République de Gagaouzie

Gagaouzie

Unité territoriale autonome de Gagaouzie

(Moldavie)

Capitale:  Comrat
Population:  172 500
Langues officielles: gagaouze, moldave et russe
Groupe majoritaire: gagaouze 
Groupes minoritaires: gagaouze (78,7 %), bulgare (5,5 %), moldave (5,4 %), russe (5 %), ukrainien (4 %), romani (1,3 %), etc.
Système politique:  région autonome de la république de Moldavie
Articles constitutionnels (langue): art. 10, 13, 35, 78, 118 et dispositions transitoires (art. VII) de la Constitution moldave du 29 juillet 1994
Lois linguistiques: Loi moldave sur le statut juridique particulier de la Gagaouzie (1994); Loi sur le fonctionnement des langues sur le territoire de la Gagaouzie (1995); Code de la Gagaouzie (1998)
; Loi sur les accords sur la mise en œuvre de dans les relations économiques internationales et étrangères (2009); Loi sur les actes législatifs (2014); Code électoral (2015); Loi sur la diffusion et de la radiotélévision (2016); Loi sur l'éducation (2016); Loi sur l'élargissement du champ d'application de la langue gagaouze (2018).

1 Situation géopolitique

La Gagaouzie (en moldave: Gagauzia; en gagaouze: Gagauz-Yeri; en russe Gagauziya; en anglais: Gagauzia) est un territoire autonome de la Moldavie. Les appellations officielles sont les suivantes: Avtonom territoriale Bölümlüü Gagauziya (ABG en gagaouze); Unitatea Teritorială Autonomă Gagauzia (UTA en roumain), Автономное территориальное образование Гагаузия (ATO en russe) et «Unité territoriale autonome» en français (traduction) ou UTA. La Gagaouzie est située au sud de la Moldavie, près de la frontière avec l'Ukraine. 

Le territoire couvre une superficie de 1832 km², c'est-à-dire 5,4 % de celle de la république de Moldavie (33 400 km²), ce qui correspond à la superficie de l'île Maurice (1860 km²). Par comparaison, la Belgique bénéficie d'une superficie de 32 545 km², soit 17 fois plus grandes que la Gagaouazie, alors que la Belgique est considérée comme un «petit» pays.

La Gagaouzie est non seulement un territoire minuscule, mais elle est morcelée en quatre zones terrestres séparées. Elle compte trois villes ou districts (Comrat, Cadîrr-Lunga et Vulcanesti), ainsi que 23 municipalités. L'enclave principale et centrale (voir la carte) comprend les villes de Comrat et de Ceadîr-Lunga et est divisée en deux districts, ces villes servant de centres administratifs. La deuxième plus grande enclave est située autour de la ville de Vulcănești, tandis que deux enclaves plus petites sont les localités de Copceac et Carbalia. La localité de Carbalia relève de l'administration de Vulcănești, tandis que Copceac fait partie du district de Ceadir-Lunga (voir la carte). La capitale de l'UTA est Comrat (26 000 habitants en 2016).

1.1 L'autonomie

La Loi sur le statut juridique particulier de la Gagaouzie du 23 décembre 1994, adoptée par le Parlement moldave, accorde un statut d'autonomie à la Gagaouzie au sein de la république moldave, lui donnant le droit de posséder ses propres emblèmes et de se doter d'une assemblée législative (l'Assemblée du peuple) et d'organismes exécutifs particuliers. Le gouvernement autonome a juridiction dans plusieurs domaines, notamment dans les sciences, la culture, l'éducation, les services communs de proximité, les services de santé, les services sociaux, les activités économiques locales (budgétaires, financières et fiscales) et l’environnement.

La Loi sur le statut juridique particulier de la Gagaouzie précise dans son article 2 que «l’administration de la Gagaouzie fonctionne sur la base de la Constitution de la république de Moldavie, la présente loi et d'autres lois de la république de Moldavie (sauf les exceptions prévues par la présente loi) en conformité avec le Règlement de Gagaouzie (1998) et les actes de l’Assemblée du peuple (Khalk Toplouchou) de Gagaouzie». L’article 1er  de la loi accorde aussi des droits collectifs à la minorité gagaouze, mais prévoit aussi une autodétermination qui ne remet pas en question l'intégrité territoriale de la Moldavie. Néanmoins, en cas d’union politique avec la Roumanie par exemple, la Gagaouzie aurait théoriquement le droit d’accéder à l’indépendance (par. 4 de l'art. 1).

Article 1er

1) La Gagaouzie (Gagaouzie-Yeri) est une entité territoriale autonome dotée d'un statut particulier qui, sous la forme d'autodétermination des Gagaouzes, fait partie intégrante de la république de Moldavie.

2) Dans les limites relevant de ses compétences, la Gagaouzie décide elle-même des questions le développement politique, économique et culturel dans l’intérêt de toute la population.

3) Sur le territoire Gagaouzie, tous les droits et toutes les libertés prévus par la Constitution et les lois de la république de Moldavie sont garantis.

4) En cas de changement de la situation de la république de Moldavie comme État indépendant, le peuple de Gagaouzie a droit à l'autodétermination extérieure.

Le gouvernement moldave est représenté par un gouverneur (ou une gouverneure) considéré comme la fonction officielle et représentant le pouvoir suprême de Gagaouzie; celui-ci (ou celle-ci) est élu directement par la population du territoire autonome pour un mandat de quatre ans.

Rappelons que la région autonome gagaouze est appelée officiellement "Unitatea teritorială autonomă Găgăuzia" en roumain/moldave, mais ''Gagauz Yeri" en gagaouze/gök-oğuz, puis "Автономное территориальное образование Гагаузия" en russe ("Avtonomnoye territorial'noye obrazovaniye Gagauziya") ou encore "Gök-Oğuz Yeri Özerk Bölgesi" en turc (non-officiel, mais également enseigné parce que beaucoup de Gagaouzes ou Gök-Oğuz vont travailler en Turquie, et parce qu'il y a un tourisme turc en Gagaouzie). 

Dans le langage courant, on emploie simplement ''Gagauziya" en gagaouze/gök-oğuz, "Găgăuzia"  en roumain/moldave, "Гагаузия"  en russe ou "Gökoğuzistan"  en turc. Les termes "Gagauz"  en gagaouze/gök-oğuz, "Găgăuz" en roumain/moldave, "Гагауз" (Gagaouze) en russe ou "Gökoğuz" en turc (signifiant "Oghouzes bleus") sont politiquement corrects. Quant aux mots "Găgăuți" («Gagaoutsi) en roumain/moldave, "Гаговцы" («Gagovtsy») en russe ou "Gağauz"  («Gaâouze») en turc sont péjoratifs. 

1.2 Les difficultés

Il faut considérer qu'en Moldavie le mot «autonome», tel qu'il apparaît dans la Loi sur le statut juridique particulier de la Gagaouzie, semble quelque peu ambigu. Bien que la loi décrive les dispositions clés du statut d'autonomie du territoire, par exemple elle délimite la juridiction administrative du territoire et l'autorité des pouvoirs législatif et exécutif, le le statut d'autonomie de 1994 fournit peu d'indications sur la manière dont les gouvernements national et territorial sont censés exercer leur autorité et leurs responsabilités. D'ailleurs, le gouvernement de Chisinau a tenté plus d'une fois de désamorcer ce qu'il considère comme une «menace» entraînée par l'autonomie gagaouze en choisissant de prendre de petites mesures graduelles qui paraissent souvent incompatibles avec le statut d'autonomie de 1994.

L'objectif est d'utiliser les lois nationales, les arrêtés ministériels et les résolutions afin de réduire l'espace politique de l'autonomie gagaouze. L'un des problèmes réside dans le fait que la loi d'autonomie de 1994 renvoie tous les litiges juridiques à la Chancellerie d'État ("Cancelaria de Stat") de la Moldavie. Celle-ci constitue l'autorité publique qui assure l'organisation de l'activité du gouvernement pour qu'il puisse mener à bien la politique intérieure et extérieure de l'État; la Chancellerie crée ainsi le cadre général de définition des priorités d'action du gouvernement central, assure le suivi de la mise en œuvre du programme gouvernemental, la présentation de documents d'analyse et d'information, la préparation de projets d'actes gouvernementaux, y compris la réalisation du droit d'initiative législative.

Jusqu'ici, le gouvernement autonome gagaouze a pu résister avec succès aux efforts de Chisinau pour modifier le statut d'autonomie de 1994. Cependant, il a obtenu moins de succès dans ses efforts pour modifier la Constitution moldave de sorte que Comrat n'a pu renforcer son contrôle dans les affaires territoriales. Plus de 98 % des Gagaouzes déclarent préférer l'Union douanière dirigée par la Russie à laquelle ils sont très attachée plutôt qu'à l'Union européenne dont ils se méfient. Or, le gouvernement moldave souhaite que le pays adhère à l'Union européenne, alors que la Gagaouzie est gouvernée par le Parti communiste, qui s'oppose à toute intégration européenne de la Moldavie.

1.3 Les langues officielles

L'article 3 de la Loi sur le statut juridique particulier de la Gagaouzie proclame que les langues officielles de la Gagaouzie sont le moldave, le gagaouze et le russe:

Article 3

1) Les langues officielles de la Gagaouzie sont le moldave, le gagaouze et le russe. En même temps que les langues officielles sur le territoire de Gagaouzie, le fonctionnement des autres langues est garanti.

2) La correspondance avec les organismes de l’administration publique de la république de Moldavie, les entreprises, les organismes et les institutions disposées en dehors de la Gagaouzie est effectuée dans les langues moldave et russe.

Rappelons qu'en Moldavie seul le roumain est la langue officielle, mais en Gagaouzie le russe et le gagaouze le sont également. Toutefois, en Gagaouzie, le roumain est toujours appelé «moldave», comme en Transnistrie et en Russie. Quoi qu'il en soit, le moldave et le roumain constituent la même langue! Au plan juridique, le terme «moldave» demeure l’une des deux appellations désignant la langue officielle de la république de Moldavie. En effet, on trouve "limba moldovenească" («langue moldave») et "limba română" («langue roumaine»). Dans son arrêt  n° 36 du 5 décembre 2013, la Cour constitutionnelle a statué que le nom de la langue officielle est celui de la Déclaration d'indépendance, c'est-à-dire le roumain. 

2 Données démolinguistiques

Groupe ethnique Population Pourcentage
Gagaouze 127 835 82,13%
Bulgare 8 013 5,15 %
Moldaves (déclarés) 7 481 4,81%
Roumains (déclarés) 38 0,02%
Russe 5 941 3,81%
Ukrainien 4 919 3,16%
Tsiganes 486 0,31%
Autres 933 0,9%
La Gagaouzie est un mélange complexe de cultures et de traditions, qui abrite environ 135 000 personnes d’origine turque, lesquelles pratiquent le christianisme orthodoxe, mais parlent principalement le russe. Au recensement de 2014, la Gagaouzie comptait 134 535 habitants, dont 82,1% de Gagaouzes, 5,15% de Bulgares, 4,8% d'autochtones déclarés au choix «Moldaves» et 0,02% d'autochtones déclarés «Roumains» (depuis que le recensement le permet), puis 3,8% de Russes, 3,1% d'Ukrainiens, 0,3% de Tsiganes et 0,9 % de personnes d'une autre ethnie. En ce qui concerne les catégories «Moldaves» et «Roumains», il s'agit bien du choix offert aux citoyens de la république de Moldavie, et non pas de citoyens de la Roumanie installés en Moldavie, qui pour leur part y sont des étrangers. Cela traduit l'expression locale "Bastinasi declarati Moldoveni" et "Bastinasi declarati Români", soit «Autochtones déclarés Moldaves» et «Autochtones déclarés Roumains». 

De plus, 80,4% de la population s'est déclarée de langue maternelle gagaouze, 9,9% de langue russe, 4,1% de langue bulgare, 3,8% de langue moldave/roumaine, 1,3% de langue ukrainienne et 0,5% d'une autre langue maternelle.

Cependant, dans la vie quotidienne, la langue russe demeure très employée. Ainsi, la plupart des Gagaouzes (80%) sont bilingues, ils parlent le gagaouze et le russe, mais en revanche très peu d'entre eux (environ 4%) sont bilingues avec le roumain, la langue officielle de la Moldavie. Par ailleurs, l'écriture gagaouze est peu employée, car les Gagaouzes privilégient le russe lorsqu'ils écrivent. 

2.1 La répartition du gagaouze

Les trois tableaux suivants (Wikipedia) indiquent la proportion des Gagaouzes dans les villes, municipalités et villages de la Gagaouzie. On doit constater que les Gagaouzes sont majoritaires dans la plupart des localités, sauf Chioselia Rusă (25,2%), Chirsova (45,6%), Ferapontievca (28,0%) et Svetlîi (35,4%):

Appellation officielle roumaine En gagaouze Pourcentage
Comrat (ville) Komrat 72,8%
Ceadîr-Lunga (ville) Çadır 73,7%
Vulcănești (ville) Valkaneş 69,4%
Avdarma Avdarma 94,2%
Baurci Baurçu 97,9%
Beșalma Beşalma 96,7%
Beșghioz Beşgöz 93,0%
Bugeac Bucak 61,8%
Carbalia Kırbaalı 70,2%
Appellation officielle roumaine En gagaouze Pourcentage
Cazaclia Kazayak 96,5%
Chioselia Rusă Köseli Rus 25,2%
Chiriet-Lunga Kiriyet 92,6%
Chirsova Başküü 45,6%
Cioc-Maidan Çok-Maydan 93,1%
Cișmichioi Çöşmäküü 94,4%
Congaz Kongaz 96,1%
Congazcicul de Sus Congazul-Mic 73,4%
Copceac Kıpçak 95,0%
Appellation officielle roumaine En gagaouze Pourcentage
Cotovscoe Kırlannar 95,4%
Dezghingea Dezgincä 94,5%
Etulia Etulya 92,7%
Ferapontievca Parapontika 28,0%
Gaidar Haydar 96,5%
Joltai Coltay 96,0%
Svetlîi Svetlıy 35,4%
Tomai Tomay 95,1%

Il existe trois chefs-lieux (ou capitales régionales) en Gagaouzie: Comrat, Ceadîr-Lunga et Vulcănești.

