Alba / Scotland

Écosse

(Royaume-Uni)

Capitale: Édimbourg
Population: 5,2 millions (2018)
Langues officielles: anglais et gaélique écossais
Groupe majoritaire: anglais (98 %)
Groupes minoritaires: gaélique écossais (1,3 %), écossais (ou scots) et ses variétés (1,9 %), langues immigrantes dont le polonais, le chinois et l'ourdou
Système politique: région administrative du Royaume-Uni
Articles constitutionnels (langue): aucun
Lois linguistiques: Loi sur la langue gaélique (2005);
Politique linguistique  (2023).
Lois scolaires: Loi écossaise de 1980 sur l'éducation; Loi sur l'enseignement continu et supérieur (1992); Loi sur les normes scolaires d'Écosse (2000);
 Loi sur l'éducation pour l'Écosse (2016).
Lois à portée linguistique: Loi sur la radiodiffusion (1996); Loi sur l'administration locale d'Écosse (1997);
 Loi sur la Cour pénale internationale (2001).

1 Présentation générale

L’Écosse (en écossais: Alba; en anglais: Scotland), l’une des trois «provinces historiques» de la Grande-Bretagne avec le pays de Galles (angl. Wales) et l’Angleterre (angl. England), occupe au nord le tiers (78 782 km²) de l’île de Grande-Bretagne (229 850 km² ). L’Écosse est bordée au nord par l'océan Atlantique, à l'est par la mer du Nord, au sud-est par l'Angleterre (130 279 km²), au sud-ouest et à l'ouest par le canal du Nord et l'océan Atlantique. 

D'une superficie de 78 789 km², l’Écosse est divisée en trois grandes régions: les Highlands au nord (Hautes-Terres du Nord), les Lowlands (Basses-Terres du Centre) et les Southern Uplands (plateaux du Sud). Les Highlands forment une région de montagnes et de lacs (lochs).

En 1995, l’administration locale d’Écosse avait été réorganisée en 29 unités administratives remplaçant le système de 1974 qui prévoyait neuf autorités régionales (divisées en 53 conseils de districts) et trois zones insulaires. Aujourd'hui, l'Écosse est constituée de 32 unités administratives divisées en «conseils de district»: Western Islands, Highland, Shetland, Moray, Aberdeenshire, etc. (voir la carte 2).

1.1 La dévolution

Le 1er juillet 1999, la «dévolution» des pouvoirs, équivalent en français du mot «décentralisation», était officiellement accordée par le gouvernement du Royaume-Uni aux autorités locales d'Écosse, ainsi qu'au pays de Galles et à l'Irlande du Nord. À partir de ce moment, le Parlement écossais s'est vu confier les pouvoirs qu'avait alors l'Exécutif écossais, parmi lesquels la responsabilité du gaélique écossais. La ville d’Édimbourg est la capitale de cette région de 5,2 millions d’habitants.

Depuis la dévolution, le gouvernement britannique utilise l'expression devolved administrations pour désigner les trois «entités» en question, ce qui se traduirait en français par «administrations déléguées». En réalité, le seul terme utilisé décrivant le territoire est celui de area, ce qui équivaut en français à «région». On a également recours aux expressions local authorities («autorités locales») et local government («administration locale») pour désigner les «administrations déléguées», ainsi que le mot nation («nation») pour dénommer la population de chacune des «régions déléguées». On emploie aussi les termes central government («gouvernement central») pour désigner le gouvernement de Londres.

Le Royaume-Uni n'étant pas une fédération, on ne peut pas recourir à des termes tels qu’«État» (comme aux États-Unis), «province» (comme au Canada et en Afrique du Sud) ou «canton» (comme en Suisse). Le Royaume-Uni n'a pas non plus retenu les expressions telles que «région autonome» (comme en Italie) ou «communauté autonome» (comme en Espagne).  Bref, la terminologie demeure incertaine et ambiguë pour désigner les entités découlant de cette «dévolution». Londres n'a pas osé former une fédération, car la dévolution avait un net avantage par comparaison : le gouvernement anglais peut à tout moment suspendre les institutions politiques locales et prendre le relais.

L'Écosse, rappelons-le, est divisée en 32 unités administratives, appelées aussi «conseils régionaux». La ville de Glasgow est la plus grande région en nombre d'habitants, tandis que le Highland est la plus grande région quant à la superficie. À ce sujet, le mot Highland employé au singulier désigne une unité administrative, alors que le même terme employé au pluriel (Highlands) désigne la région des Hautes-Terres, par opposition aux Basses-Terres (Lowlands). 

1.2 Les champs de juridiction

Les domaines décentralisés et dévolus à l'Écosse sont les suivants : la santé; l'éducation et la formation; les collectivités locales; l'aide sociale; le logement; l'aménagement du territoire; le tourisme, le développement économique et l'aide financière à l'industrie; certains aspects des transports écossais, tels que le réseau routier, la politique des bus et les ports et havres écossais; la justice et les affaires intérieures, comprenant la plupart des aspects du droit pénal et du droit civil, le Ministère public et les tribunaux ; les services de police et de pompiers; l'environnement; le patrimoine naturel et architectural; l'agriculture, les forêts et la pêche; les sports et les arts; les statistiques, l'état civil et les archives publiques.

Les domaines spécifiques du gouvernement du Royaume-Uni concernent les questions constitutionnelles; la politique étrangère du Royaume-Uni; la défense et la sécurité nationale du Royaume-Uni; le système fiscal, économique et monétaire; l'immigration et la nationalité; l'énergie : l'électricité, le charbon, le gaz et le nucléaire; les marchés communs; etc. La langue peut relever des deux niveaux de gouvernement.

Mentionnons qu'il existe encore au sein du Cabinet britannique, un secrétaire d'État pour l'Écosse, dont le rôle est de représenter celle-ci pour toutes les questions relevant de la compétence du gouvernement du Royaume-Uni. Les services du secrétaire d'État pour l'Écosse, qui font maintenant partie du département des Affaires constitutionnelles, sont connus sous le nom de ''Scotland Office'' (secrétariat d'État pour l'Écosse), devenu "Office of the Secretary of State for Scotland and The Scottish Government", le Bureau du secrétaire d'État pour l'Écosse et le gouvernement écossais, tous des organismes qui se trouvent principalement à Londres.

2 Données démolinguistiques

Le recensement britannique de 2021 révélait que la population de l'Écosse était alors de 5,4 millions d'habitants, soit 9% de la population du Royaume-Uni. La majorité de la population se concentre dans la partie centrale du pays, autour de Glasgow et d'Édimbourg (sur la carte: de 1 à 13, incluant l'Ayshire, l'Angus et le Fife). Les Hautes-Terres (Highlands) et les îles sont les régions les plus vastes, mais les moins peuplées. L'Écosse compte six grandes villes : Glasgow (578 710 hab.), Édimbourg (449 020 hab.), Aberdeen (211 910 hab.), Dundee (145 460 hab.), Stirling (86 200 hab.) et Inverness (50 920 hab.). Les langues régionales historiques sont les suivantes (voir les cartes de 400 à 1900):

Langue Origine
Anglo-écossais langue germanique
Gaélique écossais langue celtique
Écossais (scots) langue germanique

L'anglais standard, appelé aussi «l’anglais d’Oxford», est de loin la langue la plus parlée en Écosse avec l'anglo-écossais. Deux langues régionales sont protégées par la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires: le gaélique écossais et l'écossais moderne. Dans les faits, plus de 170 langues sont parlées en Écosse. Les langues non anglaises les plus parlées à la maison (par les personnes âgées de trois ans et plus) sont l'écossais (55 817), le polonais (54 186), le chinois (27 381) et l'ourdou (23 394).

2.1 L'anglais et l'anglo-écossais

Le recensement de 2011 portait sur les compétences en anglais, en écossais et en gaélique. On a également demandé aux gens quelles langues ils parlaient à la maison. L’anglais était de loin la langue la plus parlée en Écosse, soit 98,6% des locuteurs, âgés de trois ans et plus, parlaient anglais. Sur une population de 5,2 millions de personnes, 92,6% des personnes ont déclaré ne parler que l’anglais à la maison, tandis que 93,8% des Écossais ont déclaré qu’ils pouvaient parler, lire et écrire l’anglais. Même les ressortissants étrangers parlent très majoritairement l'anglais, puisque 75,2% des personnes nées dans les pays candidats à l’adhésion à l’Union européenne (le pays faisant encore partie de l'UE) ont déclaré qu’elles pouvaient parler, lire et écrire l’anglais, et 88,8% des personnes nées au Proche-Orient et en Asie pouvaient parler, lire et écrire cette langue.

- L'anglo-écossais

Une distinction s'impose, car les Écossais d'origine parlent généralement un «anglais écossais» appelé aussi «anglo-écossais» (en anglais: "Scottish English" ou "Scottish Standard English"). Il s'agit d'un anglais teinté de l’accent écossais (le roulement des [r] est caractéristique) et de certaines particularités lexicales. Presque tous les Écossais parlent aujourd’hui cet anglais régional, bien que ce soit l'anglais standard qui demeure la langue officielle et la langue de l'éducation.

L'anglo-écossais est la langue écrite usuelle en Écosse dans les textes non littéraires. Elle ne doit pas être confondue avec l'écossais, une langue germanique linguistiquement très proche, mais distincte de l'anglais moderne; bien que les deux termes aient souvent été employés l'un pour l'autre, l'usage moderne est de distinguer clairement les deux langues.

En pratique, l'anglo-écossais ne diffère que légèrement dans le vocabulaire et la mélodie des phrases de «l’anglais d’Oxford». Il peut paraître parfois difficile à comprendre pour les visiteurs dans l’usage quotidien en raison de son mélange avec l’écossais. Les frontières entre l’anglo-écossais et l’écossais moderne sont floues et difficiles à délimiter, même pour les universitaires. Les Écossais anglophones vivent, dans une proportion de 75%, dans les Central Lowlands, c’est-à-dire dans le centre et le sud de l’Écosse (voir la carte 2). La langue anglaise, y compris ses variétés locales, est parlée partout en Écosse, que ce soit dans les Highlands (les Hauts-Plateaux), les Lowlands (les Basses-Terres) ou les Uplands (les Hautes-Terres), y compris parmi les locuteurs du gaélique écossais ou de l'écossais.

L'anglo-écossais est le résultat de l'interférence linguistique entre l'écossais et l'anglais à partir du XVIIe siècle. Le passage de nombreux locuteurs de l'écossais à l'anglais s'est fait  au prix de nombreux compromis phonologiques et de transferts sémantiques. L'orthographe, la ponctuation et la grammaire de l'anglo-écossais suivent généralement l'usage de l'anglais d'Oxford, même si l'anglais des Highlands diffère un peu de celui des Lowlands, et davantage avec l'anglais des Hébrides plus influencé par le gaélique écossais.

- L'omniprésence de l'anglais

De façon générale, les anglophones sont présents partout en Écosse, que ce soit dans les Hébrides du nord au sud (ou Western Islands), les îles Shetlands, les Highlands ((Hautes-Terres) ou les Lowlands (Basses-Terres). Par contre, les gaélophones, ceux qui parlent le gaélique écossais, sont cantonnés depuis des siècles dans les Hébrides et sur le littoral occidental des Highlands, tandis que les scottophones, ceux qui parlent l'écossais (en anglais: scots), sont présents dans les Lowlands.

En dépit de variations régionales et sociales, l'anglais écossais possède un certain nombre de traits de prononciation caractéristiques. Il existe peu de différences dans la grammaire avec les autres variétés d'anglais. L'anglais écossais possède un certain nombre de mots peu employés dans le sud du Royaume-Uni, donc en Angleterre. Certains termes font partie du vocabulaire anglais en Écosse, tels que outwith plutôt que outside of («hors de»), off of dans l'usage de into («dans»), wee plutôt que small («petit»), pinkie plutôt que little finger («petit doigt»), janitor plutôt que caretaker (« concierge, gardien »), etc.

Normalement, l'anglais s'écrit selon les normes de l'anglais d'Oxford ou l'anglais d'Angleterre, mais l'anglo-écossais sert de véhicule de communications en Écosse pour la religion, l'écoles, le gouvernement et les commerces. Même les formes d’anglais les plus prestigieuses socialement parlées en Écosse peuvent contenir des éléments typiquement écossais. La variété de langue que nous pourrions identifier comme l’anglais standard écossais contient un vocabulaire distinctif et des caractéristiques grammaticales qui sont incontestablement écossaises.

2.2 L'écossais moderne (scots)

Alors que le gaélique écossais était la langue dominante dans les Highlands et les îles Occidentales (Western Islands ou Hébrides), les Lowlands d’Écosse ont adopté la langue écossaise (en anglais: "Scots"). Contrairement au gaélique, la langue écossaise est beaucoup plus proche de l’anglais, parce qu'il s'agit de deux langues germaniques, et le débat fait rage depuis de nombreuses années pour savoir s’il s’agit d’une langue distincte. Aujourd’hui, le gouvernement britannique accepte l’écossais comme langue régionale et l’a reconnu en vertu de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.

- Les origines

La langue écossaise fait partie de l'histoire ancienne de l'Écosse et contribue à l'identité de ses habitants (voir les cartes de 400 à 1900). C'était à l'origine la langue des Scots, un peuple qui a donné son nom à la région sous le terme de "Scotland".

Contrairement au gaélique écossais qui fait partie des langues celtiques, l'écossais (ou scots en anglais) est une langue germanique de l'Ouest comme l'anglais et le frison. La langue écossaise s'est formée à partir du vieil anglais parlé à l'origine par les Scots de la région de Northumbrie en Angleterre, c'est-à-dire du vieux northumbrien, l'un des dialectes anglo-saxons du Nord, avant l'invasion normande de 1066. L'écossais a aussi été influencé par le vieux norrois, apporté par les Vikings danois au IXe siècle. Il s'agit donc d'une langue antérieure à l'anglais en Écosse.

Étant donné la grande influence des Anglais pendant la Réforme et l’Union de l'Angleterre et de l'Écosse, l’anglais est devenu de plus en plus répandu en Écosse. Après 1707, les Écossais des Lowlands se considéraient déjà comme des Britanniques du Nord plutôt que comme des Écossais; la pression sociale fit en sorte que de nombreux Écossais nièrent leur identité première et se déclarèrent anglophones, voire des Anglais.

Traditionnellement parlée dans les Basses-Terres (Lowlands) et les Hautes-Terres d'Écosse, la langue écossaise est également connue sous différentes appellations: inglis (synonyme d'anglais archaïque, ce qui démontre sa parenté avec l'anglais), lallans ou Lowland Scots (dans les Lowlands du centre de l'Angleterre) et dorique (comme langue régionale à Édimbourg, particulièrement au XVIIIe siècle) comme langue régionale d'Aberdeen encore aujourd'hui dans le Nord-Est.

Il existe une variété de l'écossais appelée écossais d'Usler en Irlande du Nord (ainsi que dans le comté de Donegal en république d'Irlande): on parle l'écossais surtout dans les comtés d'Antrim, de Down et de Derry (voir la carte). Ces régions ont été colonisées par des émigrants écossais au XVIIe siècle. On estime que quelque 100 000 locuteurs parleraient l'écossais ou l'une de ses variétés (le lallans et le dorique), soit 1,9% de la population écossaise.

L'écossais est reconnu comme une «langue régionale» par le gouvernement britannique en Écosse. Contrairement au gaélique, l’écossais est une langue dont le statut est infériorisé, en partie parce qu’il n’a pas d’orthographe normalisée.

- Les variétés écossaises locales

On distingue cinq variétés de la langue écossaise :

1) l'écossais insulaire (Insular Scots), parlé dans les îles du Nord (Orkney et Shetland);
2) l'écossais du Nord (Northern Scots), parlé dans le district de Dundee:
3) l'écossais central (Central Scots), parlé dans les districts de Fife et de Perth-et-Kinross;
4) l'écossais du Sud (South Scots), parlé dans le district de Scottish Border;
5) l'écossais d'Ulster (Ulster Scots), parlé sur la côte nord-est de l'Irlande du Nord.

Ce grand nombre de variétés démontre qu'il n'existe pas d'uniformité linguistique dans cette langue. Étant donné qu'il n'y a pas d'organisme de régulation à ce sujet, il n’existe pas d’orthographe standard en écossais, ce qui n'augure rien de bon pour sa sauvegarde. On peut lire un exemple d'un énoncé en écossais et en anglais (article 1 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme):

Écossais moderne Anglais actuel Traduction française
Aa bodie sauls ar born free and scleff in mense an richts. Thai ar dotit wi wit and stickles and suid ack thither ane anither in a spírit o britherheid. All human beings are born free and equal in dignity and rights. They are endowed with reason and conscience and should act towards one another in a spirit of brotherhood. Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité.

On peut constater qu'il y a apparemment beaucoup de similitudes entre l'écossais et l'anglais. Cependant, il faut tenir compte de la prononciation et de la grammaire, sans oublier un grand nombre de mots empruntés au gaélique. Dans une conversation, un anglophone ne comprend à peu près rien en entendant un locuteur s'exprimant en écossais.  Bien qu’il ait souffert historiquement de périodes de stigmatisation, la langue écossaise continue d’être un marqueur fort de l’identité écossaise.

Non seulement l’écossais comporte aujourd’hui un grand nombre de variétés linguistique, mais le fait que l’anglais soit une langue linguistiquement proche de l’écossais a rendu plus difficile la reconnaissance officielle de ce dernier en tant que langue distincte au Royaume-Uni. Le gouvernement britannique n’a, par exemple, pas retenu l’écossais pour le recensement national; on ne dispose donc pas de statistiques officielles concernant le nombre de ses locuteurs. Les autorités britanniques citent des enquêtes selon lesquelles 30% de la population écossaise parlerait l’écossais. Le Bureau général de l’état civil (pour l’Écosse) estimait en 1996 à 1,5 million le nombre des locuteurs. L’écossais est parlé dans toute l’Écosse, mais on ignore le nombre exact de ses locuteurs établis à quelque 56 000.

