l’aspect marxisant du régime en abolissant la propriété foncière, ce qui lui aliéna les grands propriétaires terriens et l'Église copte. Il décida de continuer la guerre contre l’Érythrée et intensifia la répression à l’encontre des citoyens, tout en engloutissant de vastes ressources financières et militaires pour tenter d’étouffer le mouvement pour l’indépendance de l'Érythrée. En 1977, la province de l’Ogaden fit sécession, tandis que le conflit s’internationalisa avec le soutien apporté par la Somalie aux rebelles et l’appui militaire (environ 15 000 hommes) accordé par Cuba et l’URSS au gouvernement éthiopien. En 1984-1985, une terrible famine ravagea le nord-ouest du pays. Mengistu prit alors la décision de déplacer de force 2,5 millions de paysans, dont au moins 20 % périrent lors des regroupements. Sous la férule de Mengistu , l'Éthiopie devint en 1987 une «République populaire et démocratique» à parti unique. En plus des transferts de population, il pratiqua la collectivisation et la villagisation (le regroupement des paysans); à l'exemple de Ménélik II et Sélassié, Mengistu pratiqua une politique particulièrement répressive à l'égard de l'ethnie oromo. Les Soviétiques et les Cubains apportèrent une aide massive au régime de Mengistu, qui se convertit au marxisme-léninisme.
L'influence de l'Union soviétique entraîna une nouvelle politique des nationalités. Au plan linguistique, Mengistu modifia complètement la politique de son prédécesseur qui avait favorisé une politique d'unification nationale au moyen de l'amharique. Mengistu pratiqua plutôt une politique de multilinguisme destinée à noyer l'amharique parmi les nombreuses langues nationales de l'Éthiopie.

Bien que devenu la langue de la révolution, l'amharique perdit la position privilégiée qu'il avait sous l'ancien régime impérial. Mengistu assura la promotion de l'enseignement des langues locales à côté de l'amharique et par le découpage de régions autonomes sur une base ethnique. La surenchère nationaliste s'accentua en 1988, après la perte de l'Érythrée et du Tigré, puis raviva les vieux antagonismes entre les Amhara et des Oromo à l'égard des Tigréens.

Le régime s'épuisa dans les opérations militaires en Érythrée, au Tigré et dans la province d'Oromia au sud-est, alors que les famines ravageaient le pays. La République populaire et démocratique de l'Éthiopie fut de plus en plus contestée par les masses populaires. Le désengagement du bloc de l'Est à la suite de l’effondrement de l’Union soviétique ainsi que la suppression de l’aide provenant des pays socialistes de l’Est contribua à la chute du colonel Mengistu en mai 1991, qui s'exila au Zimbabwe.

Une «Conférence nationale», représentant les principales forces du pays et les différents peuples, reçut la mission de préparer la transition démocratique et la libéralisation de l'économie. Le pouvoir passa aux mains d'une coalition de rebelles dirigée par le chef Tigréen Meles Zenawi. Ensuite, le nouveau gouvernement provisoire redessina les frontières pour constituer 14 régions autonomes sur la base de l'appartenance ethnique. C'est que Meles Zenawi, un Tigréen, défendait le «régionalisme ethnique» et rompait ainsi avec la tradition centralisatrice des Amhara longtemps au pouvoir à Addis-Abéba.

3.5 L'Éthiopie fédérale

Le gouvernement du président Meles Zenawi entreprit la difficile tâche de reconstruire l'Éthiopie. Confrontée au réveil des nationalités, l'Éthiopie  dut reconnaître l'indépendance de l'Érythrée, qui devint effective le 3 mai 1993, ce qui privait l'Éthiopie de sa façade maritime. La nouvelle Constitution de 1994-1995 découpa le territoire en neuf États fédérés et formés sur une base ethnique (voir la carte détaillée). Chacune des entités eut théoriquement le droit à l’autodétermination.

Avec la Constitution, l’amharique perdit son statut de «langue officielle» pour devenir la «langue de travail» du gouvernement fédéral. Mécontents de la concentration des pouvoirs par les Tigréens, les Oromo quittèrent le gouvernement et la guérilla reprit dans l'Ogaden, l'État de Somali. L'opposition boycotta les élections de 1995, qui portèrent à la présidence Negasso Guidada, de 1995 à 2001.

En mai-juin 1998, un conflit armé, déclenché notamment par la création d'une nouvelle monnaie érythréenne, éclata entre l'Éthiopie et l'Érythrée. Opposée à l’Éthiopie, l’Érythrée occupa des territoires éthiopiens (le Tigré) qu’elle revendiquait sur la base de frontières délimitées à l'époque coloniale. Les diverses tentatives de médiation échouèrent, et les belligérants tentèrent d'impliquer dans leur querelle les clans somaliens, eux-mêmes en conflit. Après une trêve de quelques mois, l'Éthiopie envahit l’Érythrée en février 2000 jusqu'en mai. Afin d’inciter les deux pays à engager des pourparlers de paix, un embargo sur les armes, ainsi que sur le matériel et sur l’assistance militaire fut proclamé par le Conseil de sécurité de l’ONU. Les troupes érythréennes se retirèrent des territoires qu’elles occupaient depuis deux ans.

Grâce à l'intervention de l’Organisation de l’unité africaine (OUA), des négociations de paix furent entamées en mai 2000, suivies d'un cessez-le-feu. Cet autre conflit en l'Éthiopie et l'Érythrée fit plusieurs dizaines de milliers de victimes et provoqué le déplacement de 1,3 million de personnes.

Le 8 octobre 2001, le lieutenant Girma Wolde-Giorgis fut élu président de la République fédérale démocratique d'Éthiopie par les deux chambres du Parlement éthiopien réunies en session commune, aucun autre candidat ne s'étant présenté. Réputé «conciliant» et «indépendant», celui qui a déjoué tous les pronostics aura fort à faire pour tirer son épingle du jeu disposait d'atouts non négligeables pour mener à terme son mandat. En plus de parler l'anglais, l'italien et le français, cet Oromo maîtrisait aussi l'oromo, l'amharique et le tigrigna, un avantage certain dans un pays qui compte plus de 85 ethnies.

