République de Malte

Malte

Republic of Malta
Repubblika ta' Malta

Capitale: La Valette (Valetta)
Population: 400 800 (2004)  
Langues officielles: maltais et anglais  
Groupe majoritaire:
maltais (95,4 %)  
Groupes minoritaires:
arabe classique (1,8 %), anglais (1,5 %), italien (1,2 %)
Système politique:
république parlementaire
Articles constitutionnels (langue): art. 5, 34, 39 et 74 de la Constitution de 1964 
Lois linguistiques: Loi sur la langue maltaise (2003); Code sur l'usage correct de la langue maltaise dans les Règlements sur les médias de radiodiffusion (2010); Statut du Centre pour la maîtrise de l'anglais (2013); Loi modifiant la Loi sur la langue maltaise (2017).
Lois à portée linguistique:
 Loi sur la citoyenneté maltaise (1964); Code civil (1965); Loi sur la procédure judiciaire (Usage de la langue anglaise) adoptée en 1965 et modifiée en 1973; Loi sur les sociétés (1996); Loi sur l'éducation (1999); Loi d'interprétation (2003); Loi sur la police (2004); Code pénal (2005); Code d'organisation et de la procédure civile (2005); Loi sur l'arbitrage (2005).  

 
1 Situation générale

La république de Malte est un État insulaire situé au centre de la Méditerranée, à quelque 80 km au sud de la Sicile (Italie) et à 230 km au nord de l’Afrique (Tunisie). Le pays forme un archipel et comprend quatre îles : l'île de Malte (la principale île), l'île de Gozo, l'île de Comino et la petite île inhabitée de Filfla (voir la carte détaillée). L'île principale, Malte, présente une superficie de 246 km². La superficie totale de ce petit pays est de 316 km², l'un des plus petits du monde; par comparaison, la Belgique est très grande, car elle couvre 32 545  km². Même la principauté d'Andorre est plus grande que Malte avec 464 km². La capitale maltaise est La Valette (en maltais: Il-Belt Valletta), qui porte le nom de son fondateur, le Français Jean de Valette (1494-1568), grand maître de l'ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem.

Le pays a obtenu son indépendance du Royaume-Uni en 1964 et est devenu la république de Malte (en anglais Republic of Malta, en maltais Repubblika ta' Malta) en 1974. Malte constitue l'un des très rares États arabophones à être une démocratie parlementaire de type occidental. De plus, Malte n'est pas un pays musulman, mais chrétien catholique. Bref, au cours de son histoire, l'île de Malte a été arabisée, mais non islamisée, ce qui suffit en soi à lui procurer une originalité incontestable au plan démolinguistique. 

Le drapeau de la république de Malte fut adoptée 1964, lors de l'indépendance: il consiste en deux bandes verticales d'égale largeur (blanc à la hampe et rouge au vent), avec une représentation de la Croix de Saint-Georges (George Cross); les couleurs rouge et blanche de l'ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem reprennent la bannière du comte normand Roger Ier de Sicile (1031-1101).

2 Données démolinguistiques

Divisions administratives

  Population 2013 Pourcentage Superficie
Gozo-et-Comino  37 288 7,8 % 68,7 km2
Southern Harbour  81 834 17,2 % 26,1 km2
Northern 102 892 21,6 % 112,9 km2
Northern Harbour 131 938 27,8 % 24,1 km2
South Eastern   66 060 13,9 % 54,3 km2
Western   54 315 11,4 % 72,5 km2
Malte total 474 327 100 %

315,1 km2

Source: National Statistic Office, Malte, 2013

La population maltaise vit majoritairement dans l'île de Malte, surtout dans les districts de Northern Harbour (27,8%), de Northern (21,6%) et de Southern Harbour (17,2%), ce qui fait 66,6%). C'est dans l'île de Gozo et celle de Comino où la population est la moins nombreuse (7,8%). La capitale, La Valette, ne compte que 6675 habitants; la ville la plus populeuse est Birkirkara (Northern Harbour) avec 22 319 habitants.  

2.1 Les groupes ethniques

Le principal groupe ethnique de la république de Malte est constitué des Maltais (92,9 %). Les groupes minoritaires sont les Britanniques (1,5 %), les Arabes (0,5 %), les Somaliens (0,2 %) et les Italiens (0,2 %).  On compte aussi des Turcs, des Australiens, des Érythréens et des Juifs.
 

Ethnie Population (2016) Pourcentage Langue Affiliation linguistique Religion
Maltais 390 000 92,9 % maltais famille chamito-sémitique chrétienne
Britanniques    6 600 1,5 % anglais langue germanique chrétienne
Arabes    2 100 0,5 % arabe famille chamito-sémitique chrétienne
Somaliens    1 000 0,2 % somali couchitique (chamito-sémitique) islam
Italien      900 0,2 % italien langue romane chrétienne
Turcs     800 0,1 % turc famille altaïque islam
Australiens     600 0,1 % anglais australien langue germanique chrétienne
Érythréens  (Tigrés et Tigrina)     500 0,1 % tigrina famille chamito-sémitique chrétienne
Juif parlant le maltais      60 0,0 % maltais famille chamito-sémitique juive
Autres 17 000 4,0 % - - -
Total 419 560 100 % - - -

2.2 La langue maltaise

Alphabet maltais

La quasi-totalité des insulaires parle le maltais, que ce soit comme langue première ou comme langue seconde. Le maltais est une variante de l'arabe maghrébin parlé dans l’archipel et il transcrit «en alphabet latin complété». C'est aussi la «langue nationale» de Malte dont le pays constitue l’un des rares où l’arabe, une langue sémitique, est écrit avec l’alphabet latin. Le digramme [għ] indique une voyelle pharyngalisée; elle apparaît avant, après ou entre deux voyelles. Les voyelles [i] et [u] (= [ou] français) se diphtonguent après [għ], par exemple għid. La lettre h joue le même rôle que [għ] mais muet.

L'une des caractéristiques de la langue maltaise, c'est qu'il s'agit d'une langue sémitique (famille chamito-sémitique) parlée par des locuteurs arabophones qui ne sont pas musulmans, ce qui signifie que les arabophones ne sont pas tous musulmans et les musulmans, pas tous arabophones. De plus, cette variété d'arabe, qui s'écrit avec l'alphabet latin, compte de nombreux emprunts au sicilien, à l'italien et à l'anglais. Son vocabulaire compte beaucoup de régionalismes tirés de l'arabe du Moyen Âge.

La langue maltaise est le résultat de son histoire particulière. Il ne faut pas oublier que l'île de malte a vécu de nombreuses conquêtes depuis seulement le Moyen Âge: les Normands, les Souabes, les Angevins, les Aragonais, les Espagnols, les Siciliens, les Français et les Anglais.
 

Aujourd'hui, le maltais, tout en étant à base d'arabe maghrébin (tunisien), est resté imprégné de nombreux mots siciliens et florentins (toscans), mais aussi des mots empruntés à l'italien standard et, depuis quelques décennies, à l'anglais britannique. L'apport du vocabulaire d'origine étrangère a eu un double effet sur le maltais. D'une part, le langue étrangère a pu conduire à l'élimination des termes arabes correspondants, d'autre part, elle a donné naissance à de nombreux synonymes, sinon des doublets lexicaux. Par exemple, d'après Martine Vanhove, on trouve "pôplu" au sens de «peuple» (< it. popolo) et "nias" au sens de «gens» (< arabe nâs), "diffiôli" au sens de «difficile» ou «dur» (< it. difficile) et "t'il" au sens de «lourd», «difficile» (< arabe taqîl), "demonyu" au sens de «démon, diable» (< it. demonio) et "šitân" au sens de «diable» ou «irritation» (< arabe saytân), "indiritstsâta" (< it. indirizzare) et "addressâta" au sens de «adressée» (< anglais to address).