2.3 Le gaélique écossais

La langue gaélique écossaise appartient aux langues celtiques; elle fut introduite au VIe siècle dans l’ouest de l’Écosse par des immigrants venus de l'Irlande (la Dalriada) où cette langue était déjà parlée depuis quelques siècles. De là, le gaélique s’est répandu dans toute l’Écosse et a également été parlé à la Cour écossaise jusqu'au XIe siècle. Le gaélique sera la base de la plupart des noms de lieux en Écosse. Une faible proportion d'Écossais parlent encore leur le gaélique écossais appelé «Gallic» en écossais ou «Gaelic» en anglais. Le gaélique écossais est une langue indo-européenne du groupe celtique, comme le gallois, le mannois, l'irlandais et aussi le breton en France. Les statistiques britanniques de 2001 indiquaient que 65 674 personnes âgées de trois ans et plus, soit 1,3% de la population écossaise, étaient capables de parler, de lire et d'écrire en gaélique écossais. Cependant, 92 396 personnes affirment parler, lire, écrire ou comprendre cette langue.

Autrement dit, un nombre important de personnes semblent lire et écrire le gaélique, tout en ne le parlant pas. Par ailleurs, un nombre considérable de personnes disent comprendre le gaélique, mais ne le parlent pas, ne le lisent pas et ne l'écrivent pas. Les plus grandes concentrations d’Écossais celtophones (ou de gaélophones) habitent dans le Nord-Ouest, le Gàidhealtachd, généralement dans les îles Occidentales (ou les Hébrides) et les Highlands (ou les Hautes-Terres). On trouve de nombreux petits villages gaélophones protégés par leur caractère insulaire. Le plus grand groupe de locuteurs du gaéliques se trouve à Eilean Siar dans les Hébrides avec 61% des personnes âgées de trois ans et plus ayant des compétences dans cette langue. Dans les Hautes-Terres, c'est à Argyll (7,4%) et à Bute (5,9%). La ville de Glasgow reflète la moyenne écossaise à 1,7%. D'autres agglomérations compte moins de 1% de gaélophones: Angus, Midlothian et Fife.

Le gaélique écossais peut être plus connu sous le nom de «gaélique des Highlands» (Hautes-Terres) pour le distinguer du «gaélique des Lowlands» (Basses-Terres), mais celui-ci est pratiquement disparu. Le gaélique des Basses-Terres était parlé dans les régions méridionales de l’Écosse avant l’introduction du Lowland Scots (voir les cartes de 400 à 1900). Il n’y a cependant aucune preuve d’une frontière linguistique suivant les différences topographiques nord-sud. De même, il n’y a aucune preuve dans les noms de lieux de différences linguistiques significatives entre, par exemple, Argyll et Galloway. Les dialectes des deux côtés du détroit de Moyle reliant le gaélique écossais à l’irlandais sont maintenant éteints.

En fait, un seul village (ou paroisse) de l'Écosse n'atteint les 75% de locuteurs du gaélique écossais; il est situé dans les îles Occidentales (Na h-Eileanan Siar) à Barvas (Lewis, avec 74,7%). Les îles Occidentales demeurent la véritable forteresse pour le gaélique avec une moyenne de 61,1% pour tout l'archipel. La proportion de plus de 20% de locuteurs du gaélique est enregistrée partout dans les îles de Skye, Raasay, Tiree, Islay et Colonsay , ainsi que la paroisse de Lochalsh dans les Hautes-Terres (Highlands). Sur un total de quelque 900 paroisses d'Écosse, seules neuf d'entre elles comptent plus de 50% de locuteurs du gaélique, 20 en comptent plus de 25 %, alors que 39 paroisses dépassent les 10% de locuteurs. Les autres locuteurs celtophones sont dispersés dans l’ensemble du territoire.

Dans les faits, le gaélique écossais demeure aujourd'hui une langue très menacée d'extinction. Bien qu'il y a mille ans (voir les cartes de 400 à 1900) la majorité de la population écossaise parlait le gaélique écossais, la domination de l'anglais a pratiquement liquidé cette langue ancestrale des Écossais, sans oublier l'écossais germanique. Encore à la fin du XIXe siècle (1891), le gaélique écossais était parlé dans tout l'ouest de l'Écosse, alors que l'écossais l'était dans tout l'Est (voir les cartes de 400 à 1900).  

Comme dans la plupart des langues, le gaélique écossais a emprunté du vocabulaire à d'autres langues au cours de sa longue histoire. À la suite de plusieurs siècles de contact avec l'écossais et l'anglais, il existe de nombreux emprunts anglais en gaélique, dont voici quelques exemples:

Origine Mot gaélique Mot anglais Traduction
Emprunts directs de l'anglo-saxon ad
breacaist
brot
comhfhurtail
rathad
hat
breakfast
broth
comfortable
road
chapeau
petit-déjeuner
bouillon (soupe»)
confortable
route
Emprunts de l'anglais via le latin aingeal
airgiod
crois
eaglais
Ifrinn
angle
silver
cross
church
Hell
ange
argent
croix
église
enfer
Emprunts antérieurs de l'anglais via le vieux norrois apporté par les Vikings danois au IXe siècle gocaman
sgalag
sgioba
uinneag
lookout
lackey
crew
window
guetteur
laquais
équipage
fenêtre

Le tableau suivant présente l'article 1 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme en gaélique écossais, en écossais et en anglais:

Gaélique écossais Écossais Anglais
Rugadh na h-uile duine saor agus co-ionnan nan urram ‘s nan còirichean. Tha iad reusanta is cogaiseach, agus bu chòir dhaibh a ghiùlain ris a chèile ann an spiorad bràthaireil. Aa bodie sauls ar born free and scleff in mense an richts. Thai ar dotit wi wit and stickles and suid ack thither ane anither in a spírit o britherheid. All human beings are born free and equal in dignity and rights. They are endowed with reason and conscience and should act towards one another in a spirit of brotherhood.

Il est aisé de constater que la version en gaélique n'a rien à voir avec les deux autres versions en écossais et en anglais. Néanmoins, cette langue a façonné l'histoire de la région, elle fait partie de la conscience écossaise depuis des siècles et elle est considérée comme la langue fondatrice de l'Écosse.

2.4 La langue d'Aberdeen

Certaines parties de l'Écosse ont même leur propre variété écossaise locale, laquelle constitue généralement une partie importante de la culture et de l'histoire locales. À Aberdeen, cet écossais local est appelé «dorique», parfois «écossais du Nord-Est» (en anglais: "Northeast Scots"). Bien que le dorique ne soit pas souvent employé dans l'Aberdeen moderne, il a été largement documenté à travers la littérature, la poésie, les ballades et les chansons. Même les poètes et écrivains locaux modernes choisissent parfois d'écrire en dorique pour célébrer leur culture très particulière. Étant donné que cette langue ne bénéficie d'aucun système d'enseignement, elle est menacé à court terme de disparition. L'anglais, bénéficiant de son statut de langue officielle, a aisément supplanté le dorique, même s'il n'est pas encore disparu. Il est resté vivace dans les campagnes autour d'Aberdeen. Voici un court texte rédigé en dorique par un chauffeur de bus scolaire:
 
En dorique Traduction anglaise Traduction française
“Sen we cairry a haill bourach o littleens an visitors tae the ceity, I howp ‘The Doric Bus’ an the Doric blads steekit up on aa the buses wull help tae mak fowk mair aware o the mither tongue, an mak siccar at it’s aye tae the fore.” “Given we transport lots of children and visitors to the city, I hope ‘The Doric Bus’ and the Doric messages on board all the buses will help raise awareness and ensure our dialect continues to prosper.” "Étant donné que nous transportons beaucoup d'enfants et de visiteurs dans la ville, j'espère que le «bus dorique» et les messages doriques à bord de tous les bus aideront à sensibiliser et à assurer la prospérité de notre langue."

La plupart des locuteurs du dorique ne l'emploient généralement pas à l'écrit. Le texte ci-dessus permet de constater les grandes différences entre le dorique et l'anglais. Cette différence existe aussi entre l'écossais courant et le dorique au point de rendre difficile la communication. Ces dernières années, le dorique a dû également faire face à la concurrence du gaélique. Alors que le gouvernement écossais insiste pour que les conseils locaux investissent dans la relance du gaélique, beaucoup de citoyens peuvent affirmer que le dorique est plus important que le gaélique dans les campagnes autour d’Aberdeen.

2.5 Les données statistiques

Le tableau qui suit présente les compétences langagières des Écossais et des Écossaises en ce qui a trait au gaélique écossais et à l'écossais moderne.

Compétence langagière
Recensement 2011
Gaélique écossais Écossais moderne
Résidents habituels âgés de trois ans et plus Proportion Résidents habituels âgés de trois ans et plus Proportion
Aucune compétence 5 031 167 98,30 % 3 188 779 62,30%
Possède une certaine compétence 87 056 1,70 % 1 929 444 37,70%
Peut parler 57 602 1,13 % 1 541 693 30,12 %
Parle, lit et écrit 32 191 0,63 % 1 225 622 23,95 %
Comprend, mais ne parle pas, ne lit pas et n'écrit pas 23 357 0,46 % 267 412 5,22 %
Parle, mais ne lit ni n'écrit 18 966 0,37 % 179 295 3,50 %
Parle et lit, mais n'écrit pas 6 218 0,12 % 132 709 2,59 %
Lit, mais ne parle ni n'écrit 4 646 0,09 % 107 025 2,09 %
Autre combinaison de ces compétences 1 678 0,03 % 17 381 0,34 %
Total 5 118 223 100 00% 5 118 223 100 00%

Aujourd’hui, le gaélique n’est souvent entendu dans la vie quotidienne que dans les Highlands écossais et sur les îles des Hébrides intérieures et des Hébrides extérieures de la côte ouest et est toujours activement parlé par environ 1,1% de la population.

2.6 Les communautés immigrantes

Dans les grands centres, notamment à Glascow et à Édimbourg, on retrouve des minorités ethniques originaires de l’Inde, du Pakistan, du Bangladesh ou de la Chine; elles parlent, souvent en plus de l'anglais, le pendjabi, l’hindi, l’ourdou, le gujarati, le bengali, le cantonnais ou le chinois hakka.

Le recensement de 2011 révélait qu'en Écosse les langues numériquement les plus importantes étaient les suivantes:

Langue maternelle Nombre des locuteurs Pourcentage
Anglais 4 740 547 94,5%
Écossais (scots)      55 817 1,1%
Polonais      54 186 1,1%
Chinois (mandarin, cantonais, min nan, etc.)      27 381 0,6%
Gaélique écossais      24 974 0,5%
Ourdou      23 394 0,5%
Pendjabi      23 150 0,5%
Français      14 623 0,3%
Allemand      11 317 0,2%

En réalité, les langues immigrantes sont beaucoup plus nombreuses que celles énumérées ici, sûrement plus de 170.

3 Données historiques

Avant l’époque romaine, l’Écosse préhistorique est entrée dans l’ère néolithique vers 4000, l’âge du bronze vers 2000 et l’âge du fer vers 700 avant notre ère. Les Celtes se sont installés en Écosse dès le VIe siècle avant notre ère; ils parlaient le gaélique irlandais, lequel donnera naissance au gaélique écossais au cours du Moyen Âge.

3.1 La période romaine

En l'an 55 avant notre ère, Jules César débarqua au sud de l’île de Grande-Bretagne, alors appelée "Britannia" en latin ou «Bretagne» en français ou "Britain" en anglais. Ce fut le début de l'établissement des Romains, mais à cette époque il n'y eut ni véritable colonie ni annexion. Ce n'est qu'au premier siècle de notre ère que des marchands romains s’installèrent en Bretagne, avec l’accord des peuples brittoniques, notamment, les Bretons, les Gallois et les Corniques. Ces peuples furent partiellement romanisés durant l'occupation romaine.

Cependant, la région qui constitue aujourd'hui l'Écosse ne fut jamais conquise par les Romains, qui durent construire le mur d'Hadrien (voir la carte de la Britannia) pour se protéger des «Barbares du Nord»; ce mur fut doublé par un second mur (mur d'Antonin). Au départ des Romains de l'île de Bretagne (Britannia), à la fin du IIIe siècle, trois peuples coexistaient sur le territoire:

- au nord et au nord-ouest, les Pictes, aux origines mystérieuses;
- à l'ouest, les Irlandais, venus du nord de l'Irlande à partir du début III
e siècle;
- au sud-ouest, les Brittons ou Brittoniques (Brettones) d'origine celtique.

3.2 La prépondérance des Pictes

Ayant résisté aux Romains, les Pictes constituaient une confédération de peuples (Cait, Ce, Circinn, Fib, Fidach, Fotia, Fortriu, etc.) vivant dans ce qui est devenu l'Écosse du Nord et de l'Est (les Highlands), mais à cette époque les Pictes étaient présents dans presque toute l'Écosse, y compris dans les îles Shetlands. Les Pictes parlaient le picte, une langue celtique apparentée au langues brittoniques comme le breton insulaire parlé par les peuples voisins plus au sud, mais le picte était également liée linguistiquement au gallois et au cornique. Il ne reste pratiquement aucune attestation directe du picte, à l'exception d'un nombre limité de patronymes et de toponymes trouvés sur des monuments. Aucun texte en langue picte n’ayant survécu, on ne sait des Pictes que ce qu’en ont écrit leurs voisins, d’abord les Romains, et plus tard les Anglo-Saxons du royaume de Northumbrie.

C'est néanmoins à partir de ces documents qu'on peut affirmer que le picte est une langue celtique parlée avant la colonisation anglo-saxonne. Cette langue fut parlée durant plusieurs siècles avant d'être submergée par le gaélique irlandais à partir du VIe siècle. À partir de 450, les Angles, un peuple germanique venu du Schleswig-Holstein actuel (au sud du Danemark), s’installèrent sur les côtes méridionales de la Britannia et repoussèrent les Celtes jusqu'en Cornouailles et au pays de Galles.

Au VIe siècle, plusieurs langues étaient parlées en Écosse :

- le gaélique;
- le brittonique (dont le cambrien);
- le vieux norrois (norn en anglais), surtout dans les iles du Nord, les Hébrides, les Shetland, etc., apporté par les Vikings;
- la langue picte, apparentée au brittonique (Celtic Pictish);
- le latin, langue de l'Église et de la justice.

3.3 L'expansion gaélique

À partir du VIIe siècle, le gaélique irlandais se transporta en Écosse et devint une langue de culture que les Pictes commencèrent à adopter comme langue maternelle, bien que d'autres langues puissent coexister, ce qui signifie que l'Écosse n'a été que fort peu linguistiquement unifiée. La concurrence linguistique se faisaient entre le vieux norrois des Vikings, le picte, le gaélique et le cambrien, une autre langue celtique de type brittonique. Ces langues se firent concurrence, mais ce fut le gaélique irlandais qui prit de l'expansion parce que c'était déjà une langue de grande culture en provenance de l'île d'Irlande.

En effet, la langue irlandaise était non seulement parlée depuis 350 avant notre ère, mais elle s'était écrite dans une phase expansionniste en partie grâce au rayonnement des monastères irlandais qui favorisèrent la diffusion de la littérature irlandaise en Occident.

Jusqu'au VIIIe siècle, le gaélique écossais en resta à des territoires jouxtant l'Irlande et l'Écosse, mais avec la menace des Vikings au nord les Pictes s'allièrent aux Gaëls — peuples parlant le gaélique — afin de combattre les envahisseurs scandinaves. De plus, des alliances entre Gaëls et Pictes favorisèrent l'assimilation de ces derniers au profit des Gaëls et de l'irlandais d'Écosse. Vers 900, la langue des Pictes n'existait plus, car elle avait été remplacée par ce nouvel irlandais d'Écosse, lequel commençait à se distinguer de l'irlandais d'Irlande. Bref, en assimilant les Pictes, le gaélique irlandais s'est en même  temps transformé en gaélique écossais.   

Au Xe siècle, une grande partie des habitants de l'Écosse parlait déjà le gaélique écossais, sauf dans la région des Hébrides du Nord, du littoral septentrional, de l'archipel des Orcades (en anglais: Orkney) et des Shetland, où le vieux norrois demeurait généralisé. Au sud-est, les habitants parlaient le brittonique ou le gaélique, avec un certain mélange de bilinguisme. L'Écosse s'unifia politiquement et réussit à maintenir son indépendance par rapport à l'Angleterre. Le dernier roi de langue maternelle gaélique fut Malcolm III d'Écosse, surnommé Malcolm Canmore (Malcolm «Grosse-Tête»); il fut roi de l'Écosse de 1058 à 1093. La cour accueillait des savants, des artistes et des hommes de lettres venus de toute l'Europe. Mais la proximité de l'Angleterre allait être une source de tensions et de conflits. Au XIe siècle, une autre langue apparut en Écosse: l'anglien de Northumbrie, appelé aussi le northumbrien ou vieil anglais, qui deviendra plus tard l'écossais au nord de la frontière anglo-écossaise et l'anglais au sud.

À la même époque, le franco-normand des Normands, qui venaient de conquérir l'Angleterre, faisait son apparition en devenant la langue de l'aristocratie anglaise. En même temps, la nouvelle langues des Angles et des Saxons commençait à gagner en influence, remplaçant le gaélique écossais à la Cour écossaise, surtout, lorsque la région de Northumbrie de langue écossaise est devenue officiellement une partie de l’Écosse, après que les troupes écossaises furent vaincues au moment de la bataille de Dunbar en 1296, ce qui devait marquer le début de la mainmise de l'Angleterre sur l'Écosse et celui de l'anglicisation des Écossais.

À partir du XIIe siècle, le gaélique, qui avait été jusque là la langue de la Cour et de l'administration écossaise, fut de plus en plus menacé dans les Basses-Terres (Lowlands) par le franco-normand et l'écossais, mais résistait dans les Hautes-Terres (Highlands) et les îles environnantes. Après une longue période encore florissante, la monarchie écossaise périclita au XIVe siècle pour être assujettie au pouvoir anglais. Dès lors, le gaélique écossais se mit à décliner au point d'être supplanté par l'écossais et l'anglais dans la vie administrative. À cette époque, l'Écossais était en réalité une variété d'anglais.

À partir du XIIe siècle, le moyen anglais commença à se répandre au nord et à l'est de l'Écosse en même temps que l'écossais. Bien que l'aristocratie militaire puisse employer le français des Normands et le gaélique écossais, les petites communautés urbaines employèrent l'anglais, car la croissance du prestige de cette langue au XIVe siècle et le déclin complémentaire du français à la Cour royale d'Écosse favorisèrent cette langue dans la majeure partie de l'est de l'Écosse. Au siècle suivant, le gaélique écossais était définitivement refoulé par l'anglais qui avait l’avantage, entre autres, de posséder par rapport au gaélique écossais une littérature abondante et une Bible traduite dans cette langue. Un philosophe écossais, Hector Boece (1465-1536), donna ce témoignage vers 1527:

Those of us who live on the English border have given up our mother tongue and learned English, driven into it by wars and trade. Ceux d'entre nous qui vivons à la frontière anglaise avons abandonné notre langue maternelle et appris l'anglais, car nous y avons été poussés par les guerres et le commerce.