Après quelques interventions ponctuelles, estimant la sécurité de leur pays menacée, les troupes éthiopiennes pénètrent officiellement en Somalie en décembre 2006 avec le soutien des États-Unis. Leur objectif était de combattre les troupes des tribunaux islamiques, qui menaceraient l'Éthiopie, et de soutenir le gouvernement fédéral de transition. Habituée aux conflits interethniques, l'Éthiopie s'est retrouvée avec une guerre du Tigré en 2020. La tension fut telle qu'en novembre 2021 les médias occidentaux parlaient d'un risque de guerre totale.

En 2023, la fédération d'Éthiopie passa de neuf États à douze, avec la création de l'État du Centre, de l'État du Sud-Ouest et de l'État du Sud  (voir la carte détaillée). 

4 La politique linguistique

La politique linguistique de l'Éthiopie en est une de multilinguisme stratégique. Ce type de politique repose sur un choix essentiellement pragmatique en raison des clivages communautaires et linguistiques. État multilingue, l'Éthiopie ne semble pas avoir le choix d'agir autrement. D'ailleurs, la Constitution du 1er août 1995 a entériné cette orientation. L'article 5 est très clair à ce sujet: toutes les langues éthiopiennes sont égales.

Article 5

Les langues

Les langues

1)
Toutes les langues éthiopiennes bénéficient de la reconnaissance égale de l'État.

2) L'amharique est la langue de travail du gouvernement fédéral.

3) Les membres de la Fédération peuvent, conformément à la loi, déterminer leurs langues de travail respectives.

Si toutes les langues sont égales, il ne peut y avoir un statut officiel pour l'une d'elles. De façon plus subtile, on parle dans la Constitution de «langue de travail» plutôt que de «langue officielle».

4.1 Les langues de travail

En vertu de la Constitution, il n'existe pas de langue officielle de jure, car toutes les langues éthiopiennes jouissent de la «reconnaissance égale de l'État». L'amharique a perdu son statut de «langue officielle» pour celui de «langue de travail» du gouvernement fédéral.

De leur côté, les États régionaux peuvent choisir «leurs langues de travail respectives». On constate que six États (l'Amhara, le Benishangul-Gumuz, le Gambela, l'État du Centre, l'État du Sud et l'État du Sud-Ouest, ainsi que deux villes à charte fédérale (Addis-Abéba et Diré-Dawa) ont choisi l'amharique comme leur «langue de travail» (considérée comme une langue officielle de facto).

Mais le tigrigna est la langue de travail du Tigré; l'oromo, celle de l'Oromia; l'afar, celle de l'Afar; le somali, celle de Somalia; l’harari, celle de la ville-État de Harar.

En fait, il existe trois types d'États linguistiques:

1) La première catégorie compte des États qui ont adopté leur langue locale majoritaire comme «langue de travail» de leur administration respective: le Tigré avec le tigrigna (94 % de la population), l'Oromia avec l'oromo (85 %), l'Afar avec l'afar (91 %), la Somalia avec le somali (96 %) et l'Ahmara avec l'amharique (91 %). Ce sont les véritables États ethniques de la Fédération.

2) Une seconde catégorie a choisi l'amharique comme langue de travail de façon à ne pas se distinguer du gouvernement fédéral: le Benishangul-Gumuz, le Gambela et les nouveaux États (Centre, Sud-Ouest et Sud). Ce sont des États multiethniques qui n'ont aucune langue majoritaire.

3) La troisième catégorie concerne les villes à charte, qui ne comptent à peine qu'une très faible majorité linguistique. Si Addis-Abéba et Diré-Dawa ont choisi l'amharique, Harar a opté à la fois pour l’araire et l'oromo.

En somme, les États éthiopiens ont préféré une langue plus adaptée à leurs besoins que l'unique amharique. L'ennui, c'est que l'on compte un grand nombre de citoyens éthiopiens dispersés dans différents États et qui ne bénéficient pas du soutien de leur ethnie d'origine. Par exemple, des Amharas résident dans l'Oromia et des Oromo vivent dans l'Ahmara (voir la carte détaillée). Cela dit, cette structure semble correspondre à l'article 46 de la Constitution, qui déclare que les États sont basés sur des critères linguistiques et identitaires: 

Article 46

Les États de la Fédération


1) La République démocratique fédérale comprendra des États.

2) Les États seront délimités sur la base des modèles d'accords tels que la langue, l'identité et le consentement des peuples concernés.

Par ailleurs, la Constitution fédérale ne précise pas clairement en quelle(s) langue(s) doivent se faire les communications entre le gouvernement fédéral et les États régionaux ou entre les États eux-mêmes. Pour des raisons pratiques, il semble que l'amharique ou l'anglais soit utilisé dans la plupart des cas.

Soulignons que, en vertu de l'article 39 de la Constitution, tout État a droit à l'autodétermination ou à la sécession, et que tout Éthiopien «a le droit de parler, écrire et développer sa propre langue; d'exprimer, développer et promouvoir sa culture, et préserver son histoire»:

Article 39

1) Chaque ethnie, nationalité et peuple éthiopien a un droit inconditionnel à l'autodétermination, incluant le droit à la sécession.

2) Chaque ethnie, nationalité et peuple éthiopien a le droit de parler, d'écrire et de développer sa propre langue; d'exprimer, de développer et de promouvoir sa culture, et de préserver son histoire.

3) Chaque ethnie, nationalité et peuple éthiopien a droit à une pleine mesure d'autonomie qui inclut le droit de déterminer les établissements de gouvernement au territoire qu'il habite et à la représentation équitable dans les gouvernements régionaux et fédéraux.