Durant huit siècles, le maltais a été coupé de ses sources linguistiques arabes pour se rapprocher du monde chrétien. Si les Maltais se sont christianisés, ils ont conservé leur langue arabe.

2.3 Les autres langues

La langue maltaise témoigne ainsi de l’occupation arabe durant quelques siècle dans l’archipel. Cependant, en raison de circonstances historiques plus ou moins similaires, c’est-à-dire la colonisation britannique, l’anglais joue également un rôle important dans cet État. En réalité, la place de l’anglais, parlé seulement par quelque 6200 personnes comme langue maternelle, est considérable au plan sociopolitique, car il demeure l’une des deux langues officielles de la République. 

Si l’anglais est une langue germanique appartenant à la famille indo-européenne, le maltais, à l’instar des langues arabes, reste une langue de la famille chamito-sémitique. Cependant, le maltais est une variété d’arabe fortement marquée par le sicilien, l’italien, l’anglais et un peu de français. Quant aux mots maltais d'origine arabe, ils sont encore aujourd’hui assez semblables aux mots employés actuellement dans les variétés dialectales arabes d’Afrique du Nord.  Malte compte deux autres langues employées dans le pays:  l'arabe (environ 7200 locuteurs) et l'italien (environ 5000 locuteurs).

La plupart des Maltais sont bilingues, ils parlent en général le maltais comme langue maternelle, et l'anglais comme langue seconde.  Le trilinguisme maltais-anglais-italien est encore assez fréquent chez les Maltais; une grande partie de la population possède une bonne maîtrise de l'italien standard, même si son succès dan les écoles est moindre que celui de l'anglais. Selon un sondage Eurobaromètre en 2012, quelque 94 % de la population de l'île parlent l'anglais comme langue seconde, mais 59 % parlent aussi l'italien et 9 % le français. Tous les Maltais d'origine, soit 97 %, parlent le maltais comme langue maternelle. Un faible majorité, soit 52 %, estime avoir un «très bon niveau» d'anglais. Presque tous les répondants à Malte (93%)affirment être capables de parler au moins une autre langue en plus de leur langue maternelle.

Précisons que le droit maltais ne définit pas la notion de minorité nationale; il n'existe donc aucun groupe de population reconnu comme tel. C'est pourquoi aucun instrument juridique n'a été adopté et la nécessité de lois particulières dans le domaine des langues ne s'est pas fait sentir. Il n'existe donc aucune loi visant à assimiler les minorités nationales ou à mettre en œuvre une politique générale d'intégration ou de protection à leur égard. Le gouvernement de Malte déclare qu'il n'existe sur son territoire aucune minorité nationale au sens de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales. Toutefois, Malte considère la ratification (10 février 1998) de la Convention-cadre comme un acte de solidarité par rapport aux objectifs de la Convention.

3 Données historiques

Dès l’Antiquité, les îles maltaises ont été la proie des envahisseurs en raison de leur position stratégique dans la Méditerranée. Ainsi, se sont succédé les Phéniciens (IXe siècle avant notre ère), les Grecs (VIIIe siècle), les Carthaginois (VIe siècle) et les Romains (à partir de -218). Les insulaires maltais furent ensuite christianisés vers 50-60, puis latinisés. Après la chute de l’Empire romain, les îles furent livrées aux Vandales, aux Ostrogoths, puis aux Byzantins (en 533), avant d'être envahies par les Arabes en 870, qui allaient l'occuper jusqu'en 1090.

Ces deux siècles de présence musulmane furent déterminantes pour l'histoire linguistique de Malte, car la variété d'arabe parlée encore aujourd'hui provient des anciens dialectes citadins de Tunisie; les Maltais s’arabisèrent et s'islamisèrent, avant de se rechristianiser plus tard.

La conquête arabe prit fin en 1091 lorsque les îles de Malte furent conquises par les Normands, sous la gouverne de Roger Ier, comte de Sicile. Sous son règne, les différentes identités, coutumes et religions de l'île furent respectées. Normands, Berbères et Arabes purent cohabiter et demeurer dans l'île. Non seulement les mosquées ne furent pas détruites, mais les chrétiens orthodoxes, les musulmans et les juifs ne subirent aucune persécution de la part des catholiques. La population demeura majoritairement musulmane au moins jusqu'en 1241.

Paradoxalement, cette conquête chrétienne aura pour effet d'ancrer encore davantage l'archipel dans le monde musulman, car la plupart des chrétiens prisonniers préférèrent quitter les îles. Contrairement à la Sicile, l'influence normande demeura très faible à Malte.

3.1 La période sicilo-italienne

C'est au cours de cette période de quatre siècles que s'installèrent des Siciliens, ainsi que des Génois, des Catalans et des Aragonais, tous rapidement assimilés par la population locale. En 1249, le roi de Sicile et empereur germanique Frédéric II (1216-1250) expulsa les derniers musulmans de Malte, mais il est probable que beaucoup de ceux-ci aient préféré se convertir au christianisme plutôt que de s'exiler. C'est ce qui explique que la langue arabe ait pu se maintenir aussi aisément à Malte, dont la population se rechristianisa complètement.

C’est également à cette époque que s’installèrent un petit nombre d’Italiens, rapidement assimilés, notamment des marchands pisans (Pise), génois (Gêne), catalans et aragonais, ainsi que des travailleurs siciliens et d'autres régions de l'Italie. Après la chute du comté chrétien de Tripoli en 1289 (aujourd'hui le Liban), de nombreux esclaves musulmans furent emmenés à Malte. À partir du XIIIe siècle et surtout au XIVe siècle, l’archipel devint complètement intégré au monde socio-économique sicilien et catalano-aragonais. Les rois d'Aragon menèrent à cette époque une ambitieuse politique méditerranéenne : la Sicile (avec le royaume de Naples), puis la Sardaigne passent sous leur autorité, pendant que Barcelone, port important, profite de l'expansion catalano-aragonaise.

Au plan de l’administration religieuse, l’archipel de Malte fit partie du diocèse de Palerme en Sicile (jusqu’en 1831). Pendant cette longue période sicilo-italienne, les Maltais empruntèrent massivement une partie de leur vocabulaire au sicilien et à l’italien.

Périodiquement, des pirates maltais faisaient des razzias chez les Arabes du Maghreb (Algérie et Tunisie) afin de les réduire à l'esclavage sur l'île, ce qui signifie que les Arabes sont revenus dans l'île. Dans les documents officiels, le latin et le sicilien, puis l'italien florentin demeuraient les seules langues écrites, le maltais étant limité aux communications orales. De nombreux mots siciliens et toscans (florentins) ont pénétré dans la langue maltaise. Si les apports lexicaux siculo-italiens ont été importants, ils ont aussi été intégrés et adaptés aux structures linguistiques héritées de l'arabe.

Il faut préciser que le sicilien n'est pas de l'italien, même si son origine provient de la même langue: le latin (comme le florentin, le français, l'espagnol, le catalan, etc.). Le sicilien a sa propre grammaire et sa phonétique particulière, même s'il existe des similarités normales entre le sicilien et l'italien (comme avec le français) en raison de leur affiliation linguistique commune. Bien que le sicilien (sicilianu, en sicilien) soit considéré par les autorités italiennes comme un «dialecte de l’italien» ("dialetto italiano"), il est historiquement un dialecte du latin et une langue romane au même titre que l’italien, l'espagnol ou le français, des langues beaucoup plus prestigieuses. Parmi les langues du continent, le calabrais du Sud et le puglien sont considérés comme des variantes dialectales du sicilien.