De fait, il devenait extrêmement difficile de résister à la pression de l'anglais, surtout que toute autre langue parlée était socialement dévalorisée. Dès la fin du Moyen Âge, une plus grande propagation de la langue anglaise conduisit finalement le gaélique écossais à se limiter principalement aux Hautes-Terres et aux îles environnantes, mais certaines régions de la plaine, notamment à Galloway et à Carrick, ont conservé la langue jusqu'au XVIIe ou au XVIIIe siècle. Même le latin fut remplacé par l'écossais comme langue officielle et littéraire. Le gaélique écossais a commencé à décliner en Écosse continentale dès le début du XIIIe siècle, ce qui a entraîné un long déclin de son statut de langue nationale.

3.4 La vague de l'anglicisation

À cette époque, l'Écosse se trouvait divisée: tandis que les Basses-Terres (Lowlands) étaient orientées vers l'Angleterre et s'anglicisaient, les Hautes-Terres (Highlands) maintenaient leur mode de vie rural et conservaient le gaélique, ainsi que des liens culturels solides avec l'Irlande. Au XVIe siècle, une grande partie des Hautes-Terres demeurait catholique et parlait le gaélique écossais, mais les Basses-Terres, désignées par le terme Scottis ou Inglis (la langue écossaise), devinrent protestantes et passèrent à l'anglais. Le pouvoir royal ne put tolérer une telle situation: en raison de leur fidélité à la foi catholique et au gaélique, les Hautes-Terres constituaient une véritable provocation pour l'Église presbytérienne gagnée à l'anglais (alors qu'en Angleterre c'était l'Église anglicane).

Des tentatives furent entamées au moyen de la loi à la fin de la période médiévale et au début de la période moderne dans le but d'imposer l'anglais, d'abord parmi l'aristocratie, puis de plus en plus parmi le peuple au moyen de l'éducation dans les écoles paroissiales. Le Parlement écossais adopta une dizaine d'actes juridiques de ce type entre 1494 et 1698. Les Statuts d'Iona en 1609-1610 et en 1616 interdirent les ordres savants gaéliques et cherchèrent à éradiquer le gaélique, la langue dite «irlandaise», afin que la «langue anglaise vulgaire» (populaire) puisse être universellement implantée.

Sous Jacques Ier (de 1603 à 1625) qui avait succédé à Élisabeth Ire, les bardes et les musiciens écossais furent interdits, tandis que des missionnaires protestants furent recrutés pour convertir les «sauvages» écossais. Une loi sur l'éducation du Conseil privé d'Écosse fut promulguée en 1616 et ordonna la création d’au moins une école de langue anglaise dans chaque paroisse d’Écosse :

Forasmuch as the King’s Majesty, having a special care and regard that the true religion be advanced and established in all the parts of this Kingdom, and that all his Majesty’s subjects, especially the youth, be exercised and trained up in civility, godliness, knowledge, and learning, that the vernacular English tongue be universally planted, and the Irish language [i.e., Gaelic], which is one of the chief and principal causes of the continuance of the barbarity and incivility amongst the inhabitants of the Isles and Highlands, may be abolished and removed; and whereas there is no measure more powerful to further his Majesty’s principal regard and purpose than the establishing of schools in the particular parishes of this kingdom where the youth may be taught at least to write and read, and be catechised and instructed in the grounds of religion. Étant donné que Sa Majesté le roi, ayant une considération et un soin particuliers à que la vraie religion soit affirmée et établie dans toutes les parties de ce Royaume, et que tous les sujets de Sa Majesté, en particulier les jeunes, soient exercés et formés à la civilité, à la piété, à la connaissance et à l’instruction, que la langue anglaise vernaculaire soit universellement implantée, et la langue irlandaise [c’est-à-dire le gaélique], qui est l’une des causes principales de la persistance de la barbarie et de l’incivilité parmi les habitants des îles et des Highlands, puisse être abolie et extirpée; et attendu qu’il n’y a pas de mesure plus puissante pour promouvoir les principaux égards et objectifs de Sa Majesté que l’établissement d’écoles dans les paroisses particulières de ce Royaume où les jeunes peuvent apprendre au moins à écrire et à lire, et être catéchisés et instruits dans les fondements de la religion.

Il s'agit ici d'un extrait de l'Education Act de 1616 adoptée par le "Scottish Privy Council".

Le gaélique écossais, qui avait été la langue principale en Écosse pendant des siècles, commença à être démantelé à partir du début du XVIIe siècle, à commencer par les Statuts d'Iona (nom d'une petite île dans les Highlands) de 1609, sous le règne de Jacques VI, lesquels qualifiaient cette langue de «barbare» et invoquaient les chefs de clan à envoyer leurs héritiers dans des écoles anglaises. En conséquence, certains clans, tels que les MacDonalds de Sleat et les MacLeods de Harris, adoptèrent la nouvelle religion. D'autres clans, notamment les MacLean de Morvern & Mull, les MacDonald de Clanranald, Keppoch, Glengarry et Glencoe restèrent résolument catholiques romains. Parmi les neuf Statuts d'Iona, le VIe traitait de la langue:
 
VI. Every gentleman or yeoman in the Islands possessing “thriescore kye” [60 cattle] and having children, to send at least his eldest son, or, failing sons, his eldest daughter, to some school in the Lowlands, there to be kept and brought up until they may be found sufficiently able to speak, read and write English. VI. Chaque gentleman ou yeoman des îles possédant « thriescore kye » [60 bovins] et ayant des enfants, d'envoyer au moins son fils aîné, ou, à défaut de fils, sa fille aînée, à une école dans les Basses-Terres, pour y être gardé et amené jusqu'à ce qu'ils soient jugés suffisamment aptes à parler, lire et écrire l'anglais.

En Angleterre de cette époque, un "yeoman" était un paysan propriétaire de la terre qu'il cultivait. Les Statuts d'Iona sont considérées par certains comme la première tentative du gouvernement anglais de briser la culture et la tradition gaéliques traditionnelles. Jacques VI poursuivit obstinément sa politique de «civilisation» des Highlands et des îles, et d’affaiblissement du système clanique. Les efforts de Jacques VI pour «civiliser» les Highlands furent parfois désastreux.

Une politique répressive fut mise en place afin de pacifier la région et d'angliciser les habitants. Seule l'Église presbytérienne d'Écosse continua d'utiliser le gaélique pour la prédication et les offices. La politique linguistique ne fut jamais remis en cause par la suite et ne rencontra pas beaucoup de résistance.

3.5 Le traité d'Union de 1707

Les actes d'Union (en anglais : Acts of Union) de 1707 correspondent à deux lois du Parlement, l'une anglaise, l'autre écossaise, ratifiant le traité d'Union des deux royaumes signé en 1706, ce qui entraînait la naissance du Royaume-Uni de Grande-Bretagne. Les parlements respectifs des deux royaumes (Parlement d'Angleterre et Parlement d'Écosse) étaient dissous au profit d'un parlement commun, le Parlement de Grande-Bretagne.

Au Parlement d'Édimbourg, le traité d'Union fut ratifié par 110 voix contre 67 et 46 abstentions (total de 113 voix), ce qui ne constituait même pas la majorité des députés. Le fait que le Parlement écossais se soit lui-même sabordé entraîna de nombreuses émeutes populaires en Écosse. On suspecta, non sans raison, que plusieurs parlementaires se soient grassement achetés par les whigs anglais. Mais les esprits se calmèrent rapidement, car le traité ne touchait pas à la religion presbytérienne d'Écosse.

C'est ainsi que naquit officiellement le Royaume-Uni de Grande-Bretagne, avec un seul souverain, un seul gouvernement et un seul parlement, à Westminster, où entrèrent 45 députés écossais (Chambre des Communes) et 16 pairs écossais (Chambre des Lords). Les deux actes parlementaires prenaient effet le 1er mai 1707.

Le traité d'Union de 1707 scella le rattachement de l'Écosse à la Couronne d'Angleterre, puis le Parlement écossais d’Édimbourg cessa d'exister, ayant été ajourné... indéfiniment. Néanmoins, l'Écosse conserva un certain régime juridique, une Église nationale (presbytérienne) et un système d'éducation distinct. L’anglais devint la langue de l’Écosse avec comme conséquence que le gaélique écossais et la langue écossaise se virent transformés «en dialecte inférieur». Malgré cela, ces deux langues ne sont pas disparues et restèrent un élément essentiel de l’identité écossaise.

Les parlementaires écossais avaient obtenu le droit de siéger au Parlement britannique, mais ils se trouvaient forcément minoritaires, surtout que le traité d'Union n'avait pas prévu de droit de véto en cas de désaccord fondamental sur l'Écosse de la part des députés écossais. Dès lors, de nombreuses lois du Parlement britannique favorisèrent l'enseignement en anglais dans les écoles d'Écosse; les membres de l'aristocratie écossaise furent d'abord touchés, puis ce fut le tour de la population générale, de telle sorte que les Écossais instruits adoptèrent la langue anglaise. L'Angleterre réussit ainsi briser les clans et à mettre hors-la-loi les costumes et la musique des Highlands, notamment après la défaite des jacobites (partisans de Jacques II et des Stuart) à Culloden en 1746.

C'est cette année-là que fut adoptée la Dress Act, c'est-à-dire l'Abolition and Proscription of the Highland Dress 19 George II, Chap. 39, Sec. 17, 1746. En français, on dirait: «Loi sur l'abolition et l'interdiction des costumes écossais des Hautes-Terres», conséquence directe de la bataille de Culloden. Cette loi répressive de 1746 interdisait le port du kilt et du tartan, mais indirectement l'emploi de la langue gaélique comme symbole de l'identité écossaise.

- La perte de l'identité écossaise

La loi visait non seulement la suppression de la culture écossaise, mais également la liquidation de l'identité des habitants écossais des Hautes-Terres (Highlands):

Dress Act

That from and after the first day of August, One thousand, seven hundred and forty-six, no man or boy within that part of Britain called Scotland, other than such as shall be employed as Officers and Soldiers in His Majesty's Forces, shall, on any pretext whatever, wear or put on the clothes commonly called Highland clothes (that is to say) the Plaid, Philabeg, or little Kilt, Trowse, Shoulder-belts, or any part whatever of what peculiarly belongs to the Highland Garb; and that no tartan or party-coloured plaid of stuff shall be used for Great Coats or upper coats, and if any such person shall presume after the said first day of August, to wear or put on the aforesaid garment or any part of them, every such person so offending ... For the first offence,shall be liable to be imprisoned for 6 months, and on the second offence, to be transported to any of His Majesty's plantations beyond the seas, there to remain for the space of seven years.

Loi sur les costumes (traduction)

À compter du premier jour du mois d'août et après de mille sept cent quarante-six, aucun homme ou garçon au sein de cette partie de la Grande-Bretagne, appelée Écosse, sauf ceux qui sont employés comme officiers et soldats dans les armées de Sa Majesté, n'est autorisé, sous quelque prétexte que ce soit, à porter ou revêtir des vêtements communément appelés «costumes des Hautes Terres», à savoir le tartan, le kilt ou le petit kilt, la sacoche, les baudriers, ou toute partie quelconque de ce qui appartient singulièrement au costumes des Hautes Terres ; et aucun tartan ni étoffe de couleur à carreaux ne doit être utilisé dans la confection des Grands Manteaux ou des capes; et si un quelconque individu s'autorise après ledit premier jour du mois d'août à porter ou à revêtir ledit vêtement ou une partie de celui-ci, si cet individu récidive... Pour la première infraction, il est passible d'un emprisonnement de six mois et, pour la deuxième infraction, d'être envoyé dans les plantations d'outre-mer de Sa Majesté, pour y rester durant sept ans.

Cette loi fut rigoureusement appliquée et le zèle du gouvernement britannique à abolir le tartan témoigne que celui-ci nourrissait une grande méfiance envers les Écossais des Hautes-Terres (Highlands). Pour échapper à ces contraintes, nombreux furent les Écossais qui émigrèrent dans les colonies d'Amérique. D'autres s'enrôlèrent dans l'armée britannique, car ils pouvaient à nouveau porter le kilt et l'épée, et conserver un peu de leur identité, souvent en combattant leurs compatriotes émigrés. La fameuse Dress Act sera tout de même allégée en 1782 grâce au lobby écossais de Londres, mais le gaélique écossais continuera d’être marginalisé, devenant pratiquement une langue morte.

- Un idiome provincial et non raffiné

Par ailleurs, la «société polie» considérait l'écossais comme un idiome «provincial et non raffiné»; une grande partie de la noblesse s'efforça alors de se débarrasser de cette ancienne langue nationale. Des intellectuels réputés, tels que l'écrivain irlandais Thomas Sheridan (1719-1788) et l'éminent botaniste écossais John Walker (1731-1803), furent réquisitionnés pour enseigner aux Écossais, à la fois à Londres et en Écosse, les formalités d'un anglais «correct». Cependant, cet anglais normalisé ne fut pas accepté par tous les Écossais instruits de l'époque et une nouvelle langue littéraire écossaise vit le jour. Celle-ci fut généralement basée sur le discours familier contemporain. Son orthographe fut une adaptation de la norme importée, bien que certaines caractéristiques orthographiques de l'écossais aient continué à être employées.

Cet écossais littéraire moderne fut en usage chez de nombreux écrivains et éditeurs, qui trouvèrent avantageux d'employer des formes anglaises pour s'assurer un plus grand lectorat anglais peu familier avec l'écossais. Au début du XIXe siècle, la publication en 1808 de l'Etymological Dictionary of the Scottish Language de John Jamieson (1759-1838) fut accompagnée d'un regain d'intérêt pour l'écossais parmi les classes moyennes et supérieures. Au cours de cette période, l'absence d'une norme officielle ou d'une norme socialement acceptable conduisit à une nouvelle fragmentation dialectale.

3.6 L'expansion de l'anglais

L’Angleterre devint la région dominante dans toute la Grande-Bretagne, tandis que le gaélique écossais, à l’instar du gallois au pays de Galles, fut bientôt submergé par l’anglais au point où il en résulta une sorte de mélange des deux langues pour produire un «anglais écossais» fortement particularisé dans la prononciation et le vocabulaire. En 1766, le réputé Samuel Johnson (1709-1784), connu sous le nom de «Dr Johnson», un poète essayiste anglais, rendit ce témoignage:

Of all they had before the recent conquest of their country, only language and poverty remain. Their language is attacked from all sides. Schools are built where only English is taught and recently some thought it reasonable to deny them a version of the Holy Scriptures, so that they would have no monument of their mother tongue. De tout ce qu'ils avaient avant la conquête récente de leur pays, il ne leur reste que la langue et la pauvreté. leur langue est attaquée de toutes parts. On construit des écoles où seul l'anglais est enseigné et récemment certains estimaient raisonnable de leur refuser une version des Saintes Écritures, afin qu'ils n'aient aucun monument de leur langue maternelle.

- La multiplication des revers

Néanmoins, l'année suivante paraissait une traduction du Nouveau Testament en gaélique écossais. Les Anglais évincèrent de nombreux Écossais des Hautes-Terres afin de les remplacer par des colons anglais. D'autres revers pour la langue furent la perte de vies humaines dans les guerres napoléoniennes, les dégagements des Hautes-Terres qui ont suivi, la famine de la pomme de terre dans les années 1840, ainsi que la marginalisation économique et le sous-développement engendrèrent une migration à grande échelle vers les Basses-Terres et à l'étranger. Néanmoins, le gaélique demeura toujours la langue prédominante dans les Highlands et les Hébrides continentales.

En se dépeuplant de la population écossaise, la langue gaélique perdit de ses locuteurs, tandis que le mouvement se poursuivit durant quelques décennies. Plus de 100 000 Écossais émigrèrent au cours du XIXe siècle vers l'Angleterre, le Canada et les États-Unis. La Loi sur l’éducation de 1872, qui ignorait complètement le gaélique et conduisit à interdire à des générations de galéophones de parler leur langue maternelle en classe, sous peine de punitions sévères, est aujourd'hui reconnue comme ayant porté un coup fatal à la langue ancestrale, y compris pour une bonne partie du XXe siècle.  Les personnes encore en vie peuvent se souvenir d’avoir été battues pour avoir parlé gaélique à l’école.

- La question scolaire

Au cours du même siècle, les Écossais tentèrent de mettre en place un système volontaire d'écoles gaéliques, lequel connut un certain succès. Il fut remplacé, en 1872, par un système national d'écoles en anglais, qui ne prévoyait aucune place au gaélique. La Loi de 1872 sur l'éducation de l'Écosse (titre complet en anglais: "An Act to amend and extend the provisions of the Law of Scotland on the subject of Education") rendait obligatoire l'enseignement primaire pour tous les enfants âgés de 5 à 13 ans en Écosse. Cette loi imposait un transfert complet des écoles existantes vers un système public anglais. Elle créait des conseils scolaires élus par le peuple, qui durent entreprendre un important programme de reconstruction. La loi écossaise demeura controversée parce qu'elle des préjudices substantiels à la langue gaélique écossaise.

Bien qu'aucun article de la loi n'interdisait l'enseignement en gaélique, la Loi sur l'éducation de 1872 mit quand même fin à tout enseignement qui n'était pas en anglais, parce qu'elle imposait le système d'éducation anglais, ce qui se trouvait à imposer aussi la la langue anglaise. Cette décision du «tout-anglais» fut considérée comme extrêmement préjudiciable à l'usage et à la promotion de la langue gaélique. Le gouvernement britannique dictait les programmes sans interdire quoi que ce soit, mais il réprimait l'enseignement en gaélique écossais en n'imposant que l'anglais.

- L'humiliation des locuteurs du gaélique

Dans les faits, les enfants étaient punis pour avoir parlé leur langue. Non seulement ils l'étaient physiquement s'ils étaient surpris en train de parler gaélique, mais ils pouvaient recevoir d'autres châtiments corporels s'ils ne révélaient pas les noms des autres élèves parlant gaélique. Selon les directives des autorités, les enseignants devaient interdire le gaélique non seulement dans les classes, mais également dans les cours d'école ou les terrains de jeux.