Le problème, c'est la capacité des institutions de mettre en pratique cette disposition constitutionnelle, car, ne l'oublions pas, l'Éthiopie compte un grand nombre de langues, plus de 85. Or, il n'est pas réaliste de transposer dans les faits ce grand principe de l'égalité entre toutes les langues et toutes les ethnies.

Enfin, l'article 25 de la Constitution interdit la discrimination fondée sur la langue:

Article 25

Le droit à l'égalité

Tous sont égaux devant la loi et ont droit sans discrimination à la protection égale de la loi. À cet égard, la loi garantira à tous la protection égale et efficace, sans discrimination basée sur des motifs de race, d'ethnie, de nationalité ou d'autre origine sociale, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou autre, de propriété, de naissance ou d'un autre statut.

Enfin, selon l'article 38 de la Constitution, tout citoyen éthiopien, sans discrimination basée sur la couleur, la race, l'ethnie, la nationalité, le sexe, la langue, la religion, l'opinion politique, etc., a le droit de voter pour élire ses représentants et le droit d'être lui-même élu.

4.2 La langue de travail du Parlement fédéral

Le Parlement fédéral comprend deux organismes législatifs: la Chambre des représentants des peuples (547 sièges) et la Chambre de la Fédération (108 sièges), cette dernière comprenant des membres choisis par les assemblées des États pour un mandat de cinq ans. La Chambre des représentants des peuples est l'organisme législatif suprême de l'État. Les membres de cette chambre sont élus pour un mandat de cinq ans au suffrage universel direct au scrutin secret. La Chambre des représentants des peuples a le pouvoir de légiférer sur toutes les affaires faisant partie du champ d'application de la Constitution à la compétence fédérale, mais également le pouvoir de contrôler le pouvoir exécutif et, éventuellement, de le changer. Tel que l'énonce le Règlement n° 3 de la Chambre des représentants du peuple (1998), la langue de travail de cette chambre est l'amharique:

Article 25

Langue de travail de la Chambre

1)
La langue de travail de la Chambre est l'amharique. Chaque séance se déroule en amharique.

2) Lorsque les membres expriment leurs opinions, ils peuvent recourir au service de traduction préparé pour eux par la chambre et s'exprimer dans une langue dans laquelle ils peuvent exprimer efficacement leurs idées. Si nécessaire, ils peuvent quérir leurs propres interprètes.

3) Lorsqu'un membre exprime son opinion par l'intermédiaire d'un interprète comme prévu au paragraphe 2 ci-dessus, un membre qui prétend qu'une erreur fondamentale a été commise en raison d'une mauvaise interprétation peut présenter son idée pour corriger une erreur.

Article 26

Tenue des procès-verbaux

1)
Un procès-verbal doit être enregistré et conservé pour chaque séance de la Chambre.

2) Selon les circonstances, le procès-verbal peut être conservé sous forme écrite, filmée ou enregistrée selon les besoins.

3) Les procès-verbaux de la Chambre tenus par quelque moyen que ce soit seront mis par écrit en langue amharique et seront approuvés.

Cela signifie que l'État fédéral éthiopien adopte ses lois en amharique, mais que les provinces fédérées peuvent le faire en une autre langue. Quant aux membres du Parlement fédéral, ils ont le droit de s'exprimer en amharique, en tigrigna, en oromo, en afar, en somali, voire en anglais. Comme pour tous les débats et assemblées, les interventions sont traduites simultanément en cinq langues : amharique, oromo, tigrigna, afar et somali. L'Éthiopie compte plus de 80 langues et tout député souhaitant des traductions dans sa propre langue y a droit, aux frais du Parlement.

En Éthiopie, le Parlement adopte des «proclamations» et non formellement des «lois, même si les proclamations sont des lois du Parlement, discutées et votées au sein de l’ARP et signées par le président éthiopien. Les traités internationaux qui ont été ratifiés par l'Éthiopie ont un statut similaire aux proclamations, car ils sont également promulgués par la Chambre des représentants des peuples. Il existe aussi des règlements et des directives.

4.3 Les droits linguistiques en matière de justice

Le système judiciaire éthiopien étant basé sur la décentralisation des pouvoirs, il existe donc deux systèmes parallèles de tribunaux : les tribunaux fédéraux et les tribunaux régionaux, qui ont chacun leurs structures et administrations indépendantes particulières. Les juges des tribunaux fédéraux sont nommés par le Parlement fédéral, tandis que ceux des tribunaux régionaux sont nommés par les Conseils administratifs régionaux. De plus, la question de l'indépendance de la justice demeure un problème majeur en Éthiopie, car les juges subissent les influences politiques et les idéologies partisanes; ceux qui s'y opposent restent rarement en place bien longtemps.

Lorsque des citoyens éthiopiens sont détenus, ils ont le droit d'être informés promptement, dans une langue qu'ils comprennent, des motifs de leur arrestation (art. 19 de la Constitution):

Article 19

Le droit des personnes arrêtées

1)
Les personnes détenues ont le droit d'être informées promptement,
dans une langue qu'elles comprennent, des motifs de leur arrestation et de n'importe quelle accusation contre elles.

2) Les personnes détenues ont le droit de rester silencieuses. Lors de leur arrestation, elles ont le droit d'être informées promptement, dans une langue qu'elles comprennent, et toute déclaration qu'elles font peut être employée comme preuve contre elles devant la cour.

En vertu de l'article 20 de la Constitution, tout citoyen éthiopien a le droit de s'exprimer dans sa langue ou de recourir gratuitement aux services d'un interprète:

Article 20

Les droits des personnes accusées

6) Toute personne a le droit de faire appel devant la juridiction compétente d’une ordonnance ou d’un jugement de la juridiction qui a statué en premier lieu.

7)
Elles ont l
e droit de requérir les services d'un interprète aux frais de l'État lorsque la procédure judiciaire est menée dans une langue qu'elles ne comprennent pas.