Comrat est la capitale de la Gagaouzie et également le chef-lieu du district (appelé "dolay") du même nom et l'un des trois districts qui composent cette région. Elle compte environ 26 000 habitants, dont 72,8% sont gagaouzes. Ceadîr-Lunga est la seconde agglomération de la Gagaouzie (19 400 habitants), dont 73,7% de Gagaouzes. Elle est également le chef-lieu du district qui compose cette région. Quant à Vulcănești, elle est la troisième agglomération de la Gagaouzie avec 12 185 habitants, dont 69,4% de Gagaouzes; elle est également le chef-lieu de son district.

Si la plupart des Gagaouzes de Moldavie sont concentrés en Gagaouzie, d'autres habitent dans des districts qui ne font pas partie de l'UTA de Gagaouzie, que ce soit dans les districts de Besarabesca, de Cantemir, de Cahul, de Taraclia, etc., y compris la ville de Chisinau (plus de 5800) et de Tiraspol (env. 1900). Le district de Taraclia (12 355 hab.) est particulier, car les Bulgares y sont majoritaires dans une proportion de 77,4 %. Les Garaouzes ne comptent que pour 5,9% de la population, mais on y trouve aussi des Moldaves (6,4%), des Russes (5,1%) et des Ukrainiens (3%).  

Il existe des communautés gagaouzes en Ukraine, le pays voisin, mais aussi en Bulgarie et en Russie. On trouve aussi de très petites communautés de Gagaouzes en Grèce, en Roumanie, en Turquie, au Kazakhstan et même en Amérique du Sud.

2.2 La langue gagaouze

Le peuple gagaouze parle en principe le gagaouze, une langue turque de la famille altaïque transcrite auparavant avec l’alphabet cyrillique, mais maintenant avec l'alphabet latin (comme pour le moldave ou le roumain). Le gagaouze fait partie des langues du groupe turcique comme le turc, l'ouzbek, le kazakh, l'azéri, etc.: 

  Groupe Langues
1 Turcique turc, turkmène, ouzbek, ouïgour, azéri, kazakh, kirghiz, tatar, gagaouze, karakalpak, bachkir, yakoute, tchouvache, etc.
2 Mongol khalkha, rat, bouriat, xorein, etc.
3 Toungouze mandchou, lamout, évenki, etc. 

Le gagaouze est une langue dérivée du turc balkanique ou du turc des Balkans. Bien que le gagaouze et le turc soient mutuellement relativement intelligibles, le gagaouze est généralement classé comme une langue distincte en raison des influences étrangères des langues voisines parlées dans les Balkans. En effet, le gagaouze contient de nombreux emprunts au bulgare et au russe, ainsi qu'au roumain et l'ukrainien, sans oublier le turc ottoman. Les croyances, les traditions et les coutumes populaires, la culture orale et le folklore des Gagaouzes portent des traces significatives de la principale source turque, mais les influences balkaniques et slaves apparues plus tard ont fait en sorte que la culture gagaouze est aussi caractérisée par des particularités locales distinctes. En réalité, les Gagaouzes forment une communauté turcophone christianisée, de confession orthodoxe, contrairement aux autres turcophones qui sont généralement musulmans. La plupart des Gagaouzes pratiquent la même religion orthodoxe que les Bulgares et respectent les préceptes de l'Église orthodoxe bulgare.

À l'inverse, les Gagaouzes de Turquie ont perdu leur langue qu'ils écrivaient avec l'alphabet grec; aujourd'hui, ils ont adopté le turc moderne qu'ils écrivent avec l'alphabet latin parce que les lettres grecques sont interdites. Ils continuent de pratiquer leur religion, mais ne reconnaissent pas le Patriarcat orthodoxe turc et dépendent de l’Église autocéphale bulgare. Les activités religieuses se déroulent en slavon (langue liturgique des Slaves orthodoxes) et non en gagaouze, ce qui contribue quelque peu à la perte de l’identité gagaouze et de l’appartenance aux peuples turcs d’Europe orientale. Le nombre des Gagaouzes de Turquie ne semble pas très élevé. Quoi qu'il en soit, la langue gagaouze est partout en voie d'extinction, sauf à l'intérieur de la Moldavie. 

- Les variétés dialectales

Il existe deux principaux groupes de variétés dialectales en gagaouze. Le premier groupe est la variété Merkez (nord-est de la Turquie), dite «centrale», parlée dans les districts de Comrat (Komrat) et de Ceadîr-Lunga (Çadir). Une quinzaine de villages et de localités partagent cette variété: Avdarma, Kirsova, Baurçu, Beşalma, Beşgöz, Caltay, Çok-Meydan, Gaydar, Kazayak, Kiriet, Kongaz, Kongazcık, Kıpçak et Tomayrégion. La langue écrite est basée sur la variété dite centrale.

Le deuxième groupe est le dialecte du Sud anatolien et parlé dans la région de Vulcănești complètement au sud de la Gagaouzie ainsi que dans la région d'Odessa, aujourd'hui en territoire ukrainien: ce sont les villages de Çeşmeköy, d'Etulya près de Vulcănești, de Dimitrovka, de Novoselovka, de Karakurt, de Czervonoarmeysk, de Vinogradovka.

Les efforts lancés au début du XXe siècle pour adapter le turc gagaouze à la langue écrite ont donné certains résultats au milieu de ce siècle. Lorsque le gagaouze s'est soudainement adapté à la langue écrite au XXe siècle, période au cours de laquelle les concepts sont devenus considérablement plus diversifiés et complexes, les locuteurs ont fait appel à la langue dominante du bloc de l'Est, le russe, afin de s'adapter à de nouveaux concepts; ils ont dû emprunter un grand nombre de mots russes et à d'autres langues occidentales. C'est la raison pour laquelle de nombreuses caractéristiques archaïques propres aux dialectes et aux mots turcs ottomans peuvent être observées en turc gagaouze, sans oublier les influences des langues slaves (bulgare et russe) en termes de phonétique, de morphologie et de syntaxe provoquées par les circonstances historiques et sociales introduites par ces langues.

- L'écriture gagaouze

Les Turcs gagaouzes lisaient les livres des Turcs chrétiens en Anatolie et ceux en turc karamanli, une variété de turc écrite avec l'alphabet grec et parlée par des orthodoxes avant la chute de l'Empire ottoman. De cette manière, ces turcophones gagaouzes recevaient une éducation religieuse et culturelle en turc. Ces livres portaient sur la vie des saints, les prières, les histoires mythiques de personnages bien connus tels qu'Alexandre le Grand et les contes populaires anatoliens.

En 1904, Mihail Çakır (Michail Ceachir en roumain), un ecclésiastique gagaouze, traduisit en gagaouze la Bible avec l'alphabet cyrillique russe; peu après, en 1909 et 1910, les Évangiles furent publiés en gagaouze, toujours avec des lettres cyrilliques. Lorsque la Moldavie est passée sous la domination roumaine en 1918, Mihail Çakır réédita certains ouvrages, précédemment publiés en alphabet cyrillique, avec l'alphabet latin basé sur l'écriture de la Roumanie. Çakır s'est inspiré du roumain, mais surtout du turc, car les phonèmes gagaouzes (notamment le ö et le ü) n'ont pas tous des lettres roumaines équivalentes. En 1993, les Gagaouzes adoptèrent un alphabet latin proche de celui utilisé par le moldave (roumain) et le turc. 

- Le bilinguisme

La plupart des Gagaouzes sont bilingues. Ils parlent le gagaouze et le russe, mais leur connaissance du russe atteint généralement un niveau supérieur à celui de leur langue ancestrale. De plus, les locuteurs parlant la langue officielle de la Moldavie, le roumain, sont en minorité numérique en Gagaouzie. En effet, le gagaouze est parlé par 84 % des résidents de l'UTA de Gagaouzie, alors que le roumain n'est connu que par 13% des Gagaouzes, et ce, à un niveau de «débutant»; s'ils peuvent normalement comprendre un locuteur du roumain, ils ne peuvent communiquer ni écrire dans cette langue.

De plus, 48,4% des Gagaouzes parlent le russe à la maison, contre 44,9% en gagaouze et 1,9% en roumain. Interrogés en 2016 sur les deux langues que les jeunes de l'UTA de Gagaouzie devraient connaître, 79,5% des répondants ont mentionné le russe, 40,1% le moldave et 2,6% le roumain. La plupart des personnes interrogées qui ne parlent pas la langue officielle, le roumain, ont affirmé qu'elles ne voyaient pas la nécessité de le faire. On a demandé aux parents dans quelle mesure est ressenti le besoin de parler la langue officielle, les réponses sont les suivantes: 6,8% ont répondu «beaucoup», 25,% «plutôt», 42,1% «juste un peu», 24,6% «pas du tout». Quant à savoir quelle autre langue les parents souhaitent faire apprendre à leurs enfants, 84,1% choisissent le russe, 9,3% le moldave (roumain) et 1,8% l'anglais. Dans la vie quotidienne, 70% des Gagaouzes s'expriment en russe, contre 30% en gagaouze, même entre eux dans les milieux de travail ou avec les autorités locales. 

Selon l'Institutul Pentru Politici Publice (Institut pour les politiques publiques), de 20% à 30 % des citoyens gagaouzes veulent que leurs enfants vivent en Russie. Il y aurait déjà quelque 500 000 Gagaouzes qui travaillent en Russie et qui y vivent; beaucoup ont des passeports russes et ils ne veulent pas que leurs enfants apprennent le roumain, car ils comprennent qu'ils ne vivront pas dans ce pays. Sauf que ceux qui vivent en Russie ont tendance à perdre leur langue.

Bref, le niveau de connaissance de la langue roumaine chez les jeunes de Gagaouzie est encore faible. Les principales causes de cette situation semblent être le niveau insuffisant de son enseignement dans les écoles autonomes et le manque d'environnement linguistique, ou de locuteurs du roumain, pour faciliter les communications. Cette méconnaissance de la langue officielle empêche les diplômés de Gagaouzie de s'intégrer dans la société avec comme résultat que certains disent être confrontés à des situations de discrimination, de sorte qu'ils décident de poursuivre leurs études en Transnistrie ou en Russie. D'ailleurs, 94% des Gagaouzes disent que le russe est leur langue d'enseignement.

Pour résumer, on peut affirmer que la situation linguistique en Gagaouzie est la suivante: il existe trois langues officielles, le gagaouze, le russe et le moldave. Les communications informelles se font souvent en gagaouze, les communications avec les autorités, les entreprises, les organismes et les institutions se font en russe, sauf les communications extérieures avec la Moldavie, car les documents officiels sont en roumain, bien que les Gagaouzes répondent en russe. L'éducation des enfants est toujours offerte en russe, tandis que l'attitude des autorités officielles de Moldavie à l'égard de cette situation est ambiguë.

- Une langue en danger

En 2010, l'UNESCO déclarait que le gagaouze était «une langue en danger». Une langue est considérée comme «en danger d'extinction» si seuls quelques représentants de la génération plus âgée la parlent, tandis que pendant ce temps leurs enfants peuvent les comprendre, mais pas les petits-enfants. La langue gagaouze est exactement dans cette situation précaire. Il y a quelques décennies, seuls les jeunes des villes telles que Comrat, Ceadîr-Lunga et Vulcanesti ne parlaient plus la langue ancestrale, mais aujourd'hui cette méconnaissance s'est étendue aux villages et aux plus petites localités.

Par exemple, en 2016, dans l'un des villages de Gagaouzie, sur 29 élèves de première année seulement deux comprenaient et pouvaient parler le gagaouze. Déjà pour les enfants gagaouzes ruraux, le russe est devenu leur langue maternelle. Et cela signifie qu'en Gagaouzie, dans environ vingt ou trente ans, la langue cessera d'exister, à moins que des mesures plus énergiques soient entreprises dès maintenant. Pour ce faire, les autorités moldaves doivent être impliquées. Pour l'instant, les manuels de classe et tout autre matériel lié à la langue gagaouze sont financés par la Turquie et par le maigre budget de la Gagaouzie, ainsi que par des particuliers, mais pas du tout par le budget de l'État moldave.

Dans la pratique, dans la quasi-totalité des écoles maternelles, seul le russe est utilisé; les camps d'été annuels pour les enfants sont en russe. Les noms de villages, des commerces et des institutions administratives ne sont jamais écrits en gagaouze, même si le rapporteur spécial de l'ONU sur les minorités, dans son rapport sur la situation en Moldavie, a recommandé de traduire également les noms dans les langues minoritaires. Dans les médias, il y a un nombre très réduit de publications en langue gagaouze, alors qu'elles sont publiées sans aucun contrôle, donc avec beaucoup d'erreurs dans les textes. Les noms de famille gagaouze sont pour la plupart d'origine turque, ces noms, souvent hérités de l'URSS, peuvent aussi avoir été transformés avec l'orthographe russe, puis par la suite avec l'orthographe moldave, de sorte que les noms gagaouzes sont devenus méconnaissables. Par exemple, le nom «Kuyucuklu» en russe s'écrivait «Куйжуклу», alors qu'il s'écrit maintenant «Сuijuklu», mais en roumain il s'écrirait «Сuiuguklu»; il faudrait normaliser l'orthographe gagaouze en «Kuyucuklu». Dans la fonction publique, les employés gagagouzes travaillent en russe, mais ils reçoivent tous les documents officiels de Chisinau en roumain; étant donné que peu connaissent le roumain, les traducteurs les traduisent en russe afin que les fonctionnaires puissent répondre en russe. En somme, les Gagaouzes forment une société passablement russifiée, et ce, d'autant plus que la plupart ne veulent absolument pas se départir du russe. Au lieu de subir la concurrence d'une seule langue, le roumain, les Gagaouzes doivent affronter deux langues: le roumain et le russe.  