L'effet de la Loi sur l'éducation dans la langue gaélique fut interprété comme "désastreux" en niant la valeur de la culture et de la langue gaéliques; la loi contribua à détruire le respect de soi des communautés gaéliques. Il s'agissait de la continuation d'une politique générale des gouvernements britanniques et écossais visant l'anglicisation.

Après avoir été punis et humiliés pour avoir parlé le gaélique, de nombreux parents décidèrent qu'il valait mieux ne pas transmettre la langue ancestrale à leurs enfants, ce qui entraîna rapidement un changement de langue.

La carte ci-contre montre bien que le gaélique et l'écossais avaient considérablement perdu du terrain en 1900 au profit de l'écossais et de l'anglais, mais surtout à l'anglais, parce que cette langue était déjà parlée dans les mêmes aires que l'écossais.

Après la guerre des Petits Fermiers («Crofters' War»), la Loi sur les petits fermiers (Crofters' Act 1886) accorda la sécurité aux fermiers, lesquels sont restés le principal rempart de la survie du gaélique écossais. Mais le recensement de 1891 révéla l'érosion considérable du gaélique écossais dans le sud de l'Écosse, alors qu'il était encore parlé dans les régions montagneuses du Nord-Ouest et dans les Hébrides.

3.7 Une tiède reconnaissance

La reconnaissance du gaélique ne survint que tardivement en 1911, lors de l'adoption de la Loi écossaise sur les petits propriétaires terriers (la Small Landholders Scotland Act 1911). En vertu de cette loi, un membre au moins du Tribunal foncier d'Écosse (SLC: «Scottish Land Court») devait être de langue gaélique (paragraphe 3 de l'article 3).

Section 3.

Constitution of Scottish Land Court.

1) It shall be lawful for His Majesty, on the recommendation of the Secretary for Scotland, as from the commencement of this Act, and from time to time as vacancies occur, to appoint not more than five persons, to be designated the Scottish Land Court (in this Act referred to as the Land Court) and to appoint one of such persons to be Chairman of the Court.

2) The Chairman shall be a person who at the date of his appointment shall be an advocate of the Scottish bar of not
less than ten years' standing, and shall forthwith on his appointment have the same rank and tenure of office as if he had been appointed a Judge of the Court of Session.

3) One of the said persons shall be a person who can speak the Gaelic language.

Article 3

Constitution du Tribunal foncier écossais

1) Il sera loisible à Sa Majesté, sur la recommandation du secrétaire pour l'Écosse, à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi et, le cas échéant, pour les postes vacants à combler, de nommer pas plus de cinq personnes au Tribunal foncier écossais (ci-après dans la présente loi «tribunal foncier» et de désigner l'une de ces personnes comme président de la Cour.

2) Le président doit être quelqu'un qui, au moment de sa nomination, est avocat du barreau écossais depuis au moins dix ans et doit immédiatement au moment de sa nomination avoir le même rang et la même durée dans ses fonctions que s'il avait été nommé juge à la Cour de session.

3) L'une de ces personnes doit être quelqu'un qui parle la langue gaélique.

Au cours de la Première Guerre mondiale, les pertes humaines en mer et dans les forces armées firent des ravages considérables dans la population gaélophone, et l'entre-deux-guerres vit une nouvelle émigration, en particulier en provenance des Hébrides. Le nombre de locuteurs du gaélique diminua fortement, passant de 254 415 en 1891 à 58 969 en 2001. La migration interne des Hautes-Terres (Highlands) et des îles vers les Basses-Terres (Lowlands) fit en sorte que 45% de tous les locuteurs du gaélique d'aujourd'hui résident maintenant dans les Basses-Terres et dans l'Écosse urbaine, là où l'assimilation est galopante.

La Loi écossaise sur les petits propriétaires terriers de 1911 impliquait que le gaélique pouvait être employé devant le Tribunal foncier écossais (Scottish Land Court), mais aucune loi ne fut rédigée dans cette langue. Une loi écossaise de 1993 relative aux petits exploitants agricoles imposera la même condition à la Commission des petits exploitants. 

Au cours du XXe siècle, les Écossais devinrent massivement bilingues, avant de devenir définitivement anglophones. Aujourd'hui, les communautés qui font encore usage du gaélique ou de l'écossais moderne ont un comportement typiquement diglossique. Du fait de la migration, de nombreuses personnes gaélophones ont quitté la «région traditionnellement gaélique» des Hautes-Terres et des îles. L'enseignement en gaélique écossais ne fut rétabli que dans les années 1980, mais l'impact des interdictions précédentes se fait encore sentir dans les communautés gaéliques. D'après le recensement de 1991, la région traditionnellement gaélique des Hautes-Terres et des Hébrides (le Gaidhealtachd) ne comptait que 58% des personnes parlant gaélique en Écosse. La première école secondaire exclusivement en gaélique, la "Sgoil Ghàidhlig Ghlaschu", ne fut ouverte qu'en 2006 dans le quartier de Woodside à Glasgow, mais il existe également plusieurs écoles primaires en gaélique et des écoles secondaires partiellement en gaélique.

3.8 La dévolution des pouvoirs de 2000

Rappelons que, le 1er juillet 1999, le gouvernement du Royaume-Uni accordait officiellement la «dévolution» des pouvoirs (ou «décentralisation») aux autorités régionales d'Écosse, comme d'ailleurs au pays de Galles et en Irlande du Nord. À partir de ce moment, le Parlement écossais s'est vu confier les pouvoirs qu'avait alors l'Exécutif écossais, parmi lesquels la responsabilité du gaélique écossais. Effectivement, avec l’ouverture du Parlement écossais en 1999, il y eut de nouvelles tentatives d’employer le gaélique écossais et l'écossais à des fins formelles. La situation telle qu’on la connaissait est maintenant modifiée.

En effet, à la suite du référendum du 11 septembre 1997, les Écossais ont voté massivement pour la restauration de leur parlement dans une proportion de 74,3%. Les élections pour élire les 129 membres du nouveau Parlement écossais étaient prévues pour le printemps de 1999 de telle sorte que le Parlement soit fonctionnel en janvier de l’an 2000. Cependant, le Parlement du Royaume-Uni demeurait le seul souverain, la reine continuant d’être le chef de l'État, et l’Écosse faisait encore partie intégrante du Royaume-Uni.

- Une dévolution limitée

En ce qui concerne la dévolution, le Parlement écossais dispose d’un pouvoir politique assez limité, même s’il peut légiférer et lever des impôts. À l’exemple des législatures de l’Irlande du Nord et du pays de Galles, sans compter celles de l'île de Man et des îles Anglo-Normandes, le Parlement écossais est autorisé à s'occuper des affaires intérieures de l’Écosse: la justice et le droit pénal et le droit CIVIL, l’éducation, les arts et la culture, les sports, le logement, la santé, le tourisme, l’environnement, les pêches et l’agriculture. Le Parlement britannique se réserve les affaires constitutionnelles, les finances nationales, la politique étrangère, la défense, la sécurité sociale, les assurances, la protection du consommateur et la citoyenneté. Autrement dit, les grandes décisions – militaires, internationales et budgétaires – sont prises par le gouvernement central, à Londres, qui est rarement celui que les Écossais auraient voulu. L’Écosse est traditionnellement à gauche, pendant qu'une grande partie des Écossais se sentent enfermés dans un pays dirigé à droite.

Il reste à voir comment se développe le rapport de forces entre le Parlement britannique et l’Exécutif écossais qui doit représenter les intérêts de l’Écosse au sein du gouvernement du Royaume-Uni. Pour les nationalistes écossais, la nouvelle structure politique est encore trop tiède et trop limitée, alors qu’aux yeux des conservateurs anglais c’est le premier pas vers l’éclatement du pays. Ce n'est pas pour rien que le gouvernement du Royaume-Uni n'a jamais voulu accorder le statut de fédération à ses anciennes colonies des îles Britanniques. C'était courir le péril d'une trop grande autonomie. Certes, la dévolution écossaise sonnait le glas du centralisme politique britannique, mais le Royaume-Uni risque de découvrir bientôt les grandeurs et les misères d'une forme de gouvernements asymétriques. Si, dans le pire des cas, Londres ne réussit pas à s’adapter, les Écossais seraient bien capables, un jour, de réclamer d’avantage que leur autonomie limitée.

Pour le moment, les Écossais semblent réussir à promouvoir le gaélique écossais, non à l'imposer. Le 21 avril 2005, le Parlement britannique a adopté, la Loi sur la langue gaélique (Écosse), qui a reçu l'assentiment royal le 1er juin de la même année. Dans sa présentation du programme législatif de l'Exécutif pour 2004-2005, le premier ministre Jack McConnell (2001-2007) avait déclaré ce qui suit :

Mon ambition est de voir, dans toute l'Écosse, un nouveau progrès de l'usage du gaélique dans la vie quotidienne, et que les Écossais aient un sentiment d'appartenance à cette langue, mais aussi de fierté à son égard. Il y a un an, à l'occasion du centenaire du Mòd, nous lancions notre campagne de consultation sur un projet de loi visant à garantir le statut de la langue en Écosse. Et d'ici un an, au cours de la présente législature, nous soumettrons et adopterons le projet de loi sur le gaélique, afin de nous appuyer sur les activités que nous soutenons déjà dans les domaines de la radiodiffusion, des arts et de l'éducation. 

Le «Mòd» est un festival gaélique (Am Mòd Nàiseanta Rìoghail) axé sur les arts, la musique et la culture. Le projet de loi sur le gaélique fut présenté au Parlement écossais en septembre 2004. À cette occasion, Peter Peacock, ministre de l'Éducation et de la Jeunesse, déclarait: «Grâce à ce projet de loi, il sera plus facile d'employer le gaélique et de garantir que les organes publics, tels que les instances sanitaires et les conseils, prennent en compte les besoins des gaélisants».

Quant à la langue écossaise, pendant une grande partie des XIXe et XXe siècles, elle fut  considérée comme inférieure à l’anglais. Elle n’était pas enseignée dans les écoles ni employée dans des environnements formels, car elle était surtout plus associée à des communications informelles propres aux classes inférieures. Sa proximité avec l’anglais — deux langues germaniques — et son manque d’uniformité et d'universalité conduisirent à la quasi-extinction de cette langue à plusieurs reprises.

- La question nationale

En novembre 2006, un sondage du Sunday Telegraph de Londres révélait que 51% des Écossais désiraient l'indépendance de l'Écosse. Plus étonnant encore, selon le même sondage, 59% des Anglais voulaient que l'Écosse devienne indépendante. Pour illustrer les rivalités entre l'Écosse et l'Angleterre, le Herald de Glasgow y allait d'une statistique purement «inventée»: seulement 12% des Écossais désiraient la souveraineté si les Anglais le souhaitaient également. Que penser de cette proportion de 59% d'Anglais qui souhaiteraient l'indépendance de l'Écosse? Il est probable que l'Écosse, perçue comme un «lointain pays», n'intéresse tellement pas les Anglais qu'ils en arrivent à confondre autonomie («dévolution») et indépendance. Il y aurait même un bon nombre d'Anglais qui pensent que l'Écosse est déjà indépendante! C'est tout dire!

Mais le premier ministre britannique de l'époque, Tony Blair (du 2 mai 1997 au 27 juin 2007), avait tenté de convaincre les Écossais de ne pas choisir le Parti national écossais  — en anglais, le Scottish National Party (SNP); en gaélique, le Pàrtaidh Nàiseanta na h-Alba — aux élections du 3 mai 2007 pour les députés du Parlement d'Édimbourg. Ce parti nationaliste, qui bénéficiait de l'appui d'un bon tiers tiers des électeurs, promettait, une fois élu, de procéder à un référendum sur l'indépendance de l'Écosse. Voici ce qu'écrivait Tony Blair dans une lettre au quotidien, le Daily Telegraph du 16 mars 2007, en comparant le cas du Québec à celui de l'Écosse:

Montréal a déjà été la capitale économique du Canada. Mais même si les gens du Québec ont rejeté l'indépendance, l'incertitude sur l'avenir a été suffisante pour voir la ville [Montréal] perdre son statut au profit de Toronto. Le secteur financier prospère de l'Écosse, par exemple, pourrait subir le même sort quand de futures décisions d'investissements seront prises. C'est un prix que l'Écosse commencerait à payer aussitôt que le SNP prendrait le pouvoir.[Cité par Le Devoir, Montréal, 17 mars 2007]

M. Blair a également vanté les mérites de l'union des royaumes d'Écosse et d'Angleterre, qui fêtait en 2007 son 300e anniversaire, et qu'il a qualifiée «d'union volontaire la plus réussie entre deux pays». Ça, c'était prendre un raccourci avec l'histoire! L'exemple du Québec est très souvent évoqué dans la presse britannique. Cependant, il est nettement exagéré d'affirmer que c'est en raison des deux référendums sur l'indépendance du Québec que Montréal a perdu son titre de métropole économique du Canada, car depuis une trentaine d'années l'économie canadienne se déplace d'est (Québec) en ouest (Ontario et Alberta). Le Scottish National Party (SNP) avait placardé un peu partout dans les rues d'Édimbourg son slogan: ''1707, No right to choose - 2007, the right to choose'', ce qui signifie «1707, pas le droit de choisir; 2007, le droit de choisir».

Pour l'ancien premier ministre Tony Blair, la séparation de l'Écosse était considérée comme un «recul» avec une vision «démodée» du monde, qui apparaît comme bizarre au XXIe siècle. Il croyait que ce serait «un pas incroyablement régressif et réactionnaire» que de rompre le pacte actuel :

Separation is a retreat into an old-fashioned view of the world that would be bizarre in the 21st century. It would be an incredibly regressive and reactionary step to break it apart now. [La séparation est un recul dans une perspective démodée du monde qui apparaît comme bizarre au XXIe siècle. Ce serait un pas incroyablement régressif et réactionnaire de le rompre maintenant.]

Néanmoins, c'était aux Écossais de décider de leur avenir. Au lendemain du 3 mai 2007, le Parti national écossais (Scottish National Party) d’Alex Salmond remporta une victoire à l'arraché, devançant le Parti travailliste par un seul siège. Avec 47 sièges, contre 46 au Parti travailliste, les indépendantistes du SNP sont devenus à ce moment-là le premier parti au Parlement d'Édimbourg. Mais le Parti national écossais devait aussi former un gouvernement de coalition avec d'autres groupes politiques, puisque aucun parti n'avait obtenu la majorité à lui seul. En août 2007, trois grands choix réalistes s'offraient à l'Écosse: le statu quo actuel, un accroissement des pouvoirs de l'Assemblée d'Édimbourg ou l'indépendance pleine et entière.  

3.9 La tentation de l'indépendance

Si les nationalistes écossais réussirent à se faire élire, à l'exemple du Québec ou de la Catalogne, ils ne purent faire valoir leur projet d'indépendance auprès de leurs électeurs. Bien que ces derniers ne soient pas majoritairement pour le projet d'indépendance, ils aiment bien l'idée que quelqu'un en Écosse défende les intérêts de l'Écosse. Minoritaire au Parlement, le gouvernement du SNP ne put respecter sa promesse électorale de tenir un référendum sur l'indépendance, mais un vent d'optimisme sembla souffler sur l'Écosse qui appuya les indépendantistes, mais pas l'indépendance! C'est un peu le jeu du chat et de la souris.

Avant l'avènement de la dévolution, certains avaient plaidé pour un Parlement écossais au sein du Royaume-Uni, tandis que d'autres ont depuis plaidé pour une indépendance complète. Le peuple écossais eut pour la première fois l'occasion de voter lors d'un référendum sur des propositions de décentralisation en 1979 et, bien qu'une majorité de ceux qui votaient aient voté OUI, la législation référendaire exigeait également que 40% de l'électorat vote OUI pour que le résultat prenne effet, mais cela n'a pas été réalisé. Une deuxième occasion de référendum en 1997, cette fois sur une proposition forte, aboutit à une victoire écrasante du OUI, conduisant à l'adoption de la loi écossaise de 1998 et à la création du Parlement écossais en 1999.

- Le référendum

Lors d'un référendum en 2014, les électeurs écossais ont eu la possibilité de voter OUI pour l'indépendance pure et simple . Dans un effort pour persuader les Écossais de rester dans l'Union, les principaux partis britanniques s'engagèrent à déléguer davantage de pouvoirs à l'Écosse après le référendum.

Les partisans du NON l'emportèrent (l'indépendance fut rejetée). Le référendum du 18 septembre 2014 valida plutôt la présence de l'Écosse au sein du Royaume-Uni avec plus de 55% des suffrages contre l'indépendance et 45% pour la sécession, le taux de participation s'étant établi à 84,6%. Le premier ministre écossais, Alex Salmond (2007-2014), leader pro-indépendance, dut reconnaître le verdict de la population. Quelques heures plus tard, celui-ci donnait sa démission en ajoutant que la campagne pour l'indépendance continuait et «que le rêve ne mourra jamais». Avec ce départ précipité, l'Écosse perdait aussi son champion le plus enflammé.

De son côté, le premier ministre du Royaume-Uni, le conservateur David Cameron (2010-2016), avait promis que le rejet de l'indépendance allait être interprété comme étant favorable à une dévolution maximale.

En réalité, dans les derniers jours de la campagne référendaire, les trois chefs des partis britanniques — le Parti conservateur (Conservative Party), le Parti travailliste (Labour Party) et les démocrates-libéraux (Liberal Democrats) — avaient promis qu'à la suite d'un NON un processus serait mis en branle pour doter le Parlement écossais de nouveaux pouvoirs, notamment en matière de taxation. Dès lors, il ne s'agissait plus seulement de transférer plus d'autonomie politique à l'Écosse, mais de revoir tout le partage des pouvoirs dans le Royaume-Uni, ce qui impliquait le pays de Galles, l'Irlande du Nord, voire l'Angleterre.

Pour les nationalistes écossais, l'Écosse avait avantage à se séparer du Royaume-Uni afin d'avoir un pays plus progressiste et plus prospère. En réalité, l'Écosse se situait à gauche, alors que la Grande-Bretagne restait carrément à droite. Pendant que Westminster privatisait un peu partout, l’Écosse restait championne de l’État-providence. Pendant que l’Écosse était résolument pro-européenne, le Royaume-Uni tendait vers l’isolationnisme. C'est pourquoi la perspective que le Royaume-Uni puisse se retirer de l’Union européenne inquiétait de nombreux Écossais. De plus, l’Écosse restait pacifiste, mais Westminster conservait son long passé militariste.