Le plus souvent, les tribunaux utilisent l'amharique, mais ils permettent aussi le recours à des interprètes lorsque les circonstances l'exigent.

De son côté, le Code de procédure civile prescrit l'emploi de l'amharique ou le recours à un interprète lorsqu'un témoignage est donné dans une autre langue:

Article 262

Lorsque la déposition doit être interprétée

Lorsque le témoignage est donné dans une autre langue que l'amharique, il doit être traduit par l'interprète officiel ou par toute autre personne que la Cour peut désigner à cette fin; la personne avant de traduire le témoignage doit prêter serment ou le prononcer selon la forme prévue par la troisième annexe au présent Code.

Il en est ainsi à l'article 27 du Code de procédure pénale (1961):

Article 27

Interrogatoire

1) Toute personne convoquée conformément à l'article 25 ou arrêtée en vertu de l'article 26,50 ou 26,51, une fois que son identité et son adresse ont été établies, doit demander de répondre à l'accusation ou à la plainte déposée contre elle.

4) Si la personne arrêtée ne peut pas comprendre la langue dans laquelle ses réponses doivent être consignées, elle doit être pourvue d'un interprète compétent qui certifie l'exactitude de toutes les questions et réponses.

Conformément à la langue de travail des organismes fédéraux, l'article 31 de la Proclamation n° 1234 sur les tribunaux fédéraux (2021) prescrit l'amharique comme langue des tribunaux, mais des services d'interprétariat sont prévus pour les personnes qui ne connaissent pas l'amharique:

Article 31

Langue de travail des tribunaux fédéraux

1)
L'amharique sera la langue de travail des tribunaux fédéraux.

2) La cour doit fournir un
interprète compétent à toute personne qui ne comprend pas la langue amharique.

3) La cour doit également fournir un expert dans la langue des signes pour les personnes handicapées concernées.

4) Les tribunaux fédéraux à tous les niveaux organiseront un bureau d'interprètes avec un service complet.

L'article 14 de la Proclamation n° 188 consolidant la Charia dans les tribunaux fédéraux (1999) reprend les mêmes dispositions:

Article 14

Langue de travail de la Charia dans les tribunaux fédéraux

1)
L'amharique sera la langue de travail de la Charia dans les tribunaux fédéraux.

2) Les tribunaux fourniront
un interprète à toute partie qui ne comprend pas l'amharique.

Enfin, le Code civil de 1960 prévoit que tout testateur ou tout témoin d'un testament authentique doit être capable de lire et de comprendre la langue dans laquelle est rédigé un testament: 

Article 883

3. Capacité des témoins

1) Les témoins d'un testament authentique doivent être capables eux-mêmes de lire ou d'entendre ce qui est lu et de comprendre la langue dans laquelle le testament est rédigé.

2) Le testament doit demeurer sans effet si ces conditions ne sont pas satisfaites.

Article 886

3. Testateur incapable de comprendre le testament

Un testament olographe doit demeurer sans effet lorsqu'il apparaît que le testateur, étant analphabète ou ne sachant pas la langue dans laquelle le testament est rédigé, a regardé les symboles graphiques sans comprendre leur signification.

Dans les faits, les justiciables qui ne connaissent pas l'amharique ne peuvent pas toujours recourir aux services d'interprètes dans les tribunaux. Ce problème persiste principalement en raison de l'absence ou du nombre limité d'interprètes judiciaires, ainsi que du recours à des interprètes non qualifiés. Malgré certains efforts pour résoudre le problème, le gouvernement fédéral n'a pas encore mis en place de mécanisme formel par lequel les personnes ayant une maîtrise limitée et/ou inexistante de la langue amharique soient correctement servies dans une procédure pénale avant et pendant le procès. Dans la pratique, les accusés qui ne parlent pas la langue de travail du gouvernement fédéral sont incapables de comprendre efficacement ou d'obtenir des informations rapides et détaillées sur la nature et l'effet des poursuites engagées contre eux.

4.3 Les langues de l'administration

Les langues de l'Administration en Éthiopie correspondent aux «langues de travail». Pour sa part, le gouvernement fédéral utilise normalement l'amharique, mais souvent l'anglais, très rarement le tigrigna, l'oromo, l'afar ou le somali (Somali). Les citoyens qui font affaire avec les services du gouvernement éthiopien doivent utiliser l'une ou l'autre langue. Rappelons que le tigrigna est la langue de travail du Tigré; l'oromo, celle de l'Oromia; l'afar, celle de l'Afar; le somali, celle de Somalia; l’araire, celle de la ville-État de Harar.

L'importance de la question linguistique et son impact sur les locuteurs non amhariques exercent une pression auprès du gouvernement fédéral. Cette question de la reconnaissance linguistique fait l'objet de longs débats politiques. Afin de résoudre le problème au sein des institutions fédérales, le gouvernement montre sa volonté de changer la politique linguistique, par exemple en intégrant le tigrigna, l'afar, l'oromo et le somali, mais il se heurte à des obstacles sérieux, notamment d'ordre juridique, politique et administratif.

Néanmoins, en mars 2020, l’Éthiopie a approuvé une politique visant à introduire quatre langues de travail supplémentaires en plus de l’amharique, qui était la langue de travail du pays. À l’avenir, l’afar, l'oromo, le somali et le tigrigna sont tous adoptés comme langues de travail du gouvernement. Le gouvernement croit que l'ajout de nouvelles langues de travail devrait réduire l’extrémisme ethnique et jouer un rôle dans les efforts de construction de l’État. Mais il y a d'autres problèmes qui risquent de faire obstacle. L'un des problèmes majeurs réside toujours dans la pénurie d'interprètes et aussi, sinon davantage, dans les coûts financiers que nécessite un tel engagement. Il est fort possible que le gouvernement n'y parvienne pas dans un proche avenir. De nombreux Éthiopiens doutent encore de l'exécution de la nouvelle politique et de la manière dont elle sera mise en pratique. En même temps, d'autres proposent d'utiliser l'anglais comme langue officielle du gouvernement fédéral à la place de cinq langues, afin de réduire les coûts. Cependant, une telle solution entraînerait d'autres problèmes parce l'anglais est la langue maternelle de personne et sonnerait le glas de l'identité éthiopienne.  