2.3 Les minorités en Gagaouzie

La Gagaouzie compte quelques minorités, dont 5,5 % de Bulgares, 4,81% de Moldaves roumanophones, 3,81 de Russes, 3,16% d’Ukrainiens, 0,3% de Roms/Tsiganes et diverses autres petites nationalités. En réalité, les Bulgares constituent le plus importante minorité, car les Moldaves forment la majorité dans l'ensemble du pays, sauf en Gagaouzie et en Transnistrie. Dans quelques villages, les Bulgares peuvent être plus nombreux que les Moldaves ou les Russes.

Il convient de souligner que les peu nombreux Gagaouzes qui connaissent la langue roumaine parlée dans la région ont parfois du mal à comprendre le roumain standard employé à Chisinau ou en Roumanie, qu'ils considèrent par ailleurs comme «une belle langue».

2.4 Les religions

Les chrétiens comptent pour 96,0% de la population, dont 93,0% d'orthodoxes. Les autres confessions sont composées de 3,0% de protestants, dont 1,6% de baptistes, 0,8% d'adventistes du septième jour, de 0,4% d'évangéliques, 0,2% de pentecôtistes. Il reste 2,2% pour les catholiques et les musulmans, 0,2% pour les athées et 1,6% pour les sans religion.

Par ailleurs, les Gagaouzes de Moldavie et d'Ukraine dépendent du Patriarcat de Moscou, ceux de Bulgarie de celui de Sofia-Tarnovo, ainsi que ceux de Turquie qui sont restés chrétiens, mais la plupart sont passés à l'islam pour ne plus entendre les Turcs les traiter quotidiennement de "gyaurs" («mécréants») et leur dire qu'ils devraient avoir honte. Il est vrai qu'en 1991-1992 la Turquie a proposé à Stepan Topal, le leader Gagaouze de l'époque, de se rattacher au Patriarcat orthodoxe turc (qui serait alors passé de 50 à 140 000 fidèles, mais il s'agissait des Gagauzes de Gagaouzie; cela ne s'est jamais réalisé, car Moscou a refusé. En fait, la Turquie cherchait alors à retrouver son influence au nord des bouches du Danube, mais il n'a jamais été question qu'elle importe des orthodoxes sur son propre territoire.

3 Données historiques

Comme nous le verrons, à l'exception d'une indépendance de facto de six jours à l'hiver de 1906 lorsqu'un soulèvement paysan a déclaré une République autonome de Comrat, l'ethnie gagaouze fut toujours dirigée par d'autres groupes dominants: l'Empire russe (1812-1917), la Roumanie (1918-1940 et 1941-1944), l'Union soviétique (1940-1941 et 1944-1991) et la Moldavie (1917-1918 et de 1991 à aujourd'hui).

Ce sont des descendants des Oghouz turcophones. Ces derniers étaient à l'origine répartis en neuf clans, les Tokuz Oghouz («Neuf Oghouz»), divisés en 24 tribus issues des six fils d'Oghouz Khagan : Kün («Soleil»), Ay («Lune»), Yildiz («Étoile»), Kök («Lac»), Tag («Montagne») et Tengiz («Mer»), dirigeant chacun un groupe de quatre tribus qui se référaient à chacun à un totem clanique (rapace, animal sacré, nourriture particulière ou signe sacré). Les ancêtres des Gagaouzes étaient donc des nomades dans les steppes d'Eurasie. Poussés par la sécheresse, à la recherche de pâturages, ils se sont déplacés vers l'ouest en quelques vagues sans jamais abandonner complètement leur ancestrale religion chamanique; ils devinrent adeptes du manichéisme, du nestorianisme, du bouddhisme et finalement de l'islam, avant d'être christianisés à l'époque byzantine. Les Oghouz qui conservèrent leur foi islamique furent dès lors connus sous le nom de «Turkmènes», cousins des Azéris et des Turcs de Turquie. Les Gagaouzes entrèrent dans l'histoire au cours du XIIIe siècle dans la région de Varna, en Bulgarie, sinon plus tôt, au VIIe siècle, alors qu'on les appelait des «Bulgares turcs», des proto-Bulgares ou «prabulgars».

3.1 Une communauté turcophone

Certaines sources affirment que les Gagaouzes se seraient christianisés bien après le schisme de 1054 et auraient adhéré à la religion grecque orthodoxe bulgare. Après la chute de Constantinople (1204), les Oghouz christianisés, restés improprement des «Bulgares», auraient fui l'invasion turque, car les Ottomans menaçaient de leur imposer la religion musulmane. Durant le Moyen Âge, ces turcophones se seraient réfugiés, avec de «vrais» Bulgares, dans une zone de 200 km le long de la mer Noire, c'est-à-dire l'ancienne province de l'Empire ottoman appelée élayet de Silistra (représentée en vert); la province comprenait alors le Boudjak ou la Bessarabie, la Dobroudja (Dobrogée en français) ainsi que le nord-est de la Bulgarie actuelle. C'est aujourd'hui une région partagée entre le sud-ouest de l’Ukraine (Boudjak), l’est de la Roumanie (Dobroudja) et le nord-est de la Bulgarie (voir la carte ci-contre).

Selon une légende nationale, les turcophones auraient fondé un État monarchique du nom d'un de leurs chefs appelé Kay-Ka'us. On parlait alors de l'État des Kay-Ka'us, lequel n'a jamais existé, mais par glissement sémantique du mot ces populations seraient devenus des Gagauz ou en français Gagaouzes.

La plupart des Bulgares gagaouzes restèrent fidèles au patriarche de Constantinople après l'invasion ottomane conduite par Bayasid Ier en 1398, une invasion qui mit fin à la seule entité politique durable que les Bulgares gagaouzes aient connue au cours de leur histoire.

Jusqu'en 1812, ces derniers vécurent dans la région de la Dobrogée. À cette époque, ils dépendaient au point de vue religieux de l'exarchat de Brăila du patriarcat de Constantinople et ils utilisaient l'alphabet grec pour transcrire leur langue. Au XVIIIe siècle, la Dobrogée abritait des Gagaouzes, des Roumains, des Russes, des Ukrainiens, des Bulgares, des Turcs, des Grecs et des Tatars.

Ce fut l'ethnographe russe Valentin Moskov (1852-1922) qui, le premier, découvrit les particularités ethniques des Gagaouzes dans l'Empire russe, lesquels ne furent plus associés aux Bulgares. D'ailleurs, la langue turque des Gagaouzes apparaissait comme un signe de différenciation par rapport aux Bulgares ou aux Ukrainiens, voire aux Moldaves.

3.2 L'annexion par la Russie

À la suite de l'annexion par l'Empire russe du Boudjak situé au nord des bouches du Danube lors du traité de Bucarest de 1812 à l'issue de la guerre russo-turque de 1806-1812, la Turquie et la Russie s'engagèrent dans un échange de populations : pendant que les musulmans tatars et turcs du Boudjak (au sud de la Bessarabie, aujourd'hui en Ukraine) étaient expulsés vers la Dobrogée restée ottomane, mais actuellement partagée entre la Roumanie et la Bulgarie, les Gagaouzes et les Bulgares de la Dobroudja, tous orthodoxes, réussirent à s'installer à leur place dans le Boudjak, donc dans la nouvelle «province russe» de Bessarabie (aujourd'hui acquise par l'Ukraine).

Ce n'était pas terminé: entre 1812 et 1846, les Russes déplacèrent le peuple gagaouze du Boudjak bulgare vers la Bessarabie orthodoxe, principalement à Avdarma, Comrat, Congaz, Tomai, Cișmichioi et dans d'autres anciens villages des Turcs nogaïs. Les Gagaouzes durent s'intégrer dans l'ancienne principauté de Moldavie, la Bessarabie, qui demeura sous la suzeraineté turque, avant d'être annexée par la Russie au moment de la guerre russo-turque (1877-1878).

Dans les décennies qui ont suivi l'annexion de la Bessarabie par la Russie, la plupart des Gagaouzes restés dans la Dobrogée émigrèrent en Bessarabie, séduits par les privilèges accordés par l'administration tsariste, mais aussi par la possibilité d'échapper à l'oppression de l'Empire ottoman en raison de leur religion chrétienne. Afin de consolider les frontières de l'Empire russe, des colonies spéciales furent créées pour les Gagaouzes par décret du tsar : chaque famille obtenait 60 dixièmes de terres, tout en étant libérée de l'enrôlement dans l'armée, des impôts et des taxes. Les Gagaouzes immigrèrent en masse dans ces territoires. Les Gagaouzes s'installèrent en même temps avec les Bulgares de Bessarabie dans les localités suivantes: Avdarma, Comrat, Congaz, Tomai, Cismichioi et autres villages.

À cette époque, en Gagaouzie, les taux d'analphabétisme étaient de 88 % pour les hommes et de 98 % pour les femmes. Des écoles en langue russe furent ouvertes pour les Gagaouzes. En 1895, une variante de l'alphabet cyrillique fut créée pour la langue gagaouze par le chef spirituel gagaouze, l'archiprêtre Mihail Çakir (1861-1938) Ceachir en roumain; Tchakir en russe, mais le prénom Mihail dans les trois langues. Connaissant les langues russe, gagaouze, roumaine et grecque, Çakir puisa dans de nombreuses sources et, avant même l'apparition de l'écriture gagaouze, il écrivit l'histoire du gagaouze en roumain et en gagaouze; il publia aussi le dictionnaire gagaouze-roumain. Il traduisit en gagaouze l'Ancien et le Nouveau Testament.

Petit à petit, le turc gagaouze recula face au russe et au bulgare, sans disparaître pour autant. Cette période de la Bessarabie semble avoir été une sorte d'âge d'or dans l'histoire des Gagaouzes. La principale concentration des colonies gagaouzes fut l'agglomération de Comrat, une ville commerçante de 10 000 habitants à cette époque. L'ethnographe Valentin Moskov rapporte que les Russes désignaient Comrat avec un certain  humour comme «la capitale de la Gagaouzie».

Néanmoins, Comrat vécut un soulèvement populaire contre les autorités du tsar dans le cadre de la Révolution russe de 1905. Puis, le 6 janvier 1906, la "république de Comrat" (en gagaouze: "Komrat Respublikası") fut proclamée; les autorités russes furent licenciées et arrêtées. Cependant, la petite république autoproclamée ne dura que six jours, car les tribunaux du tsar, une fois le contrôle du territoire repris, fit déporter en Sibérie les responsables de la rébellion, dont leur leader Andreï Galatseanu, un étudiant aux ascendances gagaouze, roumaine et russe.

3.3 La Grande Roumanie (1918-1940)

À la suite de la victoire des Alliés en 1918, les «Quatorze points» du président américain Woodrow Wilson imposèrent à l'Europe «le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes». C'est ainsi que la Bessarabie, habitée majoritairement par des roumanophones, a pu proclamer son union à la Roumanie. Il en fut ainsi pour la Bucovine et la Transylvanie, également roumanophones, qui votèrent en novembre leur rattachement à la Grande Roumanie, qui engloba alors non seulement la Bucovine, la Transylvanie et la Bessarabie (nom roumain ou le Boudjak (nom turc), mais aussi toute la Dobrogée (Dobroudja). C'est alors que les Gagaouzes se trouvèrent sous la tutelle des Roumains. Dans l'entre-deux-guerres, les Gagaouzes devinrent néanmoins l'une des communautés ethniques les mieux intégrées de Bessarabie.

Compte tenu de la politique de roumanisation de la Dobrogée dans l'entre-deux-guerres, les Gagaouzes furent relativement faciles à assimiler en raison de leur religion, facteur identitaire qui s'avéra plus important que le facteur linguistique. À cette époque, tous les Gagaouzes connaissaient la langue roumaine et se méfiaient de l'idéologie communiste. Au cours des années 1930, l'administration roumaine tenta d'imposer aux Gagaouzes, sans grand succès, l'adoption de l'alphabet latin, en remplacement de l'alphabet grec qu'ils utilisaient jusqu'alors.  

Malgré le fait que les autorités roumaines reconnaissaient l'existence d'un groupe ethnique gagaouze, le nombre de celui-ci resta faible. En 1930, le nombre de Gagaouzes dans les districts de Tulcea et de Constanza s'élevait à environ 1000 personnes, dont 752 personnes à Constanza.

3.4 L'intégration à l'URSS

En juin 1940, l'URSS annexa la partie moldave qui était alors sous autorité roumaine. En juin 1941, suite à l'attaque nazie en URSS, la Moldavie fut à nouveau rattachée à la Roumanie avant d'être sous contrôle soviétique en août 1944. Quelques années plus tard, en 1947, la République socialiste soviétique moldave fut reconstituée. Une intense russification s'ensuivit, ce qui toucha autant les Moldaves que les Gagaouzes; les deux peuples durent utiliser, dès 1957, l'alphabet cyrillique russe pour écrire leur langue. Sous le régime soviétique, le peuple gagaouze fut privé d’écoles, sa langue totalement négligée et le développement culturel laissé pour compte. Cette situation déplorable suscita une réaction instinctive de rébellion contre toute autorité, y compris celle des Moldaves. C'est seulement à la fin des années 1960 que l'enseignement du gagaouze fut introduit en Moldavie.

La fin des années 1990 vit émerger quelques groupes moldaves favorables à une indépendance nationale, culturelle et politique. En juin 1990, le Parlement moldave vota une déclaration de souveraineté instaurant la primauté de la Constitution moldave sur tout le territoire, ce qui incluait la Gagaouzie. Lorsque le Parlement moldave adopta l'usage du moldave (roumain) comme seule langue officielle de la Moldavie, les Gagaouzes exprimèrent leur désapprobation. Ignorant habituellement le roumain, ils s'exprimaient généralement en gagaouze et en russe comme langue seconde, 75 % d'entre eux le parlant couramment. Sous l'initiative du leader gagaouze Stepan Topal, le Front gagaouze, qui commença à émerger. Les Gagaouzes fondèrent, le 19 août 1990, une République socialiste soviétique de Gagaouzie, qui revendiquait de rester membre de l’URSS, mais peu de temps après, le 27 août 1991, l'indépendance de la Moldavie fut aussi proclamée.