C'est ainsi que la promesse électorale de décentralisation aboutit à la formation de la Commission Smith et à l'adoption éventuelle de la Scotland Act 2016 (Loi sur l'Écosse de 2016). Sur la base des recommandations de la Commission Smith, la loi écossaise de 2016 fut adoptée par le Parlement britannique et a reçu la sanction royale le 23 mars 2016. La loi énonçait des modifications à la loi écossaise de 1998 et déléguait d'autres pouvoirs à l'Écosse, notamment la possibilité de modifier les sections de la loi écossaise de 1998, qui concernent le fonctionnement du Parlement écossais et du gouvernement écossais, y compris le contrôle de son système électoral (sous réserve d'une majorité des deux tiers au sein du parlement pour tout changement proposé).

- Le Brexit et l'Écosse

Le 24 juin 2016, le Royaume-Uni choisissait de mettre fin à quarante-trois années d’appartenance à l’Union européenne (UE). Le camp du «Leave» (sortie), favorable à la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, l’a emporté avec 51,9% des voix, contre 48,1% pour le «Remain» (maintien), camp pro-européen. On peut consulter des résultats plus détaillés par région en cliquant ici , s.v.p. Or, l'Écosse a voté à 62% pour le maintien du Royaume-Uni dans l'UE. On parle alors du Brexit qui désigne la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne. Il s'agit du mot-valise anglais composé de «Britain» («Grande-Bretagne») et de «exit» («sortie»), c'est-à-dire finalement "Bristish Exit".

Le premier ministre britannique David Cameron dut démissionner. Nommée en juillet 2016, la nouvelle première ministre Theresa May (2016-2019) devait dorénavant mener les discussions sur la sortie de son pays de l’UE face à une équipe de négociateurs représentant l'UE. Craignant que l'Angleterre puisse voir se détériorer ses relations avec le gouvernement écossais, indépendantiste et europhile, la nouvelle première ministre britannique promit que les quatre nations constitutives du pays — l'Angleterre, l'Écosse, l'Irlande du Nord et le pays de Galles — récupéreraient de nouvelles compétences, ce qui était nouveau. Cette question se posait davantage avec la réintégration de l'arsenal juridique européen dans le droit britannique.

3.10 La situation actuelle

Le gouvernement écossais désire tenir compte de trois langues: l'anglais, le gaélique écossais et l'écossais. Pour l'anglais, il n'est pas possible d'ignorer qu'il sert de moyen de communication pour 98% des citoyens. C'est aussi la langue officielle de l'Écosse et de toutes les entités du Royaume-Uni. Donc, c'est en quelque sorte la langue universelle dans cette région du monde.

- Le gaélique écossais

L'un des objectifs du gouvernement écossais est de renforcer la langue gaélique et de soutenir ses locuteurs dans les communautés, et ce, où qu'ils se trouvent en Écosse. L'objectif est d'augmenter les niveaux d'emploi de cette langue, de fournir plus de services au moyen du gaélique et d'en élargir les possibilités d'usage. En particulier, l'objectif inclut le désir de voir une augmentation de l'usage du gaélique dans deux domaines importants, soit la maison et la communauté.

Traditionnellement, les Hautes-Terres désignaient la région connue sous le nom de "Highlands" en anglais. À certains moments de l'histoire, la langue et la culture de cette région correspondaient au territoire gaélophone, mais ce n'est plus le cas aujourd'hui. Le gouvernement écossait voudrait créer, comme en Irlande, un "Gaeltacht écessais" du nom de Gàidhealtachd. Rappelons que les régions du Gaeltacht en Irlande sont connues depuis les années 1920; c'étaient des régions où la langue irlandaise était proéminente et soutenue. La législation la plus récente est la Gaeltacht Act de 2012 ou loi de 2012 sur le Gaeltacht. Cette loi redéfinissait les zones irlandaises traditionnelles selon des critères linguistiques au lieu des zones géographiques sur lesquelles elles étaient basées jusqu'en 2012.

En Écosse, le Gàidhealtachd n'est pas interchangeable avec l'expression "Scottish Highlands", car il fait référence à la langue et non à la géographie. En outre, de nombreuses parties des Terres-Hautes (Highlands) n'ont plus de populations importantes de langue gaélique, et certaines parties de ce que l'on considère maintenant comme les Terre-Hautes sont depuis longtemps des régions de langue écossaise ou anglaise.

À l'inverse, plusieurs communautés de langue gaélique se trouvent en dehors des zones du Conseil des Terres-Hautes et des Hébrides extérieures, c'est-à-dire des régions vers lesquelles il y a eu une migration importante. Bref, l'Écosse a encore du travail à faire. Il existe une controverse la question des Hautes-Terres, car l'usage politique du terme "Highlands" suscite des interprétations divergentes. Certains considèrent le terme "Highlands" comme un lieu spécifique à définir géographiquement. Ils verraient le but de cet engagement de renforcer le gaélique dans les zones où il est parlé par un pourcentage important de la population.

Derrière cela il se cache l'idée qu'il existe des domaines spécifiques où le gaélique a une plus grande visibilité et que des initiatives spécifiques de soutien linguistique devraient avoir lieu dans ces domaines. D'autres croient que l'accent devrait être mis sur le soutien à ceux qui apprennent et parlent la langue, ainsi que dans leurs réseaux et leurs communautés, où qu'ils se trouvent.

- L'écossais moderne

La langue écossaise est reconnue comme une langue minoritaire dans la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires. Le gouvernement écossais a élaboré une politique de la langue écossaise, qui a été officiellement lancée en 2015. Il s'est également engagé à prendre de nouvelles mesures pour soutenir l'écossais. Il existe un certain nombre d'autres déclarations et engagements qui démontrent le contexte politique dans lequel l'écossais s'inscrit et le niveau de priorité accordé par le gouvernement écossais aux écossais.

Cependant, l'Écosse a connu une forme de colonisation linguistique qui a, jusqu'à présent, dénigré la langue écossaise et l'a entraînée dans la sphère sociale et juridique dévalorisante. Or, les droits linguistiques des locuteurs de l'écossais doivent également être affirmés. Les organismes écossais doivent réussir à normaliser la langue écossaise qui, pour le moment, est fragmentée en un grand nombre de variétés locales. L'orthographe, la grammaire et les dictionnaires normalisés doivent respecter des conventions reconnues, car une orthographe standard de la langue écossaise est essentielle pour élever son statut et améliorer sa pratique de communication et en éducation.

De plus, le gouvernement songe à intégrer la langue écossaise dans le système d'éducation écossais. Les travaux immédiats sur la langue écossaise et l'accessibilité par l'éducation comprendraient la reconnaissance et la certification de locuteurs parlant couramment l'écossais et le soutien à la rétention des enseignants parlant l'écossais aux niveaux primaire et secondaire dans toute l'Écosse, mais surtout dans les localités scottophones. Outre la présence de l'écossais dans l'enseignement ordinaire en Écosse, de nouveaux programmes doivent être élaborés pour atteindre un public plus large. Les universités écossaises doivent garantir que les étudiants puissent poursuivre l'étude approfondie de l'écossais et à un niveau supérieur.

Enfin, un financement est nécessaire pour élaborer et promouvoir tout projet ou toute politique de promotion de la langue écossaise. Tout engagement envers la langue écossaise doit être soutenu par la loi et financé de manière adéquate.

- Un projet de loi linguistique

En août 2022, le gouvernement a présenté le Gaelic and Scots and Scottish Languages Bill, un projet de loi sur le gaélique, l’écossais et les langues écossaises. Le gouvernement a pris un certain nombre d’engagements en faveur des langues gaélique et écossaise. Parmi ceux-ci, quatre engagements clés peuvent être signalés comme particulièrement importants. Ces quatre principaux engagements sont les suivants :

1. élaborer une nouvelle approche stratégique de l’enseignement du gaélique (GME);
2. explorer la création d’un Gàidhealtachd, terme faisant référence à la culture de langue gaélique écossaise dans les Terres-Hautes et les îles environnantes;
3. revoir la structure et les fonctions du Bòrd na Gàidhlig, le principal organisme public en Écosse chargé de promouvoir le développement du gaélique, notamment en fournissant des conseils aux ministres écossais sur les questions gaéliques;
4. agir sur la langue écossaise.

S’il n’est pas résolu rapidement, je prédis une mort lente et progressive des Écossais au cours des prochaines années. Sans aucun organisme centralisé promouvant une vision unifiée de la langue (comme cela s’est produit pour le développement de la plupart des langues principales), je ne vois pas d’avenir pour l’écossais ou le gaélique.Lorsqu’une législation primaire est nécessaire pour ces projets, l’engagement en faveur d’un projet de loi sur les langues écossaises pourrait servir de véhicule législatif qui permettrait de progresser dans la réalisation de ces engagements.

Évidemment, le gouvernement a décidé d'avancer avec précaution, bien que au cours des dernières années il y a eu un bon soutien de la population pour le gaélique. À cette fin, un document de consultation a été élaborer pour chacun des engagements dans le but d'impliquer la population. clés à tour de rôle, décrivant l’engagement clé et les engagements subsidiaires que nous réalisons comme étant liés à ces grands domaines ou pertinents de ceux-ci. Le gouvernement écossais tentera de planter le décor en fournissant un éventail de points de vue qui ont été partagés jusqu’à présent dans le cadre de consultations informelles avec un éventail de parties concernées.

Quoi qu'il en soit, il fallait que le gouvernement écossais intervienne pour sauvegarder, s'il est encore temps, le patrimoine linguistique de l'Écosse. Il suffit de constater l'évolution sur le terrain du gaélique et de l'écossais pour comprendre le déclin de ces langues. Entre les années 1300 et 2000 ces langues ont continuellement régressé au profit de l'anglais.

Cette régression ne s'est pas faite toute seule. Il a fallu des interventions politiques de la part des autorités anglaises au cours des siècles. En effet, en moins de deux siècles, de 1800 à 2000, l'anglais est devenu la langue dominante des communications dans toutes les îles Britanniques. Cette évolution remarquable est finalement le résultat, lors des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles, des succès des conquêtes, de la colonisation et du commerce britanniques. Il ne sera pas facile d'inverser la vapeur, car le gouvernement écossais n'a pas la puissance politique qui a si bien servi l'Empire britannique.

Dans l'état actuel des langues dans les îles Britanniques, jamais les langues locales ne réussiront à remplacer l'anglais. Cependant, l'avenir de ces langues repose sur leur statut de langue seconde et d'instrument identitaire. On ne refait pas l'histoire! 

4 Le statut juridique du gaélique écossais et de l'écossais

Le statut juridique du gaélique écossais a toujours été ambigu. Comme il n'y a pas de constitution au Royaume-Uni, il a toujours fallu se rabattre sur d'autres textes juridiques pour connaître le statut du gaélique écossais, sans oublier l'écossais.

Rappelons également la Loi (écossaise) sur les petits propriétaires fonciers de 1911 (la Small Landholders Scotland Act 1911) qui précisait qu'au moins un membre du Tribunal foncier d'Écosse (SLC: «Scottish Land Court») devait être membre du barreau écossais:

Amendments to the Small Landholders (Scotland)
Act 1911 (c. 49)

Section 12

1) The Small Landholders (Scotland) Act 1911 shall be amended as follows.

2) For subsection (2) of section 3 (constitution of Scottish Land Court) there shall be substituted the following subsections—

"(2) The Chairman shall be a person who at the date of his appointment is—

(a) an advocate of the Scottish Bar of not less than ten years' standing; or
(b) without prejudice to paragraph (a) above, a sheriff principal or sheriff who has held office as such for a continuous period of not less than 10 years; or
(c) a solicitor who, by virtue of section 25A (rights of audience) of the [1980 c. 46.] Solicitors (Scotland) Act 1980, has for a continuous period of not less than ten years had a right of audience in the Court of Session;

and shall forthwith on his appointment have the same rank and tenure of office as if he had been appointed a judge of the Court of Session.

Modification à la Loi (écossaise)
de 1911 sur les petits propriétaires fonciers ( c. 49)

Article 12

1) La Loi (écossaise) de 1911 sur les petits propriétaires fonciers est modifiée comme suit.

2) Pour le paragraphe 2 de l'article 3 (constitution du Tribunal foncier d'écosse) sont substitués les paragraphes suivants :

"(2) le président doit être une personne qui, lors de la date de sa nomination, est:

(a) avocat au barreau de l'Écosse d'une durée d'au moins de dix ans; ou
(b) sans préjudice de l'alinéa (a) ci-dessus, un shérif principal ou un shérif qui a tenu un bureau comme tel au cours d'une période continuelle d'au moins dix ans; ou
(c) un notaire qui, en vertu de l'article 25A (droits d'audience) de [1980 c. 46.] de la Loi écossaise sur les notaires de 1980, a au cours d'une période continuelle d'au moins dix ans avaient un droit d'audience à la Cour de session;

et doivent immédiatement lors de leur nomination avoir le même rang et le même mandat que s'ils avaient été nommés juges à la Cour de session.

La loi de 1911, modifiée par la Loi de 1990 sur la réforme législative de l'Écosse (Law Reform Scotland Act 1990, c. 40), impliquait que le gaélique pouvait être employé devant le Tribunal foncier de l'Écosse. Une loi écossaise de 1993 relative aux petits exploitants agricoles imposera la même exigence à la Commission des petits exploitants. Jusqu'ici, c'était bien peu comme reconnaissance officielle.

Selon l'alinéa 1 figurant en annexe 1 de la Loi sur la nationalité britannique (British Nationality Act) de 1981, tout individu qui demande la citoyenneté britannique doit démontrer une connaissance suffisante de l'anglais, du gallois ou du gaélique écossais :

Annexe 1

Alinéa 1er

1) Sous réserve de l'alinéa 2, les exigences pour la naturalisation en tant que citoyen britannique sont, en vertu de l'article 6.1, dans le cas de toute personne pour laquelle c'est applicable;

(a) les exigences indiquées au sous-alinéa 2 du présent alinéa ou l'exigence possible indiquée au sous-alinéa 3 du présent alinéa; et

(b) qu'elle ait bon caractère; et

(c) qu'elle ait une connaissance suffisante de l'anglais, du gallois ou du gaélique écossais; et

Ce texte ne signifie pas que l'anglais, le gallois et le gaélique écossais sont des langues reconnues comme officielles dans l'une ou l'autre partie du Royaume-Uni, mais simplement que le gallois et le gaélique écossais sont des langues «ethniques» ou «nationales», c'est-à-dire officiellement tolérées.

Puis l’adoption en 1997 de la Loi sur l'administration locale d'Écosse (Local Government Scotland Act) accordait au Parlement écossais la responsabilité du gaélique écossais. Le statut juridique de la langue gaélique écossaise est, dans les faits, le même que celui du gallois au pays de Galles: une «langue protégée».  

Article 1er

À l'article 23 de la Loi écossaise sur les autorités locales de 1973 (changement du nom des autorités locales), il est inséré, après le paragraphe 1, les paragraphes suivants:

"(1A) Lorsqu'un conseil change le nom de son district en gaélique, il peut aussi, par une résolution adoptée en conformité avec le paragraphe 1 ci-dessus et, malgré les articles 2.3 et 3.1(a) de la Loi écossaise sur les autorités locales de 1994, décider que son nom sera" Comhairle" en supplément avec le nom de son district.

(1B)
Un conseil qui a ainsi changé son nom en gaélique au moyen d'une résolution adoptée en conformité avec le paragraphe 1 ci-dessus, peut le changer de nouveau en anglais.".

Article 2

1)
La présente loi peut être désignée comme la Loi écossaise de 1997 sur les autorité locales (noms en gaélique).

2) La présente loi entre en vigueur après l'expiration de la période de deux mois débutant le jour de sa promulgation.

3) La présente ne s'applique qu'à l'Écosse seulement. 

Dans le domaine culturel, l'une des dispositions adoptées a été la loi de 1997 (Local Government (Gaelic Names) (Scotland) Act) qui autorise les autorités locales écossaises à prendre un nom gaélique.

En septembre 2004, un projet de loi sur le gaélique fut présenté au Parlement écossais qui l'a adopté le 21 avril 2005 sous le nom de Gaelic Language (Scotland) Act, c'est-à-dire la Loi sur la langue gaélique (Écosse) de 2005. L'article 1.3 mentionne que le gaélique est l'une des langues officielles sur un pied d'égalité avec l'anglais:

Article 1er

Constitution et fonctions du Bòrd na Gàidhlig

(3) Les fonctions conférées au Bòrd en vertu de la présente loi doivent être exercées en vue de garantir le statut de langue officielle de l'Écosse à la langue gaélique et en exigeant un respect égal à la langue anglaise par:

(a) l'augmentation du nombre des locuteurs capables d'employer et de comprendre la langue gaélique,
(b) le soutien dans l'utilisation et la compréhension de la langue gaélique, et
(c) l'assistance à l'accès en Écosse et ailleurs à la langue et à la culture gaéliques.

Encore là, le législateur s'est montré réticent à proclamer clairement le statut co-officiel des deux langues, comme ce serait le cas dans la plupart des États bilingues. On aurait pu, par exemple, trouver dans la loi un énoncé du type : «Le gaélique écossais et l'anglais sont les langues officielles de l'Écosse.» On peut comparer avec l’article 3 de la Loi sur la politique linguistique du 7 janvier 1998 (Lei 1/1998, de 7 de gèr, de politica lingüistica) adoptée par la Generalitat de la Catalogne, qui proclame la co-officialité du catalan et du castillan en Catalogne de la façon suivante: 

Article 3 (Catalogne)

Les langues officielles

1) Le catalan est la langue officielle de Catalogne, de même que le castillan.

2) Le castillan et le catalan, en tant que langues officielles, peuvent être employés indistinctement et sans discrimination par les citoyens et citoyennes dans toutes leurs activités privées ou publiques. Les actes juridiques dressés en l'une ou l'autre des deux langues officielles ont, en ce qui concerne la langue, une pleine validité et efficacité.