- La non-discrimination

Les textes juridiques sont avares sur l'emploi des langues dans l'administration fédérale. On se rabat sur des principes de non-discrimination, ce qui évite de mentionner une langue en particulier. Ainsi, la Proclamation  n° 1064 sur la fonction publique fédérale (2017) oblige les fonctionnaires à éviter «tout traitement discriminatoire des citoyens sur la base du sexe, de la langue, de l'origine ethnique»:

Article 66

Obligations des fonctionnaires

Tout fonctionnaire est tenu aux obligations suivantes :

1. être loyal envers le public et la Constitution, et respecter la loi ;
2, exécuter efficacement les lois et les politiques émises par le gouvernement;
3. servir le public et le pays sans aucune forme de parti pris ;
4. consacrer toute son énergie et ses capacités au service du public ;
5. s'acquitter des fonctions précisées dans sa description de poste et les ordres légitimes de son supérieur immédiat ;
6. ne pas exercer sur le lieu de travail une activité ou une pratique reflétant sa propre foi ou sa religion ;
7. ne pas divulguer les éléments confidentiels de l'institution gouvernementale classés comme tels ;
8.
éviter tout traitement discriminatoire des citoyens sur la base du sexe, de la langue, de l'origine ethnique, de la religion, de la position politique, du handicap physique ou d'autres formes de différenciation ;

Il en est ainsi pour les agents de police, selon l'article 24 de la Proclamation n° 720 sur la création de la Commission de police fédérale éthiopienne (2011):

Article 24

Interdictions

Dans l'exercice des fonctions de police, il est interdit :

1. de commettre un traitement ou un acte inhumain ou dégradant ; ou

2. de pratiquer une discrimination fondée sur la race, la nationalité, la couleur, le sexe, la langue, la religion, les opinions politiques, l'origine sociale, la richesse, la naissance ou toute autre situation.

L'article 4 de la Proclamation n° 1249 sur l'octroi d'un permis et sur l'administration du service fédéral de défense (2021) énonce que personne ne peut se voir refuser un permis en raison, entre autres, de sa langue:

Article 4

Principes de la licence de la défense

4)
Sans préjudice du paragraphe 2 du présent article, nul ne peut se voir refuser une licence en raison de son sexe, de sa religion, de sa langue, de son origine ethnique ou sociale, de ses convictions politiques, de sa situation économique, de son origine, d'un handicap physique ou d'autres situations similaires.

Un individu résident dans les États régionaux de l'Afar, du Tigré, etc., qui doit faire affaire auprès du gouvernement fédéral et qui ignore l'amharique n'a d'autre solution que d'employer quand même sa langue et de ne pas se faire comprendre; il peut aussi employer l'anglais à la condition que le fonctionnaire maîtrise cette langue. Il peut aussi baragouiner l'amharique en espérant se faire comprendre. Bref, la non-discrimination a ses limites.

- L'obligation de l'amharique

L'article 5 de la Proclamation n° 378 sur la nationalité éthiopienne (2003) oblige une personne candidate à communiquer dans n'importe quelle des langues des peuples et des nationalités du pays :

Article 5

Conditions exigées

Un étranger qui demande à acquérir la nationalité éthiopienne doit :

1) avoir atteint l'âge de la majorité et être légalement qualifié selon la loi éthiopienne ;

2) avoir établi son domicile en Éthiopie et avoir vécu en Éthiopie pendant au moins quatre ans avant le dépôt de sa demande ;

3) être capable de communiquer dans n'importe quelle des langues des peuples et des nationalités du pays;

L'article 16 de la Proclamation n° 813 sur la concurrence commerciale et la protection des consommateurs (2013) impose l'usage de l'amharique ou de l'anglais:

Article 16

Étiquettes des marchandises

1)
Tout commerçant doit apposer des étiquettes sur les produits qu'il vend ou les remettre au consommateur sur une note distincte.

3) Les étiquettes à apposer sur les marchandises doivent être placées ou imprimées sur les marchandises ou sur l'emballage, ne pas être facilement détachables
et être écrites au moins en amharique ou en anglais.

Quant à l'article 26 de la Proclamation n° 686 sur l'enregistrement commercial et les permis commerciaux (2010), il n'implique pas l'emploi d'une langue en particulier:

Article 26

Effets de l'enregistrement d'un nom commercial au registre des noms commerciaux

3)
La traduction d'un nom commercial
dans une autre langue que celle dans laquelle il a été inscrit au registre du commerce ou au registre des noms commerciaux ne peut être enregistrée en tant que nom commercial que s'il est prouvé que celle-ci  n'entraîne pas de concurrence commerciale déloyale à l'encontre du propriétaire du nom commercial préalablement enregistré au registre du commerce ou au registre des noms commerciaux.

Sur la base de la Constitution, six États régionaux sur douze ont choisi de sélectionner les langues locales comme langues de travail, sur leurs territoires administratifs respectifs. On peut penser que l'amharique, l'afar, le tigrigna, l'oromo et le somali vont continuer à se faire concurrence dans les communications relevant du gouvernement fédéral, mais au plan régional, ce sont les langues locales qui vont demeurer. 

- L'affichage

L'affichage, tel qu'il se présente en Éthiopie, est souvent bilingue, c'est-à-dire en amharique et en anglais, la langue officielle étant généralement placée au-dessus des inscriptions en anglais. Il existe néanmoins des inscriptions unilingues en amharique ou en anglais. Cette façon de faire faciliterait, selon le gouvernement, la lecture chez les touristes visitant l'Éthiopie.  