3.2 Les chevaliers de Malte

En 1530, l’empereur Charles Quint (1500-1556), qui avait hérité de sa mère la Castille, l’Aragon, Naples et la Sicile (sans compter une grande partie de l’Amérique latine), accorda les îles de Malte à l’ordre des Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem, un ordre militaire religieux consacré à la défense du Royaume latin de Jérusalem. Les chevaliers, en majorité des Français, des Espagnols et des Italiens, s’installèrent avec leurs serviteurs et leurs soldats, ainsi qu’avec des Rhodiens (en Grèce).

Auparavant, soit en 1522, les hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem avaient été chassés de l’île de Rhodes, alors leur quartier général, par les Turcs de Soliman le Magnifique (1495-1566), le sultan dont l’empire connut la période la plus riche de toute l’histoire ottomane. Rendus maîtres des îles maltaises grâce à Charles Quint, les hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem prirent le nom de «chevaliers de Malte». Les chevaliers de l’ordre ont marqué fortement l’archipel de leur empreinte et furent généralement bien acceptés par les insulaires.

Afin de rendre sécuritaires leur nouveau quartier général, les chevaliers de Malte organisèrent la défense de l’île en édifiant plusieurs fortifications (fort Saint-Ange, fort Saint-Elme, fort Saint-Michel, etc.). La construction de la cité-forteresse de La Valette, sous le règne du grand maître de l’ordre, Jean Parisot de La Valette, permit de résister au Grand Siège des Turcs en 1565. C’est l’année suivante, en 1566, que La Valette, la capitale de l’archipel, fut fondée. Par la suite, l'île de Malte assista à un afflux de travailleurs, venus vraisemblablement de la Sicile voisine.

Les chevaliers de Malte réussirent à maintenir leur ordre militaire jusqu'en 1798, non sans avoir doté Malte de somptueux édifices qui font aujourd’hui l’orgueil de la capitale. Au cours de cette période, l'italien florentin a fini par remplacer le latin et le sicilien dans la langue écrite, notamment dans les actes notariés, les tribunaux et l'administration publique. C'est aussi le toscan que les intellectuels maltais utilisaient pour s'exprimer publiquement et qu'ils enseignaient dans les écoles. Dès 1632, l'arabe classique était aussi enseigné, surtout au sein des ordres religieux. Toutefois, les commerçants, les artisans, les marins et les pêcheurs ont continué de parler le sicilien et le maltais, mais ce dernier est resté pendant des siècles un moyen de communication strictement oral.

Au cours du XVIIIe siècle, l’archipel de Malte devint, sous l’influence française, le grand relais du commerce français en Méditerranée. En 1798, le 71e et dernier grand maître des chevaliers de l’ordre de Malte sur l’île, l’Allemand Ferdinand von Hompesch, se rendit au général Bonaparte après une résistance symbolique. Mais en raison de plusieurs lois impopulaires promulguées par Bonaparte, les Maltais se soulevèrent et firent appel à l'amiral anglais Horatio Nelson. 

3.3 La période britannique

En raison des troupes britanniques, les Français durent se retirer de Malte après deux ans de siège. Cependant, les Britanniques refusèrent de rendre l’archipel à l’ordre de Malte (définitivement expulsé de l’île) et en firent plutôt une colonie anglaise. Le traité de Paris de 1814 reconnut les Maltais comme des «sujets britanniques», bien que la Couronne anglaise dut assurer le maintien de la religion catholique.

Cependant, à long terme, les Maltais n'acceptèrent pas davantage les Britanniques que les Français, et ce, d'autant plus que les Britanniques imposèrent leur langue et accaparèrent tout le pouvoir politique et économique. Presque tout le XIXe siècle vit la montée de fortes revendications nationalistes. La vie intellectuelle maltaise fut marquée par un mouvement «sémitisant», ce qui se traduisit par une sorte de nationalisme arabophone, favorable aux emprunts tirés de l'arabe classique.

Non seulement, la langue maltaise acquit une littérature, mais apparurent aussi les premiers travaux de lexicographie. En même temps, d'autres mouvements nationalistes encouragèrent plutôt la promotion de l'italien considéré comme plus apte que le maltais pour résister à l'anglais. De leur côté, les Britanniques croyaient mieux implanter leur pouvoir politique et détacher la colonie maltaise de l'influence italienne en imposant l’anglais dans les administrations et les écoles. Toutefois, durant un siècle, la résistance d’une partie importante des Maltais à l’introduction de l’anglais dans les écoles demeura très vive.

Le grammairien et lexicographe maltais Mikiel Anton Vassalli (1764-1829) expliquait ainsi en 1796 l'existence de la langue arabe parlée à La Valette : «L'influence de l'arabe [est] assez nette, à cause peut-être du trop grand nombre de prisonniers musulmans.» Nous savons aussi que la population maltaise fut soumise à un bilinguisme maltais-italien, bien que l'on ignore dans quelle proportion. C'est pourquoi l'italien a été une langue d'enseignement incontournable jusqu'au XIXe siècle et la langue véhiculaire parmi l'élite locale. D'ailleurs, Vassalli protestait contre le snobisme de certains habitants de La Valette, qui utilisaient dans leurs propos des mots siciliens et italiens (florentins) en les «maltisant». 

Les premières tentatives pour normaliser l’écriture maltaise ne commencèrent qu’à la toute fin du XIXe siècle grâce à Mikiel Anton Vassalli, considéré depuis comme «le père de la langue maltaise». D'ailleurs, la plaque sur sa tombe porte ce titre de Missier il-Lingwa Maltija («le père de la langue maltaise»). Après des études de langue orientale à l'université de Rome, Vassali, qui parlait le maltais, l'anglais, le latin, le grec, l'italien, l'espagnol, le français et l'arabe, s'intéressa de façon particulière à la langue du peuple de Malte et principalement à celui de Żebbuġ, sa ville natale, qu’il estimait être «le maltais le plus pur».

Cet écrivain et grammairien, imbibé du siècle des Lumières et de la Révolution française, considérait que l’écriture du maltais devait refléter le plus précisément possible le parler populaire, celui du peuple. En 1788, Vassalli publie dans Alfabeto Maltese («Alphabet maltais») son premier alphabet connu qui n'était alors qu'une transcription avec un alphabet latin augmenté de dix signes pour transcrire dix phonèmes qu’il avait identifiés comme différents des sonorités italiennes. En 1796, Vassalli publia Lexikon, un «Lexique» de 18 000 mots, dans lequel simplifiait son alphabet en remplaçant les graphèmes arabes par d'autres signes. Il a quand même fallu attendre en 1924 pour que l’alphabet soit reconnu et accepté par les Maltais. La langue maltaise entremêle les influences sicilienne, italienne, arabe et anglaise pour former un ensemble unique.

En 1849, puis en 1887, les Britanniques durent concéder à Malte de nouvelles constitutions afin notamment d'augmenter le nombre d'élus maltais au Conseil législatif. De leur côté, les Britanniques croyaient pouvoir détacher Malte de la sphère d'influence italienne en imposant l'anglais dans les écoles et l'administration publique. En même temps, les revendications en faveur du maltais servaient les ambitions britanniques, car ses partisans étaient en général opposés à l'impérialisme linguistique italien, sans s'opposer à l'anglais.

En 1921, à la suite de violentes émeutes, une constitution instaurant un véritable parlement fut alors promulguée, puis suspendue en 1930, en raison de l'agitation croissante de la population. Londres décida d'imposer une mesure radicale: la suppression de l'italien dans les écoles et au sein de l'administration. En 1933, le maltais et l'anglais devinrent les langues officielles en lieu et place de l'italien. L'année suivante, une écriture officielle maltaise fut adoptée sur la base de l'alphabet latin; cet alphabet avait été mis au point une dizaine d'années auparavant par l'Union des écrivains maltais.  L'enseignement du maltais commença à être dispensé cette année-là, mais l'animosité entre Maltais et Britanniques continua de plus belle.