Mais la loi écossaise ne va pas aussi loin que la loi catalane. L'expression «official language» n'apparaît qu'à deux reprises dans toute la loi: la première fois, dans le préambule, et la seconde fois, à l'article 1.3. Dans tous les autres cas, le texte ne fait référence qu'à l'expression «Gaelic language» ou encore «Gaelic culture» ou «Gaelic education». Par comparaison avec la loi catalane, la Loi sur la langue gaélique d'Écosse est une loi de type «bureaucratique» et strictement «culturelle», toute axée sur le rôle du Bòrd na Gàidhlig («Bureau de la langue écossaise») et sur l'incitation à utiliser le gaélique. Il n'est pas question de «droits linguistiques» dans cette loi.

Dorénavant, c'est le Bòrd na Gàidhlig (appelé «le Bòrd»), une agence gouvernementale publique, qui est responsable de garantir le statut de langue officielle de l'Écosse à la langue gaélique. Le Bòrd est placé sous la responsabilité des ministres écossais, et il oeuvre étroitement avec l'Exécutif écossais, les autorités publiques et les partenaires associés, dont les organismes gaéliques et les groupes communautaires, afin de promouvoir et développer l'usage et la compréhension du gaélique, et s'assurer que les fonds publics soient adéquatement employés à cette fin. 

Du côté du gouvernement du Royaume-Uni, les affaires écossaises sont gérées par un ministère d'État britannique à la tête duquel se trouve le ministre délégué à l'Écosse. En Écosse même, c’est le Scottish Office du Royaume-Uni, qui fut longtemps responsable des affaires intérieures, mais c’est le Parlement britannique qui a toujours déterminé le cadre administratif de l’Écosse. Ainsi, le secrétaire d'État britannique délègue ses pouvoirs exercés par le Scottish Office, notamment au Scottish Office Development Department, qui dirige les affaires générales du gouvernement local, incluant les finances, les transports, le logement et le développement des villes et des régions. Quant au Scottish Office Education and Industry Department, il est responsable de l’éducation, des loisirs, des affaires économiques et industrielles, ainsi que du tourisme. Enfin, le Scottish Office Home Department s’occupe de la police, des incendies, des services sociaux et des élections.

En 1999, le Scottish Office fut remplacé par l'Office of the Secretary of State for Scotland and The Scottish Government, le Bureau du secrétaire d'État pour l'Écosse et le gouvernement écossais. Ce bureau (en gaélique écossais: Oifis Rùnaire Stàite na h-Alba), souvent appelé familièrement le Bureau pour l' Écosse ("Office for Scotland"), est un département du gouvernement britannique dirigé par le secrétaire d'État pour l'Écosse et responsable des affaires écossaises qui se trouvent sous la responsabilité du gouvernement britannique. Le département est basé sur deux sites, l'un à Édimbourg et l'autre à Londres. En fait, le Bureau vise à faciliter le bon fonctionnement de la décentralisation (dévolution) en assurant la liaison entre le gouvernement central et le gouvernement écossais à Édimbourg, ainsi que l'administration de certaines questions de gouvernement concernant l'Écosse.

La mission du Bureau est la suivante:

- superviser l’adoption d’une loi visant à mettre en œuvre l’entente de la Commission Smith dans son intégralité;
- mettre en œuvre les nouveaux pouvoirs à la suite de la sanction royale du Scotland Bill
- travailler de manière constructive avec le gouvernement écossais pour assurer le fonctionnement efficace de l’accord de dévolution des responsabilités.

D'un strict point de vue juridique, le ministère des Affaires écossaises a toujours estimé qu'une loi relative à la langue gaélique sur le modèle gallois n'était pas nécessaire, du fait que le gaélique n'a jamais été interdit par la loi, comme ce fut le cas, par exemple, du gallois en vertu des lois de 1536 et de 1542.

Finalement, le gouvernement britannique réussit à signer (au 2 mars 2000) et à ratifier (au 27 mars 2001) la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires de 1992. Sans ces réformes à l’égard de ses minorités historiques, le Royaume-Uni ne pouvait que difficilement adhérer à cette «Europe des peuples» (l'Union européenne) dont il a fait partie pour s'en retirer en 2016. Le Royaume-Uni a déclaré au moment du dépôt de l’instrument de ratification que la Charte s’appliquerait à la Grande-Bretagne et à l’Irlande du Nord. Cette déclaration donnait aussi la liste des langues régionales ou minoritaires du Royaume-Uni, à savoir le gaélique écossais, le gaélique irlandais, le gallois, l’écossais et l’écossais d’Ulster.

Les autorités britanniques se sont depuis engagées à reconnaître officiellement le gaélique écossais dans l'administration publique locale, d'utiliser cette langue dans les affaires, le commerce et les services publics (surtout dans l'étiquetage, les panneaux de signalisation et les avis publics) et d'effectuer des recherches et des enquêtes sur l'usage de la langue gaélique. Nous avons que les promesses politique ne sont pas toujours respectées lorsque la situation et les intérêts changent.

5 La politique linguistique

La politique linguistique relative à l'Écosse est définie dans les documents suivants: la Loi écossaise sur l'éducation (1980), la Loi sur la radiodiffusion (1996), la Loi sur l'administration locale d'Écosse (1997), la Loi sur les normes scolaires d'Écosse (2000), la Loi sur la langue gaélique (2005) et la Politique linguistique (2023).

Aujourd'hui, c'est le Bòrd na Gàidhlig («Bureau de la langue écossaise») qui a la responsabilité de promouvoir le gaélique et d'élaborer une réelle politique linguistique. Selon les différentes dispositions de la Loi sur la langue gaélique, Le Bòrd est habilité à exiger de la part des organismes publics écossais qu'ils élaborent des programmes à l'égard du gaélique (art. 2). Ces programmes doivent définir les modalités d'emploi du gaélique dans le cadre des fonctions de l'organisme concerné; ils peuvent, par exemple, préciser les services proposés aux locuteurs du gaélique, comment leur langue est utilisée en relation avec la spécificité de l'organisme et quelles publications sont mises à leur disposition en gaélique. Le Bòrd a également reçu pour mandat particulier de contrôler l'application de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires et de rendre compte de ce suivi aux ministres écossais. Compte tenu de cette récente responsabilité confiée au Bòrd, les ministres et les organismes publics écossais doivent dorénavant être tenus informés des progrès accomplis concernant l'application de la Charte signée par le Royaume-Uni.

5.1 La langue de la législation

La loi de 1998 sur l’Écosse ("Scotland Act 1998") donnait au Parlement écossais le contrôle législatif de toutes les questions relatives à l’éducation:

Scotland Act 1998

Section 28

Acts of the Scottish Parliament.

1) Subject to section 29, the Parliament may make laws, to be known as Acts of the Scottish Parliament.

2) Proposed Acts of the Scottish Parliament shall be known as Bills; and a Bill shall become an Act of the Scottish Parliament when it has been passed by the Parliament and has received Royal Assent.

3) A Bill receives Royal Assent at the beginning of the day on which Letters Patent under the Scottish Seal signed with Her Majesty’s own hand signifying Her Assent are recorded in the Register of the Great Seal.

4) The date of Royal Assent shall be written on the Act of the Scottish Parliament by the Clerk, and shall form part of the Act.

5) The validity of an Act of the Scottish Parliament is not affected by any invalidity in the proceedings of the Parliament leading to its enactment.

6) Every Act of the Scottish Parliament shall be judicially noticed.

7) This section does not affect the power of the Parliament of the United Kingdom to make laws for Scotland.

8) But it is recognised that the Parliament of the United Kingdom will not normally legislate with regard to devolved matters without the consent of the Scottish Parliament.

Loi sur l'Écosse de 1998

Article 28

Lois du Parlement écossais

1) Sous réserve de l’article 29, le Parlement peut adopter des lois, connues sous le nom de «Lois du Parlement écossais».

2) Les lois proposées par le Parlement écossais sont connues comme des projets de loi; et un projet de loi devient une loi du Parlement écossais lorsqu’il a été adopté par le Parlement et a reçu la sanction royale.

3) Un projet de loi reçoit la sanction royale au début de la journée au cours de laquelle les lettres patentes, sous le sceau écossais signées de la main de Sa Majesté signifiant sa sanction, sont inscrites au Registre du Grand Sceau.

4) La date de la sanction royale est inscrite dans la Loi du Parlement écossais par le greffier et fait partie de la loi.

5) La validité d’une loi du Parlement écossais n’est affectée par aucune invalidité dans les travaux du Parlement conduisant à sa promulgation.

6) Toute loi du Parlement écossais doit faire l’objet d’un constat judiciaire.

7) Le présent article n’affecte pas le pouvoir du Parlement du Royaume-Uni de légiférer pour l’Écosse.

8) Mais il est reconnu que le Parlement du Royaume-Uni ne légifère normalement pas sur les questions dévolues sans le consentement du Parlement écossais.

Le gaélique écossais n'a jamais disposé d’un quelconque droit reconnu par le Parlement britannique. Jusqu'en 2005 et l'adoption de la Loi sur la langue gaélique, il n'en possédait pas davantage au Parlement écossais, et seul l'anglais était juridiquement reconnu.  La nouvelle législation écossaise sur la langue gaélique ne prévoit aucune disposition particulière sur l'usage du gaélique au Parlement écossais, puisque l'anglais demeure la seule langue officielle.

Comme pour toutes les instances publiques écossaises, le Bòrd a le pouvoir d'exiger de la part du Parlement que celui-ci élabore un programme de langue gaélique. Pour le moment, certaines lois sont rédigées à la fois en anglais et en gaélique (par traduction). Les parlementaires ont le droit d'utiliser le gaélique, mais peu le font dans la mesure où il faut connaître la langue et prévoir des délais obligatoires. Considérons cet extrait de la Politique linguistique:

Général

1. L'anglais est la langue de travail du Parlement.

2. Le Parlement légifère uniquement en anglais. Par conséquent, tous les projets de loi, la législation déléguée et leurs documents d'accompagnement doivent être en anglais. Lorsqu'un MPE [membre du Parlement écossais] ou une commission considère qu'il existe de bonnes raisons de traduire dans une autre langue que l'anglais, il doit demander l'approbation préalable du responsable de l'examen ou de la législation et des affaires parlementaires, selon le cas. Si un projet de loi est traduit dans une autre langue que l'anglais, la version anglaise fera toujours foi.

3. Avec l'accord préalable du président de séance, les MPE peuvent employer n'importe quelle langue dans les débats parlementaires. Lors des réunions d'un comité, l'accord préalable de l'organisateur doit être recherché. Dans la mesure du possible, un préavis de deux semaines doit être donné pour permettre au SPCB d'organiser les services d'interprétation appropriés, si nécessaire.

Le SPCB ou "Scottish Parliamentary Corporate Body", c'est le Bureau parlementaire écossais. En fait, la procédure pour employer le gaélique ou l'écossais est tellement lourde qu'elle décourage ce genre d'emploi. Même si plusieurs membres du Parlement écossais ont utilisé le gaélique lors de l'examen du projet de  Loi sur la langue gaélique, cet usage demeure marginal. Néanmoins, le Parlement écossais encourage l'emploi du gaélique dans ses débats et dans les commissions, mais l'anglais demeure omniprésent, notamment parce que peu de parlementaires peuvent s'exprimer en gaélique ou en écossais, bien que cette dernière soit plus connue, mais aussi plus dévalorisée. L'Exécutif écossais et le Parlement écossais publient occasionnellement des versions bilingues (anglais-gaélique) de nombreux documents officiels, dont certaines lois. Le Parlement écossais accepte aussi les preuves, les requêtes et les correspondances orales et écrites en gaélique ou en écossais.

Les articles 12 et 13 de l'énoncé de Politique linguistique déclarent que «lorsque le gaélique est employé lors des réunions du Parlement et des réunions de commissions, le procès-verbal incorpore le texte gaélique avant le procès-verbal de la traduction en anglais» et «lorsque l'écossais est employé lors des réunions du Parlement et des réunions de commissions, le procès-verbal incorpore cette langue dans le corps du texte.»

5.2 Les tribunaux

Dans les cours de justice de l'Écosse, l'usage du gaélique n'est pas permis en principe de la part des tribunaux britanniques. En 1982, l'affaire Taylor c. Haughney avait fait référence au statut du gaélique écossais et, en appel, la Haute Cour de Londres s'était prononcée contre un droit général d'employer le gaélique dans les débats des tribunaux. Pourtant, d'après les réponses officielles du ministère des Affaires écossaises en 1969 et 1970, tout ce qui est dit ou écrit en gaélique devait avoir une égale validité avec l'anglais. 

Depuis la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, le gouvernement du Royaume-Uni s'est engagé à permettre, dans une procédure civile, la production de documents et de preuves en gaélique écossais; si cela semble nécessaire, il est prévu d'avoir recours à des interprètes et à des traductions. De fait, en 2001, le Parlement britannique a adopté des mesures en ce sens avec la Loi sur la Cour pénale internationale (2001, pour l'Écosse). L'article 55 prévoit que personne ne peut, s'il est interrogé dans une autre langue que celle qu'il comprend et parle pleinement, être privé de l'aide d'un interprète compétent, et ce, sans frais, et ces traductions sont nécessaires pour répondre aux exigences de la justice:

Article 55

Droits des individus lors d'une enquête

1)
En ce qui a trait à une enquête en vertu de la présente loi, nul:

(a) n'est contraint de s'incriminer lui-même ou avouer sa culpabilité;

(b) n'est soumis à une forme de contrainte, de coercition ou de menace, de torture ou à toute autre forme de traitement cruel, inhumain, dégradant ou punitif;

(c) ne peut, s'il est interrogé dans une autre langue que celle qu'il comprend et parle pleinement, être privé de l'aide d'un interprète compétent, et ce, sans frais, et ces traductions sont nécessaires pour répondre aux exigences de la justice;

D'ailleurs, l'usage du gaélique écossais devant les tribunaux civils est prévu à Lochmaddy, à Portree et à Stornoway, qui couvrent les îles Occidentales (Hébrides extérieures) et l'île de Skye, des régions où plus de 40% de la population était de langue galloise lors du recensement de 1991. Des brochures d'information peuvent être obtenues au greffe du tribunal et les avocats locaux ont été informés de cette disposition.

Il serait éventuellement possible d'utiliser sur demande le gaélique écossais ou en écossais dans le cadre d'une procédure civile. Mais cette mesure n'a bénéficié d'aucune publicité et personne n'est informé de son éventuelle existence. Cependant, la Loi sur la langue gaélique écossaise de 2005 permet, en principe, au Bòrd na Gàidhlig de demander aux autorités judiciaires compétentes d'élaborer un programme pour le gaélique en indiquant comment elles garantissent l'usage de la langue gaélique.

Par ailleurs, en raison de la pénurie du personnel judiciaire et/ou d'un interprète, un tribunal d'Écosse peut obliger un justiciable adulte de procéder en anglais parce qu'il est réputé savoir cette langue. Il faut comprendre que le gaélique ou l'écossais ne peut être utilisé oralement par les parties ou les témoins seulement lorsqu'ils sont incapables de témoigner en anglais. Bref, le gaélique et l'écossais ne peuvent pas être employés seulement quand le souhaite un justiciable, indépendamment de son aptitude à employer l'anglais. 

5.3 L'administration écossaise

Durant quelques décennies, le Scottish Office était responsable de la politique linguistique dans l'administration écossaise, avec des résultats médiocres. En 1982, le Conseil des îles Occidentales (Western Islands) avait préparé un premier projet de politique linguistique. En 1999, le Scottish Office fut remplacé par l'Office of the Secretary of State for Scotland and The Scottish Government, le Bureau du secrétaire d'État pour l'Écosse et le gouvernement écossais. Depuis, le gaélique a acquis un statut dont il ne jouissait pas auparavant et son emploi a été autorisé dans les réunions du Conseil des îles grâce à la traduction simultanée. Cependant, l'usage du gaélique de la part des conseils régionaux et des conseils de district est resté encore limité. Le gaélique écossais n'est pas du tout généralisé, même dans les régions considérées comme des bastions du gaélique – les Western Islands et les Highlands – et seulement quelques municipalités utilisent le bilinguisme dans leurs services administratifs auprès du public. Des formulaires bilingues sont apparus ici et là.  Dans l'ensemble, dans la plupart des régions d’Écosse, le gaélique est resté inexistant dans l’Administration publique. Chez les fonctionnaires de Sa Majesté, la question ne se posait même pas, ils demeuraient unilingues anglais.

- Les services en gaélique ou en écossais

La situation a changé un peu ces toutes dernières années. L'administration écossaise accepte que les locuteurs du gaélique (dans les Hautes-Terres) ou de l'écossais (dans les Basses-Terres) puissent présenter des requêtes orales ou écrites dans cette langue. En réalité, beaucoup de documents sont acceptés au cas par cas, selon les autorités régionales.  Le Comhairle nan Eilean Siar (Conseil des îles Occidentales) reçoit les preuves, les requêtes et les correspondances orales et écrites en gaélique, et s'efforcent de répondre en gaélique aux citoyens qui désirent utiliser cette langue pour traiter de leurs affaires. Il en est ainsi pour le Conseil d'Argyll et Bute. En principe, le Bòrd na Gàidhlig («Bureau de la langue écossaise») encourage les collectivités locales écossaises à employer le gaélique écossais ou l'écossais dans les débats de leurs assemblées, sans exclure l'anglais. Conformément à la Loi sur la langue gaélique écossaise de 2005, le Bòrd peut demander aux collectivités locales d'élaborer des programmes pour l'usage du gaélique en indiquant comment elles garantiront la possibilité d'employer la langue. Depuis 1972, les chèques peuvent être rédigés et signés en gaélique écossais.

La législation écossaise n'interdit pas l'«usage sérieux» des patronymes personnels en gaélique. Certaines personnes ont donc légalement adopté la forme originale ou gaélique de leur nom pour toutes les fins officielles. Ce genre de décision demeure toutefois très rare. Par contre, des prénoms gaéliques sont désormais fréquemment déclarés lors de la naissance d'un enfant. Le gaélique compte de nombreux patronymes tels que Ailean, Aonghas, Dòmhnall, Donnchadh, Coinneach, Murchadh, etc., pour lesquels il existe traditionnellement des correspondances en anglais (Alan, Angus, Donald, Duncan, Kenneth, Murdo, etc.). Il existe également des formes gaéliques écossaises puisées dans le fonds commun des patronymes européens tels que AIain (John), Alasdair (Alexander), Uilleam (William), Caitrìona (Catherine), Cairistìona (Christina), Anna (Ann), Màiri (Mary), Seamus (James).  On dénombre aussi des patronymes gaéliques traditionnels pour lesquels il n'y a pas d'équivalents anglais:  Oighrig, Effie, Etta, Harriet, Diorbhal, Gormul, Beathag, etc.