Le visage résolument bilingue témoigne de la présence importante de l'anglais comme première langue étrangère et principale langue commerciale, très utilisée dans l'administration et l'industrie du tourisme. Toutefois, la connaissance de l'anglais par  les Éthiopiens est restreinte à une certaine élite issue des classes sociales aisées. La grande pauvreté du pays limite sa diffusion.

4.4 Les langues de l'éducation

Jusqu'en 1991, l'amharique demeurait l'unique langue de l'éducation dans les écoles primaires éthiopiennes. Selon la proclamation no 41/1993, publiée le 20 janvier 1993, les organismes centraux et régionaux des Bureaux de l'éducation ont reçu comme mandat d'assurer la qualité de l'éducation dans leur région, de préparer des programmes d'étude pour les écoles primaires, de fournir des manuels scolaires, d'assurer des services éducatifs aux minorités nationales et de coordonner les communautés locales dans leurs efforts de participation aux activités éducatives.

Depuis 1994, les programmes d'enseignement ont été radicalement modifiés afin de permettre aux États fédérés de choisir la langue dans laquelle les élèves allaient recevoir leur instruction au primaire. Ainsi, de nombreuses langues éthiopiennes ont été introduites pour remplacer l'amharique comme langue d'enseignement dans les régions où l'amharique n'est pas la langue maternelle de la majorité de la population.

La Politique sur l'éducation et la formation (1994) prescrit sans équivoque que l'enseignement primaire doive être donné dans les langues nationales:

Article 3.5

Langues et éducation

1)
Conscient de l'avantage pédagogique de l'enfant dans l'apprentissage dans sa langue maternelle et du droit des nationalités à promouvoir l'usage de leurs langues,
l'enseignement primaire doit être offert dans les langues de leur nationalité.

2) En effectuant la préparation nécessaire, les nations et les nationalités peuvent soit poursuivre leur apprentissage dans leur propre langue, soit choisir parmi celles sélectionnées sur la base d'une répartition nationale et territoriale.

3) La langue de formation des enseignants de l'éducation préscolaire et primaire doit être la langue nationale en usage dans la région.

4) L'amharique doit être enseigné comme langue de communication à l'échelle nationale.

5) L’anglais doit être la langue d’enseignement dans l’éducation secondaire et supérieur.

6) Les élèves peuvent choisir et apprendre au moins une langue nationale et une langue étrangère pour les relations culturelles et internationales.

7) L'anglais sera enseigné comme matière à partir de la première année.

8) Les mesures nécessaires seront prises pour renforcer l'enseignement des langues à tous les niveaux.

Trois études gouvernementales on affirmé que le choix de la langue d'enseignement doit être laissé à la communauté locale, qu'il faut revoir la politique de l'enseignement dans la langue maternelle et qu'il faut réexaminer les implications pédagogiques et administratives du choix de la langue d'enseignement. Afin de concrétiser davantage ce droit à l'éducation, quelque 53 langues en Éthiopie sont déjà entrées dans le système d'éducation, après avoir élaboré leur propre alphabet et d'autres normes linguistiques. Désormais, l'enseignement primaire est tenu d'utiliser ces langues, ce qui entraîne le développement de la langue elle-même et le respect des droits linguistiques des communautés à travers l'Éthiopie.

En effet, la langue est une grave question de droits. Selon l'UNESCO, tous les enfants ont le droit d'être éduqués dans une langue qu'ils comprennent, car la langue est au cœur de l'autodétermination et d'autres droits de groupe/individus.

- Les langues nationales

L'année scolaire s'étend de septembre à juillet et l'enseignement est gratuit au niveau primaire. Les élèves entrent à l'école à sept ans et l'enseignement obligatoire (primaire) dure six ans et se termine à douze ans.

L'amharique est enseigné dans les écoles primaires d'Addis-Abéba, de Diré-Dawa, ainsi que dans les États régionaux de Benishangul-Gumuz, de Gambela, de l'Amhara et de l'État du Sud-Ouest et de l'État du Sud. En principe, le tigrigna est enseigné au Tigré, l'oromo en Oromia et à Harar, l'afar en Afar, le somali en Somalia et l’harari à Harar. Une quarantaine d'autres langues sont également enseignées dans les écoles d'Éthiopie. C'est la première fois dans l'histoire de l'Éthiopie que plusieurs langues locales, autres que l'amharique, sont employées comme langue d'instruction dans les écoles. En 2020, les principales langues d'enseignement étaient les suivantes:

État régional Primaire 1-4 Secondaire 5-6- Secondaire 7-8
Afar afar - amharique amharique anglais
Amhara amharique - awngi - oromo  amharique - oromo - awngi anglais - amharique - awngi
Benishangul-Gumuz amharique amharique anglais
Gambela nuer - anguak - meshenger anglais anglais
Harar harari - oromo - amharique harari - oromo - amharique harari - oromo - amharique
Oromia oromo - amharique oromo - amharique oromo - amharique
Somali somali somali somali
Tigré tignigna tigrigna tigrigna
Sud-Ouest et Sud amharique - dawro - gédéo - hadiya - gamao - wolaitta etc. anglais anglais
Addis-Abéba amharique amharique anglais
Diré-Dawi oromo - somali amharique - oromo - somali amharique - oromo - somali

Cette transition vers un système d'éducation multilingue ne s'est pas faite sans difficulté; afin de produire des enseignants capables d'enseigner les langues nationales locales, il a fallu former des candidats dans leur région d'origine pour qu'ils puissent enseigner dans l'une des langues nationales. Ce développement rapide de l'éducation a entraîné une augmentation de l'effectif moyen par classe dans l'ensemble du pays. L'offre d'établissements scolaires n'arrive pas à satisfaire la demande. C'est pourquoi l'intégration du plus grand nombre possible d'enfants dans le système d'éducation a eu pour conséquence inévitable de compromettre sérieusement la qualité de l'éducation au profit de l'équité.