La Seconde Guerre mondiale mit fin temporairement au conflit opposant Britanniques et Maltais. Puis la lutte pour l'indépendance reprit dès la fin de la guerre. On comprendra que, sous le régime britannique, l’anglais fit partie des habitudes linguistiques des Maltais, et ce, d’autant plus que le maltais restait complètement ignoré de la vie politique et économique du pays.

3.4 L'indépendance de l'archipel

Après avoir accédé enfin à une autonomie locale en 1947, Malte obtint le statut de «dominion» en 1955, puis en 1962 le Parlement maltais promulgua unilatéralement l'indépendance de l'État de Malte. Celle-ci ne fut officiellement accordée qu’en mai 1964 par la proclamation de la Malta Independence Act par le Parlement du Royaume-Uni, ce qui favorisa immédiatement l’usage de la langue et de l’écriture maltaises. Le 13 décembre 1974, Malte devint officiellement la république de Malte (Republic of Malta). Si l'anglais et le maltais étaient les deux langues officielles, seul le maltais avait le statut de «langue nationale».

 Bien que l'anglais et le maltais soient les langues officielles, la télévision n'a été disponible qu'en italien jusqu'en 1959.

Dans les années qui suivirent, la vie politique du pays fut marquée par son neutralisme et son non-alignement dans les affaires internationales, puis, à la fin des années 1970, par une coopération étroite avec la Libye. En 1990, la république de Malte et la Libye ont même renouvelé leur traité de coopération bilatérale jusqu'en 1995. La même année, Malte demanda son adhésion à l'Union européenne, qui fut refusée en raison de sa petite taille (bien que l’UE aie accepté l’adhésion du Luxembourg), mais en revanche Malte fait partie du Conseil de l’Europe depuis le 29 avril 1965. Dans la Constitution de 1964, adoptée à la proclamation de l’indépendance, le maltais est défini comme la langue nationale de l’État maltais et comme la langue officielle avec l’anglais.

Le 1er mai 2004, Malte fut acceptée, non sans résistances (après onze ans de négociations), comme premier État arabophone membre de l'Union européenne. En même temps, le maltais devint aussi l'une des langues officielles de l'Union européenne, une décision politique qui représentait l’aboutissement d’une évolution tendant à renforcer le statut du maltais en affirmant son identité nationale. Le 1er janvier 2008, Malte intégrait la zone euro. Du fait de sa petite taille et de la vocation touristique de Malte, une dérogation fut accordée à la république de Malte, qui a la possibilité d'interdire aux citoyens non résidents sur l'île de l'Union d'y acquérir une résidence secondaire.

Depuis les années 2000, l'île de Malte vit un afflux constant de réfugiés et d'immigrants illégaux qui s'échouent sur ses plages. La plupart de ces immigrants proviennent de l'ensemble de l'Afrique, car ils veulent fuir les conflits et la pauvreté. À partir d'un bassin de migrants qui s'accumule au Maghreb et qui se déverse ensuite vers l'Europe, les petits États insulaires méditerranéens, comme Malte, deviennent des escales sur le chemin de l'Europe. Bref, l'île de Malte est devenue un port de transit pour les migrants d'Afrique sub-saharienne vers l'Europe continentale, ce qui implique une importante charge financière pour le gouvernement maltais. Confrontée également à sa limitation géographique insulaire, Malte n'a pas la capacité territoriale de garder tous ces immigrants chez elle. Cette situation a eu pour conséquence d'engendrer une vague de xénophobie et une montée de l'extrême droite sur l'île.

4 La législation linguistique

La législation linguistique est décrite dans la Constitution, ainsi que dans de plusieurs lois ponctuelles, dont une loi linguistique, la Loi sur la langue maltaise (2003) suivie de la Loi modifiant la Loi sur la langue maltaise (2017). L'État de Malte a beaucoup légiféré sur la langue, ce qui implique des difficultés sur cette question. Le domaine législatif le plus sollicité en la matière reste sans contredit celui de la justice. À Malte, ll n'existe pas de groupe de population reconnu juridiquement comme minoritaire. C'est pourquoi aucune législation n'a été adoptée en ce sens. Il n'existe pas d'avantage de loi visant à assimiler les minorités ethniques ou à mettre en œuvre une politique générale d'intégration ou de protection. Le gouvernement maltais affirme qu'il n'existe sur son territoire aucune minorité nationale, quoique l'afflux des immigrants venus d'Afrique ces dernières années risque de changer la donne.

4.1 Le statut du maltais et de l'anglais

L’actuelle Constitution (1964), qui a été adoptée au moment de l’indépendance et qui a été quelque peu modifiée en 1974, en 1994, en 1996, etc. L’article 5 de la Constitution précise que le maltais est la langue nationale, et que le maltais et l’anglais constituent les deux langues officielles de l’État:

Article 5

1) La langue nationale de Malte est le maltais.

2) Le maltais et l'anglais et toute autre langue prescrite par le Parlement (en vertu d'une loi adoptée par au moins les deux tiers de l'ensemble des membres de la Chambre des représentants) sont les langues officielles de Malte et l'Administration peut utiliser l'une ou l'autre de ces langues à toutes fins officielles:

Quiconque peut s'adresser l'Administration dans l'une ou l'autre des langues officielles et l'Administration devra lui répondre dans la même langue.

3) La langue des tribunaux est le maltais:

Le Parlement peut prendre les dispositions nécessaires pour que l'anglais soit utilisé dans les cas et les conditions qu'il jugera bon de définir.

4) La Chambre des représentants peut, dans le cadre de ses règles de procédure, choisir la ou les langues qui seront utilisées dans les débats et les comptes rendus du Parlement.

Dans les faits, l’anglais constitue bel et bien l’une des langues officielles de la République, mais le maltais reste la «langue nationale». L'article 3 de la Loi sur la langue maltaise de 2003 énonce ce qui suit:

Article 3

Principes et obligations

(1)

(a) Le maltais est la langue de Malte et un élément fondamental de l'identité nationale du peuple maltais.

(b)
La langue maltaise est une composante essentielle du patrimoine national, ayant été constamment développée dans le discours des Maltais, ce qui distingue le peuple maltais de toutes les autres nations et donne à ses citoyens leur meilleur moyen d'expression.

(c) L'État maltais reconnaît
la langue maltaise comme une expression forte de la nationalité des Maltais et, en conséquence, reconnaît son importance unique et la protège contre la dégradation et la disparition.

(d) L'État maltais prend les dispositions pour qu'on accorde toujours à l'étude du maltais dans ses manifestations linguistiques, littéraires et culturelles l'importance première à la fois dans l'État et les autres écoles dans les premières années d'enseignement chez tous les citoyens maltais.

e) L'État maltais promeut par tous les moyens possibles l'usage le plus étendu du maltais en éducation, dans la radiodiffusion et les médias, les tribunaux et la vie politique, administrative, économique, sociale et culturelle.

f) L'État maltais favorise la création dans toutes les occasions possibles pour développer la langue nationale et affirmer sa dignité méritée.

g) L'État maltais reconnaît, dans le contexte plus large de la diaspora maltaise, que la langue maltaise doit leur rester connue et être considérée comme un élément obligatoire chez les citoyens maltais.

2) Les dispositions du présent article ne sont exécutoires dans aucune cour de justice, mais les principes qui y sont contenus restent néanmoins fondamentaux pour la protection de la langue maltaise et l'objectif de l'État est de les appliquer et de s'y soumettre.

Si l'anglais est une langue officielle, c'est une langue seconde pour la quasi-totalité de la population.