3.5 L'autonomie régionale

Aussitôt, les minorités gagaouze et russophone, craignant une union avec la Roumanie, réclamèrent l'autonomie de leur région. Une guerre civile éclata dans la république de Transnistrie entre les forces armées moldaves et les russophones; ces derniers étaient appuyés par des contingents de cosaques et surtout par la 14e armée russe. En 1992, le président moldave (Mircea Snegur) autorisa une intervention armée contre les rebelles gagaouzes, mais la déconfiture de l'armée moldave en Transnistrie permit d'éviter une répression sanglante en Gagaouzie. Les conflits s'achevèrent avec la conclusion d'un accord à Moscou, prévoyant l'autodétermination de la Transnistrie et de la Gagaouzie, dans l'éventualité d'une union avec la Roumanie.

En février 1994, le président Mircea Snegur promit l'autonomie aux Gagaouzes, tout en étant contre l'indépendance de la région. Il s'opposa également au projet que la Moldavie devienne un État fédéral composé de trois républiques: la Moldavie, la Gagaouzie et la Transnistrie. En mars 1994, un référendum moldave trancha en faveur de l'indépendance de la Moldavie dans ses frontières de 1990, c'est-à-dire comprenant la Transnistrie et la Gagaouzie, et contre la fusion avec la Roumanie. La même année, une nouvelle constitution fut proclamée, garantissant l'autonomie de la Gagaouzie et de la Transnistrie. L'autonomie de la Gagaouzie fut adoptée par le Parlement moldave, le 28 décembre 1994: ce fut la Loi sur le statut particulier de la Gagauzie (n° 344-XIII). Trois villes et 23 localités furent incluses dans le territoire autonome gagaouze: toutes les localités comptant plus de 50% de population ethnique gagaouze, ainsi que les localités gagaouzes de 40% à 50% qui ont exprimé leur souhait par référendum d'être incluses pour déterminer les frontières de la Gagaouzie. En réalité, les dirigeants gagaouzes semblent avoir tous été conscients qu’une réelle indépendance était économiquement et politiquement irréalisable.

Cette même loi de 1994, entrée en vigueur le 14 janvier 1995, permet aux Gagaouzes de faire sécession en cas de réunification de la Moldavie avec la Roumanie, et confère à la langue gagaouze le statut de langue co-officielle, avec le russe et le moldave (roumain). D'après l'article 1er de la Loi sur le statut particulier de la Gagauzie: «La Gagaouzie est une entité territoriale autonome avec un statut particulier [...] formant partie intégrante de la république de Moldavie.» Le statut de 1994, confirmé par une consultation électorale en mars 1995, a été négocié grâce à la médiation de la Turquie. On considère que ce statut a résolu le problème politique de la Gagaouzie, même s'il subsiste des problèmes économiques qui sont jugés différemment par le gouvernement moldave et par les autorités régionales. En 1998, un projet de constitution gagaouze a été soumis aux experts du Conseil de l'Europe par le président de l'Assemblée régionale.

Le 2 février 2014, la Gagaouzie organisa un référendum. Une écrasante majorité d'électeurs opta pour des liens plus étroits avec la Russie en cas d'intégration européenne. Ils déclarèrent également préférer l'indépendance de la Gagaouzie si la Moldavie choisissait d'entrer dans l'Union européenne. Le gouvernement local est aux mains du Parti communiste qui privilégie des liens étroits avec la Russie. En Gagaouzie, la Russie sert de modèle, c'est le recours et la mère nourricière; tous parlent russe, regardent la télévision russe et vivent à l'heure de Moscou. Quand on parle de quitter la Moldavie, c'est pour émigrer en Russie.

Les Gagaouzes ont su non seulement éviter un bain de sang, mais surtout faire entendre leur voix auprès des autorités moldaves. Leurs institutions fonctionnent relativement bien et ne rencontrent pas de réelles oppositions de la part des Moldaves qui respectent l'autonomie gagaouze. Les Gagaouzes s’identifient aujourd'hui comme des Moldaves aux traditions particulières et, bien qu’ils multiplient les liens avec la Turquie, ils semblent être apparemment satisfaits de pouvoir gérer leurs affaires internes tout en faisant partie de la république de Moldavie; cela dit, le mouvement sécessionniste gagaouze n'est pas totalement disparu. Évidemment, les autorités gagaouzes ne voient pas les difficultés de la même façon que les autorités moldaves. L'article 12 du statut d'autonomie accorde à l'Assemblée de Gagaouzie un pouvoir législatif portant sur une série importante de compétences définies de manière très générale comme la culture, l'éducation, la santé publique, le sport, l'économie, l'écologie, les budgets locaux, etc. Le statut précise que l'Assemblée est habilitée à adopter une «législation locale», ce qui laisserait penser qu'il s'agit de compétences partagées. Les risques de conflit subsistent.

4 La politique linguistique

Étant donné que la Gagaouzie ne constitue pas un État souverain, il fallait que l'État moldave intervienne par voie législative afin d'accorder une autonomie aux Gagaouzes. L'appellation officielle est le suivant: Unité territoriale autonome de Gagaouzie (UTA). En roumain: Unitatea Teritorială Autonomă Găgăuzia (UTA). En gagaouze:  Avtonom Territorial Bölümlüü Gagauziya (ATB). En russe: Автономное территориальное образование Гагаузия (Avtonomnoïe territorial'noïe obrazovanie Gagaouzia) ou ATO.En anglais: Autonomous Territorial Unit of Gagauzia (ATU).

4.1 Le statut d'autonomie

L'autonomie réside principalement dans la Loi moldave sur le statut particulier de la Gagaouzie de 1994 qui confère à la Gagaouzie un statut d'autonomie :

Article 1er

1) La Gagaouzie (Gagaouzie-Yeri) est une unité territoriale autonome dotée d'un statut particulier qui, sous la forme d'autodétermination des Gagaouzes, fait partie intégrante de la république de Moldavie.

2) Dans les limites relevant de ses compétences, la Gagaouzie décide elle-même des questions le développement politique, économique et culturel dans l’intérêt de toute la population.

3) Sur le territoire Gagaouzie, tous les droits et toutes les libertés prévus par la Constitution et les lois de la république de Moldavie sont garantis.

4) En cas de changement de la situation de la république de Moldavie comme État indépendant, le peuple de Gagaouzie a droit à l'autodétermination extérieure.

Article 2

L’administration de la Gagaouzie fonctionne sur la base de la Constitution de la république de Moldavie, la présente loi et d'autres lois de la république de Moldavie (sauf les exceptions prévues par la présente loi) en conformité avec le Règlement de Gagaouzie et les actes de l’Assemblée populaire (Khalk Toplouchou) de Gagaouzie.

L'article 3 de cette loi moldave reconnaît trois langues officielles, le moldave, le gagaouze et le russe:

Article 3

1) Les langues officielles de la Gagaouzie sont le moldave, le gagaouze et le russe. En même temps que les langues officielles sur le territoire de Gagaouzie, le fonctionnement des autres langues est garanti.

2) La correspondance avec les organismes de l’administration publique de la république de Moldavie, les entreprises, les organismes et les institutions disposées en dehors de la Gagaouzie est effectuée dans les langues moldave et russe.

Pour la suite, la politique linguistique relève des pouvoirs de l'UTA de Gagaouzie.

4.2 Les langues de la législation

L'Assemblée populaire de Gagaouzie ("Gagauzia Halk Toplusu") est le Parlement monocaméral de la région autonome de Gagaouzie en Moldavie depuis sa création en 1994, les premières élections législatives ayant eu lieu l'année suivante. L'Assemblée est composée de 35 membres élus pour quatre ans au scrutin uninominal majoritaire à deux tours dans autant de circonscriptions. Les candidats ayant recueilli plus de 50 % des voix au premier tour ou, à défaut, lors d'un second tour organisé 14 jours plus tard entre les deux candidats arrivés en tête au premier, sont déclarés élus à la condition que la participation dans leur circonscription ait été d'au moins 33 % des inscrits. Dans le cas contraire, il est procédé à un nouveau scrutin dans la circonscription concernée.

Le territoire gagaouze comprend 31 villages ou localités, tous représentés au Parlement local, qui compte 35 députés, soit un par village, sauf la capitale Comrat qui a droit à cinq députés. La Gagaouzie est représentée au parlement de Moldavie par trois députés spécifiquement gagaouzes, mais d'autres sont élus en tant que membres des partis politiques moldaves traditionnels.

- La fonction de gouverneur(e)

Selon l'article 14 de la Loi moldave sur le statut juridique particulier de la Gagaouzie du 23 décembre 1994, le gouverneur (appelé "bashkan") est le représentant officiel suprême de la Gagaouzie. Bien sûr, une femme peut être élue gouverneure. Toutes les autorités de l'administration publique de Gagaouzie lui sont subordonnées. Il est élu au suffrage universel, égal, direct, secret et libre pour un mandat de quatre ans, sur une base alternative. La même personne est rééligible en tant que gouverneur de la Gagaouzie pour deux mandats consécutifs. Il doit être citoyen de la république de Moldavie, avoir atteint l'âge de 35 ans et connaître la langue gagaouze. De plus, il est nécessairement membre du gouvernement de la Moldavie par décret du président de la République moldave. Enfin, le gouverneur exerce la gestion des activités de l'administration publique gagaouze et est responsable de l'exercice des attributions dont il est investi par la loi; il rend des décisions et des ordonnances exécutoires sur tout le territoire de Gagaouzie.

L'article 97 du Code électoral (2015) énumère les exigences linguistiques, dont la maîtrise du gagazouze, pour être admissible au poste de gouverneur:

Article 97

Conditions requises pour les candidats au poste de gouverneur (Bashkan) de Gagaouzie (Gagaouz Yeri)

1)
Les citoyens de la république de Moldavie qui ont vécu ou ont résidé sur le territoire de la Gagaouzie pendant au moins dix ans, qui ont le droit de vote, qui ont atteint l'âge de 35 ans le jour du scrutin, qui ont fait des études supérieures,
qui parlent la langue gagaouze et qui sont inscrits le jour des élections sur le territoire de la Gagaouzie et répondent aux exigences du présent code.

2) Les candidats au poste de gouverneur de Gagaouzie sont obligés de passer
un test pour déterminer leur maîtrise de la langue gagaouze, lequel est établi par la commission linguistique formée par la Commission électorale centrale de Gagaouzie, qui comprend des spécialistes du Centre de recherche de Gagaouzie, de l'Université d'État de Comrat, du Collège pédagogique de Comrat et d'autres spécialistes dans le domaine de la langue gagaouze.

3) La Commission électorale centrale de Gagaouzie désigne les tests linguistiques pour déterminer dans quelle mesure les candidats au poste de gouverneur de la Gagaouzie parlent couramment la langue gagaouze après avoir reçu des documents des candidats au poste de gouverneur de la Gagaouzie avant leur inscription officielle.

Quant à l'article 111 du Code électoral (2015), il précise que le gouverneur élu doit prêter le serment solennel dans les trois langues officielles de Gagaouzie, soit en gagaouze, en moldave et en russe:

Article 111

Prestation de serment

1)
Après l’annonce du chef élu de la Gagaouzie à l’élection, celui-ci prononce le serment solennel du contenu suivant:

« Je jure solennellement de servir fidèlement le peuple de Gagaouzie, de respecter et de protéger les droits et libertés de l'homme et du citoyen, d'observer strictement la Constitution de la république de Moldavie,  les règlements et les lois de la Gagaouzie, de remplir fidèlement les hautes fonctions qui m’ont été confiées comme gouverneur de la Gagaouzie. »

2) Le serment solennel est prêté dans les trois langues officielles de Gagaouzie, en gagaouze, en moldave et en russe, puis signé et déposé auprès de la Commission électorale centrale de Gagaouzie.

On peut s'attendre à ce que le gouverneur ou la gouverneure sache le gagaouze et le russe, mais le moldave (roumain), c'est moins certain.

- L'adoption des lois

Au point de vue juridique, le moldave (roumain), le russe et le gagaouze sont donc les trois langues officielles de la Gagaouzie. Plusieurs lois énoncent ce principe fondamental. C'est d'abord la Loi sur le fonctionnement des langues sur le territoire de la Gagaouzie (1995):

Article 1er

Les langues officielles de la Gagaouzie sont le moldave, le gagaouze et le russe.

Article 2

Outre les langues officielles sur le territoire de la Gagaouzie, le fonctionnement des langues bulgare, ukrainienne et autres est garanti pour répondre aux besoins nationaux et culturels des groupes ethniques vivant en Gagaouzie.

Notons que les locuteurs du bulgare et de l'ukrainien ont aussi des droits.

Puis l'article 16 du Code de la Gagaouzie (1998) tout en précisant que la langue écrite est basée sur l'alphabet latin en respectant les normes orthographiques de la langue gagaouze:

Article 16

1)
Les langues officielles en Gagaouzie sont le gagaouze, le moldave et le russe.

2) La
langue gagaouze fonctionne sur la base de l'écriture latine et constitue la base de l'identité nationale du peuple gagaouze. La relance, la préservation, le développement et l'élargissement de la sphère d'usage de la langue gagaouze sont les tâches prioritaires des pouvoirs publics de la Gagaouzie.

3) Tout citoyen résidant dans le territoire de Gagaouzie a le droit d'indiquer sur les cartes d'identité le nom, le prénom, le patronyme, dont l'orthographe est déterminée par
les normes orthographiques de la langue gagaouze
.

4) La Gagaouzie reconnaît et garantit des droits égaux à la préservation et au développement des langues et des cultures de toutes les nationalités vivant sur son territoire, et crée des possibilités pour leur libre développement.