Néanmoins, 32 % des enfants en âge officiel d'aller à l'école primaire ne sont pas scolarisés. L'éducation en Éthiopie reste loin d'être satisfaisante. Dans les zones rurales où les installations sont souvent dispersées et où il existe de grandes disparités entre les enfants les plus pauvres et les plus riches, en particulier au niveau primaire.

Quant à l'enseignement secondaire, le premier cycle dure quatre ans et couvre les quatre premières années du programme d'enseignement secondaire complet de six ans. Les étudiants sont généralement âgés de 13 à 16 ans. L'enseignement secondaire inférieur se termine par le certificat d'enseignement secondaire général éthiopien, qui donne accès à l'enseignement secondaire supérieur. Le second cycle commence à 17 ans et dure deux ans. Deux concentrations, sciences ou sciences sociales, sont proposées et, à la fin de leurs études, les étudiants passent le certificat de fin d'études éthiopiennes et, plus récemment, l'examen d'entrée à l'enseignement supérieur éthiopien. La réussite d'au moins cinq matières est requise lors de l'examen final.

- Les langues internationales

L'enseignement de l'anglais est important en Éthiopie, car il est offert comme langue seconde dans la plupart des écoles secondaires et constitue la principale langue dans les universités et autres établissements supérieurs. De plus, l'anglais tend à remplacer l'amharique dans la plupart des établissements où cette langue n'est pas la langue maternelle des élèves. Généralement, les élèves en arrivent à maîtriser au moins les premiers rudiments de la langue anglaise, mais cela n'en fait pas pour autant des anglophones.

Le français reste une langue peu diffusée et n'est connu que par une petite élite instruite. Son enseignement est en principe restreint au lycée franco-éthiopien Guébré-Mariam (env. 1800 élèves) à Addis-Abeba.  L'arabe est également enseigné dans les écoles coraniques.

- L'enseignement supérieur

L'Éthiopie compte plus d'une quarantaine d'universités. Selon leur localisation dans les États régionaux, les langues d'enseignement peuvent être nombreuses. L'article 20 de la Proclamation n° 650 sur l'enseignement supérieur (2009) énonce que la langue d'enseignement dans tout établissement doit être l'anglais, mais d'autres langues appropriées sont possibles: 

Article 20

Langue d'enseignement

1) La langue d'enseignement dans tout établissement, sauf éventuellement dans les études d'autres langues que la langue anglaise, doit être l'anglais.

2) Nonobstant les dispositions du paragraphe 1 du présent article, les formations de courte durée et la préparation des enseignants des écoles et des classes du primaire peuvent être offertes dans toute langue appropriée.

3) L'enseignement destiné aux élèves malentendants complets doit être donné ou complété par une langue des signes appropriée.

Les langues d'enseignement les plus employées sont l'anglais, l'amharique, l'oromo, le tigrigna et le somali. En raison des tensions communautaires en Éthiopie, des dizaines de milliers d'étudiants universitaires ont quitté leur université.  

4.5 Les langues des médias

La situation des médias éthiopiens est unique à plus d'un titre. Les médias se répartissent en deux secteurs: d’une part, les médias publics et gouvernementaux, d’autre part, la presse privée. Les médias gouvernementaux comptent parmi les plus anciens de l’Afrique subsaharienne. Les premiers journaux gouvernementaux remontent au début du XXe siècle, notamment après la spectaculaire victoire de l’Éthiopie contre l'Italie. À l'opposé, les médias privés sont très récents; ils ont moins de quinze ans d’existence et leur apparition est la conséquence de la première loi sur la presse dont s’est dotée l’Éthiopie en 1992. 

Fait digne d'être mentionné: c’est le seul pays possédant un alphabet guèze. Mais cet alphabet n’est employé que par moins de cinq langues parmi les quelque 85 parlées dans le pays. Si l'on fait exception des ceux publiés en anglais, tous les journaux ne diffusent qu'en amharique, sauf un en oromo et un en arabe. Les journalistes éthiopiens parlent rarement une autre langue nationale que l'amharique. La radio et la télévision, encore dans une situation de monopole gouvernemental, exercent une forte influence sur la population. Il n'existe qu'une seule station privée: Radio Fana, la station du parti au pouvoir.

- Les médias écrits

Dans l'ensemble, la presse écrite publique, dont les quotidiens The Ethiopian Herald (en anglais) et Addis Zemen (en amharique), est ignorée du grand public. Par contre, le Elatawi Addis (en amharique) et The Monitor (en anglais) sont davantage lus, auxquels il convient d'ajouter le Bariisaa (en oromo) et l'Alalem (en arabe). Ces journaux gouvernementaux demeurent contrôlés par l’État et s’inscrivent dans la politique du gouvernement.

Comme il n'existe que fort peu de quotidiens, les hebdomadaires sont plus nombreux, une trentaine environ, et massivement publiés en amharique, alors que la majorité de la population ne parle pas cette langue: Askual, Atkurot, Mahlet, Ethiop, Tomar, Tikusat, Efoita, Tobia, Mebrek, Kebrit, Menelik, Seife Nebelbal, Ruh, Goh, Ethio Times, etc. The Sun et Addis Tribune sont édités en anglais, alors que The Reporter l'est à la fois en amharique et en anglais. Les Éthiopiens des zones rurales ne reçoivent aucun journal (environ 85 % de la population). La presse hebdomadaire éthiopienne est hebdomadaire dans sa périodicité, mais quotidienne dans le traitement de l’information. De fait, chaque titre paraît une fois par semaine mais jamais le même jour; il paraît donc plusieurs hebdomadaires tous les jours. Autrement dit, il existe une presse quotidienne à partir de la publication des hebdomadaires.