4.2 Le Conseil national de la langue maltaise

En avril 2005, l'État maltais a institué le Conseil national de la langue maltaise (en maltais: Malti Kunsill Nazzjonali tal-Ilsien; en anglais: National Council for the Maltese Language).  Selon l’article 3a, qui définit les principes et obligations relatifs à l’établissement du Conseil: «Le maltais est la langue de Malte et un élément fondamental de l'identité nationale du peuple maltais.» L'article 4 de la Loi sur la langue maltaise prescrit que le Conseil national de la langue maltaise, devra élaborer et promouvoir une politique linguistique appropriée pour l'avantage et le développement de la langue nationale et de l'identité du peuple maltais:

Article 4

Établissement du Conseil national de la langue maltaise

1) Il y a un organisme, connu comme le Conseil national de la langue maltaise, avec comme but l'adoption et la promotion d'une politique linguistique appropriée et une stratégie pour vérifier son exécution et son respect dans chaque secteur de la vie maltaise, pour l'avantage et le développement de la langue nationale et l'identité des citoyens maltais.

Outre la promotion du maltais, les fonctions du Conseil national de la langue maltaise (art. 5 de la Loi sur la langue maltaise) doit réviser périodiquement l'orthographe du maltais, proposer l'écriture et les mots corrects, élaborer une politique linguistique appropriée, s'assurer de sa mise en œuvre, conseiller le Ministre responsable de la langue, chercher à obtenir des ressources financières locales ou étrangères, coopérer avec des personnes et des organismes afin d'augmenter les activités linguistiques et culturelles pour l'avancement de la langue maltaise, offrir les ressources nécessaires imprimées et audiovisuelles aux membres des associations linguistiques maltaises, assurer le plein accès aux données statistiques disponibles au sujet des travaux du Conseil et maintenir des contacts fréquents avec les organisations locales, nationales et internationales ayant des fonctions similaires à celles du Conseil national de la langue maltaise (voir une version française de la Loi sur la langue maltaise).

Par ailleurs, la plus grande partie de la Loi sur la langue maltaise concerne le Conseil national de la langue maltaise et correspond davantage à des descriptions bureaucratiques portant sur la sécurité d'emploi des fonctionnaires affectés au travail du Conseil.

Celui-ci doit collaborer étroitement avec un certain nombre d’organismes publics et privés, ainsi qu'avec des associations bénévoles qui accordent un intérêt particulier à la langue maltaise, la littérature et la culture maltaises, sans oublier le patrimoine national. Le domaine des technologies de l'information et de la communication (TIC) semble revêtir une importance particulière, notamment dans le développement des outils et des ressources numériques (correcteurs d’orthographe, corpus, dictionnaires électroniques et applications). Pour le moment, seules quelques applications sont disponibles en maltais; il n'existe pas encore de correcteur orthographique ni de dictionnaire électronique dans cette langue, mais le développement de ces deux ressources est en cours. Ces outils numériques sont absolument indispensables pour que la langue maltaise se trouve sur un pied d’égalité avec les autres langues officielles de l’Union européenne.

Le Conseil de la langue maltais est financé par le gouvernement maltais. Si le Conseil demande un financement supplémentaire pour un projet précis et si sa demande est appuyée par le ministère de l'Éducation et le ministère des Finances, un financement supplémentaire peut être accordé.

Parallèlement au Conseil de la langue maltaise, il existe un Centre for English Language Proficiency (Centre pour la maîtrise de l'anglais) fondé en septembre 2012 en tant qu'institution de l'Université de Malte afin de promouvoir la maîtrise de la langue anglaise parmi les étudiants universitaires, de mener des recherches dans des domaines connexes et d'aider à la mise en œuvre des politiques linguistiques. À l'article 4 du Statut du Centre pour la maîtrise de l'anglais (2013), on peut lire les objectifs et fonctions du Centre comme suit: 

Article 4

Objectifs et fonctions

Les objectifs du Centre sont les suivants:

(a) soutenir et promouvoir la maîtrise de l'anglais chez les étudiants de l'Université en concevant et en offrant des cours et un enseignement approprié aux niveaux pré-tertiaire, de premier cycle et de troisième cycle;

(b) assurer la liaison, le cas échéant, avec les départements, les facultés, les centres et les instituts de l'Université de Malte sur les questions qui peuvent avoir une incidence sur le niveau de maîtrise en anglais des étudiants de l'Université;

(c) évaluer le niveau de maîtrise de l'étudiant en anglais dans le but d'offrir des services de soutien efficaces, à la condition que cela ne comprenne pas l'évaluation visant à admettre des étudiants à des cours universitaires;

(d) aider, au besoin et en tant que de besoin, la mise en œuvre des politiques linguistiques et les résultats de la politique linguistique au sein de l'Université et dans des contextes plus larges;

(e) élaborer et offrir aux organismes universitaires et non universitaires des services professionnels liés à l'engagement du Centre pour l'amélioration de la maîtrise de l'anglais;

(f) faire des recherches sur la maîtrise de l'anglais à Malte à divers niveaux et dans ses divers aspects et contextes;

(g) assurer la liaison, le cas échéant, avec des organismes non universitaires sur des questions qui peuvent avoir une incidence sur la maîtrise de la langue anglaise dans des contextes éducatifs, professionnels et nationaux plus larges;

(h) publier des publications et des rapports sur la maîtrise de l'anglais à Malte; et

(i) de convoquer des colloques nationaux et internationaux et des réunions similaires sur des questions intéressant le Centre.

L’archipel de Malte fut une colonie britannique pendant 164 ans. C’est pourquoi l’anglais est l’une des langues officielles avec le maltais. Depuis l'indépendance, les écoles de langue (anglais) fleurissent sur l’archipel (près de 50 écoles accréditées), si bien qu’elles accueillent des étudiants étrangers toute l’année.

4.3 La langue des débats parlementaires

Bien que les débats au Parlement ne se déroulent plus qu’en maltais, les lois sont adoptées et promulguées à la fois en maltais et en anglais. Toutefois, l’article 74 de la Constitution intitulé "Language of Laws" («Langue des lois») précise qu’en cas de conflit d’interprétation la version maltaise reste prépondérante:

Article 74

Langues des lois

Sauf si le Parlement en dispose autrement, chaque loi doit être promulguée en maltais et en anglais et, en cas de conflit entre la version anglaise et la version maltaise, le texte maltais fera foi.

Le paragraphe 4 de l'article 5 de la Constitution prévoit que le le Parlement peut prendre les mesures nécessaires pour permettre l'utilisation de l'anglais dans les circonstances et aux conditions qu'il jugera bon de définir.

Article 5

4) La Chambre des représentants peut, dans le cadre de ses règles de procédure, choisir la ou les langues qui seront utilisées dans les débats et les comptes rendus du Parlement.

Cependant, l'article 14 de la Loi d'interprétation (1975-2003) précise qu'une loi du Parlement peut être décrétée entièrement ou partiellement en maltais ou en anglais seulement :

Article 14

La langue des lois

Sans préjudice des dispositions d'une autre promulgation, une loi du Parlement adoptée après l'application de la présente loi peut être décrétée entièrement ou partiellement en maltais ou en anglais seulement si le projet de loi du Parlement ou une partie d'un projet de loi est présenté au secrétaire de la Chambre et est publié dans une seule des langues mentionnées et si la loi adoptée contient une disposition autorisant la promulgation de cette loi, ou si l'une ou plusieurs de ses parties est seulement dans une langue, tel que les circonstances peuvent l'exiger.

4.4 Les langues de la justice

L'État de Malte a beaucoup légiféré en matière linguistique dans le domaine de la justice. Rappelons qu'en matière de justice le paragraphe 4 de l’article 5 de la Constitution précise que le maltais est la langue des tribunaux, mais le Parlement peut décider que l’anglais est admis au même titre que la langue nationale: «Le maltais est la langue utilisée en matière judiciaire.» Le droit de se défendre dans sa langue ou de bénéficier de l'aide d'un interprète si on ne comprend pas la langue utilisée au procès est garanti par l'article 39. 6 de la Constitution maltaise:

Article 39

6) Quiconque est accusé d'une infraction pénale:

(a) doit être informé par écrit, dans une langue qu'il comprend et en détails, de la nature de l'accusation portée;

(e) doit bénéficier gratuitement de l'aide d'un interprète s'il ne comprend pas la langue utilisée lors de l'accusation au procès [...].