- Le nom des conseils locaux en gaélique

Rappelons que l'Écosse est constituée de plusieurs unités administratives divisées en «conseils de district»: îles Occidentales (Western Islands), Terres-Hautes (Highlands), Shetland, Moray, Aberdeenshire, etc. (voir la carte 2). Or, l'article 1er de la  Loi sur l'administration locale d'Écosse (1997) permet aux autorités locales d'adopter un nom en gaélique, en plus ou à la place de l'anglais:

Chapitre 6

Loi permettant aux autorités locales d'Écosse de recourir à des noms en gaélique; et pour des fins connexes 

[Le 27 février 1997]

Sa Majesté la Reine, sur avis et avec le consentement des membres ecclésiastiques et laïcs de la Chambre des lords et des Communes, en présence du Parlement rassemblé et en vertu de l'autorité qui lui est conférée, DÉCRÈTE ce qui suit: 

Article 1er

Pouvoir du conseil de changer un nom en gaélique et vice versa

À l'article 23 de la Loi de 1973 sur l'administration locale (Écosse) (changement de nom des régions de l'administration locale), il est inséré, après le paragraphe 1, les paragraphes suivants:

"(1A) Lorsqu'un conseil change ainsi en gaélique le nom de sa région, il peut aussi, par une résolution adoptée conformément au paragraphe 1 ci-dessus et, malgré les articles 2.3 et 3.1(a) de la Loi de 1994 sur l'administration locale (Écosse), décider que son nom sera "Comhairle" en supplément au nom de sa région.

(1B) Un conseil qui a ainsi changé son nom en gaélique, par une résolution adoptée conformément au paragraphe 1 ci-dessus, peut le modifier ensuite pour l'anglais.".

Article 2

Titre bref, début et commencement et application

(1) La présente loi peut être citée comme la Loi de 1997 sur l'administration locale (noms en gaélique) (Écosse).

(2) La présente loi entre en vigueur à l'expiration de la période de deux mois commençant le jour de son adoption.

(3) La présente loi ne s'applique qu'en Écosse.

Le Comhairle nan Eilean Siar (CNES) a ainsi modifié son nom (anciennement ''Council of Western Islands'' : Conseil des îles Occidentales) depuis 1998.

- Les édifices publics et les panneaux routiers

Par la voix de la North West Authority, le gouvernement britannique a émis une directive permettant le bilinguisme gaélique-anglais dans les inscriptions identifiant les édifices gouvernementaux dans les municipalités de l'Écosse. Le gouvernement britannique a également autorisé le bilinguisme sur les panneaux de signalisation routière. Quelques affiches bilingues sont apparues dans les îles du Nord-Ouest (les Hébrides extérieures) ainsi que dans l'Highland, notamment dans la région de Skye et de Lochalsh.

Dans les Hébrides extérieures, la politique officielle consistait à employer les deux langues à importance égale, sauf sur les panneaux routiers qui furent uniquement en gaélique. Dans l'île de Skye, les panneaux routiers sont devenus bilingues (gaélique-anglais). Le Conseil de l'Highland a statué que le gaélique sera dorénavant utilisé dans la signalisation routière chaque fois qu'elle devra être remplacée. Le conseil a convenu que la signalisation et les appellations des organismes devaient être bilingues et que le gaélique devait figurer clairement dans tous les documents publics, sur le site Internet du conseil et dans ses ordres du jour. La toponymie ne figurera majoritairement que sous sa forme gaélique. Ailleurs, les panneaux de noms de lieux et de rues sont généralement en anglais et en gaélique écossais. Toutefois, le gaélique écossais ne joue aucun rôle au sein du gouvernement britannique si ce n'est par la présence d’une plaque sur un seul bâtiment de Sa Majesté. D'après l'article 12,4 de la réglementation de 1981 sur la signalisation routière et les panneaux indicateurs, adoptée selon la loi de 1984 sur la signalisation routière, les ministres écossais pouvaient autoriser la signalisation bilingue.

- Les programmes nationaux de gaélique

Bien sûr, certains organismes gouvernementaux ont commencé à utiliser systématiquement le gaélique avec l'anglais. Par exemple, les Musées nationaux d'Écosse (''National Museums Scotland'') ont adopté un programme pour l'emploi du gaélique précisant les différentes possibilités d'emploi du gaélique dans les travaux des trois musées: le National Museum of Scotland, le National Museum of Flight et le National Museum of Scotland. Il en est ainsi de la Commission royale sur les monuments anciens et historiques d'Écosse (''Royal Commission on the Ancient and Historical Monuments of Scotland''), du service des Parcs nationaux de Cairngorms (''Cairngorms National Park''), de la Bibliothèque nationale d'Écosse (''National Library of Scotland''), etc.

Certains organismes non gouvernementaux ont décidé d'emboîter le pas. Ainsi, le Patrimoine naturel écossais (''Scottish Natural Heritage''), qui compte une quarantaine d'agences dans toute l'Écosse, assure la promotion du gaélique dans les publications, la signalisation bilingue, la correspondance et les médias d'information. La Commission des petits exploitants agricoles (Crofters Commission of Small Landholders) a recourt à une signalisation, une papeterie et une publicité bilingues; elle propose un certain nombre de brochures en gaélique et, en collaboration avec d'autres organismes, elle a produit un document pédagogique destiné aux écoles gaéliques.

Voici une liste publiée par le gouvernement écossais d'organismes publics qui se sont engagés à produire un programme de gaélique pour les prochaines années:

Années

Organismes publics

2006-2007 Scottish Executive, Scottish Parliament, Comhairle nan Eilean Siar, Highland Council, Argyll and Bute Council and Highlands and Islands Enterprise, etc.
2007-2008 Scottish Arts Council, Learning and Teaching Scotland, Scottish Funding Council, UHI Millennium Institute, Scottish Qualifications Authority, Caledonian MacBrayne Ltd, Scottish Natural Heritage, HM Inspectorate of Education, VisitScotland, Crofters' Commission, NHS Western Isles and NHS Highland and Argyll, etc.
2008-2009 Cairngorms National Park Authority, City of Edinburgh Council, Forestry Commissioners, Glasgow City Council, Highlands and Islands Airports Ltd., Historic Scotland, Loch Lomond and The Trossachs National Park Authority, NHS Greater Glasgow, North Lanarkshire Council, Northern Constabulary, Scottish Environment Protection Agency, sportscotland and Stirling Council, etc.

Comme quoi la politique linguistique d'écosse en est une en phase d'élaboration! Dans les faits, les documents en gaélique écossais demeurent limités, car il n'existe pas vraiment d'avantages à traduire un énorme volume de documents en gaélique juste pour le principe. Un surinvestissement dans la traduction gaélique n'apporte pas valeur pratique réelle et pourrait même produire un ressac de la part de ceux qui ne sont pas très disposés à l'égard de la langue. Sans oublier qu'une réelle politique de bilinguisme nécessiterait un grand nombre de traducteurs correctement rémunérés afin d'accorder suffisamment de temps et d'attention au travail de traduction, car des normes élevées à ce sujet semblent essentielles.

5.3 Le domaine de l'éducation

Il n’existe pas au Royaume-Uni de cadre juridique général concernant l’enseignement des langues régionales ou minoritaires. L’enseignement est de la responsabilité des 32 autorités locales. L’éducation en Écosse est supervisée par le gouvernement écossais et son agence exécutive l'Education Scotland (en gaélique: Foghlam Alba). Il s'agit d'un enseignement public universel, ce qui rend le système d'éducation écossais relativement différent de ceux des autres entités du Royaume-Uni.

Depuis 1918, les lois relatives à l'enseignement ont permis d'organiser un certain enseignement du gaélique dans les régions où l'on parlait cette langue, mais le développement fut très lent jusqu'à ce que le gaélique écossais devienne la première langue d'enseignement dans les Highlands (régions de l'Inverness-shire et du Rosshire) à partir de 1958. En 1975, les autorités scolaires responsables de l'éducation dans les Hébrides introduisirent l'enseignement primaire bilingue, suivie de près par la région de l'Highland (à Skye). L'enseignement primaire en gaélique commença avec deux écoles en 1985.

C'est la Loi écossaise de 1980 sur l'éducation qui demeurait la principale loi régissant l’éducation en Écosse, jusqu'à la nouvelle loi de 2016 (Loi sur l'éducation pour l'Écosse). Traditionnellement, le système écossais au niveau de l’enseignement secondaire a mis l’accent sur l’étendue d’un éventail de matières, tandis que les systèmes anglais, gallois et nord-irlandais misaient sur une plus grande profondeur de l’éducation par rapport à un plus petit éventail de matières

Les élèves restent à l’école primaire pendant sept ans. Alors âgés de 11 ou 12 ans, ils entament l’école secondaire pour quatre années obligatoires, les deux années suivantes étant facultatives. En Écosse, les élèves passent les examens nationaux (anciennement Standard Grade ou Intermediate examinations) à l’âge de 15-16 ans, pour normalement huit matières, y compris les examens obligatoires en anglais et en mathématiques. Une matière scientifique (physique, biologie ou chimie) et une matière sociale (géographie, histoire ou études modernes) étaient également obligatoires, mais cela a été modifié conformément au nouveau programme. Le Parlement écossais exige maintenant que les élèves aient deux heures d’éducation physique par semaine; Chaque école peut varier ces combinaisons obligatoires. L’âge de fin de scolarité est généralement de seize ans (après avoir terminé les 4/5 nationaux), après quoi les étudiants peuvent choisir de rester à l’école et d’étudier pour les examens supérieurs et / ou supérieurs.

Avec les règlements de 1986 sur les subventions à l’instruction en langue gaélique, le Département de l’éducation du Scottish Office, aujourd'hui l'Office of the Secretary of State for Scotland and The Scottish Government (le Bureau du secrétaire d'État pour l'Écosse et le gouvernement écossais), s’engageait à accorder des sommes importantes aux conseils locaux qui favoriseraient des projets scolaires en gaélique. Lentement, l’instruction en gaélique écossais s’est développée au sein de certaines écoles primaires, notamment dans les Hébrides, les Highlands, les régions de Glasgow, d’Édimbourg et d’Aberdeen. L’objectif était d’enseigner le gaélique écossais comme langue seconde.

- La législation scolaire

D'après l'article 1er de la Loi écossaise de 1980 sur l'éducation, les autorités en éducation ont l'obligation d'assurer un enseignement scolaire et une formation continue appropriée, notamment en gaélique dans les régions où l'on parle le gaélique. Les autorités sont aussi responsables des écoles maternelles et de la scolarisation dans ces écoles, où l'enseignement du gaélique est proposé.

Enseignement scolaire et formation continue

Article 1er

Obligations des autorités en éducation pour garantir les dispositions sur l'éducation.

(5)
Dans la présente loi:

(a) "Éducation scolaire" désigne l'enseignement progressif approprié aux besoins des élèves, en tenant compte de leur âge, de leur capacité et de leur aptitude, et comprend:

(i) des activités dans les écoles et les classes (ces écoles et classes étant appelées dans la présente loi "écoles maternelles" et "classes maternelles"), sont des activités devant être appropriée dans le cas normal pour les élèves qui ne sont pas d'âge scolaire;

(ii) des mesures pour des besoins particulier en éducation;

(iii) l'enseignement du gaélique dans les régions où l'on parle le gaélique;

(b) La formation continue comprend:

(ii) des cours libres à temps partiel et à plein temps pour l'enseignement destiné aux personnes d'âge scolaire;

(iii) des activités sociales, culturelles et récréatives ainsi que de la formation et de l'éducation physique, chacun étant des activités libres organisées et conçues pour promouvoir le développement en éducation de personnes participantes ou comme une partie d'un cours de formation; 

(iv) l'enseignement du gaélique dans les régions où l'on parle le gaélique;

(d) "Besoins particuliers en éducation", en ce qui concerne un enfant ou un élève, correspondent à des besoins occasionnés par causés par une difficulté d'apprentissage exigeant des mesures particulières en éducation pour ces enfants qui connaissent des difficultés d'apprentissage selon les objectifs du présent alinéa, si: 

(iii) cet enfant est âgée de moins de cinq ans et, si les mesures pour les besoins particuliers en éducation n'ont pas été prises à cet égard, est ou pourrait être assujetti au sous-alinéa (i) ou (ii) ci-dessus, lorsque au cours de cet âge, un enfant ou un élève ne doit pas être accepté comme ayant une difficulté d'apprentissage seulement parce que la langue qu'il apprend ou a apprise (la "langue d'enseignement") diffère d'une langue ou d'un type de langue d'enseignement, et qui a été parlée normalement à la maison.

D'après la Loi sur les normes scolaires d'Écosse de 2000, les autorités en matière d'éducation doivent rendre compte de leurs programmes en matière d'enseignement du gaélique. Elles ont l'obligation de préciser les circonstances ou les conditions dans lesquelles elles proposeront un enseignement en gaélique. La loi permet à ces autorités de répondre à toute demande raisonnable sur leur territoire. Les autorités écossaises ont aussi le droit de demander un financement au titre du programme de subventions spécifiques de l'Exécutif écossais pour l'éducation en gaélique. Voici l'article 5 de cette loi concernant l'enseignement du gaélique écossais:

Article 5

Déclaration annuelle d'une autorité en éducation sur les objectifs d'amélioration

2) La déclaration ainsi préparée et diffusée doit être connue comme «une déclaration annuelle d'objectifs d'amélioration en éducation» de la part de l'autorité et comprend un compte-rendu:

(a) sur les méthodes dans lesquelles l'instance cherchera à impliquer les parents dans la promotion de l'éducation de leurs enfants;

(b) sur les méthodes dans lesquelles l'instance, dans la prestation de l'éducation scolaire, encourage l'égalité des chances et, en particulier, le respect des exigences de chances égales; et

(c) sur les-

(i) moyens par lesquels; ou
(ii) circonstances dans lesquels,

l'autorité donne un enseignement en gaélique intermédiaire et, là où elle offre cet enseignement, ainsi que sur les méthodes par lesquelles elle cherche à développer des mesures au moyen d'un tel enseignement.

3) À l'alinéa (b) du paragraphe 2 ci-dessus, «égalité des chances» et «exigences de chances égales» ont les mêmes significations que dans les exceptions à l'article L2 de l'annexe 5 dans la Loi de l'Écosse de 1998 (c.46); à l'alinéa (c) du présent paragraphe, «enseignement gaélique intermédiaire» correspond à l'enseignement au moyen de la langue gaélique telle qu'elle est parlée en Écosse; et les renvois dans ces alinéas à l'enseignement doivent être interprétés comme le fait d'offrir un enseignement en application des mesures mentionnées à l'article 3.3 de la présente loi. 

4) Les objectifs sont choisis: 

(a) dans le respect de chacune des priorités nationales en éducation et en ce qui concerne les mesures de performance telles qu'elles apparaissent à l'alinéa (b) de l'article 4.1 de la présente loi; et

(b) dans le respect des autres questions et en ce qui concerne les autres mesures de performance, si l'autorité les considère comme appropriées.

L'enseignement en gaélique a été incorporé dans le cadre des «Priorités nationales» (''National Priorities'') sous le titre suivant :

To promote equality and help every pupil benefit from education, with particular regard paid to pupils with disabilities and special educational needs and to Gaelic and other lesser used languages Promouvoir l'égalité et aider chaque élève à bénéficier d'une instruction, en veillant particulièrement à s'adapter aux élèves ayant des handicaps et des besoins particuliers en éducation et au gaélique et à d'autres langues moins utilisées

La ''Priorité 3'' est présentée comme suit:

Priority 3 is made up of the three following 'outcomes':

Every pupil benefits from education.

Every pupil benefits from education, with particular regard paid to pupils with disabilities and special educational needs.

Every pupil benefits from education, with particular regard paid to Gaelic and other lesser used languages.
La priorité 3 est composée des trois 'résultats' suivants:

- Tout élève bénéficie de l'instruction.

- Tout élève bénéficie de l'instruction éducation, en veillant particulièrement à s'adapter aux élèves ayant des handicaps et des besoins particuliers en éducation.

- Tout élève bénéficie de l'instruction, en veillant particulièrement à s'adapter au gaélique et à d'autres langues moins utilisées.

La Loi sur l'enseignement continu et supérieur (1992) précise la connaissance ou la méconnaissance de la langue anglaise ne doit pas être considérée comme une difficulté suffisante pour accéder à l'enseignement supérieur:

Article 1er

5) Nul ne doit être considéré comme ayant une difficulté d'apprentissage uniquement parce que la langue (ou le type de langue) dans laquelle il a reçu ou recevra son instruction est différente d'une langue (ou du type de langue) qui a été parlée normalement à la maison.

Article 6

1) Tout programme d'apprentissage est soumis au présent article si:

(e) il est conçu pour aider des individus dont la langue maternelle n'est pas l'anglais pour atteindre un niveau de compétence en anglais;

Néanmoins, la non-connaissance de l'anglais peut handicaper considérablement tout étudiant à l'université.

Contrairement au statut du gallois au pays de Galles, le gaélique écossais n’est pas une matière obligatoire dans la grande majorité des écoles en Écosse. En outre, le gaélique écossais a été pendant longtemps limité géographiquement aux régions des Hautes-Terres et des îles Occidentales (Western Islands). Tout le reste de l'Écosse fut coupé des possibilités d'expansion de la langue gaélique. Néanmoins, celle-ci reste une langue communautaire dans plusieurs régions l’Écosse, notamment dans les Hébrides, et il a laissé sa marque sur l’anglais parlé là-bas et dans d’autres parties du pays. Cet article 15 de la Loi sur l'éducation pour l'Écosse (2016) illustre bien qu'il faut faire une demande pour que son ou ses enfants puissent recevoir un enseignement en gaélique:

Article 15

Promotion, soutien et orientation

Devoir de promouvoir et de soutenir l’enseignement et l’apprentissage du gaélique

1) Toute autorité scolaire doit promouvoir la prestation éventuelle d’un enseignement scolaire dans le domaine de l’autorité -

a) au moyen de l’enseignement en gaélique en faisant connaître, de la manière qu’elle juge appropriée, le droit de présenter une demande en vertu de l’article 7.1 à l’autorité, et

b) au moyen de l’enseignement de l’apprenant gaélique de la manière qu’elle juge appropriée.