- Les médias électroniques

De façon générale, le secteur électronique reste sous le contrôle entier de l'État, et ce, malgré une loi de dérégulation adoptée en 1999 (loi no 178/99).  Radio Fana, l'une des rares stations privées du pays sert d'outil de propagande au Front démocratique révolutionnaire des peuples d'Éthiopie (EPRDF, au pouvoir). Il existe quelques autres stations privées, mais elles sont toutes liées à des partis politiques. Or, en vertu de l’article 19 de la loi fédérale sur la presse et l'audiovisuel (no 178/99), les activités dans le secteur audiovisuel en Éthiopie sont strictement réservées aux citoyens éthiopiens et interdits aux partis politiques et aux organisations religieuses.

En raison de la faible alphabétisation des Éthiopiens, la radio est le média prédominant et le plus influent auprès du public. Évidemment, comme la tradition orale éthiopienne est importante, la radio et la télévision nationales ont souvent été utilisées par le gouvernement pour se rallier l’appui du public; elles ont donc joué un rôle déterminant dans la promotion de la solidarité nationale, mais également comme agent de désinformation.

La station EMA (Educational Media Agency), une agence éducative gouvernementale, gère 13 stations locales et diffuse en une quinzaine de langues nationales, dont l'anglais. Radio Ethiopia diffuse, pour sa part, en 11 langues (amharique, oromo, tigrigna, somali, afar, harari, nuer, agnuak, arabe, anglais et français).   Radio Fana émet à partir d'Addid-Abeba et de trois autres villes, et diffuse en amharique, en oromo en somali et en afar. On compte plusieurs stations régionales, qui diffusent au total en une quinzaine de langues.

 

La politique linguistique mise en œuvre en Éthiopie semble correspondre une forme hybride d'approches personnelles et territoriales. Bien que le choix de l'amharique comme langue de travail nationale et la protection accordée aux citoyens sur cette base pourraient correspondre aux modèles personnels, le droit des États régionaux de choisir la langue de leur choix pour l'employer dans le domaine public pourrait être compris comme une approche linguistique territorialisée.

À cet effet, plus de la moitié des administrations régionales éthiopiennes ont choisi d'adopter les langues locales comme langues de travail, tandis que les autres ont continué à employer l'amharique. Cette approche territoriale des droits linguistiques s'est appliquée dans les domaines de l'éducation dans un laps de temps relativement court.

Cependant, en dépit de la politique de multilinguisme stratégique égalitariste, les langues éthiopiennes ne sont pas toutes au même niveau. Au sommet de la hiérarchie, se trouve l'amharique, qui bénéficie d'un statut privilégié comme «langue de travail» au sein des institutions fédérales, des États régionaux suivants: l'Amhara, le Benishangul-Gumuz, le Gambela, le Sud-Ouest, le Sud, le Centre, et de deux villes à charte fédérale (Addis-Abeba et Diré-Dawa), mais aussi dans les milieux scolaires et en général toute la presse écrite et électronique. C'est beaucoup! Ainsi, certaines langues sont avantagées, notamment l'anglais, l'arabe, le tigrigna dans le Nord, l'oromo dans le centre et le somali dans le Sud. Par contre, toutes les autres langues sont désavantagées.

Il n'est pas possible de transposer dans la réalité l'égalité juridique des quelque 85 langues utilisées en Éthiopie. On ne peut forcer l'égalité des très petites langues face aux cinq grandes langues nationales que sont l'amharique, le tigrigna, l'oromo, l'afar et le somali. Sur le continent africain, l'Éthiopie pratique une politique linguistique assez exceptionnelle, qui repose sur un multilinguisme plus théorique que réel dans la mesure où il est limité à quelques langues: l'amharique, l'anglais, l'arabe, le tigrigna, l'oromo, l'afar et le somali. Au sommet de toute cette hiérarchie, on trouve d'abord l'amharique, puis, assez loin derrière, l'anglais. Ensuite, il y a de la place pour le tigrigna, l'oromo, l'afar, le somali et l'arabe.

Il n'en demeure pas moins que l'Éthiopie est l'un des rares pays africains à promouvoir une langue nationale (l'amharique), sans favoriser officiellement une langue colonisatrice (anglais, français, portugais). Évidemment, l'anglais a remplacé depuis longtemps l'italien et joue un rôle relativement important en Éthiopie, notamment en éducation, bien qu'il n'ait jamais obtenu un statut officiel. De plus, l'Éthiopie mise sur un multilinguisme stratégique, ce qui n'est guère le cas dans les autres pays du continent. En ce sens, la politique linguistique de l'Éthiopie semble plutôt originale, même si son multilinguisme n'est pas aussi étendu qu'il prétend l'être.

Dernière mise à jour: 18 avr. 2024

Bibliographie

BERHANOU, A., Histoire de l'Éthiopie d'Axoum à la révolution, Addis Abeba/Paris, 1998.
 
CARAMAN, Ph., L'empire perdu. L'histoire des jésuites en Éthiopie, Paris, Desclée De Brouwer, 1988.

DUBOIS, C., Djibouti 1888-1967. Héritage ou frustration?, Paris, L'Harmattan, 1997.
FEDERAL DEMOCRATIC REPUBLIC OF ETHIOPIA, Basic Information, States of the Federal Democratic Republic of Ethiopia, Addis-Abeba, http://www.ethiopar.net/English/basinfo/Basicifo.htm
 
FONTRIER, M., La chute de la junte militaire éthiopienne (1988-1991), Paris, L’Harmattan, Peiresc, 1999.
PARTENAIRES DES MÉDIAS AFRICAINS, L’état des médias en Éthiopie, Document de synthèse réalisé pour le compte du réseau de Partenaires des médias africains, Tsega MariaAbebe Genamow, décembre 2000.
 
TADESSE, T., Church and State in Ethiopia, 1270-1527, Oxford, Oxford University Press, 1972

 

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