Ce droit est également consacré par l'article 6.3 de la Convention européenne des droits de l'homme. En vertu de la Loi sur la procédure judiciaire (Usage de la langue anglaise) adoptée en 1965 et modifiée en 1973, la procédure des cours de juridiction civile et pénale est en maltais, mais peut l'être en anglais si toutes les parties sont anglophones; elle peut être bilingue si l'une des partie veut conserver le maltais. En réalité, même si l’anglais est autorisé dans les cours de justice, le maltais demeure la langue habituelle des juges, accusés et autres justiciables. L’anglais n’est utilisé que si l’accusé est de langue maternelle anglaise, ce qui est peu fréquent.

Enfin, l'article 7 de la Loi sur la procédure judiciaire (Usage de la langue anglaise) distingue ce qu'est une personne parlant le maltais et une autre parlant l'anglais. Un locuteur maltais «est une personne qui a une connaissance suffisante de la langue maltaise pour comprendre et suivre la procédure si elle est conduite en cette langue, mais qui a une connaissance suffisante de la langue anglaise nécessaire pour comprendre et suivre la procédure si elle est conduite en cette langue»:

Article 7

Locuteurs parlant le maltais et locuteurs anglophones

Pour les fins de la présente loi:

(a) Quelqu'un parlant le maltais est une personne qui a une connaissance suffisante de la langue maltaise pour comprendre et suivre la procédure menée en cette langue;

(b) Un anglophone est une personne qui n'a pas de connaissance suffisante de la langue maltaise nécessaire pour comprendre et suivre la procédure si elle est conduite en cette langue, mais qui a une connaissance suffisante de la langue anglaise nécessaire pour comprendre et suivre la procédure si elle est menée en cette langue;

(c) Toute personne est réputée parler le maltais à moins que la cour ne soit convaincue du contraire.

En principe, la loi considère que toute personne parle le maltais, à moins qu'on puisse en faire la démonstration autrement à la cour. L'article 21 du Code d'organisation et de la procédure civile (Code of Organization and Civil Procedure) de 2005 proclame bien que le maltais est la langue des tribunaux et que, en vertu des dispositions de la Loi sur la procédure judiciaire (Usage de la langue anglaise), toute la procédure se déroule dans cette langue:

Article 21

Langue des tribunaux

1)
Le maltais est la langue des tribunaux et, en vertu des dispositions de la Loi sur la procédure judiciaire (Usage de la langue anglaise), toute la procédure se déroule dans cette langue.

2) Lorsqu'une personne accusée
ne comprend pas la langue dans laquelle se déroule la procédure et qu'un témoin est cité, la procédure ou le témoin doivent lui être traduits par le tribunal ou un interprète assermenté.

Il en est ainsi lors de la procédure d'arbitrage, car le maltais est, selon la Loi sur l'arbitrage (Arbitration Act), la langue reconnue, sauf si les parties en conviennent autrement.

Article 28

Langue

1)
La langue qui doit être utilisée dans la procédure est le
maltais, sauf si les parties en conviennent autrement.

2) Le tribunal d'arbitrage peut ordonner que toutes les pièces jointes à la déclaration de la réclamation ou à celle de la défense, ainsi que tout document supplémentaire ou tout objet présenté au cours de la procédure, doivent être présentés dans leur langue originale ou les langues convenues par les parties ou choisies par le tribunal d'arbitrage.

Dans la Loi sur la police (Police Act), l'article 18 énonce que nul ne peut être interrogé en l'absence d'un interprète s'il ne ne comprend pas le maltais ou l'anglais, ou encore si la personne menant l'interrogatoire ne comprend pas la langue parlée par la personne interrogée

 

Article 18

Déclaration en d'autres langues que le maltais ou l'anglais

Nul ne peut être interrogé en l'absence d'un interprète si:

(a) il ne comprend pas le maltais ou l'anglais; ou

(b) la personne menant l'interrogatoire ne comprend pas la langue parlée par la personne interrogée.

Dans le cas d'un individu faisant une déclaration dans une autre langue que le maltais ou l'anglais :

(a) l'interprète ou l'agent prenant une déclaration doit comprendre la déclaration dans la langue dans laquelle elle est faite;

(b)
une traduction maltaise doit être faite en temps utile et annexée comme document avec la déclaration originale;

(c) seule la déclaration originale doit être présentée à la personne faisant la déclaration.

Lorsque la langue d'une personne interrogée n'est ni le maltais ni l'anglais, un interprète doit procéder à une traduction. L'article 596 de la Loi sur la police (Police Act) prévoit des dispositions concernant les interprètes devant les tribunaux : 

Article 596

Emploi d'interprète

1)
Si la cour
ne comprend pas la langue dans laquelle le témoignage est donné, elle doit désigner un interprète qualifié à la charge provisoire de la partie présentant le témoin.

2) L'interprète officiel, en acceptant les obligations de ses fonctions, jure devant la cour qu'il rapportera fidèlement les paroles des témoins.

3) L'interprète désigné par la cour prête le serment susmentionné précédant l'examen du témoin.

4) Le serment est administré à l'interprète par le greffier.

4.5 Les services publics

Dans les services publics, le maltais et l’anglais sont utilisés, mais l’anglais est généralement privilégié pour la communication écrite. Le Conseil de la langue maltaise s’efforce de développer et de sensibiliser l’opinion publique à une langue simple, c’est-à-dire une langue maltaise qui pourrait être comprise et utilisée par le public, notamment dans les domaines de la justice et de la santé. Suite logique de la colonisation britannique, c’est dans l’administration gouvernementale que le bilinguisme est pratiqué de façon systématique. Conformément à l’article 5 (paragraphe 2, alinéa 2) de la Constitution, l’anglais et le maltais sont, en effet, tous deux permis:

Article 5

2) Le maltais et l'anglais et toute autre langue prescrite par le Parlement (en vertu d'une loi adoptée par au moins les deux tiers de l'ensemble des membres de la Chambre des représentants) sont les langues officielles de Malte et l'Administration peut utiliser l'une ou l'autre de ces langues à toutes fins officielles:

Quiconque peut s'adresser l'Administration dans l'une ou l'autre des langues officielles et l'Administration devra lui répondre dans la même langue.

Il suffit qu’un citoyen écrive ou parle en anglais pour qu’on lui réponde dans cette langue, mais dans les faits le maltais demeure la langue la plus usuelle. Dans l’administration interne, les fonctionnaires utilisent indifféremment l’anglais et le maltais, et la plupart des documents officiels paraissent dans les deux langues. La circulaire 52/87 du 4 juin 1987 précise bien que les Maltais ont le droit de recevoir toute correspondance officielle de la part d’un service gouvernemental ou paragouvernemental (par exemple les hôpitaux) en maltais, avec une traduction anglaise si cela s’avère nécessaire.

D'après la Loi sur la citoyenneté maltaise de 1964, l'une des conditions pour obtenir la citoyenneté maltaise est une connaissance adéquate du maltais ou de l'anglais:

Article 10

1) Un étranger ou un apatride, en tant que personne majeure et avec sa capacité juridique, sur demande expresse auprès du Ministre selon les dispositions prescrites, peut se voir accorder un certificat de naturalisation comme citoyen de Malte s'il prouve auprès du Ministre:

(a) qu'il a résidé à Malte pendant une période de douze mois précédant immédiatement la date de demande; et

(b) que, pendant les six ans précédant immédiatement la période mentionnée des douze mois, il a résidé à Malte au cours de périodes totalisant pas moins de quatre ans; et

(c) qu'il a une connaissance adéquate du maltais ou de l'anglais; et

(d) qu'il a bon caractère; et

(e) qu'il est un bon citoyen de Malte.