Enfin,  l'article 4 de la Loi sur l'élargissement du champ d'application de la langue gagaouze (2018) énonce que la langue gagaouze est l'une des langues officielles de la Gagaouzie et la base de la conscience de soi du peuple gagaouze:

Article 4

Statut de la langue gagaouze

1)
La langue gagaouze est l'une des langues officielles de la Gagaouzie et la base de la conscience de soi du peuple gagaouze.

2) La relance, la préservation, le développement et l'élargissement du domaine d'usage de la langue gagaouze sont les tâches prioritaires des pouvoirs publics de la Gagaouzie.

Les représentants de l’Assemblée populaire utilisent en principe les trois langues officielles, mais dans la pratique le russe est omniprésent à l'écrit, tandis que le gagaouze l'est à l'oral dans les débats parlementaires; le moldave est peu employé. Si les lois sont promulguées dans les trois langues, le texte original est généralement rédigée en russe, puis traduit en gagaouze et en moldave. Dans les faits, seules certaines lois sont traduites en gagaouze et en moldave. Normalement, seule la version russe est disponible.

D'ailleurs, l'article 16 de la Loi sur les actes législatifs (2014) n'énonce comme règles d'ordre linguistique que celles de la langue russe:

Article 16

Langue, orthographe et ponctuation dans la législation

Le texte d'un projet d'acte législatif
doit être élaboré en russe, conformément aux règles suivantes :

a) les phrases sont construites conformément aux règles de grammaire de sorte que les pensées soient présentées de manière correcte, concise, sans permettre une interprétation ambiguë, et devraient être accessibles à tous les sujets intéressés;

b) une seule pensée est exprimée dans une phrase ;

c) des termes adéquats et généralement compris doivent être utilisés;

d) les concepts ne sont pas divulgués au moyen d'une définition ou d'une description, mais au moyen d'un terme approprié ;

e) la terminologie utilisée est employée dans le même sens et a la même forme que dans d'autres actes législatifs; le même terme est utilisé s'il est correct et si son usage répété exclut toute ambiguïté;

f) les néologismes ne sont utilisés que s'ils sont généralement compris;

g) l'emploi de régionalismes, de mots et d'expressions non fonctionnels, idiomatiques, peu utilisés et/ou à double sens est exclu;

h) les cas de tautologie légale sont exclus;

i) les règles d'orthographe et de ponctuation doivent être strictement respectées.

- La responsabilité de l'Assemblée du peuple envers la langue gagaouze

L'article 27 de la Loi sur l'élargissement du champ d'application de la langue gagaouze (2018) impose une responsabilité à l'Assemblée du peuple dans le contrôle sur le respect de la législation à l'égard de la langue gagaouze:

Article 27

Contrôle et responsabilité

1)
L'Assemblée du peuple de Gagaouzie exerce un contrôle sur le respect de la
Loi sur l'élargissement du champ d'application de la langue gagaouze sur le territoire de l'UTA.

2) Le Comité exécutif de Gagaouzie est responsable de la mise en œuvre de la
Loi sur l'élargissement du champ d'application de la langue gagaouze
sur le territoire de Gagaouzie.

3) Conformément au paragraphe 2 du présent article, le Comité exécutif de Gagaouzie élabore et soumet pour approbation à l'Assemblée du peuple de Gagaouzie un «Programme visant à élargir le champ d'application de la langue gagaouze», ainsi que, chaque année, à partir de 2019, jusqu'au 1
er mars de l'année suivant l'année de déclaration présente un rapport sur la mise en œuvre du programme spécifié.

4) L'Assemblée du peuple de Gagaouzie entend chaque année le rapport du Comité exécutif sur la mise en œuvre du «Programme d'extension du champ d'utilisation de la langue gagaouze».

Le Comité exécutif de Gagagouzie (Gagauz Yerin Bakannık Komiteti) est l'organisme exécutif permanent de la Gagaouzie. Il est formé par l'Assemblée du peuple, sur proposition du gouverneur de Gagaouzie, avec le vote de la majorité des députés, approuvant la composition du Comité exécutif de Gagaouzie pendant son mandat. Le Comité exécutif organise ses activités en tenant compte de la Constitution et des lois de la république de Moldavie, ainsi qu'aux lois locales de la Gagaouzie. La composition du Comité exécutif comprend le premier vice-président et les vice-présidents, les chefs des ministères (ou directions) de Gagaouzie et les chefs administratifs des districts de Gagaouzie.

4.3 Les langues de la justice

En Gagaouzie, il n’existe pas de système judiciaire distinct de celui de la république de Moldavie. Comme ailleurs dans le pays, le système judiciaire comprend des tribunaux, des chambres d'appel (cinq chambres d'appel : Chisinau, Balti, Cahul, Comrat et Bender) et la Cour suprême de justice. En cette matière, les trois langues officielles sont admises dans les tribunaux. L'article 9 de la Loi sur le fonctionnement des langues sur le territoire de la Gagaouzie (1995) désigne les langues ainsi:

Article 9

La procédure judiciaire, les affaires civiles et administratives sur le territoire de la Gagaouzie se déroulent
en moldave, en gagaouze ou en russe.

L'article 87 du Code de la Gagaouzie (1998) précise aussi que les justiciables ont le droit de recourir à un interprète pour s'exprimer devant le tribunal dans leur langue maternelle:

Article 87

Toute procédure judiciaire devant la cour et les tribunaux se déroule
en gagaouze, en moldave ou en russe. Les justiciables participant au procès se voient garantir le droit de se familiariser avec tous les éléments du procès et de participer à la procédure judiciaire par l'intermédiaire d'un interprète ainsi que le droit de s'exprimer devant le tribunal dans leur langue maternelle.

Étant donné que la plupart des juges sont moldaves et que la majorité des Gagaouzes ignorent cette langue, l'emploi du russe est fréquent. De plus, puisque le juge n'est pas tenu de connaître la langue russe, le recours à un traducteur est très fréquent pour ne pas dire la règle. Même les traducteurs privilégient le russe comme langue d'arrivée, parce qu'il n'y a pas suffisamment de traducteurs pour le gagaouze. Dans le cas des nationalités bulgares, tsiganes ou autres, les services d'interprétariat sont la seule règle.

4.4 Les langues de l'administration locale

En 2020, la Loi sur le fonctionnement des langues parlées sur le territoire de la république de Moldavie prévoyait plusieurs articles concernant le statut du gagaouze dans l'UTA de Gagaouzie, notamment les articles 3, 6, 7, 8, 9, 13, 14, 15, 16 et 17. Cependant, la Cour constitutionnelle de Chisinau a déclaré la loi inconstitutionnelle par l'Arrêt du 21 janvier 2021. Tous ces articles ne sont donc plus en vigueur.

L'article 3 de la Loi gagaouze sur le fonctionnement des langues sur le territoire de la Gagaouzie (1995) reconnaît aux citoyens de pouvoir communiquer à l'oral comme à l'écrit en gagaouze, en moldave ou en russe:

Article 3

Dans les relations avec les organismes de l'État, les administrations publiques et les organisations publiques, ainsi qu'avec les entreprises, organisations et institutions situées sur le territoire de la Gagaouzie,
la langue de communication écrite et orale est le moldave, le gagaouze ou le russe, selon les conditions locales.

On comprend que le citoyen a le choix de la langue. L'article 23 de la Loi sur l'élargissement du champ d'application de la langue gagaouze (2018) reprend les mêmes exigences sur l'emploi du gagaouze:

Article 23

Le droit du consommateur à l'information en gagaouze

1)
Le consommateur de biens et de services a le droit de recevoir des informations et des services en gagaouze.

2) Les agents économiques œuvrant dans le domaine du commerce assurent la disponibilité des affiches d'information avec les noms de marchandises ou de groupes de marchandises dans les langues officielles établies en Gagaouzie,
avec le texte obligatoire en gagaouze.

Les articles 5, 6, 7 et 8 de la Loi sur le fonctionnement des langues sur le territoire de la Gagaouzie reconnaissent l'emploi des trois langues officielles dans les organismes publics de la Gagaouzie:

Article 5

Dans les localités de Gagaouzie, les langues de travail et les langues de travail de bureau dans les autorités publiques, l'administration publique locale, les organismes publics, les entreprises, les institutions et les organisations sont
le moldave, le gagaouze ou le russe.

Article 6

Les documents des autorités de l'État, de l'administration publique locale et des organismes publics sont rédigés et acceptés
en moldave, en gagaouze ou en russe.

Article 7

Les organismes du pouvoir de l'État, l'administration publique locale, les organismes publics, les entreprises, les institutions et les organisations font appel aux citoyens et aux citoyennes auprès des organismes susmentionnés
en moldave ou en gagaouze ou en russe.

Article 8

La correspondance entre les autorités de l'État, l'administration publique locale et les organismes publics, ainsi qu'entre les entreprises, les institutions et les organisations situées sur le territoire de la Gagaouzie, doit s'effectuer
en moldave ou en gagaouze ou en russe.

Cette Loi sur le fonctionnement des langues sur le territoire de la Gagaouzie impose l'emploi des trois langues officielles pour la désignation des organismes publics et des entreprises ainsi que dans les formulaires, les tableaux indicateurs, etc.:

Les langues dans les noms et les informations

Article 13


Les localités ou autres objets géographiques sur le territoire de la Gagaouzie n'ont qu'un seul nom officiel, moldave ou gagaouze ou autrement, conformément aux traditions historiques de la région.

Article 14

Les noms des autorités de l'État, de l'administration publique locale, des entreprises, des institutions, des organisations et de leurs subdivisions sont écrits dans
les langues moldave, gagaouze et russe selon un ordre séquentiel.

Article 15

Les formulaires officiels, les textes des sceaux sont rédigés
en moldave, en gagaouze et en russe. Les tableaux avec les noms des autorités nationales, de l'administration publique locale et des organismes publics, des unités économiques, commerciales, culturelles, etc., des indicateurs de places, des rues, des ruelles, des villes, des villages, etc., sont présentés en moldave, en gagaouze et en russe. Les textes sont situés à gauche (en haut) en gagaouze, au centre (en bas) en moldave, à droite (en bas) en russe. Les textes d'affiches, d'annonces publiques, d'informations visuelles, etc., sont écrits en moldave, en gagaouze ou en russe. Les noms (étiquettes) des marchandises, les instructions pour le commerce et la production des marchandises sont présentés de la même manière.

Les articles 21 et 22 de la Loi sur l'élargissement du champ d'application de la langue gagaouze (2018) sont davantage précis sur ces mêmes questions:

Article 21

Langue des informations

Les enseignes, les panneaux, les noms spécifiques des entreprises et la publicité extérieure placés dans les lieux publics, y compris à des fins de campagne politique, doivent être présentés
dans les langues officielles reconnues en Gagaouzie, avec le texte obligatoire en gagaouze.

Article 22

Langue des sceaux, des timbres et du papier à en-tête

1)
Les formulaires officiels, les textes des sceaux doivent être rédigés
dans les langues moldave, gagaouze et russe.

2) Les tableaux avec les noms des autorités de l'État, des autorités de l'administration publique locale et des organismes publics, des unités économiques, commerciales, culturelles, etc., les panneaux des places, des rues, des ruelles, des villes, des villages, etc., doivent être présentés
en moldave, en gagaouze et en russe
. Les textes sont situés à gauche (en haut) en gagaouze, au centre (en bas) en moldave, à droite (en bas) en russe.

En vertu de l'article 24 de la Loi sur l'élargissement du champ d'application de la langue gagaouze, la langue de travail des organismes publics de la Gagaouzie doit être le gagaouze, mais il peut être nécessaire de recourir à une autre langue, le russe en l'occurrence:

Article 24

Langue de travail des réunions

1)
Le gagaouze est la langue de travail des réunions officielles, des sessions et des conférences de travail de l'Assemblée du peuple de Gagaouzie, du Comité exécutif de Gagaouzie, des conseils locaux et municipaux. Si un organisme juge nécessaire d'employer une autre langue pendant la réunion, il doit assurer la traduction vers la langue gagaouze, et lors de la tenue de la réunion en gagaouze, il assure également la traduction dans les autres langues officielles de la Gagaouzie.

2) Au moins 20 % des points inscrits à l'ordre du jour des réunions tenues par les pouvoirs publics locaux doivent être présentés en gagaouze. D'ici 2021, ce chiffre doit atteindre 50 %.

L'article 25 de la même loi exige que les responsables des autorités publiques locales s'expriment dans les médias de Gagaouzie principalement en gagaouze:

Article 25

Exigences pour les fonctionnaires de Gagaouzie

Le gouverneur (Bashkan) de Gagaouzie (Gagaouz Yeri), les membres du Comité exécutif de Gagaouzie, les députés de l'Assemblée du peuple de Gagaouzie, occupant des postes de responsabilité, et les responsables des autorités publiques locales s'expriment dans les médias de Gagaouzie
principalement en gagaouze.

Selon l'article 17 de la Loi sur l'élargissement du champ d'application de la langue gagaouze, la langue principale des événements officiels et culturels organisés dans les localités de Gagaouzie doit être le gagaouze dans une proportion d'au moins 60%:

Article 17

Langue des événements officiels et culturels

1)
La langue principale des événements officiels et culturels (Journée de la Gagaouzie, Journée de la langue gagaouze, l'Hederlez, le
Kasym
et autres) organisés dans les localités de Gagaouzie est le gagaouze.

2) L'
emploi de la langue gagaouze lors de la mise en œuvre de ces événements doit être d'
au moins 60%.

Cet article 5 de la Loi sur l'élargissement du champ d'application de la langue gagaouze impose les normes de la langue littéraire gagaouze dans tout usage officiel:

Article 5

Usage officiel de la langue et normes de la langue littéraire gagaouze

1)
L’usage officiel de la langue est l’emploi de la langue par le gouvernement et les organismes subordonnés, les autorités publiques locales et les institutions autorisées à effectuer des tâches d’administration publique, les réunions et les personnes qui rédigent les documents, les sites Web, les panneaux, les affiches et les messages. L’usage officiel de la langue doit être conforme
aux normes de la langue littéraire gagaouze.