2) Lorsque le paragraphe 3 ou 4 s’applique, l’autorité scolaire doit, dans la mesure du possible, promouvoir et appuyer -

a) l'enseignement en gaélique offert dans sa région,

b) l’enseignement de l’apprentissage du gaélique offert dans sa région, ou

c) (selon le cas) les deux.

- L'enseignement du gaélique

Dans toute l'Écosse, l'enseignement à tous les niveaux est assuré en anglais. Les orientations nationales relatives à l'éducation des élèves âgés de 5 à 14 ans recommandent l'introduction de la littérature écossaise dans les programmes ainsi que l'enseignement d'une connaissance et d'une maîtrise correctes de la langue gaélique. Le Conseil consultatif écossais (Scottish Consultative Council) élabore le matériel pédagogique nécessaire pour cette politique.

La situation actuelle crée l’impression que la langue écossaise est encore confinée dans un dispositif pédagogique rudimentaire. En effet, au cours de l'année scolaire 2017-2018, l'enseignement moyen en gaélique ("Gaelic Medium Education") n'était disponible que dans 14 des 32 autorités locales écossaises pour tous les enfants et les jeunes. Certaines collectivités locales utilisaient les prestations des collectivités locales voisines pour répondre aux demandes des parents. Plus précisément, l'enseignement moyen en gaélique n'était alors possible que dans environ 60 écoles primaires et dans leurs écoles secondaires associées en Écosse, y compris les écoles spécialisées en gaélique. Un nombre croissant de centres d'apprentissage et de garde d'enfants, d'écoles secondaires et de centres de formation continue proposent également un apprentissage au moyen du gaélique.

La plupart des écoles sont dotées d'une «section gaélique», mais il n'existe que fort peu d'école primaire spécifiquement gaélique, comme à Glasgow. À la fin du primaire, chaque élève est théoriquement capable de parler, de lire et d'écrire dans cette langue. Soulignons qu'à la maternelle, quelque 60 jardins d'enfants (''nurseries'') dirigées par des autorités locales comptaient au total 641 enfants (enregistrés au cours de l'année scolaire 2017-2018).

Au secondaire, les effectifs de l'enseignement secondaire gaélique étaient de 2583 élèves pour les cours destinés aux débutants et de 307 pour les cours réservés aux élèves parlant couramment le gaélique, contre 315 élèves pour l'année scolaire 2005-2006. En tout, 34 établissements d'enseignement secondaire proposaient le gaélique pour ces derniers et 15 établissements proposaient un enseignement d'autres matières en gaélique.

Dans l'enseignement post-secondaire, le nombre d'étudiants recevant un enseignement partiellement en gaélique ou inscrits dans un cours de gaélique dans les collèges et universités de l'Écosse compte un peu plus de 1500 élèves. Dans les études supérieures, trois universités (celles d'Aberdeen, d'Édimbourg et de Glasgow) ont des départements d'études celtiques accueillant des étudiants de premier et de deuxième cycles. Certains de ces cours sont offerts en gaélique, mais il n'y a pas d'autres formations universitaires dans cette langue. C'est le Northern College, à Aberdeen, et le campus Jordanhill de l'Université de Strathclyde à Glasgow, qui assurent la formation des professeurs de gaélique. La langue et la littérature écossaises peuvent aussi être étudiées dans plusieurs universités d'Écosse.  Les départements de l'UHI Millennium Institute encouragent les études et les recherches sur le gaélique.

En 2021, on comptait 11 874 élèves en Écosse, qui recevaient un enseignement (toutes catégories confondues) en gaélique, ce qui représentait 1,7 % de la population étudiante du pays. Ce chiffre est supérieur à la proportion globale de locuteurs de gaélique en Écosse, qui était de 1,1 % en 2011. Près de 5100 étudiants en Écosse étaient inscrits dans un enseignement en gaélique en 2021, soit une augmentation de 92% par rapport aux chiffres de 2009. Le tableau suivant présente l'enseignement en langue gaélique en 2021 pour l'Écosse: 

Niveau Nombre des élèves Pour 1000 élèves
de ce niveau
Élèves du primaire 3 808 4,1 %
Élèves du secondaire 1 258 9,8 %
Tous les élèves 5 066 7,2 %

Quinze des 32 unités administratives d'Écosse proposent un enseignement en gaélique. Cinq de ces 15 conseils ont un nombre d'élèves supérieur à la moyenne nationale: Eilean Siar (39,1%); Highland (4,5%); Argyll & Bute (2,2%); Glasgow City (1,8%); et la ville d'Édimbourg (0,9 %). Le Comhairle nan Eilean Siar a annoncé en 2020 que le gaélique deviendrait la langue par défaut pour les nouveaux élèves à l'école primaire dans les Hébrides extérieures à partir d'août, et en 2021, 43% des élèves du primaire de Na h-Eileanan Siar suivaient un enseignement en gaélique. La grande majorité des élèves de langue gaélique ne sont immergés en gaélique que pendant leurs années d'enseignement primaire. De plus, 87% de tous les élèves de l'enseignement secondaire en langue gaélique se trouvent seulement dans trois unités seulement : Glasgow (409 élèves); Na h-Eileanan Siar (386) et Highland (294).

En dehors de ces écoles, l'enseignement en gaélique est également offert au moyen d'unités en gaélique au sein des écoles anglaises. Le Bun-sgoil Shlèite sur l' île de Skye est l'exception, car il s'agit d'une école gaélique avec une unité anglophone. La plus grande unité gaélique se trouve à l'école primaire Mount Cameron à East Kilbride, qui comptait 70 élèves au début de l'année scolaire 2015-216.

En somme, si l’on se référait à la population totale de l’Écosse (5,2 millions d’habitants), on pourrait affirmer que les droits linguistiques des Écossais de langue gaélique ne sont accordés qu'au compte-gouttes. Un fait demeure: les Écossais parlent l’anglais dans une proportion de 98,6%. Plutôt que le gaélique, il leur semble préférable d’apprendre comme langue seconde une langue étrangère moderne comme le français, l’allemand ou l’espagnol.

- Les émissions nationales

Depuis plusieurs années, l’administration écossaise renouvelle son engagement à promouvoir la langue et la culture gaéliques. Son premier objectif est de renforcer la formation en gaélique écossais et d’améliorer la qualité de son enseignement. Par ailleurs, la Loi sur la langue gaélique (Écosse) de 2005 prévoit de nouvelles dispositions concernant l'instruction en gaélique. Le Bòrd na Gàidhlig est habilité à proposer des avis ou à soumettre des lignes directrices concernant son enseignement. Le Bòrd doit inclure dans son programme national pour le gaélique une stratégie de développement de l'enseignement en gaélique. Il est aussi habilité à exiger des différentes autorités en éducation qu'elles élaborent des programmes pour la langue gaélique:

Article 9

Directives sur l'enseignement en gaélique

(1) Le Bòrd peut élaborer et soumettre aux ministres écossais des directives en relation avec les dispositions sur l'enseignement en gaélique et la mise en pratique de ces dispositions.

(2) Les paragraphes 2 à 8 de l'article 8 s'appliquent aux directives du paragraphe 1, comme ils s'appliquent aux directives du paragraphe 1 du présent article.

(3) Après le paragraphe 4 de l'article 5 (autorité d'éducation déclaration annuelle d'objectifs d'amélioration) relatif à la Loi de 2000 sur les normes des écoles de l'Écosse (asp. 6), insérer: 

"(4A) En conformité avec le paragraphe 2.c ci-dessus, toute autorité éducative doit respecter:

(a) tout programme de langue gaélique diffusé par l'autorité en vertu de l'article 5.9 de la Loi de 2005 sur la langue gaélique (Écosse) (asp. 7), et;
(b)
toute directive diffusée par le Bòrd na Gàidhlig en vertu de l'article 9 de la présente loi."

5.4 Les médias et la vie économique

Les médias écossais ont une longue histoire particulière au sein du Royaume-Uni, bien que la plupart de ces médias constituent de succursales de compagnies plus vastes, à l'échelle du pays. Quoi qu'il en soit, l’Écosse dispose d’un large éventail de différents types et de qualité dans les médias.

- La presse écrite

Il existe quelques quotidiens nationaux publiés en Écosse : The Herald (Glasgow), The Daily Record (le principal tabloïd), The Scotsman (Édimbourg), The National (Glasgow). Les journaux nationaux du Royaume-Uni tels que The Times, The Daily Telegraph, Daily Express, Daily Mail, Daily Star, Daily Mirror et The Sun publient des éditions écossaises de leur journal. Les journaux du dimanche comprennent le tabloïd Sunday Mail, le Sunday Post, le Sunday Herald et le Scotland on Sunday. Tous ces journaux publient leurs éditions en anglais, bien que leur contenu soit écossais ou sont présentés selon la lunette écossaise.

Certains journaux écossais publient une colonne ou une page en gaélique: Stornoway Gazette, Inverness Courrier, Oban Times, Press and Journal, West Highland Free Press. Il existe aussi une multitude de journaux locaux distribués dans des petites rgions et dans des îles isolées, et plusieurs de ces journaux publient des articles en gaélique écossais. Bref, rien qui ne soit exclusivement en langue gaélique.

Il existe aussi plus de 700 magazines différents en Écosse, publiés par environ 200 maisons d'édition. La quasi-totalité de ces magazines est en anglais, mais quelques-uns sont en gaélique écossais: Sruth, Gairm, Gath, Cothrom, Dàna, etc. Les périodiques suivants publient des articles en gaélique: The Scotsman, Stornoway Gazette, Ross-shire Journal
West Highland Free Press, Garm-lu, Tocher
, etc.

Il n'existe pas de journaux en langue écossaise.

- Les médias électroniques

L’Écosse a ses propres services de la BBC, qui comprennent les stations de radio nationales, BBC Radio Scotland et le service en langue gaélique écossaise, BBC Radio nan Gaidheal, qui est disponible dans le nord de l’Écosse et diffuse en gaélique écossais. Il existe également un certain nombre de stations de radio locales indépendantes, dont quelques-unes diffusent en gaélique, et de la BBC dans tout le pays.

La BBC Scotland gère deux chaînes de télévision nationales en anglais. Les nouvelles locales, les actualités et les programmes sportifs sont diffusés par la BBC Scotland Television, tandis que d’autres, par exemple de nombreux programmes dramatiques et comiques, s’adressent à un public dans tout le Royaume-Uni et sur les marchés mondiaux.
Trois stations ITV diffusent également en anglais en Écosse. La station STV atteint la majorité de la population écossaise. Bien que marquée comme un seul canal, elle se compose de deux stations: STV Central et STV North, qui appartiennent toutes deux à STV Group. Quant à ITV Border, elle diffuse dans le sud de l’Écosse.

Ces dernières années, l'usage du gaélique a beaucoup évolué dans les médias électroniques. La Loi sur la radiodiffusion de 1990 prévoyait des fonds publics destinés à la radio et la télévision en gaélique; le gouvernement britannique a même augmenté ces budgets depuis 1992. Puis la loi de 1990 a été remplacée par la
Loi sur la radiodiffusion de 1996, qui a donné certains résultats (voir l'article 32).

Article 32

Radiodiffusion numérique des émissions gaéliques


1) Le secrétaire d'État peut, par arrêté de la part de la Commission, inclure dans toute licence multiplex accordée pour une fréquence à laquelle l'article 28 s'applique aux conditions touchant la
radiodiffusion d'émissions en gaélique en vue de la réception en totalité ou principalement en Écosse, tel qu'il peut être spécifié ou déterminé dans l'arrêté.

2) Le secrétaire d'État peut, selon l'arrêté exiger que le détenteur d'une licence multiplex ("le détenteur"), en conformité avec ces conditions, émettre des
émissions en gaélique offertes par chacune des personnes mentionnées au paragraphe 4 ("les fournisseurs") s'élevant à nombre minimal d'heures (le cas échéant) de transmission annuelle d'antenne, tel qu'il peut être spécifié dans l'arrêté en rapport avec ce fournisseur.

3) Dans le but de permettre au détenteur de respecter ces conditions et obligations imposées en vertu du paragraphe 2, il est du devoir de tout fournisseur d'alimenter gratuitement le détenteur avec des
émissions en gaélique, lesquelles ont été diffusées par le fournisseur, tel que le détenteur peut le demander.

4) Les fournisseurs sont:

(a) la BBC;
(b) le Channel Four Television Corporation;
(c) tout détenteur d'une licence de Canal 3 pour offrir un service régional de Canal 3 (selon les termes de la Partie I de la loi de 1990) pour une réception en totalité en Écosse, et;
(d) toute autre personne offrant à la télévision des services de diffusion, tel qu'il peut être spécifiée par arrêté par le secrétaire d'État.

5) Le paragraphe 3 n'applique pas par rapport à une émission d'abord transmise par le fournisseur concerné:

(a) avant le 1er janvier 1993, ou;
(b) au cours de la période commençant le 1er janvier 1993 et se terminant le 31 mars 1997, si le fournisseur n'a aucun droit d'émettre à nouveau ou bénéficie de ce droit mais n'a pas celui de le transférer au détenteur.

6) Le détenteur peut émettre n'importe quel programme offert en vertu de la subdivision (3) sur une occasion seulement.

7) Le détenteur doit consulter le Comataidh Craolaidh Gaidhlig et les fournisseurs au sujet :

(a) de la quantité des émissions probables devant être demandées par le détenteur pour chaque fournisseur en vertu du paragraphe 3, et;
(b) des annexes proposées pour l'émission par le détenteur des programmes prévus en vertu du présent paragraphe;

et devra respecter tous les commentaires reçus à la suite de cette consultation.

8) Tout arrêté en vertu du présent article doit être sujet à l'annulation en conformité avec une l'adoption d'une résolution de la part de l'un ou l'autre Chambre du Parlement.

9) Dans le présent article,
"gaélique" désigne la langue gaélique telle qu'elle est parlée en Écosse.

Dans la vie économique, le gaélique écossais ne pèse pas lourd. Cependant, la connaissance de cette langue devient lentement un avantage dans certains emplois, tant publics que privés, notamment dans les Hébrides, dans l'île de Skye et dans l'ouest des Highlands. Il semble que les secteurs des médias et de l'éducation soient particulièrement touché, et le nombre total de ces emplois atteint plusieurs centaines. 

Il n'y a pas de restrictions concernant l'usage du gaélique dans l'étiquetage commercial, mais il n'existe pas davantage d'exigences officielles à cet égard. Si l'on fait exception de deux marques de whisky, jamais une entreprise commerciale n'a osé étiqueter ses produits en gaélique écossais. 

Le gaélique écossais ne jouit pas d’un statut des plus enviables. Étant donné qu’il n’existait auparavant aucun appareil juridique destiné à protéger cette langue, on peut affirmer, il est vrai, que la situation s’est grandement améliorée. Il faut reconnaître que, depuis les dernières décennies, le nationalisme a considérablement grandi en Écosse, et la région vit aujourd'hui «un accès de fièvre indépendantiste» que les médias mesurent régulièrement. Cependant, ce nationalisme ne s’est pas manifesté concrètement par des revendications linguistiques. À part les beaux discours des représentants du Bòrd na Gàidhlig, le principal organisme public en Écosse chargé de promouvoir le développement du gaélique, dont les campagnes de promotion sont axées sur la survie du gaélique, les Écossais continuent de vivre en anglais. Quant à la Loi sur la langue gaélique de 2005, elle demeure strictement incitative, alors que, pour être efficace, toute politique linguistique doit manier savamment le bâton et la carotte, la coercition et la persuasion. De plus, cette loi n'est pas conçue en termes de droit, mais avec des objectifs de promotion et de valorisation. Il ne faut pas oublier que 98% de la population écossaise vit en anglais et que ses locuteurs peuvent considérer le gaélique comme une violation de leurs droits. Tant que les locuteurs du gaélique n’auront pas atteint leur masse critique d'au moins 10% à 15%, la promotion du bilinguisme demeurera strictement symbolique. De toute façon, on ne voit pas comment à court terme le gaélique écossais pourrait surclasser l’anglais.

Il faut dire que les lois et les pratiques linguistiques britanniques n’ont pas toujours été très généreuses à l'égard des minorités nationales (galloise, écossaise et irlandaise) du pays. La politique linguistique du Royaume-Uni actuel est le résultat d'une longue tradition de répression exercée par l'Angleterre à l'égard des voisins dont elle a conquis les territoires et assimilé toutes les langues (gallois, gaélique écossais, irlandais, mannois, anglo-normand). Maintenant que les langues nationales minoritaires ne peuvent plus constituer un danger pour l’anglais parce que leur survie est devenue précaire, le gouvernement de Sa Majesté peut se payer le luxe de la générosité en accordant une autonomie politique limitée aux Écossais, aux Gallois et aux Irlandais, qui pourraient tenter de restaurer leurs langues ancestrales.  

Certes, les réformes politiques du Royaume-Uni étaient nécessaires. Cependant, elles arrivent non seulement beaucoup trop tard, mais aussi avec des moyens inefficaces. Il faudrait que les autorités britanniques acceptent que la dévolution se transforme en fédération, afin de donner plus de pouvoirs aux entités comme l'Écosse. Malheureusement, l’assimilation est devenue une issue incontournable pour les minorités nationales du Royaume-Uni. Plus rien n’empêchera la très grande majorité des Écossais de continuer à faire usage de l’anglais dans leur vie quotidienne, à leur travail ou à l’école. Peu importe les subventions gouvernementales de Sa Majesté, peu importe les anciennes directives de l’Union européenne, peu importe la restauration des administrations régionales, peu importe la dévolution ou les campagnes de promotion linguistique, l’imaginaire collectif de l'immense majorité des Écossais continuera de s’exprimer en anglais. Dans ces conditions, le gaélique écossais risque de demeurer une «langue de décoration», l'écossais une «langue identitaire», des langues qu’on emploiera dans les lois, dans les noms de rue, dans les menus de restaurant, dans les panneaux indicateurs des musées, etc., mais pas dans la vie quotidienne.

Loi sur la langue gaélique (2005)

Lois diverses à portée linguistique pour l'Écosse

Dernière mise à jour: 15 févr. 2024
 

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