Évidemment, la plupart des demandeurs d'asile peuvent connaître l'anglais, pas le maltais. Dans les faits, ils parlent une variété d'arabe. La république de Malte vit actuellement une «invasion culturelle», car des milliers d’immigrés africains traversent coûte que coûte la Méditerranée pour atteindre les côtes de cette île minuscule qui est devenue une porte d’entrée de l’Union européenne. Avant que Malte n’adhère à l’Union européenne en 2004, le taux d’immigration était négligeable, mais sa proximité avec l’Afrique du Nord en a ensuite fait une porte d’entrée pour les immigrants qui veulent venir en Europe. Au cours des dix dernières années, plus de 17 000 immigrés clandestins sont arrivés sur les côtes maltaises; par rapport à sa population, Malte est le territoire qui reçoit le plus de demandes d’asile au monde.

Les habitants de Malte doivent donc s’ajuster à une petite société de plus en plus multiculturelle, mais la situation demeure difficile pour l'État maltais qui peine à intégrer les immigrants aux prises avec la ségrégation, l’exploitation des minorités ethniques et la hausse du racisme.

4.6 Les langues de l'enseignement

La Loi scolaire de 1999 (tirée à l’origine de l’Education Act de 1988) précise que le maltais et l’anglais sont les deux langues d’enseignement dans les écoles de la République. Que ce soit à la maternelle, au primaire, au secondaire ou à l’université, tout le système d’enseignement est bilingue (maltais et anglais).

Au primaire, le maltais doit demeurer la première langue d’enseignement bien que tout professeur puisse décider de réduire ou d’augmenter le temps consacré à l’une ou l’autre langue. Les autorités recommandent l'emploi du maltais dans l’enseignement des sciences sociales, de l’histoire, de la religion, de l’éducation civique ou morale, alors que l'anglais est préconisé pour l’enseignement des matières scientifiques, de l’informatique et des mathématiques à l’école primaire

Au niveau secondaire, l’anglais est utilisé dans le design et l’économie, ainsi que dans les disciplines scientifiques. Le maltais est généralement utilisé dans le développement personnel et social, l’histoire et la géographie. Le maltais a commencé à s’imposer dans l’enseignement de la géographie à la suite d’un projet de terminologie entre le Conseil national de la langue maltaise et l’administration chargé de l’enseignement de la géographie au sein du Département de gestion des programmes d’enseignement. Par ailleurs, au premier cycle du secondaire, tous les élèves doivent apprendre une troisième langue, l’italien étant sans conteste la langue la plus populaire; lors du second cycle, les élèves ont le choix d’apprendre une autre langue étrangère (surtout le français, l’allemand ou l’arabe).

D'après la législation en vigueur, les citoyens jouissent d'une totale liberté en matière d'apprentissage des langues, bien que ce droit ne soit pas garanti par une loi. Le gouvernement considère que si une activité n'est pas interdite par la loi, les citoyens sont libres de l'exercer. De plus, une telle interdiction serait contraire à l'article 41 de la Constitution maltaise et à l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme.

En annexe à la Loi sur l'éducation, il est précisé que le maltais et l'anglais sont les langues officielles de l'Université; l'Administration universitaire peut choisir l'une ou l'autre langue pour toutes les fins officielles.

Article 1.1

Langues officielles

Le maltais et l'anglais sont les langues officielles de l'Université. L'administration de l'Université peut employer l'une ou l'autre langue à des fins officielles.

Normalement, c’est le professeur qui choisit la langue d’enseignement (maltais ou anglais). Quoi qu'il en soit, le maltais et l'anglais sont des matières obligatoires pour l'admission au titre et aux cours sanctionnés par un diplôme de l'Université (Loi sur l'éducation):

Article 1.2

Matières obligatoires pour l'admission

Le maltais et l'anglais sont des matières obligatoires pour l'admission au titre et aux cours sanctionnés par un diplôme de l'Université :

À la condition que le Sénat puisse par règlement permettre aux candidats dans des circonstances spéciales d'offrir d'autres matières en lieu et place.

Les écoles privées ont tendance à accorder plus d’importance à l'enseignement de l’anglais, ce qui porte à négliger parfois totalement le maltais. Les écoles publiques privilégient davantage le maltais, surtout au cours des premières années du primaire, l’anglais étant introduit plus progressivement. Dans les écoles confessionnelles, la situation est très variable, puisque certaines d’entre elles préfèrent l’anglais, alors que d’autres privilégient le maltais.

De façon générale, l’État accorde dans tout le système scolaire une grande importance à l'apprentissage des langues étrangères. En général, en plus du maltais et de l’anglais, l’italien, l’allemand, le français, l’espagnol, l’arabe, le latin (dans un seul établissement secondaire) et le chinois (projet pilote dans certaines écoles publiques) sont enseignés dans les écoles.

Comme on pouvait s'y attendre, le nombre d’étudiants non maltais a considérablement augmenté au cours des dernières années. Comme il n’existe pas de dispositions juridiques sur cette question, le gouvernement tente de trouver des solutions pour aider les étudiants étrangers à s’intégrer à tous les niveaux, que ce soit au plan social et linguistique. Pour le moment, les enfants des immigrants sont soumis aux mêmes obligations que les Maltais, l’école étant obligatoire jusqu’à l’âge de 16 ans.

4.7 La vie économique et les médias

Les citoyens sont totalement libres de choisir la langue dans laquelle ils souhaitent présenter les enseignes, les inscriptions et autres informations de caractère privé. Quant aux inscriptions sur les édifices gouvernementaux, ils sont bilingues (maltais-anglais) ainsi que les noms de rues, mais, dans ce dernier cas, les plaques bilingues ont tendance à être renouvelées par des inscriptions unilingues maltaises. L’étiquetage dans les produits courants, tels que les denrées alimentaires produites à l’étranger et importées, se fait dans la langue du pays de fabrication et en anglais. La même règle s’applique aux produits pharmaceutiques, médicaments et produits dérivés. Les produits locaux sont étiquetés le plus souvent en anglais plutôt qu’en maltais ou dans les deux langues.

Dans le domaine de l'affichage privé, il est possible d'afficher dans n'importe quelle langue. Il n’existe pas de règle particulière concernant la langue utilisée dans la publicité. Les affiches publiques et les panneaux d’affichage sont souvent en maltais. Les présentations de produits et publications officielles sont le plus souvent rédigées exclusivement en anglais.

Dans la vie économique, l’anglais demeure la première langue du pays, sauf dans les communications interpersonnelles où le maltais conserve une place peu importante. Les inscriptions sur les produits manufacturés sont en anglais, de même que les modes d’emploi. La plupart des raisons sociales apparaissent aussi en anglais. Un ou deux signes de l'alphabet cyrillique ont récemment fait leur apparition. Les enseignes de pharmacie sont parfois mentionnées dans trois ou quatre langues, surtout dans les régions touristiques.

Dans les faits, la plupart des enseignes commerciales et des placards publicitaires sont exclusivement en anglais. Le bilinguisme maltais-anglais n'est pas très fréquent bien qu'il ait tendance à s'accroître ces dernières années. En somme, l'usage massif de la langue anglaise reflète le poids de plus de 160 ans de domination britannique. La langue maltaise doit faire face à une lourde concurrence, l'anglais.

La Loi sur les sociétés (Companies Act) de 1996 impose certaines restrictions aux sociétés étrangères installées à Malte:

Article 183

Exemplaires des comptes fournis au greffier

9)
Si un document compris dans les comptes rendus annuels est dans une autre langue que le maltais ou l'anglais, l'entreprise doit annexer à la copie de ce document une traduction en maltais ou en anglais, reconnue être une traduction correcte de la façon pouvant être prescrite.