2) La norme de la langue littéraire désigne un système de normes et de recommandations orthographiques, grammaticales et lexicales, dont l'application est établie par les règles d'orthographe et de ponctuation de la langue gagaouze en vigueur, approuvées par le Centre de recherche scientifique de l'UTA de Gagaouzie nommé d'après A. M.V. Marunevich.

Maria Vasilievna Marunevich (1937-2004) est une personnalité exceptionnelle dans l'histoire du peuple gagaouze : elle fut une érudite, une ethnographe, une enseignante, une personnalité publique et politique gagaouze. En 2010, la Direction générale de l'éducation de Gagaouzie a demandé au Comité exécutif de Gagaouzie de donner le nom du Centre de recherche scientifique de l'UTA en l'honneur de cette femme exceptionnelle.

Le gagaouze reste la langue de communication orale la plus utilisée, avant le russe et le roumain (moldave). Entre ethnies différentes, les citoyens utilisent généralement le russe plutôt que le roumain ou le gagaouze). Le russe demeure très employé dans les documents écrits, aux dépens du gagaouze et du roumain. Dans les institutions et dans l'administration (lors de réunions, assemblées, réunions, etc.), cette langue prédomine. Les fonctionnaires gagaouzes emploient généralement le russe dans toutes leurs activités, mais ils reçoivent en roumain tous les documents relevant de Chisinau, c'est-à-dire de la république de Moldavie et de ses ministères. Par la suite, ces fonctionnaires font appel à des traducteurs pour traduire les mêmes documents, puis ils répondent toujours en russe.  Les résultats montrent qu'en Gagaouzie, les documents officiels, les publications imprimées et les sites Web officiels sont uniquement en russe. Le système de passeport national en Moldavie ne permet pas l'orthographe des noms en gagaouze.

Dans les institutions médicales de Gagaouzie, plusieurs langues sont employées dans la communication avec les patients. Les employés des services médicaux de la région sont confrontés à une connaissance insuffisante de la langue gagaouze et de la langue roumaine, une situation qui les désavantage professionnellement. Beaucoup d'entre eux ont déjà étudié le russe, mais leurs ressources linguistiques sont insuffisantes pour expliquer, par exemple, les symptômes de la maladie ou pour prescrire un traitement en roumain ou en gagaouze. Certains médecins de Gagaouzie envisagent leur avenir professionnel en Russie. Quant aux infirmières, bien qu'elles s'expriment très bien en gagaouze, elles n'ont aucune connaissance de la terminologie médicale en turc: les organes vitaux, tels que le cœur, les poumons, etc., sont nommés de façon différente qu'en turc.

Ainsi, en raison des barrières linguistiques et des difficultés du processus d'accréditation en Turquie, les médecins gagaouzes préfèrent aller chercher un emploi en Russie ou dans d'autres pays européens. Cette entreprise de migration affecte non seulement le système de santé, mais en même temps elle peut être décrite comme une incitation à apprendre une autre langue ou plus, indispensable comme outils de travail et qui offre la possibilité d'une meilleure carrière. De plus, le manque de personnel médical se fait également sentir dans les institutions médicales hors de la Gagaouzie, et la migration influence dans d'autres régions la restructuration du répertoire linguistique, déterminant l'intérêt pour l'étude d'autres langues.

- Les problèmes de l'affichage

La législation prescrit que les noms des localités doivent être présentés en deux langues, en roumain et en gagaouze, par exemple Komrat/Comrat. En général, l'affichage public est en gagaouze ou bilingue (gagaouze-moldave ou gagaouze-russe). Les panneaux de signalisation en Gagaouzie sont principalement en roumain et les noms des places et des rues n'ont pas changé depuis l'époque de l'Union soviétique; il y a encore des rues Lénine et des rues Karl-Marx. Dans les commerces, on trouve de tout: de l'unilinguisme roumain, gagaouze, russe ou anglais (rare).

 

Manifestement, l'article 21 (voir le texte plus haut) de la Loi sur l'élargissement du champ d'application de la langue gagaouze n'est pas encore en vigueur, car la visibilité du russe est importante à un point tel qu'on peut croire que la Gagaouzie est une «province russe». De façon générale, les panneaux routiers portant des inscriptions, les indications de direction, les plaques ou façades d'institutions ou les noms de localités sont le plus souvent trilingues (gagaouze-roumain-russe), mais pas toujours. Parfois,m pour une question d'espace ou de moyens, il n'y a que le russe (que tout le monde comprend) ou seulement deux langues (russe et gagaouze, ou roumain et gagaouze). Pour les affiches commerciales et les devantures des commerces, chacun fait ce qu'il veut avec le résultat qu'on y trouve du russe, du roumain, de l'anglais ou du turc de Turquie.

- Les instances régulatrices

Au sujet de la langue roumaine/moldave, il existe à la fois une complicité et une rivalité entre l'Académie roumaine ("Academia Română") et l'Académie des sciences de Moldavie ("Academia de Ştiinţe a Moldovei"), section linguistique, qui sont les deux instances régulatrices de cette langue. L'Académie roumaine s'en tient à sa dernière réforme de 1993 (retour partiel à la graphie des années 1912-1953), tandis que l'Académie des sciences de Moldavie, section linguistique, s'en tient à sa dernière réforme de 1989 (retour à l'alphabet latin) conforme aux normes de l'Académie roumaine des années 1953-1993. Certains pro-Russes voudraient revenir en Moldavie à l'alphabet cyrillique roumain (en vigueur jusqu'en 1867), mais la majorité préfère l'alphabet cyrillique russe, comme c'est aussi le cas en Transnistrie où il est officiel.

En Gagaouzie, l'instance régulatrice pour le gagaouze est la «Fondation Mikail Çakir de Comrat». Rappelons que Mikail Çakir (Michael Ceachir en roumain) était un pope lettré qui a normalisé la langue gagaouze dans les années 1930; il a rédigé aussi des dictionnaires gagaouze-russe et gagaouze-roumain.

4.4 Les langues de l'éducation

Le système scolaire de la Gagaouzie relève de la république de Moldavie; il est sous la juridiction du ministère de l'Éducation par l'intermédiaire du Département gagaouze de l'éducation et des sports ("Upravleniye obrazovaniya i sporta Gagauzii"), dont le siège est à Comrat. Bien que les écoles utilisent les programmes scolaires moldaves, elles sont «adaptées à la situation gagaouze». Rappelons que, pendant de nombreuses décennies, la langue gagaouze fut réservée à l’usage privé; elle n’a pas été enseignée avant 1957.

Aujourd'hui, le système d'éducation gagaouze accueille au total quelque 32 000 élèves répartis dans 136 établissements qui vont de la maternelle à l'université: 66 établissements préscolaires, trois écoles primaires (comprenant les classes de la 1re à la 4e année), 11 gymnases (de la 5e à la 8e année), 26 écoles secondaires complètes, dont une où l'instruction est donnée en roumain, et 25 où elle est donnée en russe. Il existe aussi 14 lycées, la plupart de langue russe, trois écoles d'EFP ("Educația și formarea profesională") appelées aussi «collèges de formation à la production» à l'exemple des fermes-écoles, ainsi que l'Université d'État de Comrat et la nouvelle Université nationale de Comrat.

Il faut considérer qu'il existe trois systèmes parallèles: un en roumain, un autre en russe et un troisième en gagaouze. En somme, les trois communautés bénéficient d'établissements d'enseignement distincts.

- La législation scolaire

Comme c'est le cas en Moldavie, les citoyens gagaouzes ont le droit de choisir légalement pour leurs enfants la langue d'enseignement à tous les niveaux et toutes les étapes de l'enseignement. L'article 11 de la Loi sur le fonctionnement des langues sur le territoire de la Gagaouzie (1995) offre les langues officielles comme langues d'enseignement ainsi que celle des citoyens d'autres nationalités:

La langue dans les domaines de l'éducation publique, de la  science et de la culture

Article 11

L'éducation et la formation dans les établissements préscolaires, les établissements d'enseignement secondaire de Gagaouzie sont offertes en moldave, en gagaouzie ou en russe. Les citoyens d'autres nationalités vivant sur le territoire de la Gagaouzie ont droit à l'éducation et à la formation dans leur langue maternelle.

En pratique, les seules autres langues minoritaires enseignées sont le bulgare et l'ukrainien.

L'article 38 du Code de la Gagaouzie (1998) accorde le droit aux citoyens de bénéficier d'un enseignement préscolaire et de recevoir un enseignement secondaire supérieur obligatoire:  

Article 38

1)
Les citoyens ont droit à l'enseignement public gratuit.

2) Les citoyens ont le droit
à l'éducation préscolaire, à recevoir l'enseignement secondaire supérieur obligatoire et la possibilité d'obtenir un lycée et un enseignement professionnel. Quiconque a le droit d'obtenir un enseignement supérieur sur une base concurrentielle en fonction de ses capacités.

3) En Gagaouzie, le système d'éducation national est créé afin qu'il ne porte pas atteinte aux droits et aux intérêts légitimes des citoyens. 

Mais l'article 7 de la Loi sur l'éducation (2016) est plus précis, car il accorde le droit de recevoir un enseignement préscolaire, primaire, secondaire général, secondaire et professionnel spécialisé, un enseignement supérieur, ainsi qu'un enseignement post-universitaire dans l'une des langues fonctionnant sur le territoire de l'Unité territoriale autonome de Gagaouzie. De plus, cet article précise bien le fonctionnement du système d'éducation en Gagaouzie:

Article 7

Les langues dans le domaine de l'éducation

1) Le droit de choisir la langue d'enseignement et d'éducation à tous les niveaux et toutes les étapes de l'enseignement dans l'Unité territoriale autonome de Gagaouzie est garanti, conformément aux actes normatifs en vigueur de la république de Moldavie et de l'Unité territoriale autonome de Gagaouzie.

2) Dans l'Unité territoriale autonome de Gagaouzie, la procédure pédagogique dans le système d'éducation se déroule dans les langues officielles fonctionnant sur le territoire de l'Unité territoriale autonome de Gagaouzie.

3) Les citoyens de la république de Moldavie résidant dans l'Unité territoriale autonome de Gagaouzie ont le droit de recevoir un enseignement préscolaire, primaire, secondaire général, secondaire et professionnel spécialisé, un enseignement supérieur, ainsi qu'un enseignement post-universitaire dans l'une des langues fonctionnant sur le territoire de l'Unité territoriale autonome de Gagaouzie.

4) L'Unité territoriale autonome de Gagaouzie fournit nécessairement les conditions nécessaires à l'étude de la langue gagaouze dans les établissements d'enseignement, notamment par une augmentation progressive des disciplines secondaires étudiées en langue gagaouze et par la création d'établissements d'enseignement avec la langue d'enseignement gagaouze.

5) L'étude de la langue gagaouze sur le territoire de l'Unité territoriale autonome de Gagaouzie est obligatoire à tous les niveaux d'enseignement. Pour les étudiants d'une nationalité différente de celle des Gagaouzes, le droit d'étudier leur langue maternelle est garanti dans les limites des capacités d'un établissement d'enseignement.

6)La préservation, le développement et l'élargissement du domaine d'emploi de la langue gagaouze dans les établissements d'enseignement sont les tâches prioritaires des organismes de l'administration publique de l'Unité territoriale autonome de Gagaouzie.

7) L'étude de la langue officielle de la république de Moldavie est obligatoire dans tous les établissements d'enseignement de l'Unité territoriale autonome de Gagaouzie à tous les niveaux d'enseignement.

Rappelons qu'il existe donc trois types d'écoles en Gagaouzie, en fonction de l'une des trois langues officielles d'enseignement.

- L'enseignement préscolaire

Les écoles maternelles existent en gagaouze, en russe et en roumain. L'article 8 de la Loi sur l'élargissement du champ d'application de la langue gagaouze énonce les mesures pour l'enseignement de la langue gagaouze dans les écoles gagaouzes:

Article 8

Création d'un environnement linguistique dans les établissements d'enseignement préscolaire

1)
Dans les établissements d'enseignement préscolaire, les gestionnaires doivent créer un environnement linguistique grâce à la communication du personnel avec les enfants en gagaouze tout au long de la journée. Les cours se déroulent dans la langue d'enseignement en vigueur. En dehors des cours, la communication entre les enfants, avec les éducateurs et avec les parents se fait en langue gagaouze.

2) La matière «Beaux-arts» dans les établissements d'enseignement préscolaire est enseignée
en gagaouze.

3) Afin de stimuler et de former une image positive de la langue gagaouze, les établissements d'enseignement préscolaire diffusent des dessins animés en gagaouze et s'entraînent à lire des contes de fées en gagaouze lors de la préparation des enfants à la sieste.

4) Le scénario et le répertoire des matinées pour enfants et des divers événements doivent contenir
au moins 50 % du matériel en langue gagaouze avec l'inclusion de danses et de chants folkloriques gagaouzes.

5) À la fin des études dans les établissements d'enseignement préscolaire, l'échelle des compétences linguistiques de l'enfant en matière d'élocution doit être comblée. Ces données sont l'un des indicateurs de l'efficacité de l'activité de l'institution préscolaire dans la mise en place de l'environnement de communication en gagaouze.

6) L'étude de la matière «Beaux-arts» en langue gagaouze dans les écoles maternelles est introduite par étapes, à partir de l'année scolaire 2019-2020.

Cependant, la proportion des enfants en Gagaouzie qui fréquentent des écoles russes est de l'ordre de plus de 90%, contre 3% pour les écoles roumaines.

Dans les écoles russes, tous les cours sont offerts en russe, alors que le roumain est enseigné comme langue seconde. Dans les rares écoles roumaines, le russe est enseigné comme langue seconde. La nostalgie de l’Union soviétique est forte dans la région gagaouze. Alors que la bibliothèque principale de Comrat porte le nom de «Mustafa Kemal Ataturk», le fondateur de la Turquie moderne, la rue principale de la ville porte encore le nom de «Lénine» ("ул. Ленина").