Article 199

Exigences pour les comptes rendus provisoires

6)
Si les comptes rendus sont dans une autre langue que l'anglais ou le maltais, une traduction en anglais ou en maltais des comptes, reconnue pour être une traduction correcte de la façon pouvant être prescrite, doit également avoir été adressée au greffier.

Selon l'article 387 de la Loi sur les sociétés, de façon générale, ces restrictions concernent l'emploi obligatoire du maltais ou de l'anglais dans tous les documents servant à l'enregistrement des sociétés auprès du gouvernement, ou une traduction dans l'une ou l'autre de ces deux langues: 

Article 387

Les comptes rendus des sociétés étrangères

1) Toute société étrangère doit, dans les quarante-deux jours à compter de la fin de la période visée à l'article 182.2 et 182.3, élaborer et remettre au greffier à des fins d'enregistrement un bilan, un compte des profits et pertes, ainsi que les notes aux comptes, selon la forme prévue et le contenu des renseignements incluant ces documents; en vertu des dispositions de la présente loi, l'administration, si la société a été une société établie et inscrite en vertu de la présente loi, est tenue d'élaborer et émettre ces documents devant la société lors de l'assemblée générale : [...]

5) Si un document tel qu'il est mentionné aux paragraphes 1 à 4 n'est pas rédigé en maltaise ou en anglais, il doit y être annexée une traduction dans chacune de ces langues, reconnue comme une traduction correcte de la façon pouvant être prescrite.

Dans les médias, l'article 3 (paragraphe 1-e) de la Loi sur la langue maltaise prévoit que l'État maltais devra promouvoir un usage extensif de la langue maltaise dans l'éducation, la radiotélévision et les médias, dans les cours de justice et dans la vie politique, administrative, économique, sociale et culturelle:

Article 3

(e) L'État maltais doit promouvoir par tous les moyens possibles l'usage le plus étendu large de la langue maltaise en éducation, à la radiodiffusion et dans les médias, les tribunaux et la vie politique, administrative, économique, sociale et culturelle.

Par ailleurs, l'article 41 de la Constitution garantit la liberté d'expression dans les médias écrits:

Section 41

Expression

3) Anyone who is resident in Malta may edit or print a newspaper or journal published daily or periodically:

Provided that provision may be made by law --

(a) prohibiting or restricting the editing or printing of any such newspaper or journal by persons under twenty-one years of age; and

(b) requiring any person who is the editor or printer of any such newspaper or journal to inform the prescribed authority to that effect and of his age and to keep the prescribed authority informed of his place of residence.

Article 41

Expression

3) Tout résident de Malte peut éditer ou imprimer un journal ou un journal publié quotidiennement ou périodiquement :

À la condition que la présente disposition puisse être faite conformément à la loi:

a) Interdiction ou restriction de l'édition ou d'impression d'un journal ou par des citoyens de moins de 21 ans; et

b) exigence de tout citoyen qui est éditeur ou imprimeur d'un journal ou d'informer les autorités prescrites à cet effet de son âge et tenir celles-ci informées de son lieu de résidence.

Dans les médias écrits, beaucoup de journaux sont en anglais (The Malta Business Weekly, The Malta Financial and Business Times, The Malta Independent, Malta Star, Malta Today, Maltamedia, Sunday Circle, The Times & Sunday Times), mais les autres sont en maltais: Lehen is-Sewwa, Il-Mument, In-Nazzjon, it-Torca, Kullhadd, L-Orizzont

Pour ce qui est des médias électroniques, Radio 101 et Net Television sont en maltais, alors que PBS et One diffusent en anglais. Maltamedia diffuse ses émissions à la fois en maltais et en anglais. Les stations de radio sont principalement en maltais et en italien, quoique quelques-unes sont en anglais. Selon un récent sondage, 82,4 % de la population écoute régulièrement la radio maltaise, 25,4 % le fait en italien et 14,6 % en anglais. Dans les faits, il est possible de capter des émissions de l'étranger en espagnol, en catalan, en français, en italien, en allemand, etc. Les chaînes de télévision locales à Malte sont diffusées principalement en maltais et parfois en anglais. Néanmoins, Malte est approvisionné avec des stations numériques du monde entier comme le reste de l'Europe (Sky, TPS, et d'autres peuvent être vus sur la télévision maltaise).

Dans la presse en langue maltaise, il arrive également de trouver des publicités ou des offres d’emplois en anglais. Il en va de même pour la radio et la télévision : les chaînes en maltais diffusent des publicités en anglais et parfois de brefs messages publicitaires en italien et en maltais. On peut affirmer aussi que les Maltais sont de grands consommateurs de médias britanniques, que ce soit dans les journaux, les périodiques, les stations de radio ou de télévision. La grande majorité des Maltais préfèrent l'anglais comme leur choix de lecture, l'anglais étant préféré par 61,1 % de la population pour les livres et 70,8 % pour les magazines. Seulement 35,7 % de la population maltaise semble préférer lire des livres en maltais; 22,6 % d'entre eux préfèrent cette langue pour des magasines. À Malte, la proportion de répondants qui affirment pouvoir lire un article de journal ou de magasine en anglais est nettement plus basse que celle de répondants qui affirment pouvoir suivre les actualités à la télévision ou à la radio en anglais (respectivement -11 points de pourcentage et -17 points). La majorité des répondants à Malte (57%) utilisent des langues étrangères pour lire des livres, des journaux ou des magasines.

La politique linguistique du gouvernement maltais en est une de bilinguisme officiel. Il s’agit d’un bilinguisme de type colonial où la prépondérance est en principe accordée au maltais. Toutefois, l’anglais a maintenu un rôle stratégique, surtout dans la langue écrite. C'est pourquoi le paysage linguistique est resté massivement anglais, la petite langue maltaise ne faisant manifestement pas le poids devant la dominance de l'anglais. Dans le monde actuel, le nombre des locuteurs du maltais demeurera toujours relativement limité, soit plus ou moins 400 000 individus.

Malgré ses efforts pour promouvoir le maltais, l'État ne réussira jamais à évincer l'anglais, ce qu'il ne compte pas faire de toute façon. En raison de sa situation géostratégique en Méditerranée, l'île de Malte a toujours été au cœur de l’histoire des empires européens, arabes et ottomans. La langue maltaise représente un cas très original d’une langue reflétant une histoire particulièrement riche où sont entremêlées les influences phénicienne, grecque, carthaginoise, romaine ou latine, arabe, normande, sicilienne, italienne, française et britannique. Aujourd’hui, la langue maltaise tire son originalité par un singulier mélange : la grammaire, les mots et les sonorités sont à l’évidence arabes, mais également siciliens, italiens et anglais. Toutefois, l’enseignement de l’arabe n’a pas encore acquis toute la place à laquelle il aurait droit, la concurrence de l'anglais demeurant trop forte, sans compter la présence des autres langues européennes comme l'italien, le français ou l'allemand. C'est pourquoi les autorités maltaises ont voulu accorder une place non négligeable à l’enseignement des langues étrangères. Il reste à trouver un équilibre entre la langue nationale utilisée et parlée par la quasi-totalité des Maltais, et la langue anglaise qui lui livre une concurrence énorme que le maltais ne peut vaincre. Le bilinguisme institutionnel et social de la république de Malte devrait demeurer déséquilibré à l'avantage du maltais à l'oral et de l'anglais à l'écrit et dans les communications le moindrement élargies à l'extérieur de l'archipel.

Dernière mise à jour: 19 févr. 2024

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VANHOVE, Martine. «À Malte, l'expression est l'histoire» dans Manière de voir, Paris, n° 97, février-mars 2008, p. 16-18. 


 

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