- Les écoles gagaouzes

Dans les écoles gagaouzes, c'est le gagaouze qui sert en principe de langue d'enseignement, mais pas pour toutes les disciplines. Ainsi, il n'y a aucune école où toutes les matières sont enseignées dans cette langue. Généralement, il n'y a que trois heures par semaine de langue et de littérature gagaouzes. Les matières «Culture et traditions du peuple gagaouze» dans les classes 1 à 4 et «Histoire de la Gagaouzie et du peuple gagaouze» dans les classes 5 à 12 sont données en gagaouze.

Les dirigeants des établissements d'enseignement de Gagaouzie, quel que soit leur type, sont tenus d'encourager et de faciliter l'usage de la langue gagaouze et, en dehors de la salle de classe, pendant que les élèves sont en période de cours dans les établissements d'enseignement, afin de créer les conditions permettant aux élèves de communiquer entre eux, ainsi qu’avec les enseignants pour communiquer en gagaouze. Il s'agit évidemment d'un vœu pieux!

La quasi-totalité des écoles gagaouzes enseignement le russe comme langue seconde, rarement le roumain. Au total, il n'existe que trois écoles en Gagaouzie avec un enseignement en roumain : à Comrat, à Vulcnești et dans le village de Chioselia Rusă. Dans deux d'entre eux, le nombre de ceux qui souhaitent étudier en roumain est supérieur à la capacité de ces établissements d'enseignement. Bref, moins de 10 % des Gagapouzes apprennent la langue officielle de leur pays. Malheureusement, en Gagaouzie, il n'y a pas d'environnement dans lequel les élèves pourraient s'exprimer en roumain. D'ailleurs, les meilleurs étudiants poursuivent leurs études en Roumanie avec une bourse de l’État roumain. Bien qu'il ait été établi comme langue écrite en 1957, l'écriture gagaouze n'a été instaurée dans le programme scolaire qu'en 1959.

De leur côté, les autorités gagaouzes reconnaissent qu'un effort devrait être fait pour améliorer l'enseignement de la langue roumaine. L'allemand est même enseigné dans certaines classes à la place du roumain. En réalité, il existe des lacunes importantes sur le plan de la langue d'enseignement dans la mesure où la plupart des écoles secondaires enseignent encore en russe. Non seulement la Gagaouzie souffre d'une grave pénurie d'enseignants de langue roumaine, mais la qualité des enseignants en général laisse grandement à désirer.  Par exemple, même si la situation s'est améliorée, le pourcentage d'enseignants titulaires de diplômes d'études supérieures est plus faible dans les localités gagaouzes que dans tout le reste de la Moldavie. Beaucoup d'enseignants ne détiennent encore qu'un diplôme d'enseignement secondaire. Les recherches ont également démontré qu'il n'y a pas de volonté ou de tentative sérieuse d'introduire la langue gagaouze comme langue générale d'enseignement, la concurrence étant encore trop grande avec le russe. Bref, le gagaouze n'a aucune chance de faire contrepoids au russe dans l'UTA de Gagaouzie.

Dans les localités de résidence compacte des Bulgares et des Ukrainiens, la discipline «Histoire, culture et traditions» du peuple correspondant est enseignée dans la langue de ce peuple; la matière «Histoire de la terre natale» est enseignée dans la langue de ce peuple ou dans la langue d'enseignement.

- Les universités

Dans les universités, c'est surtout le russe qui sert de langue d'enseignement, mais les cours peuvent parfois se donner en roumain, voire en gagaouze (avec l'alphabet latin) si le professeur maîtrise cette langue, ce qui est rare. On compte aussi un lycée privé turco-gagaouze où l'instruction est offerte en anglais, en gagaouze et en turc.

L'article 12 de la Loi sur l'élargissement du champ d'application de la langue gagaouze traite de la formation du personnel enseignant.

Article 12

Formation du personnel pour l'enseignement des matières en langue gagaouze

1)
L'Université d'État du Comrat (ci-après - l'UEC) crée des
conditions appropriées pour un large usage de la langue gagaouze, encourage son emploi pendant la période de séjour des étudiants dans un établissement d'enseignement pour qu'ils communiquent entre eux dans cette langue et avec les enseignants .

2) L'UEC assure
la traduction en gagaouze
du matériel didactique sur les méthodes d'enseignement des disciplines «Éducation technologique» et «Beaux-arts» à l'école primaire.

3) L'UEC assure la traduction en gagaouze de matériel didactique sur la méthodologie d'enseignement de la discipline «Beaux-arts» pour l'enseignement préscolaire.

4) Pour traduire le matériel didactique, l'UEC crée des groupes de travail, qui comprennent des spécialistes et des enseignants de l'UEC qui ont une expérience pratique dans l'enseignement des matières «Éducation technologique» et «Beaux-arts» à l'école primaire.

5) Pour traduire le matériel didactique pour les établissements préscolaires sur l'enseignement de la discipline «Beaux-arts», l'UEC crée un groupe de travail, qui comprend des spécialistes de l'UEC et des enseignants du préscolaire ayant une expérience pratique dans l'enseignement de la matière.

En 1991, l'enseignement de la langue et de la littérature gagaouze a été transféré à la Faculté de culture nationale de l'Université d'État de Comrat. Le but de la faculté était de soutenir les langues et les cultures nationales dans une région multiethnique, telle que la Gagaouzie, pour former des spécialistes capables d'entreprendre des communications interculturelles dans le domaine professionnel, principalement dans le milieu scolaire. Cette faculté forme des éducateurs préscolaires, des enseignants du primaire, des enseignants de langue et de littérature gagaouzes, de langue et de littérature bulgares, de langue et de littérature roumaines, de langue et de littérature anglaises, de langue et de littérature allemandes, ainsi que des professeurs de chant et des spécialistes pour les institutions à vocation sociale. Au cours de l'année scolaire 2019-2020, on comptait 497 étudiants ayant étudié à cette faculté.

En somme, la langue gagaouze est apprise dans les jardins d'enfants, les écoles, les collèges ou lycées, ainsi que dans toutes les facultés de l'Université d'État de Comrat. Cependant, la langue russe constitue une solide concurrence au gagaouze dans la vie quotidienne. Selon une enquête menée par le ministère gagaouze de l'Éducation auprès des étudiants (N = 12 409) de 41 établissements d'enseignement secondaire en février-mars 2020, quelque 70% des familles d'écoliers parlent la langue gagaouze à la maison, mais seulement 54,4% des élèves de première année le parlent. Ces données indiquent que les enfants n'ont pas développé la capacité de communiquer en famille dans leur langue maternelle, ce qui relève de la responsabilité des parents qui passent au russe pour parler à leurs enfants.

Bien que l'écrasante majorité des répondants (73 %) reconnaissent l'importance d'apprendre la langue gagaouze dans le cadre de leur formation scolaire, seulement la moitié d'entre eux préfèrent communiquer avec leurs camarades de classe et avec leurs amis dans la langue gagaouze. Beaucoup de parents croient que la maîtrise de la langue gagaouze ne pourra pas contribuer à un bon emploi et à la construction d'une carrière pour leurs enfants. Ces faits illustrent le déclin de l'importance de la langue gagaouze comme moyen de communication pour la jeune génération.

En fait, les résultats de ces études nous permettent de constater que, parmi les facteurs qui réduisent la motivation des écoliers à apprendre une langue, les enseignants considèrent que les difficultés sont causées non seulement par des facteurs linguistiques, mais aussi par des programmes surchargés, des manuels de classe désuets, ce qui qui ne contribue guère à susciter de l'intérêt pour la langue gagaopuze. Tout cela témoigne de la nécessité de développer, sur une base scientifique et pratique, de nouvelles approches de l'enseignement de la langue gagaouze, dont le choix du contenu et des méthodes de son étude, en tenant compte des acquis de la didactique moderne, ainsi que de la formation des enseignants de la langue gagaouze.

Les problèmes propres aux écoles de Gagaouzie seraient les suivants :

- des bâtiments vétustes et mal entretenus, la dernière école ayant été construite en 1988; la construction de certaines écoles n'a jamais été terminée et aucune d'elles n'est réellement entretenue;
- une grave pénurie de manuels scolaires, notamment en langue russe.

La Russie a bien proposé de fournir des manuels, mais les programmes moldaves ne sont pas les mêmes qu'en Russie. De plus, les manuels en gagaouze (et en bulgare) coûtent de trois à quatre fois plus cher que ceux rédigés en russe ou en roumain et, dans certaines classes, plusieurs enfants doivent partager un seul manuel. Les examens extérieurs (notamment au niveau de la 9e année) se déroulent en russe.

De son côté, la Turquie a également proposé ses manuels, mais les Gagaouzes se sont montrés très réticents à les employer, car le turc de Turquie s'est révélé trop différent du turc gagaouze. De plus, l'histoire de la Turquie n'est pas celle de la Gagaouzie ni de la Moldavie, ce qui rend inutiles les manuels d'histoire turcs, tandis que l'omniprésence des photos de Mustafa Kémal Atatürk dans tous les manuels ainsi que la prépondérance de l'idéologie musulmane ont pour effet d'irriter passablement les Gagaouzes. 

Aujourd'hui, le système d'éducation de Gagaouzie doit faire face à de nombreux problèmes d'ordre pédagogique. Il faut promouvoir la langue maternelle gagaouze et, en même temps, préserver les langues des minorités nationales résidant sur le territoire de la Gagaouzie qui sont enseignées dans les établissements d'enseignement, notamment le roumain, le bulgare et l'ukrainien, le tout sans oublier la langue officielle et la langue russe, qui est parlée par la plupart de la population gagaouze. Il faut aussi prendre en compte le souhait des parents que leurs enfants connaissent deux langues étrangères (russe, anglais, français ou allemand). Le budget de l'Éducation relève de Chisinau, mais Comrat peut lever des impôts additionnels pour offrir des services pédagogiques supplémentaires. Bref, les budgets ne peuvent pas correspondre au grand nombre d'objectifs à atteindre!

4.5 Les langues des médias

La Gagaouzie est une région autonome abritant un peuple chrétien orthodoxe d'origine turque dans le sud de la Moldavie, où les citoyens ont un accès limité aux médias autres que les médias pro-russes. Dans ce contexte, le portail d'information Gagauz Media est largement reconnu comme le seul média véritablement indépendant de l'autonomie gagaouze. Gagauz Media produit du contenu en russe et en gagaouze, y compris des informations sur les événements politiques, économiques, sociaux et culturels importants pour les Gagaouzes. Plusieurs émissions thématiques, telles que «Gagaouzes à l'étranger» racontant des histoires de Gagaouzes vivant et travaillant en Europe et au-delà, visent à démystifier les prétendus mythes propagandistes sur l'Union européenne. Ce média s'efforce d'atteindre au moins 90 % de la population de Gagaouzie en Moldavie, les Gagaouzes de la région d'Odessa en Ukraine, ainsi que les consommateurs de contenu médiatique en russe dans toute la Moldavie.

- Les médias écrits

En Gagaouzie, on compte quelques journaux en gagaouze et deux magazines (Sabaa yıldızı et Gunescik); deux autres magazines (Gagouz et Kirlangac) sont publiés par les Gagaouzes de Chisinau en langue gagaouze. L'Ana Sözü est le plus grand journal local de Gagaouzie; c'est aussi le seul journal local encore entièrement écrit en gagaouze, et le premier journal de quelque nature que ce soit publié en gagaouze.

Il existe divers journaux publiés dans l'Unité territoriale autonome de Gagaouzie, notamment les suivants: Açık Göz, Gagauz Yeri, Gagauz Sesi, Halk Birliği, Novıy Vzgled, Vesti, Gagauzii et Znamea.

- Les médias électroniques

Il n'existe pas beaucoup de contraintes juridiques concernant les médias électroniques, mais il subsiste néanmoins deux articles de loi à ce sujet. L'article 10 de la Loi sur la diffusion et de la radiotélévision (2016) incite les distributeurs à diffuser les émissions dans les langues officielles, en gagaouze, en moldave et en russe, mais proportionnellement à la taille de la composition ethnique de la population:

Article 10

Protection du patrimoine national linguistique et culturel

1)
Lors de l'élaboration des propositions pour des émissions retransmises, les distributeurs doivent diffuser dans les langues officielles de l'UTA de Gagaouzie
en gagaouze, en moldave et en russe proportionnellement à la taille de la composition ethnique de la population.

2) La taille proportionnelle de la composition ethnique de la population est déterminée selon les données statistiques par l'organisme autorisé du Comité exécutif de Gagaouzie sur la base des résultats du dernier recensement de la population de l'UTA de Gagaouzie.

L'article 16 de la Loi sur l'élargissement du champ d'application de la langue gagaouze (2018) oblige la Société de radiodiffusion à produire des émissions en gagaouze dans une proportion d'au moins 75% à partir de 2020:

Article 16

Langue gagaouze dans la société de radiodiffusion publique "Gagauziya Radio Televizionu"

1)
Les émissions télévisées et radiophoniques d'information, de culture, d'éducation et de divertissement de la Société de radiodiffusion publique «Gagauziya Radio Televizionu» (ci-après : la Société) sont produites dans un volume d'au moins 60%
en gagaouze et, d'ici 2020, le volume de ces diffusions sera d'au moins 75 %.

2) La Société organise des jeux télévisés et radiophoniques en gagaouze, ainsi que des jeux-questionnaires et des concours de vulgarisation
de la langue et de la littérature gagaouze.

3) La Société produit et diffuse régulièrement des publicités à la radio et à la télévision visant à vulgariser
la langue gagaouze et son application dans diverses sphères de la vie publique.

4) La publicité à caractère social est diffusée principalement
en gagaouze.


5) Afin de vulgariser la production et le placement de publicités commerciales en gagaouze, la Société propose des tarifs spéciaux 50 % inférieurs aux tarifs actuels.

6) Le Conseil de surveillance de la Société surveille en permanence la mise en œuvre des dispositions de la présente loi et soumet chaque année un rapport sur le respect de la législation linguistique par la Société.

7) Les textes d'annonces, les annonces publiques, les informations audios et vidéos, etc., à la télévision et à la radio publiques sont diffusées dans les langues officielles de la Gagaouzie, sous réserve de la disponibilité d'un texte en gagaouze.

8) La Société assure la traduction de films d'animation
en gagaouze.


9) La traduction des films d'animation est financée sur les ressources du Fonds.

- La pratique en matière de diffusion

Les Gagaouzes disposent de leurs propres radios et télévisions. L'accord signé avec les autorités moldaves en 1995 permet aux Gagaouzes de diffuser deux heures d’émissions par jour sur le canal de la radio d'État. Quant à la télévision, suite à un accord avec la télévision moldave, les Gagaouzes diffusent aujourd’hui douze heures d'émissions par semaine (en russe, en gagaouze, en bulgare et en roumain) sur le canal moldave. Après un nouvel accord avec les autorités moldaves, deux canaux ont été réservés aux Gagaouzes : l'un est utilisé exclusivement par Comrat, l'autre sert à diffuser la télévision publique turque, condition posée par Ankara à la fourniture de matériel (émetteurs et équipements divers). Mais de façon générale, ce sont toujours les chaînes russes qui remportent le plus de succès ou, faute de moyens techniques pour les capter, la chaîne ukrainienne.

La "Gagauziya Radio Televizionu" (GRT) est le radiodiffuseur de service public gagaouze. Il diffuse ses émissions en trois langues: en gagaouze, en russe et en moldave. La GRT est la seule société de radiodiffusion en langue gagaouze.  Elle adopte sa propre politique en la matière, dont la mission distincte est d'aider au développement de l'identité commune des Gagaouzes, à la fois par la langue et la culture, notamment au moyen de l'usage de la langue gagaouze par les langues des groupes ethniques vivant sur le territoire de l'UTA de Gagaouzie. Des émissions télévisées de divers genres aident les stations de radio à s'unir, à se renforcer et à progresser. La GRT possède des antennes de diffusion: TV 56 – Caltay, TV 49 – Çadır, TV 24 – Valkaneş, TV 47 – Kıpçak, TV 29 – Baurçu, TV 33 – Çöşmä küüyü et TV 49 – Komrat. Pour la radio, il s'agit des stations suivantes: Komrat – 102.1 FM, Çadır – 104.6 FM et Valkaneş – 103.6 FM.

Dans le cadre du protocole de coopération entre la radio turque TRT et la société de télévision, la société de radiodiffusion GRT diffuse depuis 2018 des émissions de télé et radio en provenance de Türksat de Turquie. Dans le cadre du «Projet pour faire avancer le pluralisme dans les médias», la société russe Evropa Soveti accompagne la GRT dans l'actualisation de la stratégie d'avancement de l'entreprise de diffusion.

Bien sûr, la société moldave Teleradio Moldova, en plus des émissions dans la langue officielle (65 % du temps d’antenne), des émissions dans les langues des minorités nationales sont déjà diffusés depuis une vingtaine d'années, dont certaines sont en gagaouze; d'autres sont en ukrainien, en bulgare, en russe, en yiddish et en romani.

- La loi moldave anti-propagande

Une pomme de discorde est apparue non seulement entre la Russie et la Moldavie, mais aussi entre les autorités moldaves et celles de la Gagaouzie. En 2017, la Moldavie adoptait une loi anti-propagande qui n'entraînait pas la fermeture des chaînes de télévision russes dans le pays, mais seulement l'interdiction de la retransmission des bulletins d'information et d'émissions d'information en provenance de la Russie.

Le Code de l'audiovisuel se trouvait complété par un nouveau paragraphe 9.2.1, qui énonce que, sur le territoire de la république de Moldavie, il ne sera autorisé que la transmission d'émissions de télévision et de radio à contenu informatif, analytique, militaire et politique, lesquelles émissions doivent être produites par les États membres de l'Union européenne, les États-Unis et le Canada, ainsi que dans les États qui ont ratifié la Convention européenne sur la télévision transfrontière, ce qui exclut la Russie puisqu'elle n'a jamais ratifié ladite convention. Étant donné que plusieurs ambiguïtés sont apparues dans le processus de connexion des services d'émissions audiovisuelles et des diffusions de services de programmes conformément aux nouvelles règles audiovisuelles, le Conseil de coordination de l'audiovisuel a dû publier la liste des États membres de l'Union européenne et des États qui ont ratifié la Convention européenne de télévision. Voici l'article du paragraphe 9.2.1 du Code:

Article 9

Réception gratuite des services des programmes

2.1) Afin d'assurer la sécurité de l'information de l'État, les radiodiffuseurs et les distributeurs de services sont autorisés à diffuser des émissions de télévision et de radio à contenu informatif, informatif-analytique, militaire et politique, qui sont produites par les États membres de l'Union européenne ou par les États-Unis ou par le Canada, ainsi que par les États qui ont ratifié la Convention européenne sur la télévision transfrontière.

Cependant, la Gagaouzie a toujours fait fit de la loi moldave sur cette question, comme pour plusieurs autres lois. En effet, le gouvernement de l'UTA diffuse les émissions d'information et d'analyse en provenance de la Russie, et ce, en violation de la loi anti-propagande adoptée par la législature de Chisinau. Le Conseil de coordination de l'audiovisuel ("Consiliul Coordonator al Audiovizualului") a même infligé en vain des amendes à plusieurs chaînes de télévision et de radio en Gagaouzie. Bien entendu, d'autres sanctions devaient suivre, dont la suppression éventuelle de la licence d'exploitation.

La politique linguistique de la Gagaouzie, à l'exemple de la plupart des États non souverains, est soumise à des contraintes extérieures. Cette politique ne peut restreindre les droits ni des Moldaves, ni des Russes, ni des Bulgares, ni des Ukrainiens. C'est une politique de valorisation de la langue locale, le gagaouze, tout en s'appuyant sur le multilinguisme imposé par l'État moldave, mais aussi par les circonstances tant historiques que territoriales. Au point de vue juridique et constitutionnel, la Gagaouzie ne peut ignorer ni le roumain ni le russe, et en plus elle doit aussi promouvoir et protéger les langues des autres minorités. Bref, la petite Gagaouzie doit tenir compte de trop de langues! Le problème fondamental, c'est que le petit État gagaouze ne dispose que de moyens financiers fort modestes pour mener à bien une telle politique de multilinguisme. Or, la Gagaouzie est la région la plus pauvre de la Moldavie qui est elle-même l'un des pays les plus pauvres d'Europe. Qui plus est, une politique de multilinguisme est forcément contreproductive pour une petite langue comme le gagaouze. L'UTA de Gagaouzie doit chercher des appuis de la part des autres pays, mais ces appuis auront comme conséquence de concurrencer encore davantage la langue locale, car rien n'est gratuit.

La tentation pour la Gagaouzie, c'est de se méfier de la Moldavie et de chercher du soutien auprès de la Russie et de la Turquie. Les sympathies pro-russes sont très profondes en Gagaouzie. Les politiciens locaux utilisent régulièrement des slogans séparatistes et pro-russes pour obtenir un soutien local. Les événements en Ukraine n'ont fait qu'encourager ce genre de rapprochement au cours des dernières années. Or, l'ingérence russe en Moldavie n'a rien de nouveau: il  suffit de regarder ce qui est survenu avec la Transnistrie, notamment en Crimée et dans le Donbass. Toutefois, en quémandant sans cesse l'aide de la Russie, la Gagaouzie perd une partie de son autonomie déjà limitée, car le soutien russe n'est pas gratuit et, surtout, il a pour effet d'amplifier la compétition entre les langues russe et gagaouze. La Russie concentre généralement ses efforts sur la vie politique en finançant les partis politiques et les candidats qu'elle soutient; elle utilise également ses liens historiques avec la région à son avantage. Pour la Russie, la Gagaouzie sert de levier pour influencer la politique moldave. Ce n'est pas une coïncidence si tant d'États divisés bordent la Russie à sa périphérie: la Gagaouzie et la Transnistrie en Moldavie, le Haut-Karabakh en Azerbaïdjan, la Crimée et le Donbass en Ukraine, l'Ossétie du Sud et l’Abkhazie en Géorgie. Le soutien russe consiste à monter les habitants les uns contre les autres afin que les forces russes s'imposent comme arbitres. Toutes ces régions sont héritières de cette politique dans laquelle des États instables deviennent des vassaux de la Russie. Paradoxalement, le russe est considéré par tous ces peuples, ainsi que par les Gagaouzes, comme un moyen de défense contre l’assimilation du peuple titulaire! Mais le prix à payer, c'est d'accepter de se faire russifier puisque la langue russe sera aussi leur cercueil. Serait-il mieux de se faire assimiler par le russe ou le roumain? Avec le roumain, l'assimilation est moins certaine et, surtout, elle serait plus lente.

Cependant, cette situation où la Russie fait la pluie et le beau temps en Gagaouzie pourrait être révolue en raison de l'implication de la Turquie. De fait, la Gagaouzie est devenue un autre lieu de compétition entre Moscou et Ankara. La Turquie a recours à une approche différente dans son engagement en Gagaouzie; elle met l'accent sur l'approfondissement de la coopération culturelle entre la Gagaouzie et la Turquie tout en développant des liens économiques. La Turquie semble chercher à empêcher un émiettement politique causé par un renforcement de l'influence de Moscou dans une région qui demeure tout de même assez proche pour y avoir d’importantes répercussions, et ce, bien que la religion musulmane soit un obstacle psychologique au rapprochement des deux peuples. Une chose est sûre : la rivalité russo-turque ne va pas disparaître, alors que la Gagaouzie est en train de devenir un point d'intérêt des deux côtés.

En dépit des sympathies pro-russes ou pro-turques en Gagaouzie, la région fait partie de la Moldavie. Les Gagaouzes peuvent donc compter sur l'appui de Chisinau, bien que les autorités moldaves aient des moyens assez limités au point de vue financier. De façon générale, la politique moldave concernant ses minorités dans les domaines de l'éducation et de la culture s'est notablement assouplie. D'ailleurs, l’épanouissement culturel des Gagaouzes, ainsi que des Ukrainiens et des Bulgares, s'inscrit parfaitement dans la politique de «dérussification» menée par les autorités moldaves. Les Gagaouzes devraient en tenir compte.

Il est malheureux que la Gagaouzie mette elle-même des obstacles au rapprochement avec la Moldavie en interdisant, depuis le 4 octobre 2013, l'emploi des termes «langue roumaine», «littérature roumaine» et «histoire roumaine»; le terme «roumain» fait peur! Cette interdiction doit être appliquée dans toutes les institutions de l'État gagaouze, y compris dans les écoles sur le territoire de l'UTA de Gagaouzie.
L'Assemblée du peuple soutient que, selon l'article 13 de la Constitution de la république de Moldavie: «La langue officielle de la république de Moldavie est la langue moldave, fonctionnant sur la base de l'orthographe latine.» La Gagaouzie ne reconnaît pas le terme «roumain appliqué à la Moldavie. Depuis le 1er janvier 2014, sur le territoire de l'UTA de Gagaouzie, la langue officielle est appelée «langue moldave» et non pas «langue roumaine». Rappelons qu'en décembre 2013 la Cour constitutionnelle de Moldavie a statué que la Déclaration d'indépendance de la république de Moldavie a priorité sur la Constitution et que, par conséquent, la langue officielle doit s'appeler «roumain». De plus, la Gagaouzie a souvent utilisé la menace d'adopter des politiques pro-russes comme monnaie d'échange avec le gouvernement national moldave à Chisinau. De façon, générale, les autorités gagaouzes intensifient leurs critiques contre le gouvernement moldave de Chisinau. Quoi qu'il en soit, les décisions de l'Assemblée du peuple ne peuvent prévaloir sur la législation de la république de Moldavie.

Bien que la petite Gagaouzie ne compte que 1832 km², elle a le potentiel de jouer un rôle démesuré dans la politique régionale. En ce qui a trait à sécurité de l'Ukraine, la stabilité de la mer Noire et la rivalité naissante russo-turque, la Gagaouzie demeure une pièce importante du puzzle géopolitique de la région. Les autorités gagaouzes et moldaves devraient en tenir compte plutôt que de s'opposer. Cette résistance à l'État moldave semble plutôt liée au maintien d'une politique des «nationalités internationalistes» dans laquelle le russe jouerait le rôle dominant, plutôt qu'un soutien à un nationalisme ethnique russe. La situation stratégique de la Moldavie entre l'Ukraine et la Roumanie la place dans un tourbillon de compétitions régionales entre l'OTAN et la Russie. Le gouvernement moldave de tendance occidentale, plus particulièrement à l'égard de Bucarest, a longtemps combattu ses deux républiques autonomes pro-russes (Gagaouzie et Transnistrie). Par ailleurs, la Moldavie rejette toute proposition qui consisterait à fédéraliser le pays et qui donnerait à la Gagaouzie et à la Transnistrie un droit de veto sur les questions de politique étrangère et les traités internationaux. Dans cette perspective, la Gagaouzie continue de se méfier des pays occidentaux, donc de l'Union européenne, mais surtout de la Roumanie. Bref, le séparatisme gagaouze est en grande partie animé par la peur de l'unification de la Moldavie et de la Roumanie. Pourtant, l'une de solutions consisterait pour la Gagaouzie à diversifier ses alliés plutôt que de tout mettre ses œufs dans le même panier russe, afin que les autorités gagaouzes ne soient plus de fidèles exécutants de Moscou. Idéalement, il faudrait que la langue russe ne soit plus en concurrence avec le gagaouze, donc en pratique éliminée dans toute la région, mais ce n'est pas pour demain que le russe va disparaître en Gagaouzie. Pour ce faire, il faudrait préalablement changer les mentalités russifiées. Dans un tel contexte où le gagaouze ne fait pas le poids face au russe, la langue gagaouze demeure une langue en grand danger de disparition.

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 Dernière révision: 21 février, 2024

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